[5] ‘Ταῦτα δ´ οὐκ ἀποδράσεως πρόφασίς ἐστιν ἀλλὰ συγγνώμης
αἴτησις, ὅπως ὁ λόγος, οἷον εἰς λιμένα καὶ καταφυγὴν
ἀποβλέπων, εὐθαρσέστερον ἐξαναφέρῃ τῷ πιθανῷ
πρὸς τὴν ἀπορίαν. ἀλλὰ σκοπεῖτε πρῶτον, ὅτι κατὰ Πλάτωνα
πάντων καλῶν ὁ θεὸς ἑαυτὸν ἐν μέσῳ παράδειγμα
θέμενος τὴν ἀνθρωπίνην ἀρετήν, ἐξομοίωσιν οὖσαν ἁμωσγέπως
πρὸς αὑτόν, ἐνδίδωσι τοῖς ἕπεσθαι θεῷ δυναμένοις.
καὶ γὰρ ἡ πάντων φύσις ἄτακτος οὖσα ταύτην ἔσχε τὴν
ἀρχὴν τοῦ μεταβαλεῖν καὶ γενέσθαι κόσμος, ὁμοιότητι
καὶ μεθέξει τινὶ τῆς περὶ τὸ θεῖον ἰδέας καὶ ἀρετῆς. καὶ
τὴν ὄψιν αὐτὸς οὗτος ἁνὴρ ἀνάψαι φησὶ τὴν φύσιν ἐν
ἡμῖν, ὅπως ὑπὸ θέας τῶν ἐν οὐρανῷ φερομένων καὶ θαύματος
ἀσπάζεσθαι καὶ ἀγαπᾶν ἐθιζομένη τὸ εὔσχημον
ἡ ψυχὴ καὶ τεταγμένον ἀπεχθάνηται τοῖς ἀναρμόστοις
καὶ πλανητοῖς πάθεσι καὶ φεύγῃ τὸ εἰκῆ καὶ ὡς ἔτυχεν,
ὡς κακίας καὶ πλημμελείας ἁπάσης γένεσιν. οὐ γὰρ ἔστιν
ὅ τι μεῖζον ἄνθρωπος ἀπολαύειν θεοῦ πέφυκεν ἢ τὸ μιμήσει
καὶ διώξει τῶν ἐν ἐκείνῳ καλῶν καὶ ἀγαθῶν εἰς ἀρετὴν
καθίστασθαι. διὸ καὶ τοῖς πονηροῖς ἐν χρόνῳ καὶ σχολαίως
τὴν δίκην ἐπιτίθησιν, οὐκ αὐτός τινα τοῦ ταχὺ
κολάζειν ἁμαρτίαν δεδιὼς ἢ μετάνοιαν, ἀλλ´ ἡμῶν τὸ περὶ
τὰς τιμωρίας θηριῶδες καὶ λάβρον ἀφαιρῶν καὶ διδάσκων
μὴ σὺν ὀργῇ μηδ´ ὅτε μάλιστα φλέγεται καὶ σφαδᾴζει
’Πηδῶν ὁ θυμὸς τῶν φρενῶν ἀνωτέρω‘,
καθάπερ δίψαν ἢ πεῖναν ἀποπιμπλάντας ἐπιπηδᾶν τοῖς
λελυπηκόσιν, ἀλλὰ μιμουμένους τὴν ἐκείνου πραότητα καὶ
τὴν μέλλησιν ἐν τάξει καὶ μετ´ ἐμμελείας, τὸν ἥκιστα
μετανοίᾳ προσοισόμενον χρόνον ἔχοντας σύμβουλον, ἅπτεσθαι
τῆς δίκης. ὕδατι γὰρ τεταραγμένῳ προσπεσόντα χρῆσθαι
δι´ ἀκρασίαν ἧττόν ἐστι κακόν, ὡς Σωκράτης
ἔλεγεν, | ἢ θολερὸν ὄντα καὶ διάπλεω τὸν λογισμὸν ὀργῆς
καὶ μανίας, πρὶν ἢ καταστῆναι καὶ γενέσθαι καθαρόν,
ἐμφορεῖσθαι τιμωρίας συγγενοῦς καὶ ὁμοφύλου σώματος.
οὐ γὰρ ’ἐγγυτάτω τὸ ἀμύνασθαι τῷ παθεῖν‘, ὡς Θουκυδίδης
ἔλεγεν, ἀλλὰ μᾶλλον ἀπωτάτω κείμενον
ἀπολαμβάνει τὸ προσῆκον. ὡς γὰρ ὁ θυμὸς κατὰ τὸν
Μελάνθιον ’Τὰ δεινὰ πράττει τὰς φρένας
μετοικίσας‘, οὕτω καὶ ὁ λογισμὸς τὰ δίκαια πράττει καὶ
μέτρια, τὴν ὀργὴν καὶ τὸν θυμὸν ἐκποδὼν θέμενος. ὅθεν
ἡμεροῦνται καὶ τοῖς ἀνθρωπίνοις παραδείγμασιν, ἀκούοντες
ὡς Πλάτων τε τὴν βακτηρίαν ἀνατεινάμενος τῷ παιδὶ
πολὺν ἔστη χρόνον, ὡς αὐτὸς ἔφη, τὸν θυμὸν κολάζων,
καὶ Ἀρχύτας οἰκετῶν τινα πλημμέλειαν ἐν ἀγρῷ καὶ ἀταξίαν
καταμαθών, εἶθ´ ἑαυτοῦ συναισθανόμενος ἐμπαθέστερον
ἔχοντος καὶ τραχύτερον πρὸς αὐτοὺς οὐδὲν ἐποίησεν
ἀλλ´ ἢ τοσοῦτον ἀπιών ’εὐτυχεῖτ´‘ εἶπεν ’ὅτι ὀργίζομαι
ὑμῖν.‘ εἴπερ οὖν ἀνδρῶν λόγοι μνημονευόμενοι καὶ
πράξεις λεγόμεναι τὸ τραχὺ καὶ σφοδρὸν ἀπαρύτουσι τῆς
ὀργῆς, πολὺ μᾶλλον εἰκὸς ἡμᾶς τὸν θεὸν ὁρῶντας, ᾧ δέος
οὐδὲν οὐδὲ μετάνοια πράγματος οὐδενός, ὅμως ἐν τῷ
μέλλοντι τὴν τιμωρίαν κατατιθέμενον καὶ περιμένοντα
τὸν χρόνον εὐλαβεῖς περὶ τὰ τοιαῦτα γίνεσθαι καὶ θεῖον
ἡγεῖσθαι μόριον ἀρετῆς τὴν πραότητα καὶ τὴν μεγαλοπάθειαν,
ἣν ὁ θεὸς ἐνδείκνυται τῷ μὲν κολάζειν ὀλίγους
ἐπανορθοῦσαν, τῷ δὲ βραδέως πολλοὺς ὠφελοῦσαν καὶ νουθετοῦσαν.’
| [5] «En parlant ainsi, je ne cherche pas un prétexte pour
éluder la discussion. Mon but est de réclamer l'indulgence.
C'est afin que la vue d'une sorte de port et de refuge donne
plus de hardiesse à ma parole au moment où je vais combattre
avec le plus de persuasion possible les difficultés que j'attaque.
«Considérez d'abord que Dieu, selon que le dit Platon,
se présente à nos regards comme le modèle de toutes les
perfections, et qu'en donnant aux hommes la vertu, qui
est en quelque sorte sa propre ressemblance, il nous met
à même de suivre ses traces divines. L'univers, masse confuse,
n'a commencé à se modifier, à devenir de l'ordre,
qu'en prenant de la ressemblance et de l'analogie avec la
forme et la perfection divine. Ce même personnage dit encore,
que la nature a allumé en nous la lumière du regard,
afin que le spectacle merveilleux des corps qui se
meuvent dans le ciel habituât notre âme à se passionner de
préférence pour ce qui est beau et régulier, à ressentir de
l'aversion contre ce qui est désordre et incertitude, à fuir
ce qui provient du hasard et des rencontres fortuites,
comme étant le principe de tous les vices et de toutes les
erreurs. L'homme peut-il jouir plus pleinement de Dieu,
que s'il s'affermit dans la vertu par l'imitation et la poursuite
des perfections infinies qui sont en Dieu?
«De ce que la justice céleste n'atteint les méchants qu'à
loisir et à la longue, il ne faut donc pas conclure qu'en
châtiant elle craigne de se tromper ou d'avoir à se repentir.
C'est que la Divinité veut faire disparaître de notre cœur
cette férocité, cette violence avec laquelle nous procédons
aux châtiments. Elle nous enseigne à ne point prendre
conseil de la colère. Ce n'est pas lorsque nous sommes enflammés
et palpitants de courroux, lorsque
"La rage en bondissant trouble l'intelligence",
ce n'est pas alors que, comme s'il s'agissait d'assouvir notre
faim ou notre soif, nous devons fondre sur ceux qui nous
ont mécontentés. Imitons la clémence divine et sa lenteur.
Que ce soit avec ordre, avec réflexion, en prenant conseil
du temps, dont les avis exposent rarement au repentir, que
nous fassions justice. Se jeter sur une eau bourbeuse et
trouble, en boire parce qu'on s'impatiente d'attendre, est
un moindre mal, disait Socrate, que de ne pas savoir,
quand la raison est troublée, pleine de fureur et de colère,
lui rendre le calme et la sérénité. Est-il raisonnable
de s'élancer en pareil état sur un concitoyen, sur son
semblable, pour se venger de lui? Ce n'est pas, a dit
Thucydide, la punition la plus rappprochée de l'offense,
mais celle qui en est la plus éloignée, dont la convenance
est la meilleure. Comme la colère, selon l'expression de Mélanthius,
"Produit des maux affreux en chassant la raison",
de même la réflexion est sûre d'être juste et mesurée, si elle
s'affranchit de la fureur et de l'emportement.
«Des exemples humains nous donnent aussi des leçons de
douceur, et l'on se calme lorsqu'on en écoute le récit. Platon
ayant levé le bâton sur un esclave, garda longtemps cette
attitude, pour châtier lui-même, disait-il, sa propre colère.
Archytas avait eu occasion de se convaincre que ses serviteurs
apportaient de la négligence et du désordre à la culture
de son domaine; mais comme il se sentait trop animé et trop
courroucé contre eux, il ne leur fit rien, et se contenta de
dire en s'éloignant: «Vous êtes bienheureux que je sois en
colère contre vous.» Que si en entendant rapporter des paroles,
citer des actes, d'hommes aussi illustres, il est possible
de diminuer l'âpreté et la violence de la colère, il est
naturel que l'exemple de la Divinité soit bien plus efficace
encore. Dieu, qui ne connaît en quoi que ce soit la crainte
ou le repentir, n'en retarde pas moins ses vengeances, et il
les diffère quelque temps. Ne devons-nous pas en pareille
matière user aussi de circonspection ? Oui : regardons
comme un des attributs de la Divinité cette douceur, cette
longanimité que Dieu montre lui-même. Il est peu de coupables
qu'il redresse au moyen d'une correction immédiate.
Par ses délais, au contraire, il en soutient, il en ramène un
grand nombre.
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