[1,15] ιεʹ. Περὶ τῶν πέντε τρόπων.
Οἱ δὲ νεώτεροι σκεπτικοὶ παραδιδόασι τρόπους τῆς ἐποχῆς πέντε τούσδε,
πρῶτον τὸν ἀπὸ τῆς διαφωνίας, δεύτερον τὸν εἰς ἄπειρον ἐκβάλλοντα, τρίτον
τὸν ἀπὸ τοῦ πρός τι, τέταρτον τὸν ὑποθετικόν, πέμπτον τὸν διάλληλον.
Καὶ ὁ μὲν ἀπὸ τῆς διαφωνίας ἐστὶ καθ´ ὃν περὶ τοῦ προτεθέντος πράγματος
ἀνεπίκριτον στάσιν παρά τε τῷ βίῳ καὶ παρὰ τοῖς φιλοσόφοις εὑρίσκομεν
γεγενημένην, δι´ ἣν οὐ δυνάμενοι αἱρεῖσθαί τι ἢ ἀποδοκιμάζειν καταλήγομεν
εἰς ἐποχήν.
Ὁ δὲ ἀπὸ τῆς εἰς ἄπειρον ἐκπτώσεως ἐστὶν ἐν ᾧ τὸ φερόμενον εἰς πίστιν τοῦ
προτεθέντος πράγματος πίστεως ἑτέρας χρῄζειν λέγομεν, κἀκεῖνο ἄλλης, καὶ
μέχρις ἀπείρου, ὡς μὴ ἐχόντων ἡμῶν πόθεν ἀρξόμεθα τῆς κατασκευῆς τὴν
ἐποχὴν ἀκολουθεῖν.
Ὁ δὲ ἀπὸ τοῦ πρός τι, καθὼς προειρήκαμεν, ἐν ᾧ πρὸς μὲν τὸ κρῖνον καὶ τὰ
συνθεωρούμενα τοῖον ἢ τοῖον φαίνεται τὸ ὑποκείμενον, ὁποῖον δὲ ἔστι πρὸς
τὴν φύσιν ἐπέχομεν.
Ὁ δὲ ἐξ ὑποθέσεως ἔστιν ὅταν εἰς ἄπειρον ἐκβαλλόμενοι οἱ δογματικοὶ ἀπό
τινος ἄρξωνται ὃ οὐ κατασκευάζουσιν ἀλλ´ ἁπλῶς καὶ ἀναποδείκτως κατὰ
συγχώρησιν λαμβάνειν ἀξιοῦσιν.
Ὁ δὲ διάλληλος τρόπος συνίσταται, ὅταν τὸ ὀφεῖλον τοῦ ζητουμένου πράγματος
εἶναι βεβαιωτικὸν χρείαν ἔχῃ τῆς ἐκ τοῦ ζητουμένου πίστεως· ἔνθα
μηδέτερον δυνάμενοι λαβεῖν πρὸς κατασκευὴν θατέρου, περὶ ἀμφοτέρων
ἐπέχομεν. Ὅτι δὲ πᾶν τὸ ζητούμενον εἰς τούτους ἀνάγειν τοὺς τρόπους
ἐνδέχεται, διὰ βραχέων ὑποδείξομεν οὕτως.
Τὸ προτεθὲν ἤτοι αἰσθητόν ἐστιν ἢ νοητόν, ὁποῖον δ´ ἂν ᾖ, διαπεφώνηται·
οἱ μὲν γὰρ τὰ αἰσθητὰ μόνα φασὶν εἶναι ἀληθῆ, οἱ δὲ μόνα τὰ νοητά, οἱ δέ
τινα μὲν αἰσθητὰ, τινὰ δὲ νοητά.
Πότερον οὖν ἐπικριτὴν εἶναι φήσουσι τὴν διαφωνίαν ἢ ἀνεπίκριτον;
Εἰ μὲν ἀνεπίκριτον, λέγομεν ὅτι δεῖ ἐπέχειν· περὶ γὰρ τῶν ἀνεπικρίτως
διαφωνουμένων οὐχ οἷόν τέ ἐστιν ἀποφαίνεσθαι.
Εἰ δὲ ἐπικριτήν, πόθεν ἐπικριθήσεται πυνθανόμεθα. Οἷον τὸ αἰσθητόν (ἐπὶ
τούτου γὰρ προτέρου στήσομεν τὸν λόγον) πότερον ὑπὸ αἰσθητοῦ ἢ ὑπὸ νοητοῦ;
εἰ μὲν γὰρ ὑπὸ αἰσθητοῦ, ἐπεὶ περὶ τῶν αἰσθητῶν ζητοῦμεν, καὶ ἐκεῖνο ἄλλου
δεήσεται πρὸς πίστιν. Εἰ δὲ κἀκεῖνο αἰσθητὸν ἔσται, πάλιν καὶ αὐτὸ ἄλλου
δεήσεται τοῦ πιστώσοντος, καὶ τοῦτο μέχρις ἀπείρου.
Εἰ δὲ ὑπὸ νοητοῦ ἐπικρίνεσθαι δεήσει τὸ αἰσθητόν, ἐπεὶ καὶ τὰ νοητὰ
διαπεφώνηται, δεήσεται καὶ τοῦτο νοητὸν ὂν κρίσεώς τε καὶ πίστεως. Πόθεν
οὖν πιστωθήσεται; εἰ μὲν ὑπὸ νοητοῦ, εἰς ἄπειρον ἐκπεσεῖται ὁμοίως· εἰ δ´
ὑπὸ αἰσθητοῦ, ἐπεὶ πρὸς μὲν τὴν πίστιν τοῦ αἰσθητοῦ παρελήφθη νοητόν, πρὸς
δὲ τὴν τοῦ νοητοῦ πίστιν αἰσθητόν, ὁ διάλληλος εἰσάγεται τρόπος.
Εἰ δὲ ταῦτα φεύγων ὁ προσδιαλεγόμενος ἡμῖν κατὰ συγχώρησιν καὶ
ἀναποδείκτως ἀξιώσειε λαμβάνειν τι πρὸς ἀπόδειξιν τῶν ἑξῆς, ὁ ὑποθετικὸς
εἰσαχθήσεται τρόπος, ἄπορος ὑπάρχων. Εἰ μὲν γὰρ ὁ ὑποτιθέμενος πιστός
ἐστιν, ἡμεῖς ἀεὶ τὸ ἀντικείμενον ὑποτιθέμενοι οὐκ ἐσόμεθα ἀπιστότεροι. Καὶ
εἰ μὲν ἀληθές τι ὑποτίθεται ὁ ὑποτιθέμενος, ὕποπτον αὐτὸ ποιεῖ, καθ´
ὑπόθεσιν αὐτὸ λαμβάνων ἀλλὰ μὴ μετὰ κατασκευῆς· εἰ δὲ ψεῦδος, σαθρὰ ἔσται
ἡ ὑποβάθρα τῶν κατασκευαζομένων.
Καὶ εἰ μὲν ἀνύει τι τὸ ὑποτίθεσθαι πρὸς πίστιν, αὐτὸ τὸ ζητούμενον
ὑποτιθέσθω, καὶ μὴ ἕτερόν τι δι´ οὗ δὴ κατασκευάσει τὸ πρᾶγμα περὶ οὗ ὁ
λόγος· εἰ δὲ ἄτοπόν ἐστι τὸ ὑποτίθεσθαι τὸ ζητούμενον, ἄτοπον ἔσται καὶ τὸ
ὑποτίθεσθαι τὸ ἐπαναβεβηκός.
Ὅτι δὲ καὶ πρός τι ἐστὶ πάντα τὰ αἰσθητά, δῆλον· ἔστι γὰρ πρὸς τοὺς
αἰσθανομένους.
Φανερὸν οὖν ὅτι ὅπερ ἂν ἡμῖν προτεθῇ πρᾶγμα αἰσθητόν, εἰς τοὺς πέντε
τρόπους ἀνάγειν τοῦτο εὐμαρές ἐστιν.
Ὁμοίως δὲ καὶ περὶ τοῦ νοητοῦ ἐπιλογιζόμεθα. Εἰ μὲν γὰρ ἀνεπικρίτως
διαπεφωνῆσθαι λέγοιτο, δοθήσεται ἡμῖν τὸ δεῖν ἐπέχειν περὶ αὐτοῦ. Εἰ δὲ
ἐπικριθήσεται ἡ διαφωνία, εἰ μὲν διὰ νοητοῦ, εἰς ἄπειρον ἐκβαλοῦμεν, εἰ δὲ
ὑπὸ αἰσθητοῦ, εἰς τὸν διάλληλον· τὸ γὰρ αἰσθητὸν πάλιν διαφωνούμενον, καὶ
μὴ δυνάμενον δι´ αὑτοῦ ἐπικρίνεσθαι διὰ τὴν εἰς ἄπειρον ἔκπτωσιν, τοῦ
νοητοῦ δεήσεται ὥσπερ καὶ τὸ νοητὸν τοῦ αἰσθητοῦ. Διὰ ταῦτα δὲ ὁ ἐξ
ὑποθέσεως λαμβάνων τι πάλιν ἄτοπος ἔσται. Ἀλλὰ καὶ πρός τί ἐστι τὰ νοητά·
πρὸς γὰρ τὸν νοῦν νοητὰ λέγεται, καὶ εἰ ἦν τῇ φύσει τοιοῦτον ὁποῖον
λέγεται, οὐκ ἂν διεφωνήθη. Ἀνήχθη οὖν καὶ τὸ νοητὸν εἰς τοὺς πέντε
τρόπους, διόπερ ἀνάγκη περὶ τοῦ προτεθέντος πράγματος πάντως ἡμᾶς ἐπέχειν.
Τοιοῦτοι μὲν καὶ οἱ παρὰ τοῖς νεωτέροις παραδιδόμενοι πέντε τρόποι· οὓς
ἐκτίθενται οὐκ ἐκβάλλοντες τοὺς δέκα τρόπους, ἀλλ´ ὑπὲρ τοῦ ποικιλώτερον
καὶ διὰ τούτων σὺν ἐκείνοις ἐλέγχειν τὴν τῶν δογματικῶν προπέτειαν.
| [1,15] Chap. XV. De cinq autres Moyens de l'Époque.
Les nouveaux sceptiques nous donnent encore cinq moyens d'Époque : le premier
est pris de la contrariété; le second jette le dogmatique dans l'infini ;
le troisième est tiré de la relation ; la quatrième, qu'on peut appeler
hypothétique, est pris de quelque supposition ; le cinquième est le
Diallèle, qui fait voir que le dogmatique prouve souvent deux choses
également incertaines l'une par l'autre réciproquement. (C'est le cercle
vicieux.)
I. Le premier moyen pris de la contrariété, est celui, par lequel nous
trouvons quelque diversité ou contrariété de sentiments, qui n'a point été
encore jugée, soit dans l'usage ordinaire de la vie, soit parmi les
philosophes; à cause de laquelle contrariété, ne pouvant ni approuver
rien, ni le désapprouver, nous nous trouvons réduits à l'Époque.
II. Le second moyen, qui jette le dogmatique dans le progrès à l'infini,
est un moyen, suivant lequel nous disons que ce qu'on apporte pour appuyer
une proposition, a besoin d'une seconde preuve, et celle-ci d'une autre,
et ainsi de suite à l'infini. Tellement que comme dans cette suite de
preuves infinies, nous ne saurions trouver un commencement ou un principe
d'assertion, l'Époque se présente tout naturellement (comme une
conséquence d'une incertitude si incurable.)
III. Le troisième, qui se prend de la relation, est le même, que nous
avons expliqué ci-dessus, suivant lequel nous pouvons dire qu'un objet,
nous paraît tel ou tel par rapport à celui qui en juge, et aux choses, qui
par une suite nécessaire entrent en considération avec cet objet : mais
nous nous abstenons de juger, quel il peut être de sa nature.
IV. Le quatrième ; qui est pris de quelque supposition, a lieu, lorsque
les dogmatiques voyant qu'on les réduit au progrès à l'infini, supposent
pour principe quelque chose, qu'ils ne prouvent point ; mais qu'ils
veulent qu'on leur accorde tout simplement et sans démonstration.
V. Le cinquième, qui est le Diallèle ou le moyen alternatif, est celui par
lequel nous faisons voir qu'une preuve, dont on doit se servir pour
prouver une chose, qui est en question, a besoin elle même d'être prouvée
par cette chose qui est en question. D'où il s'enfuit qu'aucune de ces
deux choses ne pouvant être prise pour prouver l'autre, (parce qu'elles
sont également incertaines toutes deux) nous devons prendre le parti de
l'Époque. Nous ferons voir maintenant en peu de mots, que quelque question
que ce soit, se peut réduire à ces cinq moyens.
Quelque chose que l'on puisse proposer, est ou sensible, ou intelligible:
mais, quelle qu'elle soit, il y aura toujours à l'égard de la question que
l'on proposera, de la contrariété dans les opinions. Car les uns disent
qu'il n'y a que les choses sensibles qui soient vraies: les autres qu'il
n'y a que les choses intelligibles qui le soient : et d'autres qu'il y a
quelques choses sensibles, et quelques choses intelligibles, qui sont vraies.
Dira-t-on que cette contrariété est impossible à juger, ou qu'elle peut
être jugée ? Si on dit qu'elle est impossible à juger, on nous accordera
que nous devons nous abstenir de juger. C'est le premier moyen.
Si on dit qu'elle peut être jugée et décidée, nous demandons comment on
pourra la décider. Supposons, par exemple, qu'il s'agit de juger d'une
chose sensible, qui s'aperçoit par les sens, (pour commencer par-là notre
dispute.) En jugera-t-on par une chose sensible, ou par une chose
intelligible ? Si on en juge par une chose sensible, (comme il est
question ici de choses sensibles) cette chose sensible aura encore besoin
d'une autre chose pour sa confirmation ; et, si cette dernière chose est
sensible, il faudra la confirmer encore par une autre chose sensible, et
ainsi à l'infini. Voilà le second moyen, qui est le progrès à l'infini.
Que si l'on juge d'une chose sensible par une intelligible ; comme les
choses intelligibles sont controversées aussi, il faudra de même juger de
cette chose intelligible. Or comment en jugera-t-on ? Sera-ce par une
chose intelligible ? Mais voilà le progrès à l'infini. Sera-ce par une
chose sensible? Voilà le Diallèle. Car on a pris l'intelligible pour juger
du sensible ; et maintenant on prend le sensible pour juger de
l'intelligible. C'est le cercle vicieux ou le Diallèle, par lequel de deux
choses, également contestées, on prend la seconde pour la preuve de la
première, et alternativement la première pour la preuve de la seconde.
C'est là le cinquième moyen.
Que si quelqu'un, qui disputera contre nous, veut se tirer de ces
embarras, et que pour cet effet il veuille supposer par concession et sans
démonstration, quelque chose qui lui sera utile pour une démonstration
suivante, il tombera dans le moyen hypothétique, en se servant d'une
supposition pour sa démonstration; et il n'avancera pas d'un pas. Car,
s'il mérite d'être cru dans des choses qu'il suppose et qu'il prend par
pure concession, nous mériterons aussi qu'on nous croie, lorsque nous
supposerons des choses toutes contraires à ses suppositions. Ajoutez que
si l'on suppose une chose vraie, celui qui fait cette supposition,
affaiblit ce qu'il suppose et le rend suspect parce qu'il ne le prouve, ni
ne l'assure pas, mais qu'il le suppose seulement, et le prend par
concession et que, si on suppose faux, c'est un fondement ruineux à l'égard
de tout ce que l'on établit dessus.
Outre cela, si cette sorte de supposition a quelque efficace pour
démontrer une chose, pourquoi celui qui s'en sert, ne suppose-t-il pas
plutôt la chose même qui est en question, et non pas une autre qui lui
serve de moyen pour prouver celle qui est en question? Que s'il croit
qu'il serait absurde de supposer ce qui est en question, il est tout de
même absurde de supposer ce qui est encore plus général et plus étranger à
ce qui est en question. Voilà pour le quatrième moyen.
Enfin il est évident que toutes les choses sensibles, sont relatives à
quelque chose: car elles sont relatives à toutes les choses qui sentent.
Voilà le troisième moyen.
Il est donc clair que quelque chose sensible qu'on nous propose, il nous
sera facile de la réduire à ces cinq moyens.
Nous raisonnons de même, s'il s'agit de juger d'une chose intelligible.
Car, si on nous accorde que la contrariété des opinions à l'égard de cette
chose fait qu'on n'en peut pas juger, on nous accordera que nous devons
suspendre notre jugement. Voilà le premier moyen. Que si on veut juger de
cette question malgré cette discordance, et que l'on veuille juger de
l'intelligible par un intelligible, et ainsi de suite ; voilà le progrès à
l'infini. C'est le second moyen. Que si on veut juger de l'intelligible
par le sensible, ce fera le Diallèle ; car ce sensible qui est lui-même en
controverse, et qui ne peut pas être décidé par lui-même, pour éviter le
progrès à l'infini, aura besoin d'être décidé par quelque chose
d'intelligible, tout comme l'intelligible a besoin d'être décidé par le
sensible. Voilà le troisième moyen. Que si, pour se délivrer d'embarras,
on veut avancer quelque chose par supposition; on se rendra ridicule.
Voilà le quatrième. Enfin l'intelligible est relatif à quelque chose,
savoir à la personne ou à la chose intelligente. Et si cet objet
intelligible était de sa nature et incontestablement tel que quelques-uns
disent qu'il est, l'on n'en contesterait pas. Voilà le troisième moyen.
Nous avons donc réduit aussi l'objet intelligible à ces cinq moyens. C'est
pourquoi nous devons nous abstenir de juger de quelque chose que ce soit
que l'on nous puisse proposer.
Voilà les cinq moyens que les sceptiques modernes nous ont laissés. Ce
n'est pas qu'ils aient voulu pour cela rejeter les dix moyens que nous
avons expliqués ; mais c'est qu'ils ont voulu en joignant ces cinq
derniers aux autres, avoir de quoi réfuter d'une manière plus diversifiée
et plus abondante, la témérité des dogmatiques.
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