[20] XX. Ταῦτ´ εἰπόντος τοῦ Θέωνος, ἐδόκει καταπαῦσαι τὸν
περίπατον, καὶ καθάπερ εἰώθειμεν ἐπὶ τῶν βάθρων καθεζόμενοι
πρὸς τοῖς εἰρημένοις ἦμεν σιωπῇ, χρόνον οὐ πολύν.
ὁ γὰρ Ζεύξιππος ἀπὸ τῶν εἰρημένων ἐννοήσας ‘τίς’ ἔφη
‘τὰ λειπόμενα τῷ λόγῳ προσαποδίδωσι; καὶ γὰρ οὔπω
{τὸ} προσῆκον ἔχει τέλος. {ὃ} αὐτὸς ἄρτι μαντικῆς μνησθεὶς
καὶ προνοίας ὑποβέβληκε ταῦτα γὰρ οὐχ ἥκιστά
φασιν οἱ ἄνδρες ἡδονὴν καὶ γαλήνην καὶ θάρσος αὐτοῖς
παρασκευάζειν εἰς τὸν βίον, ὥστε δεῖ τι λεχθῆναι καὶ περὶ
τούτων.’ ὑπολαβὼν δ´ ὁ Ἀριστόδημος ‘ἀλλὰ περὶ ἡδονῆς
μὲν εἴρηται σχεδόν’ εἶπεν, ‘ὡς εὐτυχῶν καὶ κατορθῶν ὁ
λόγος αὐτῶν φόβον ἀφαιρεῖ τινα καὶ δεισιδαιμονίαν,
εὐφροσύνην δὲ καὶ χαρὰν ἀπὸ τῶν θεῶν οὐκ ἐνδίδωσιν·
ἀλλ´ οὕτως ἔχειν ποιεῖ πρὸς αὐτοὺς τῷ μὴ ταράττεσθαι
μηδὲ χαίρειν, | ὡς πρὸς τοὺς Ὑρκανοὺς ἢ Ἰχθυοφάγους
ἔχομεν, οὔτε χρηστὸν οὐθὲν οὔτε φαῦλον ἀπ´ αὐτῶν προσδοκῶντες.
εἰ δὲ δεῖ προσθεῖναί τι τοῖς εἰρημένοις, ἐκεῖνό
μοι δοκῶ λήψεσθαι παρ´ αὐτῶν πρῶτον, ὅτι τοῖς ἀναιροῦσι
λύπας καὶ δάκρυα καὶ στεναγμοὺς ἐπὶ ταῖς τῶν
φίλων τελευταῖς μάχονται καὶ λέγουσι τὴν εἰς τὸ ἀπαθὲς
καθεστῶσαν ἀλυπίαν ἀφ´ ἑτέρου κακοῦ μείζονος ὑπάρχειν,
ὠμότητος ἢ δοξοκοπίας ἀκράτου καὶ λύσσης· διὸ πάσχειν
τι βέλτιον εἶναι καὶ λυπεῖσθαι καὶ νὴ Δία λιπαίνειν τοὺς
ὀφθαλμοὺς καὶ τήκεσθαι, καὶ ὅσα δὴ παθαινομένοις γράφοντες
ὑγροί τινες εἶναι καὶ φιλικοὶ δοκοῦσι. ταῦτα γὰρ
ἐν ἄλλοις τε πολλοῖς Ἐπίκουρος εἴρηκε καὶ περὶ τῆς
Ἡγησιάνακτος τελευτῆς πρὸς Σωσίθεον τὸν πατέρα γράφων
καὶ Πύρσωνα τὸν ἀδελφὸν τοῦ τεθνηκότος. ἔναγχος
γὰρ κατὰ τύχην τὰς ἐπιστολὰς διῆλθον αὐτοῦ· καὶ λέγω
μιμούμενος, ὡς οὐχ ἧττόν ἐστι κακὸν ἀθεότης ὠμότητος καὶ
δοξοκοπίας, εἰς ἣν ἄγουσιν ἡμᾶς οἱ τὴν χάριν ἐκ τοῦ θείου
μετὰ τῆς ὀργῆς ἀναιροῦντες. βέλτιον γὰρ ἐνυπάρχειν τι
καὶ συγκεκρᾶσθαι τῇ περὶ θεῶν δόξῃ κοινὸν αἰδοῦς καὶ
φόβου πάθος, ἢ {που} τοῦτο φεύγοντας μήτ´ ἐλπίδα μήτε
χάριν ἑαυτοῖς μήτε θάρσος ἀγαθῶν παρόντων μήτε τινὰ
δυστυχοῦσιν ἀποστροφὴν πρὸς τὸ θεῖον ἐναπολείπεσθαι.
| [20] Quand Théon eut ainsi parlé, nous jugeâmes à propos
de cesser notre promenade; et nous étant, selon notre
habitude, assis sur les bancs, nous fîmes succéder le silence
à ce qui venait d'être dit. Mais ce ne fut pas pour longtemps,
car Zeuxippe, après avoir réfléchi sur cet entretien,
reprit bientôt la parole : «Qui complétera, dit-il, ce qui
manque à la discussion? Nous l'avons laissée là où elle ne
ne saurait être convenablement finie comme le prouvent
les dernières paroles prononcées sur la divination et la
prescience divine. Ces deux derniers points ne contribuent
pas peu, selon les sectateurs d'Epicure, à leur assurer une
vie pleine de voluptés, de calme et de confiance. Il faut
donc que ce soit aussi l'objet de quelques développements.»
— Aristodème reprit la parole : «Il est certain que
pour ce qui regarde le plaisir, la question est à peu près
épuisée. On a dit que, même en atteignant son but et en
parvenant à prévaloir, la doctrine des Épicuriens dissipe, il
est vrai, une certaine crainte des Dieux et une certaine superstition,
mais qu'elle ne saurait donner la fécilité et la
joie qui vient des Dieux. Si elle laisse ses sectateurs exempts
de trouble, elle les laisse aussi sans contentement. Ils se
trouvent à l'égard des Dieux comme nous le sommes à
l'égard des Hyrcaniens ou des Scythes, dont nous n'attendons
ni bien ni mal.
«Maintenants, s'il faut ajouter quelque chose à ce qui a
été dit, il me semble que c'est aux Épicuriens mêmes qu'on
l'empruntera. D'abord ceux qui suppriment le chagrin, les
larmes et les gémissements à propos de la perte de personnes
chéries trouvent en eux des adversaires. Ceux-ci prétendent,
«que cette absence de chagrin fondée sur l'insensibilité procède
d'un autre vice plus grand, qui est de la cruauté ou
une arrogance extrême et poussée jusqu'à la rage; que par
conséquent il est plus convenable d'ouvrir son coeur à des
émotions, de s'affliger, et même, par Jupiter, de faire de
ses yeux des sources de larmes, de se consumer de se
livrer enfin à toutes les démonstrations qui soit en paroles,
soit par écrit, prouvent de la sensibilité et de la tendresse.
Ce sont là des prescriptions données par Épicure dans plusieurs
de ses ouvrages : entre autres, dans les lettres qu'à
propos de la mort d'Hégésianax il adresse à Dosithée le
père, et à Pyrson le frère du défunt. Tout récemment et
par hasard j'ai eu occasion de parcourir cette correspondance.
Je le déclare, en imitant leur langage : l'athéisme
n'est pas un moindre mal que la cruauté et que l'arrogance,
et l'on nous mène à l'athéisme quand on supprime la
bienveillance des Dieux et leur courroux. Mieux vaut qu'il
se joigne et se mêle à notre croyance des Dieux du respect
et à la fois de la terreur, que si, pour éviter ce dernier sentiment,
nous ne gardions en nous ni espoir, ni gratitude,
ni confiance aux biens présents. Ce serait ne nous réserver
dans le malheur aucun moyen de nous retourner du côté de la Divinité.
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