[6] Τὰς δὲ πολλὰς ὁρῶμεν μητέρας, ὅταν ὑπ´ ἄλλων τὰ παιδία καθαρθῇ
καὶ γανωθῇ, καθάπερ παίγνια λαμβανούσας εἰς χεῖρας, εἶτ´ ἀποθανόντων
ἐκχεομένας εἰς κενὸν καὶ ἀχάριστον πένθος, οὐχ
ὑπ´ εὐνοίας (εὐλόγιστον γὰρ εὔνοια καὶ καλόν), ἀλλὰ
μικρῷ τῷ φυσικῷ πάθει πολὺ συγκεραννύμενον τὸ πρὸς
κενὴν δόξαν ἄγρια ποιεῖ καὶ μανικὰ καὶ δυσεξίλαστα τὰ
πένθη. καὶ τοῦτο φαίνεται μὴ λαθεῖν Αἴσωπον· ἔφη γὰρ
οὗτος ὅτι τοῦ Διὸς τὰς τιμὰς διανέμοντος τοῖς θεοῖς ᾔτει
καὶ τὸ Πένθος. ἔδωκεν οὖν αὐτῷ, παρὰ τοῖς αἱρουμένοις
δὲ μόνοις καὶ θέλουσιν. ἐν ἀρχῇ μὲν οὖν οὕτω τοῦτο γινόμενόν
ἐστιν· αὐτὸς γὰρ ἕκαστος εἰσάγει τὸ πένθος ἐφ´
ἑαυτόν. ὅταν δ´ ἱδρυθῇ χρόνῳ καὶ γένηται σύντροφον καὶ
σύνοικον, οὐδὲ πάνυ βουλομένων ἀπαλλάττεται. διὸ δεῖ
μάχεσθαι περὶ θύρας αὐτῷ καὶ μὴ προίεσθαι φρουρὰν δι´
ἐσθῆτος ἢ κουρᾶς ἤ τινος ἄλλου τῶν τοιούτων, ἃ καθ´
ἡμέραν ἀπαντῶντα καὶ δυσωποῦντα μικρὰν καὶ στενὴν
καὶ ἀνέξοδον καὶ ἀμείλικτον καὶ ψοφοδεῆ ποιεῖ τὴν διάνοιαν,
ὡς οὔτε γέλωτος αὐτῇ μετὸν οὔτε φωτὸς οὔτε φιλανθρώπου
τραπέζης τοιαῦτα περικειμένῃ καὶ μεταχειριζομένῃ
διὰ τὸ πένθος. ἀμέλειαι δὲ σώματος ἕπονται τῷ
κακῷ τούτῳ καὶ διαβολαὶ πρὸς ἄλειμμα καὶ λουτρὸν καὶ
τὴν ἄλλην δίαιταν· ὧν πᾶν τοὐναντίον ἔδει τὴν ψυχὴν πονοῦσαν
αὐτὴν βοηθεῖσθαι διὰ τοῦ σώματος ἐρρωμένου.
πολὺ γὰρ ἀμβλύνεται καὶ χαλᾶται τοῦ λυποῦντος, ὥσπερ
ἐν εὐδίᾳ κῦμα, τῇ γαλήνῃ τοῦ σώματος διαχεόμενον, ἐὰν
δ´ αὐχμὸς ἐγγένηται καὶ τραχύτης ἐκ φαύλης διαίτης καὶ
μηδὲν εὐμενὲς μηδὲ χρηστὸν ἀναπέμπῃ τὸ σῶμα τῇ ψυχῇ
πλὴν ὀδύνας καὶ λύπας ὥσπερ τινὰς πικρὰς καὶ δυσχερεῖς
ἀναθυμιάσεις, οὐδὲ βουλομένοις ἔτι ῥᾳδίως ἀναλαβεῖν ἔστι.
τοιαῦτα λαμβάνει πάθη τὴν ψυχὴν οὕτω κακωθεῖσαν.
| [6] Nous voyons tant d'autres mères, en effet, qui attendent
que leurs petits aient été nettoyés et arrangés par des
étrangères, pour les prendre dans leurs mains, comme si
c'étaient de véritables jouets. Puis, s'ils viennent à mourir,
elles se répandent en lamentations inutiles et déplaisantes,
dans lesquelles les sentiments affectueux n'entrent pour
rien; car les sentiments affectueux se produisent d'une manière
raisonnable et honnête. Il y a bien un peu de chagrin
naturel, mais il s'y mêle surtout beaucoup d'affectation ; et
c'est ce qui engendre ces deuils farouches, furieux et implacables.
On voit qu'Esope n'ignorait pas cela. Il dit que
Jupiter faisant aux Dieux la répartition des attributs et des
honneurs, le Deuil réclama aussi les siens. Jupiter lui en
conféra donc également, mais à la discrétion et à la volonté
seulement de ceux qui accueilleraient ce dieu. Ainsi se passent
les choses dans le commencement. C'est de son plein gré
qu'on admet le Deuil chez soi. Mais quand il s'y est installé
avec le temps, qu'il est devenu un commensal, un familier de
la maison, on a beau vouloir le chasser, il ne s'en va plus.
C'est pour cela que nous devons le combattre dès qu'il
se présente sur le seuil, et ne pas lui laisser prendre garnison
soit en modifiant nos vêtements, soit en rasant nos
cheveux, soit en nous livrant à d'autres pratiques du même
genre. Répétées chaque jour, ces pratiques amènent la
mauvaise honte. L'intelligence se rapetisse, se rétrécit. On
ne sait plus comment sortir d'un pareil état; on devient
farouche, on s'effraye du moindre bruit. On s'interdit le
rire, la lumière du soleil, les douces familiarités de la table ;
on est absorbé, dominé par son deuil. La négligence des
soins que réclame le corps vient à la suite de ce premier
mal. On maudit les frictions, les bains et les autres détails
d'hygiène : tandis qu'au contraire, il faudrait appeler tous
ces moyens au secours de l'âme malade, et par eux fortifier
le corps. La douleur, en effet, s'apaise en grande partie
et se détend lorsque l'état du corps est calme, comme les
flots, quand le temps est serein. Mais si à la suite d'un
régime trop austère il y a échauffement et inflammation, si
du corps il n'émane pour l'âme rien de bienfaisant et de
profitable, mais seulement des douleurs et des tristesses, sortes
d'exhalaisons amères et fâcheuses; alors, même le voulût-on,
il n'est pas facile de reprendre le dessus : tant sont violentes
les passions qui se sont saisies d'une âme ainsi maltraitée !
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