[19] XIX. Ἀλλ´ οἵ γε πρὸς ἔπαινον οὕτως καὶ
δόξαν ἔχοντες ἆρ´ οὐχ ὁμολογοῦσι μεγάλας ἡδονὰς προΐεσθαι
δι´ ἀσθένειαν ἢ μαλακίαν φεύγοντες ἀρχὰς καὶ πολιτείας
καὶ φιλίας βασιλέων, ἀφ´ ὧν τὰ μεγάλα καὶ λαμπρὰ
εἰς τὸν βίον γίνεσθαι ἔφη Δημόκριτος; οὐ γὰρ ἄν τινα
πείσειεν ἀνθρώπων ὁ τὴν Νεοκλέους μαρτυρίαν καὶ τὴν
Κωλώτου προσκύνησιν ἐν τοσούτῳ λόγῳ τιθέμενος καὶ
ἀγαπῶν, ὡς οὐκ ἂν ὑπὸ τῶν Ἑλλήνων κροτηθεὶς Ὀλυμπίασιν
ἐξεμάνη καὶ ἀνωλόλυξε, μᾶλλον δ´ ὄντως ὑπὸ χαρᾶς
ἤρθη κατὰ τὸν Σοφοκλέα ’γραίας ἀκάνθης πάππος
ὣς φυσώμενος‘. εἴ γε μὴν τὸ εὐδοξεῖν ἡδύ, τὸ ἀδοξεῖν
δήπου λυπηρόν· ἀδοξότερον δ´ ἀφιλίας ἀπραξίας ἀθεότητος
ἡδυπαθείας ὀλιγωρίας οὐθέν ἐστι. ταῦτα δὲ πάντες
ἄνθρωποι πλὴν αὐτῶν ἐκείνων τῇ αἱρέσει προσεῖναι νομίζουσιν.
’ἀδίκως‘ φήσει τις. ἀλλὰ τὴν δόξαν οὐ τὴν ἀλήθειαν
σκοποῦμεν. καὶ βιβλία μὲν μὴ λέγωμεν μηδὲ ψηφίσματα
βλάσφημα πόλεων, ὅσα γέγραπται πρὸς αὐτούς
φιλαπεχθῆμον γάρ. εἰ δὲ χρησμοὶ καὶ μαντικὴ καὶ θεῶν
πρόνοια καὶ γονέων πρὸς ἔκγονα στοργὴ καὶ ἀγάπησις καὶ
πολιτεία καὶ ἡγεμονία καὶ τὸ ἄρχειν ἔνδοξόν ἐστι καὶ
εὐκλεές, οὕτως ἀνάγκη τοὺς λέγοντας, ὡς οὐ δεῖ σῴζειν
τοὺς Ἕλληνας ἀλλ´ ἐσθίειν καὶ πίνειν ἀβλαβῶς τῇ γαστρὶ
καὶ κεχαρισμένως, ἀδοξεῖν καὶ κακοὺς νομίζεσθαι, νομιζομένους
δὲ τοιούτους ἀνιᾶσθαι καὶ ζῆν ἀτερπῶς, εἴ γε δὴ
τὸ καλὸν ἡδὺ καὶ τὴν εὐδοξίαν ἡγοῦνται.’
| [19] Mais j'en appelle à ceux qui ont ainsi tant de passion
pour l'éloge et la gloire. Ne confessent-ils pas que c'est
à de grands plaisirs qu'ils renoncent ou par impuissance
ou par mollesse, quand ils fuient les charges publiques, les
soins du gouvernement, les amitiés royales : toutes choses
qui, suivant Démocrite, répandent de grands biens sur la
vie humaine? Épicure, en effet, ne saurait persuader à
personne, lui qui tient un si grand compte et qui est si
heureux du témoignage de son frère, des génuflexions de
Colotès, ne saurait, dis-je, persuader à personne que les
applaudissements des Grecs à Olympie l'auraient laissé
froid. Il en serait devenu fou, il en aurait poussé des hurlements.
Ou plutôt, complétement emporté hors de lui par
la joie, il aurait rappelé l'image qu'emploie Sophocle,
"D'un vieux chardon, aux vents abandonnant sa plume".
Si donc la gloire est une douce chose, le déshonneur est
certainement pénible. Or qu'y a-t-il de plus déshonorant
que d'être sans amis, sans occupation, que de ne pas croire
à des dieux, que de rechercher les plaisirs sensuels, et de
négliger tout le reste? Rien, assurément. Et c'est bien là,
(tout le monde, excepté ces philosophes, en est convaincu),
c'est bien là le portrait des partisans de cette secte. —
Croyance injuste, dira quelqu'un. — C'est l'opinion commune,
et non la vérité, que nous examinons ici. Ne rappelons
pas les livres où les Épicuriens sont réfutés; ne rappelons
pas les décrets diffamatoires prononcés contre eux par des
villes : ce serait nous plaire à raviver les haines. Mais si
des oracles, si la divination, si la prescience de la volonté
des Dieux, si l'amour et la tendresse des parents pour leur
progéniture, si la participation aux affaires de l'Etat, au
commandement des armées, aux magistratures, sont des
titres à la renommée et à la gloire, d'après ce raisonnement
ceux qui disent : «Il ne s'agit pas de sauver les Grecs,
mais de manger et de boire sans que le ventre soit endom-
magé et de manière à le rendre satisfait" — ceux-là doivent
nécessairement perdre toute considération et passer pour
des lâches. Dès lors, aussi, se sachant jugés tels, ils mènent
une existence chagrine et privée de tout agrément, puisqu'ils
prétendent d'autre part que l'on trouve du charme
dans le beau et dans l'estime publique.
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