[14] XIV. Ἧς οὐ μέτεστι τούτοις, ὡς δέ φασιν οὐδὲ βούλονται
μετεῖναι· κατατείναντες δὲ τὸ θεωρητικὸν εἰς τὸ σῶμα
καὶ κατασπάσαντες ὥσπερ μολιβδίσι ταῖς τῆς σαρκὸς
ἐπιθυμίαις οὐδὲν ἀπολείπουσιν ἱπποκόμων ἢ ποιμένων
χόρτον ἢ καλάμην ἤ τινα πόαν προβαλλόντων, ὡς ταῦτα
βόσκεσθαι καὶ τρώγειν προσῆκον αὐτῶν τοῖς θρέμμασιν.
ἢ γὰρ οὐχ οὕτως ἀξιοῦσι τὴν ψυχὴν ταῖς τοῦ σώματος
ἡδοναῖς κατασυβωτεῖν, ὅσον ἐλπίσαι τι περὶ σαρκὸς ἢ
παθεῖν ἢ μνημονεῦσαι χαίρουσαν, οἰκεῖον δὲ μηδὲν ἡδὺ
μηδὲ τερπνὸν ἐξ αὑτῆς λαμβάνειν μηδὲ ζητεῖν ἐῶντες;
καίτοι τί γένοιτ´ ἂν ἀλογώτερον ἢ δυοῖν ὄντοιν, ἐξ ὧν ὁ
ἄνθρωπος πέφυκε, σώματος καὶ ψυχῆς, ψυχῆς δὲ τάξιν
ἡγεμονικωτέραν ἐχούσης, σώματος μὲν ἴδιόν τι καὶ κατὰ
φύσιν καὶ οἰκεῖον ἀγαθὸν εἶναι, ψυχῆς δὲ μηθέν, ἀλλὰ τῷ
σώματι καθῆσθαι προσβλέπουσαν αὐτὴν καὶ τοῖς μὲν
τοῦ σώματος πάθεσιν ἐπιμειδιῶσαν καὶ συνηδομένην καὶ
συγχαίρουσαν, αὐτὴν δ´ ἀκίνητον ἐξ ἀρχῆς καὶ ἀπαθῆ
καὶ μηδὲν αἱρετὸν ἔχουσαν μηδ´ ὀρεκτὸν ὅλως μηδὲ χαρτόν;
ἢ γὰρ ἁπλῶς ἀποκαλυψαμένους ἔδει σαρκοποιεῖν
τὸν ἄνθρωπον ὅλον, ὥσπερ ἔνιοι ποιοῦσι τὴν τῆς ψυχῆς
οὐσίαν ἀναιροῦντες, ἢ δύο φύσεις ἐν ἡμῖν διαφόρους ἀπολιπόντας
ἴδιον ἀπολιπεῖν ἑκατέρας καὶ ἀγαθὸν καὶ κακὸν
καὶ οἰκεῖον καὶ ἀλλότριον· ὥσπερ ἀμέλει καὶ τῶν αἰσθήσεων
ἑκάστη πρὸς ἴδιόν τι πέφυκεν αἰσθητόν, εἰ καὶ πάνυ
συμπαθοῦσιν ἀλλήλαις. ἔστι δὲ τῆς ψυχῆς ἴδιον αἰσθητήριον
ὁ νοῦς, ᾧ μηθὲν οἰκεῖον ὑποκεῖσθαι, μὴ θέαμα μὴ
κίνημα μὴ πάθος συγγενὲς οὗ τυγχάνουσα χαίρειν πέφυκε,
πάντων ἀλογώτατόν ἐστιν· εἰ μή τι νὴ Δία λέληθα
συνεπισυκοφαντῶν τοὺς ἄνδρας.’
| [14] C'est là un genre d'agrément que ne partagent pas les
Épicuriens. Ils protestent ne le connaître point et ne vouloir
pas le connaître. Ils appliquent au corps leurs facultés
contemplatives, qu'ils alourdissent par les désirs de la chair
comme par des masses de plomb. Nulle différence entre eux
et des palefreniers ou des pâtres, donnant aux animaux qu'ils
nourrissent du foin, de la paille, de l'herbe, comme la
nourriture qu'il convient à ces créatures de paître et de
brouter. N'est-ce pas en effet vouloir par les plaisirs sensuels
engraisser l'âme comme on engraisse un pourceau, que de
borner les joies de cette âme à des espérances, des affections,
des souvenirs dont la chair est l'unique objet, sans lui permettre
de goûter et de chercher en elle-même aucune douceur,
aucune félicité? Comment imaginer rien de plus contraire
à la raison? Il y a deux substances dont l'homme se
compose, le corps et l'âme, celle-ci étant faite pour exercer
le commandement; et ce sera pour le corps qu'il y aura un
bien particulier, approprié par la nature, un bien tout spécial,
tandis que l'âme n'en possédera aucun ! Affaissée sur
elle-même, l'âme sera réduite à contempler le corps, à sourire
aux affections qu'il éprouve, à en partager les plaisirs
et les joies; mais pour ce qui est d'elle, immobile dès le
principe et complétement impassible, elle sera condamnée à
n'avoir aucun sentiment de préférence, aucun élan, aucune
satisfaction. Ah! il fallait, ou bien que, s'étant découverts
tout simplement, ils fissent l'homme entièrement de chair,
comme veulent quelques-uns, et supprimassent la substance de
l'âme, ou bien que, laissant en nous deux natures différentes,
ils laissassent aussi à chacune d'elles son bien et son mal
particulier, ses sympathies et ses antipathies. Car, après
tout, nos sens possèdent chacun naturellement leur fonction
spéciale, bien qu'ils s'accordent fort bien les uns avec les autres.
Or il est un sens propre pour l'âme : c'est l'entendement.
Vouloir que ce sens n'ait rien sur quoi il doive s'exercer,
vouloir que l'âme ne puisse ni voir, ni se remuer, ni éprouver
des affections nées en même temps qu'elle, des affections
dont la présence soit destinée à lui causer des joies naturelles,
c'est ce qu'il y a de plus déraisonnable au monde.
— "A moins, par Jupiter, dit Théon m'interrompant que
sans le savoir quelques-uns n'aient calomnié les Epicuriens."
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