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[5] Ἂν δὲ τοιαῦταί τινες ἄφνω βαρεῖς ὄντας
ἡμᾶς καὶ διακειμένους φαύλως ἀνάγκαι καταλάβωσιν
ἡγεμόνων καλούντων ἢ ξένων ἐπιφανέντων ὑπ´
αἰδοῦς βαδίζειν εἰς ταὐτὸ τοῖς ἱκανῶς ἔχουσι καὶ
συμπίνειν, ἐνταῦθα μάλιστα δεῖ παρατετάχθαι πρὸς
"τὴν μέγα σινομένην ἄνδρας αἰδῶ" καὶ δυσωπίαν,
τὰ τοῦ τραγικοῦ Κρέοντος λέγοντος
κρεῖσσον δέ μοι νῦν πρός ς´ ἀπέχθεσθαι, ξένε,
ἢ μαλθακισθένθ´ ὕστερον μέγα στένειν.
τὸ γὰρ ἀγροικίας φοβηθέντα δόξαν εἰς πλευρῖτιν ἢ
φρενῖτιν ἐμβάλλειν ἑαυτὸν ἀγροίκου τινὸς ὡς ἀληθῶς
ἐστι καὶ νοῦν οὐκ ἔχοντος οὐδὲ λόγον ἄνευ
κύλικος καὶ κνίσης ἀνθρώποις ἐπιστάμενον ὁμιλεῖν.
ἥ τε γὰρ παραίτησις ἂν τὸ ἐπιδέξιον καὶ τὸ ἀστεῖον
ἔχῃ, οὐχ ἧττον ἔσται κεχαρισμένη τῆς συμπεριφορᾶς·
ἄν τέ τις παρέχων ἑστίασιν ὥσπερ θυσίαν
ἄγευστον αὐτὸς ἀπέχηται, παρά τε τῇ κύλικι καὶ
τῇ τραπέζῃ μετὰ προθυμίας καὶ φιλοφροσύνης ἅμα
τι παίζων καὶ λέγων εἰς ἑαυτόν, ἡδίων φανεῖται
τοῦ συμμεθυσκομένου καὶ συνοψοφαγοῦντος. ἐμνήσθη
δὲ τῶν μὲν παλαιῶν Ἀλεξάνδρου μετὰ πότον
πολὺν αἰσχυνθέντος ἀντειπεῖν Μηδίῳ παρακαλοῦντι,
καὶ καταβαλόντος αὖθις ἐξ ἀρχῆς αὑτὸν εἰς
ἄκρατον ἀφ´ οὗ διεφθάρη, τῶν δὲ καθ´ ἡμᾶς
Ῥήγλου τοῦ παγκρατιαστοῦ. καλοῦντος γὰρ ἐπὶ
τὸ λουτρὸν ἅμ´ ἡμέρᾳ Τίτου Καίσαρος ἧκε καὶ
συνελούσατο, καὶ πιὼν ἅπαξ, ὥς φασιν, ἀποπληξίας
καταλαβούσης εὐθὺς ἀπέθανε.
Ταῦθ´ ἡμῖν ὁ Γλαῦκος ἐν γέλωτι προύφερεν ὡς
παιδαγωγικά· τῶν δ´ ἄλλων οὐ πάνυ πρόθυμος ἦν
ἀκούειν, οὐδ´ ἡμεῖς ἐκείνῳ διηγεῖσθαι. σὺ δ´ ἐπισκόπει
τῶν λεχθέντων ἕκαστον.
| [5] Supposez que, pendant que nous serons alourdis et dans
une mauvaise disposition, des nécessités comme celles que je
vais dire viennent fondre sur nous : que de grands personnages
arrivent soudainement, que des hôtes se présentent.
Devrons-nous, par honte, nous avancer sur le terrain avec des
gens qui sont parfaitement dispos, et lutter contre eux le verre à
la main ? Non : ce sera plus que jamais l'occasion de résister
«à cette honte, à ce respect humain si funeste aux hommes»,
et de dire avec le Créon de la tragédie :
"Mon hôte, j'aime mieux te déplaire en ce jour
Que de gémir plus tard sur mon trop de faiblesse".
S'exposer, dans la crainte de paraître grossier, à une
pleurésie ou à une congestion cérébrale, c'est ce qui serait
réellement le propre d'un homme grossier, dépourvu de
sens et de raison et ne sachant parler à des hommes qu'au
milieu des bouteilles et de l'odeur des viandes. Le refus de
faire honneur à tous les comestibles qui circulent ne sera
pas agréé avec moins de plaisir, si l'on est adroit et poli,
que n'est agréé le repas lui-même. Ce sera comme un
sacrifice où l'on ne goûte pas à la victime ; et pour peu
que celui qui offre le festin, tout en ne prenant rien à table
et au milieu des verres, plaisante gaiement et avec cordialité
sur lui-même, les convives le trouveront plus agréable
que s'il s'enivrait ou dévorait les plats avec eux. Notre ami,
à ce propos, rappela parmi les Anciens l'exemple d'Alexandre
qui, après avoir bu considérablement, n'osa résister à
la provocation de Médius. Celui-ci le décida à boire de
nouveau comme de plus belle et le monarque en mourut.
Parmi ceux de notre temps il cita le pancratiaste Réglus.
L'empereur Titus ayant invité celui-ci dès la pointe du jour
à l'accompagner au bain, il y alla et se baigna avec le
prince ; mais il ne se fut pas plus tôt mis à table qu'il mourut
subitement, frappé, dit-on, d'apoplexie. Glaucus rappelait
ces exemples pour en rire et les traiter de propos de pédants.
Mais s'il était fort peu disposé à en écouter la suite, nous ne
l'étions pas non plus à en dire davantage devant lui. Vous,
au contraire, veuillez prêter votre attention à chacune des
choses qui furent dites alors.
| [6] Πρῶτος μὲν ὁ Σωκράτης παρακελευόμενος
φυλάττεσθαι τῶν βρωμάτων ὅσα μὴ πεινῶντας
ἐσθίειν ἀναπείθει, καὶ τῶν πωμάτων ὅσα πίνειν
μὴ διψῶντας, οὐχ ἁπλῶς τὸ χρῆσθαι τούτοις ἀπηγόρευσεν,
ἀλλὰ χρῆσθαι δεομένους ἐδίδασκε καὶ τὸ
ἡδὺ κατατάττοντας αὐτῶν εἰς τὸ ἀναγκαῖον, ὥσπερ
οἱ τὰ θεωρικὰ ποιοῦντες ἐν ταῖς πόλεσι στρατιωτικά.
τὸ γὰρ ἡδὺ τῇ φύσει μέχρι ἂν ᾖ μέρος τοῦ
τρέφοντος οἰκεῖόν ἐστι, καὶ δεῖ πεινῶντας ἔτι τῶν
ἀναγκαίων ἀπολαύειν ἢ τῶν ἡδέων, ἰδίᾳ δὲ μὴ
κινεῖν ἑτέρας ὀρέξεις τῶν κοινῶν ἀπηλλαγμένους.
ὥσπερ γὰρ αὖ τῷ Σωκράτει γυμνάσιον ἦν οὐκ
ἀηδὲς ἡ ὄρχησις, οὕτως ᾧτινι τὸ πέμμα καὶ τὸ
τράγημα δεῖπνόν ἐστι καὶ σιτίον, ἧττον βλάπτεται·
τὸ δ´ ἀπέχοντα τῇ φύσει τὸ μέτριον καὶ πεπληρωμένον
ἐπιδράττεσθαι τῶν τοιούτων φυλακτέον ἐν
τοῖς μάλιστα. φυλακτέον δὲ τῆς περὶ ταῦτα
φιληδονίας καὶ γαστριμαργίας οὐδὲν ἧττον ἀπειροκαλίαν
καὶ φιλοτιμίαν· καὶ γὰρ αὗται πολλάκις
συναναπείθουσι μὴ πεινῶντας ἐσθίειν ἔνια καὶ
πίνειν μὴ διψῶντας, ἀνελευθέρους κομιδῇ καὶ
φορτικὰς ὑποβάλλουσαι φαντασίας, ὡς ἄτοπόν
ἐστι πράγματος σπανίου καὶ πολυτελοῦς μὴ ἀπολαῦσαι
παρόντος, οἷον οὔθατος ἢ μυκήτων Ἰταλικῶν
ἢ Σαμίου πλακοῦντος ἢ χιόνος ἐν Αἰγύπτῳ.
ταῦτα γὰρ δήπου προάγεται πολλάκις χρῆσθαι
τοῖς περιβοήτοις καὶ σπανίοις, ὥσπερ ὑπὸ κνίσης
τῆς κενῆς δόξης ἀγομένους καὶ τὸ σῶμα κοινωνεῖν
μηδὲν δεόμενον ἀναγκάζοντας, ὅπως ἔχωσιν ἑτέροις
διηγεῖσθαι, ζηλούμενοι τῆς ἀπολαύσεως τῶν οὕτω
δυσπορίστων καὶ περιττῶν. ὅμοια δὲ καὶ πρὸς
γυναῖκας ἐνδόξους πάσχουσιν. ἰδίαις μὲν γὰρ ἔστιν
ὅτε καὶ καλαῖς καὶ ἀγαπώσαις συναναπαυόμενοι
τὴν ἡσυχίαν ἄγουσι, Φρύνῃ δὲ τελέσαντες ἀργύριον
ἢ Λαΐδι καὶ τὸ σῶμα φαύλως καὶ πρὸς συνουσίαν
ἀργῶς ἔχοντες διακείμενον ἐγείρουσιν ἅμα καὶ
παρακαλοῦσι τὸ ἀκόλαστον ἐπὶ τὴν ἡδονὴν ὑπὸ τῆς
κενῆς δόξης. αὐτὴ γοῦν ἔλεγεν ἡ Φρύνη πρεσβυτέρα
γεγενημένη τὴν τρύγα πλείονος πωλεῖν διὰ τὴν δόξαν.
| [6] Socrate, pour commencer par lui, conseillait de se mettre
en garde contre les mets et les boissons qui invitent à
manger et à boire quand on n'a ni faim ni soif. Il ne les
interdisait pas complétement, mais il enseignait à n'en user
que dans l'occasion et à subordonner aux convenances de la
nécessité le plaisir qu'ils offrent, comme dans les Gouvernements
on applique à l'entretien des armées l'argent destiné
à payer des places au théâtre Ce que les aliments ont d'agréable
n'est salutaire que dans la proportion où ils sont
nutritifs. Qu'ayant encore faim on mange de bonnes choses
tout en mangeant par nécessité, c'est au mieux; mais il ne
faut pas que d'une façon exceptionnelle on provoque des
besoins factices quand les appétits naturels sont satisfaits. De
même que Socrate ne regardait pas non plus la danse comme
un exercice désagréable, de même celui à qui les gâteaux et
les friandises d'un dessert tiennent lieu de souper et de viandes
n'en est pas incommodé sensiblement. Mais lorsqu'on a
eu sa mesure naturelle et que l'on s'est assez rempli, il faut
tout particulièrement se garder de toucher à ces friandises;
et en de telles choses la gourmandise et la gloutonnerie ne
sont pas moins à fuir que l'inconvenance et la vanité. Ces
deux derniers défauts nous excitent souvent à manger et à
boire sans que nous ayons ni faim ni soif, et nous suggèrent
les fantaisies les plus folles et les plus détestables. Nous
croyons, parce qu'un mets est rare ou coûteux, que nous
serions bien maladroits de ne pas profiter de l'occasion qui
nous est offerte de nous en régaler, comme par exemple
s'il s'agit de tettines de truie, ou de champignons d'Italie,
ou de gâteaux de Samos, ou de neige d'Egypte. Cette sotte
vanité devient une espèce de fumet appétissant qui souvent
nous pousse à manger des mets vantés et rares. Nous
contraignons notre estomac à les recevoir sans nécessité, afin
de pouvoir le raconter à d'autres et de faire envier le bonheur
que nous avons eu de goûter à des choses d'un si grand prix
et si difficiles à se procurer. Ceci rappelle ce qui arrive souvent
aux maris dont les femmes ont une excellente réputation.
Couchés avec leurs moitiés, qui quelquefois sont fort
belles et les aiment tendrement, ils restent bien tranquilles
à leurs côtés; mais s'ils ont payé les faveurs d'une Phryné
ou d'une Lais, ils s'évertuent auprès d'elle, tout impuissants,
tout épuisés qu'ils sont, et ils tâchent à force de débauche
de réveiller en eux le plaisir, excités uniquement
par une fausse gloriole. C'est ce qui faisait dire à Phryné
elle-même, devenue vieille, qu'elle vendait plus cher sa
lie en raison de sa célébrité.
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