[394] ὡς οὐδέποτε (394a) γινομένης περὶ αὐτὸν ἐκστάσεως καὶ μεταβολῆς,
ἀλλ´ ἑτέρῳ τινὶ θεῷ μᾶλλον δὲ δαίμονι τεταγμένῳ περὶ τὴν ἐν φθορᾷ
καὶ γενέσει φύσιν τοῦτο ποιεῖν καὶ πάσχειν προσῆκον·
ὡς δῆλόν ἐστιν ἀπὸ τῶν ὀνομάτων εὐθὺς οἷον ἐναντίων
ὄντων καὶ ἀντιφώνων. Λέγεται γὰρ ὁ μὲν Ἀπόλλων ὁ δὲ Πλούτων, καὶ ὁ μὲν
Δήλιος ὁ δ´ Ἀιδωνεύς, καὶ ὁ μὲν Φοῖβος ὁ δὲ Σκότιος· καὶ παρ´ ᾧ μὲν αἱ
Μοῦσαι καὶ ἡ Μνημοσύνη, παρ´ ᾧ δ´ ἡ Λήθη καὶ ἡ Σιωπή· καὶ ὁ μὲν Θεώριος
καὶ Φαναῖος, ὁ δέ « Νυκτός τ´ ἀιδνᾶς ἀεργηλοῖό θ´ Ὕπνου κοίρανος· »
καὶ ὁ μέν
« βροτοῖσι θεῶν ἔχθιστος ἁπάντων, »
πρὸς ὃν δὲ Πίνδαρος εἴρηκεν οὐκ ἀηδῶς
(394b) « κατεκρίθη δὲ θνατοῖς ἀγανώτατος ἔμμεν. »
Εἰκότως οὖν ὁ Εὐριπίδης εἶπε
« Λοιβαὶ νεκύων φθιμένων
ἀοιδαί θ´, ἃς χρυσοκόμας
Ἀπόλλων οὐκ ἐνδέχεται· »
καὶ πρότερος ἔτι τούτου {ὁ} Στησίχορος
« Χορεύματά τοι μάλιστα
παιγμοσύνας τε φιλεῖ μολπάς τ´ Ἀπόλλων,
κάδεα δὲ στοναχάς τ´ Ἀίδας ἔλαχε. »
Σοφοκλῆς δὲ καὶ τῶν ὀργάνων ἑκατέρῳ προσνέμων ἑκάτερον δῆλός ἐστι διὰ
τούτων « Οὐ νάβλα κωκυτοῖσιν οὐ λύρα φίλα » .
Καὶ γὰρ ὁ αὐλὸς ὀψὲ καὶ πρῴην ἐτόλμησε φωνήν † « ἐφινερθίσιν » ἀφιέναι·
τὸν δὲ πρῶτον χρόνον εἵλκετο πρὸς τὰ πένθη, καὶ τὴν περὶ ταῦτα λειτουργίαν
οὐ μάλ´ ἔντιμον (394c) οὐδὲ φαιδρὰν εἶχεν, εἶτ´ ἐμίχθη πάντα πᾶσι. Μάλιστα
δὲ τὰ θεῖα πρὸς τὰ δαιμόνια συγχέοντες εἰς ταραχὴν αὑτοὺς κατέστησαν. Ἀλλά
γε τῷ εἶ τό « γνῶθι σαυτόν » ἔοικέ πως ἀντικεῖσθαι καὶ τρόπον τινὰ πάλιν
συνᾴδειν· τὸ μὲν γὰρ ἐκπλήξει καὶ σεβασμῷ πρὸς τὸν θεὸν ὡς ὄντα διὰ παντὸς
ἀναπεφώνηται, τὸ δ´ ὑπόμνησίς ἐστι τῷ θνητῷ τῆς περὶ αὐτὸ φύσεως καὶ ἀσθενείας. »
| [394] ne sort jamais (394a) de lui-même et qu'il n'éprouve aucune vicissitude. Ces
changements et ces opérations ne peuvent convenir qu'à un autre dieu, ou plutôt
quelque génie qui préside à la nature, dans laquelle la naissance et la
mort se succèdent continuellement ; c'est ce que prouvent sensiblement les
noms qu'on donne à ce génie, et qui expriment des qualités si contraires à
celles de notre dieu : ce dernier s'appelle Apollon; l'autre est nommé
Pluton; celui-ci, Délius; le premier, Aidonée; l'un, Phébus, et l'autre,
Scotius ; l'un a pour compagnes les Muses et Mnémosyne ;
l'autre, l'oubli et le silence ; l'un s'appelle Théorius et Phanaius ; pour l'autre,
Il préside à la nuit, au tranquille sommeil; aussi l'un
Est-il de tous les dieux le plus craint des mortels.
Pour l'autre, Pindare a dit de lui agréablement :
(394b) "Du Destin la loi suprême
A voulu qu'aux humains il fût plein de bonté".
Euripide a donc eu raison de dire :
"Laissons aux tristes morts les larmes, les regrets,
Le brillant Apollon ne les connut jamais".
Stésichore avait dit avant lui :
"Apollon ne chérit que les chants et les ris;
Le sort laisse à Pluton les douleurs et les cris".
Sophocle assigne à chacun d'eux l'instrument qui leur convient en disant :
"La flûte exprime la tristesse,
La lyre enfante l'allégresse".
C'est depuis bien peu de temps que la flûte a osé se faire entendre dans
les jeux. Auparavant elle n'appelait les hommes qu'aux cérémonies
lugubres, et remplissait un ministère aussi triste (394c) que peu
honorable. Dans la suite, tout a été confondu ; et cette confusion du
culte des dieux avec celui des génies a été une source de troubles parmi
les hommes. Mais l'inscription "Ei", et la maxime "Connais-toi toi-même", qui
paraissent se contredire sous un rapport, s'accordent sous un autre. La
première nous imprime un profond respect pour la divinité et nous invite à
l'adorer comme l'être suprême et éternel; l'autre avertit les mortels de
la fragilité de leur nature. »
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