[12] XII. Ταύτας μέντοι τὰς τηλικαύτας καὶ τοσαύτας ἡδονὰς
ὥσπερ ἀεννάους ἐκτρέποντες οὗτοι καὶ
ἀποστρέφοντες οὐκ ἐῶσι γεύεσθαι τοὺς πλησιάσαντας
αὐτοῖς, ἀλλὰ τοὺς μὲν ’ἐπαραμένους τὰ ἀκάτια‘ φεύγειν
ἀπ´ αὐτῶν κελεύουσι, Πυθοκλέους δὲ πάντες καὶ πᾶσαι
δέονται δι´ Ἐπικούρου καὶ ἀντιβολοῦσιν, ὅπως οὐ ζηλώσει
τὴν ἐλευθέριον καλουμένην παιδείαν· Ἀπελλῆν δέ τινα
θαυμάζοντες καὶ ὑπερασπαζόμενοι γράφουσιν ὅτι τῶν
μαθημάτων ἀποσχόμενος ἐξ ἀρχῆς καθαρὸν ἑαυτὸν ἐτήρησε.
περὶ δὲ τῆς ἱστορίας, ἵνα τὴν ἄλλην ἀνηκοΐαν ἐάσω,
παραθήσομαι μόνα τὰ Μητροδώρου, γράφοντος ἐν τοῖς
περὶ Ποιημάτων· ’ὅθεν μηδ´ εἰδέναι φάσκων, μεθ´
ὁποτέρων ἦν ὁ Ἕκτωρ, ἢ τοὺς πρώτους στίχους τῆς
Ὁμήρου ποιήσεως ἢ πάλιν τὰ ἐν μέσῳ, μὴ ταρβήσῃς.‘
Ὅτι τοίνυν αἱ τοῦ σώματος ἡδοναὶ καθάπερ οἱ ἐτησίαι
μαραίνονται μετὰ τὴν ἀκμὴν καὶ ἀπολήγουσιν, οὐ λέληθε
τὸν Ἐπίκουρον. διαπορεῖ γοῦν, εἰ γέρων ὁ σοφὸς ὢν καὶ
μὴ δυνάμενος πλησιάζειν ἔτι ταῖς τῶν καλῶν ἁφαῖς χαίρει
καὶ ψηλαφήσεσιν, οὐ τὰ αὐτὰ μέντοι Σοφοκλεῖ διανοούμενος
ἀσμένως ἐκφυγόντι τὴν ἡδονὴν ταύτην ὥσπερ
ἄγριον καὶ λυττῶντα δεσπότην. ἀλλ´ ἔδει γε τοὺς ἀπολαυστικοὺς
ὁρῶντας ὅτι πολλὰς ἀφαυαίνει τῶν ἡδονῶν τὸ
γῆρας ’ἥ τ´ Ἀφροδίτη τοῖς γέρουσιν ἄχθεται‘ κατ´ Εὐριπίδην,
ταύτας μάλιστα συνάγειν τὰς ἡδονάς,
ὥσπερ εἰς πολιορκίαν ἄσηπτα σιτία καὶ ἄφθαρτα παρατιθεμένους,
εἶτ´ ἄγειν ἀφροδίσια τοῦ βίου καὶ μεθεόρτους
καλὰς ἐν ἱστορίαις καὶ ποιήμασι διατρίβοντας ἢ
προβλήμασι μουσικοῖς καὶ γεωμετρικοῖς. οὐ γὰρ ἂν ἐπῆλθεν
αὐτοῖς εἰς νοῦν βαλέσθαι τὰς τυφλὰς καὶ νωδὰς ἐκείνας
ψηλαφήσεις καὶ ἐπιπηδήσεις τοῦ ἀκολάστου μεμαθηκόσιν,
εἰ μηδὲν ἄλλο, γράφειν περὶ Ὁμήρου καὶ περὶ Εὐριπίδου,
ὡς Ἀριστοτέλης καὶ Ἡρακλείδης καὶ Δικαίαρχος.
ἀλλ´ οἶμαι τοιούτων ἐφοδίων μὴ φροντίσαντες, τῆς δ´
ἄλλης αὐτῶν πραγματείας ἀτερποῦς καὶ ξηρᾶς, ὥσπερ
αὐτοὶ τὴν ἀρετὴν λέγουσιν, οὔσης ἥδεσθαι πάντως ἐθέλοντες,
τοῦ δὲ σώματος ἀπαγορεύοντος, αἰσχρὰ καὶ ἄωρα
πράττειν ὁμολογοῦσι, τῶν τε προτέρων ἡδονῶν ἀναμιμνήσκοντες
ἑαυτοὺς καὶ χρώμενοι ταῖς παλαιαῖς ἀπορίᾳ
προσφάτων ὥσπερ τεταριχευμέναις, καὶ νεκρὰς ἄλλας
πάλιν καὶ τεθνηκυίας οἷον ἐν τέφρᾳ ψυχρᾷ τῇ σαρκὶ κινοῦντες
παρὰ φύσιν καὶ ἀναζωπυροῦντες, ἅτε δὴ μηδὲν
οἰκεῖον ἡδὺ μηδὲ χαρᾶς ἄξιον ἔχοντες ἐν τῇ ψυχῇ παρεσκευασμένον.
| [12] Voilà pourtant les nombreuses et vives jouissances,
jouissances en quelque sorte intarissables, que les Epicuriens
éloignent et détournent de leurs partisans et qu'ils
ne leur permettent pas de goûter : exigeant au contraire
qu'ils s'en éloignent à toutes voiles. C'est ainsi que Pythodès
est assailli de prières. Hommes et femmes le conjurent
et le supplient, au nom d'Epicure, de ne pas chercher à
acquérir ce qu'on appelle une éducation libérale. C'est ainsi
que les Epicuriens citent avec admiration un certain Apelle
qu'ils comblent d'éloges, écrivant qu'il s'était, dès le principe,
garanti et conservé pur de toute initiation aux mathématiques.
Quant à l'histoire, pour ne pas parler des autres
preuves de leur ignorance, je rapporterai seulement un
passage tiré du livre de Métrodore "Sur les poètes": «Ne
craignez pas, dit-il, de répéter que vous ignorez dans quel
camp combattait Hector, que vous ne connaissez pas les
premiers vers de l'Iliade et encore moins ceux du milieu.
Un aveu pareil ne doit pas vous embarrasser."
Que les plaisirs du corps, semblables aux vents Étésiens,
perdent leur vivacité après un premier essor et ne tardent
pas à tomber, c'est ce qu'Epicure veut bien reconnaître.
Aussi se pose-t-il cette question : «Quand le sage est devenu
vieux et incapable de faire l'amour, aime-t-il encore que
de belles créatures le touchent et le caressent?" Certes ses
idées ne sont pas tournées du même côté que celles de
Sophocle, qui se dit «heureux d'avoir échappé à ces voluptés,
comme on échappe à un maître cruel et furieux.» Il
aurait au moins fallu que ces partisans de la jouissance,
voyant l'âge mettre en fuite presque tous les plaisirs,
"Et Vénus repousser l'hommage des vieillards",
comme dit Euripide, il aurait fallu, dis-je, qu'ils se ménageassent
spécialement ces plaisirs de l'intelligence, comme
on fait dans une place assiégée. Je voudrais les voir mettre
de côté quelques-unes de ces provisions qui ne peuvent se
dessécher ni se corrompre. Je voudrais qu'aux fêtes de Vénus
ils fissent dans leur vie succéder un honorable lendemain,
s'occupant d'histoire, de poésie, de questions de géométrie,
de musique. Il ne leur serait pas venu à l'esprit de jeter cette
mention d'attouchements inertes et impuissants, derniers
élancements de la débauche, s'ils avaient appris, à défaut
d'autre chose, à écrire sur Homère et sur Euripide comme
ont fait Aristote, Héraclide et Dicéarque. Mais ils ne se sont
guères inquiétés, je pense, de faire des provisions de cette
nature. D'un autre côté le reste de ces études n'est, à leurs
yeux, comme ils le disent eux-mêmes de la vertu, que désagrément
et que sécheresse. A tout prix ils veulent du plaisir.
De sorte que quand le corps épuisé refuse son service ils
ont, de leur aveu propre, recours à des moyens honteux et
hors de saison. Ils se maintiennent dans le souvenir de leurs
anciennes voluptés, faute de jouissances toutes fraîches; ils
vivent sur leurs jouissances d'autrefois, qui sont comme des
viandes salées et mortifiées. Ce sont ces plaisirs éteints
qu'ils cherchent, contre le voeu de la nature, à ranimer
dans la chair. Cendre éteinte qu'ils remuent en vain. Et
pourquoi agissent-ils ainsi? Parce qu'ils n'ont mis en
réserve pour leur âme aucun de ces plaisirs qui lui sont
propres et qui sont dignes d'elle.
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