[17] Δημοσθένους δὲ λοιδοροῦντος τὸν Ἀλέξανδρον ἤδη
προσάγοντα ταῖς Θήβαις, ἔφη·
σχέτλιε, τίπτ' ἐθέλεις ἐρεθιζέμεν ἄγριον ἄνδρα
καὶ δόξης μεγάλης ὀρεγόμενον; ἢ βούλει πυρκαϊᾶς τηλικαύτης
οὔσης ἐγγὺς ῥιπίσαι τὴν πόλιν; ἀλλ' ἡμεῖς οὐδὲ βουλομένοις
ἀπολέσθαι τούτοις (2) ἐπιτρέψομεν, οἱ διὰ τοῦτο στρατηγεῖν
ὑπομένοντες." ὡς δ' ἀπωλώλεισαν αἱ Θῆβαι, καὶ ὁ Ἀλέξανδρος
ἐξῃτεῖτο τοὺς περὶ Δημοσθένην καὶ Λυκοῦργον καὶ Ὑπερείδην
καὶ Χαρίδημον, ἡ δ' ἐκκλησία πρὸς ἐκεῖνον (3) ἀπέβλεπεν,
ὀνομαστὶ πολλάκις καλούμενος ἀνέστη· καὶ τῶν φίλων ἕνα
παραστησάμενος, ᾧ μάλιστα χρώμενος διετέλει καὶ πιστεύων
καὶ ἀγαπῶν· "εἰς τὰ τοιαῦτ'" ἔφη "τὴν πόλιν οὗτοι
παραγηόχασιν, ὥστ' ἔγωγε κἂν Νικοκλέα τις τοῦτον ἐξαιτῇ,
διδόναι κελεύσω. τὸ μὲν γὰρ αὐτὸς (4) ὑπὲρ ὑμῶν ἁπάντων
ἀποθανεῖν εὐτυχίαν <ἂν> ἐμαυτοῦ θείμην. ἐλεῶ δ'" εἶπεν
"ἄνδρες Ἀθηναῖοι καὶ τοὺς ἐκ Θηβῶν δεῦρο πεφευγότας, ἀρκεῖ
δὲ τὰς Θήβας κλαίειν τοῖς Ἕλλησι. διὸ βέλτιόν ἐστιν ὑπὲρ
ἀμφοῖν πείθειν (5) καὶ παραιτεῖσθαι τοὺς κρατοῦντας ἢ
μάχεσθαι." τὸ μὲν οὖν πρῶτον ψήφισμα λέγεται <τὸν>
Ἀλέξανδρον ὡς ἔλαβε ῥῖψαι, καὶ φυγεῖν ἀποστρα(6)φέντα τοὺς
πρέσβεις· τὸ δὲ δεύτερον ἐδέξατο κομισθὲν ὑπὸ Φωκίωνος, τῶν
πρεσβυτέρων ἀκούων ὅτι καὶ Φίλιππος ἐθαύμαζε τὸν ἄνδρα
τοῦτον, καὶ οὐ μόνον τὴν ἔντευξιν ὑπέμεινεν αὐτοῦ καὶ τὴν
δέησιν, ἀλλὰ καὶ συμ(7)βουλεύοντος ἤκουσε. συνεβούλευε δ' ὁ
Φωκίων, εἰ μὲν ἡσυχίας ὀρέγεται, θέσθαι τὸν πόλεμον· εἰ δὲ
δόξης, μεταθέσθαι, πρὸς τοὺς βαρβάρους ἀπὸ (8) τῶν Ἑλλήνων
τραπόμενον. καὶ πολλὰ πρὸς τὴν Ἀλεξάνδρου φύσιν καὶ
βούλησιν εὐστόχως εἰπών, οὕτω μετέβαλε καὶ κατεπράϋνεν
αὐτόν, ὥστ' εἰπεῖν ὅπως προσέξουσι τὸν νοῦν Ἀθηναῖοι τοῖς
πράγμασιν, ὡς εἴ τι (9) γένοιτο περὶ αὐτόν, ἐκείνοις ἄρχειν
προσῆκον. ἰδίᾳ δὲ τὸν Φωκίωνα ποιησάμενος αὑτοῦ φίλον καὶ
ξένον, εἰς τοσαύτην ἔθετο τιμὴν ὅσην εἶχον (10) ὀλίγοι τῶν ἀεὶ
συνόντων. ὁ γοῦν Δοῦρις εἴρηκεν, ὡς μέγας γενόμενος καὶ
Δαρείου κρατήσας ἀφεῖλε τῶν ἐπιστολῶν τὸ χαίρειν, πλὴν ἐν
ὅσαις ἔγραφε Φωκίωνι· τοῦτον δὲ μόνον ὥσπερ Ἀντίπατρον
μετὰ τοῦ χαίρειν προσηγόρευε. τοῦτο δὲ καὶ Χάρης ἱστόρηκε.
| [17] Démosthène, dans ses harangues, invectivait contre Alexandre,
qui déjà faisait approcher son armée de Thèbes. « Eh quoi!, lui dit
Phocion, "Veux-tu donc, malheureux, irriter davantage Ce farouche ennemi tout
bouillant de courage", cet homme si avide de gloire? Quand ce terrible incendie
est si près de nous, faut-il y précipiter la ville? Pour moi, je ne consentirai jamais que
les Athéniens courent même volontairement à leur perte; et c'est dans cette seule vue
que j'ai accepté le commandement. » XIX. Après qu'Alexandre eut ruiné Thèbes, il fit
demander aux Athéniens qu'on lui livrât Démosthène, Lycurgue, Hypéride et
Charidème. Toute l'assemblée tourne ses regards vers Phocion, qui, appelé
nommément plusieurs fois, se lève enfin; et faisant approcher celui de ses amis qu'il
aimait le plus, et en qui il avait toujours eu plus de confiance, il dit au peuple :
"Ceux qu'Alexandre vous somme de lui livrer ont réduit la ville à une telle détresse,
que s'il demandait ce Nicoclés qui m'est si cher, je conseillerais moi-même de le lui
abandonner. Je regarderais comme un bonheur de mourir pour vous sauver tous. Je
suis, Athéniens, vivement touché du sort de ces Thébains qui sont venus chercher un
asile au milieu de vous. Mais c'est assez que les Grecs aient à pleurer la perte de
Thèbes; et je crois qu'il vaut mieux avoir recours aux prières, et obtenir du vainqueur
la grâce des Thébains et des Athéniens, que de prendre les armes contre lui. » XX.
Alexandre, dit-on, rejeta le premier décret rendu sur sa demande, et tourna le dos
aux ambassadeurs qui le lui apportaient. Mais il reçut le second que Phocion lui
présenta, parce que les plus anciens de ses officiers lui dirent combien Philippe, son
père, avait eu d'estime pour ce général : non content de lui donner audience et de
recevoir favorablement ses prières, il écouta le conseil que Phocion lui donna, de
renoncer à la guerre s'il aimait le repos; ou, s'il ambitionnait la gloire des conquêtes,
de tourner ses armes contre les Barbares, au lieu d'attaquer les Grecs. Il fit ainsi entrer
adroitement dans son discours bien des choses conformes au caractère et aux
inclinations d'Alexandre; et par ce moyen il l'adoucit tellement, que ce prince lui dit
que les Athéniens devaient particulièrement s'appliquer aux affaires de la Grèce,
parce qu'après lui ils seraient le seul peuple qui fût digne de commander. Il
s'unit avec Phocion par le double lien de l'amitié et de l'hospitalité, et le traita avec
une distinction qu'il n'accordait qu'à un très petit nombre de ses courtisans les plus
assidus. L'historien Duris rapporte qu'après que ses victoires sur Darius l'eurent
élevé au plus haut degré de puissance, il retrancha de toutes ses lettres le mot salut,
excepté de celles qu'il écrivait à Phocion, qui fut le seul, avec Antipater, pour qui
ce prince conserva cette formule. Ce récit est confirmé par Charès.
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