[20] Ἐπεὶ δὲ πολλοὺς τῶν Ἀμβρώνων οἱ Ῥωμαῖοι
διαφθείραντες ἀνεχώρησαν ὀπίσω καὶ σκότος ἐπέσχεν, οὐχ
ὥσπερ ἐπ' εὐτυχήματι τοσούτῳ τὸν στρατὸν ἐδέξαντο παιᾶνες
ἐπινίκιοι καὶ πότοι κατὰ σκηνὰς καὶ φιλοφροσύναι περὶ δεῖπνα
καὶ τὸ πάντων ἥδιστον ἀνδράσιν εὐτυχῶς μεμαχημένοις, ὕπνος
ἤπιος, ἀλλ' ἐκείνην μάλιστα (2) τὴν νύκτα φοβερὰν καὶ
ταραχώδη διήγαγον. ἦν μὲν γὰρ αὐτοῖς ἀχαράκωτον τὸ
στρατόπεδον καὶ ἀτείχιστον, ἀπελείποντο δὲ τῶν βαρβάρων ἔτι
πολλαὶ μυριάδες ἀήττητοι, καὶ συμμεμειγμένων τούτοις ὅσοι
διαπεφεύγεσαν τῶν Ἀμβρώνων, ὀδυρμὸς ἦν διὰ νυκτὸς οὐ
κλαυθμοῖς οὐδὲ στεναγμοῖς ἀνθρώπων ἐοικώς, ἀλλὰ
θηρομιγής τις ὠρυγὴ καὶ βρύχημα μεμειγμένον ἀπειλαῖς καὶ
θρήνοις ἀναπεμπόμενον ἐκ πλήθους τοσούτου τά τε πέριξ ὄρη
(3) καὶ τὰ κοῖλα τοῦ ποταμοῦ περιεφώνει. καὶ κατεῖχε φρικώδης
ἦχος τὸ πεδίον, τοὺς δὲ Ῥωμαίους δέος αὐτόν τε τὸν Μάριον
ἔκπληξις, ἄκοσμόν τινα καὶ ταραχώδη νυκτομαχίαν
προσδεχόμενον. οὐ μὴν ἐπῆλθον οὔτε νυκτὸς οὔτε τῆς
ἐπιούσης ἡμέρας, ἀλλὰ συντάττοντες ἑαυτοὺς (5) καὶ
παρασκευαζόμενοι διετέλουν. ἐν τούτῳ δὲ Μάριος, ἦσαν γὰρ ἐκ
κεφαλῆς τῶν βαρβάρων νάπαι περικλινεῖς καὶ κατάσκιοι
δρυμοῖς αὐλῶνες, ἐνταῦθα Κλαύδιον Μάρκελλον ἐκπέμπει
μετὰ τρισχιλίων ὁπλιτῶν, ἐνεδρεῦσαι κελεύσας κρύφα καὶ
μαχομένοις ἐξόπισθεν ἐπιφανῆναι. (6) τοὺς δ' ἄλλους
δειπνήσαντας ἐν ὥρᾳ καὶ κοιμηθέντας ἅμ' ἡμέρᾳ συνέταττε
πρὸ τοῦ χάρακος ἀγαγών, καὶ προεξέπεμπε τοὺς ἱππέας εἰς
τὸ πεδίον. θεασάμενοι δ' οἱ Τεύτονες οὐκ ἠνέσχοντο
καταβαίνοντας αὐτοῖς ἐξ ἴσου διαγωνίζεσθαι τοὺς Ῥωμαίους,
ἀλλὰ σὺν τάχει καὶ δι' (8) ὀργῆς ὁπλισάμενοι τῷ λόφῳ
προσέβαλον. ὁ δὲ Μάριος ἑκασταχοῦ διαπέμπων τοὺς
ἡγεμόνας ἑστάναι καὶ καρτερεῖν παρεκάλει, πελασάντων δ' εἰς
ἐφικτὸν ἐξακοντίσαι τοὺς ὑσσούς, εἶτα χρῆσθαι ταῖς μαχαίραις
καὶ τοῖς (9) θυρεοῖς ἀντερείσαντας βιάζεσθαι· τῶν γὰρ τόπων
ἐπισφαλῶν ὄντων ἐκείνοις, οὔτε τόνον ἕξειν τὰς πληγὰς οὔτε
ῥώμην τὸν συνασπισμόν, ἐν περιτροπῇ καὶ σάλῳ (10) τῶν
σωμάτων ὄντων διὰ τὴν ἀνωμαλίαν. ταῦθ' ἅμα παρῄνει καὶ
δρῶν ἑωρᾶτο πρῶτος· οὐδενὸς γὰρ ἤσκητο χεῖρον τὸ σῶμα, καὶ
πάντας πολὺ τῇ τόλμῃ παρήλλαττεν.
| [20] XXI. Les Romains, après avoir taillé en pièces la plus grande partie des
Ambrons, regagnèrent leur poste, à la nuit tombante; mais l'armée ne fit pas
entendre, comme il était naturel après un si grand avantage, des chants de joie et de
victoire. Loin de penser à boire dans leurs tentes, à s'égayer en prenant ensemble
leurs repas, ils ne se permirent même pas le délassement le plus agréable pour des
hommes qui ont heureusement combattu, la douceur d'un sommeil paisible : ils
passèrent toute la nuit dans le trouble et dans la frayeur. Leur camp n'avait ni
clôture, ni retranchement. Il restait encore plusieurs milliers de Barbares qui
n'avaient pas combattu ; et ceux des Ambrons qui s'étaient sauvés de la défaite
s'étant joints à eux, ils poussèrent toute la nuit des cris horribles, qui ressemblaient
non à des plaintes, ou à des gémissements humains, mais à des hurlements, à des
mugissements de bêtes féroces, mêlés de menaces et de lamentations; les cris de
cette multitude immense faisaient retentir les montagnes voisines et les concavités
du fleuve. Ce bruit affreux remplissait toute la plaine; les Romains étaient saisis de
terreur, et Marius lui-même, frappé d'étonnement, s'attendait à un combat de nuit,
dont il craignait le désordre. Mais ils ne sortirent de leur camp, ni cette nuit, ni le
jour du lendemain; ils les employèrent à se préparer et à se disposer pour la bataille.
Cependant Marius, sachant qu'au-dessus du camp des Barbares il y avait des creux
assez profonds et des vallons couverts de bois, y envoya Marcellus avec trois mille
hommes de pied, pour s'y mettre en embuscade, et charger les ennemis par derrière,
quand l'action serait engagée. Il ordonna au reste de ses troupes de prendre leur
repas de bonne heure, et ensuite de se reposer. Le lendemain, dès la pointe du jour,
il les range en bataille devant les retranchements, et envoie sa cavalerie dans la
plaine. Dès que les Teutons l'eurent aperçue, ils n'attendirent pas que les Romains
fussent descendus au pied de la colline, où ils auraient pu les combattre à avantage
égal, sur un terrain uni. Frémissant de colère, ils s'arment avec précipitation, et vont
les attaquer sur la hauteur même. Alors Marius envoie ses officiers porter dans tous
les rangs l'ordre de s'arrêter, et d'attendre que l'ennemi soit à la portée du trait; de
lancer alors leurs javelots, de mettre ensuite l'épée à la main, et de le pousser
vigoureusement en le heurtant de leurs boucliers. Comme on était sur un terrain
glissant, il avait prévu que les coups portés par les Barbares n'auraient point de
force, et que leur ordonnance ne pourrait se maintenir, parce que leurs corps seraient
sur ce terrain inégal, comme sur une mer orageuse, dans une agitation continuelle.
XXII. Marius, aussi adroit que personne à manier les armes, et supérieur à tous en
audace, était le premier à exécuter les ordres qu'il donnait.
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