HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales, Comment écouter

Chapitre 2

  Chapitre 2

[2] Ἐπεὶ δ´ ὥσπερ τῶν ἐγγραφομένων εἰς τὰς πολιτείας οἱ μὲν ἀλλοδαποὶ καὶ ξένοι κομιδῇ πολλὰ μέμφονται καὶ δυσκολαίνουσι τῶν γιγνομένων, οἱ δ´ ἐκ μετοίκων σύντροφοι καὶ συνήθεις τῶν νόμων ὄντες οὐ χαλεπῶς προσδέχονται τὰ ἐπιβάλλοντα καὶ στέργουσιν, οὕτω σε δεῖ πολὺν χρόνον ἐν φιλοσοφίᾳ παρατρεφόμενον καὶ πᾶν μάθημα καὶ ἄκουσμα παιδικὸν ἀπ´ ἀρχῆς ἐθισθέντα προσφέρεσθαι λόγῳ φιλοσόφῳ μεμιγμένον, εὐμενῆ καὶ οἰκεῖον ἥκειν εἰς φιλοσοφίαν, μόνη τὸν ἀνδρεῖον καὶ τέλειον ὡς ἀληθῶς ἐκ λόγου τοῖς νέοις περιτίθησι κόσμον. Οὐκ ἂν ἀηδῶς δ´ οἶμαί σε προακοῦσαι περὶ τῆς ἀκουστικῆς αἰσθήσεως, ἣν Θεόφραστος παθητικωτάτην εἶναί φησι πασῶν. οὔτε γὰρ ὁρατὸν οὐδὲν οὔτε γευστὸν οὔθ´ ἁπτὸν ἐκστάσεις ἐπιφέρει καὶ ταραχὰς καὶ πτοίας τηλικαύτας ἡλίκαι καταλαμβάνουσι τὴν ψυχὴν κτύπων τινῶν καὶ πατάγων καὶ ἤχων τῇ ἀκοῇ προσπεσόντων. ἔστι δὲ λογικωτέρα μᾶλλον παθητικωτέρα. τῇ μὲν γὰρ κακίᾳ πολλὰ χωρία καὶ μέρη τοῦ σώματος παρέχει δι´ αὐτῶν ἐνδῦσαν ἅψασθαι τῆς ψυχῆς, τῇ δ´ ἀρετῇ μία λαβὴ τὰ ὦτα τῶν νέων ἐστίν, ἂν καθαρὰ καὶ ἄθρυπτα κολακείᾳ καὶ λόγοις ἄθικτα φαύλοις ἀπ´ ἀρχῆς φυλάττηται. διὸ καὶ Ξενοκράτης τοῖς παισὶ μᾶλλον τοῖς ἀθληταῖς ἐκέλευε περιάπτειν ἀμφωτίδας, ὡς ἐκείνων μὲν τὰ ὦτα ταῖς πληγαῖς, τούτων δὲ τοῖς λόγοις τὰ ἤθη διαστρεφομένων, οὐκ ἀνηκοΐαν οὐδὲ κωφότητα προμνώμενος, ἀλλὰ τῶν λόγων τοὺς φαύλους φυλάττεσθαι παραινῶν, πρὶν ἑτέρους χρηστούς, ὥσπερ φύλακας ἐντραφέντας ὑπὸ φιλοσοφίας τῷ ἤθει, τὴν μάλιστα κινουμένην αὐτοῦ καὶ ἀναπειθομένην χώραν κατασχεῖν. καὶ Βίας παλαιὸς Ἀμάσιδι, κελευσθεὶς τὸ χρηστότατον ὁμοῦ καὶ φαυλότατον ἐκπέμψαι κρέας τοῦ ἱερείου, τὴν γλῶτταν ἐξελὼν ἀπέπεμψεν, ὡς καὶ βλάβας καὶ ὠφελείας τοῦ λέγειν ἔχοντος μεγίστας. οἵ τε πολλοὶ τὰ μικρὰ παιδία καταφιλοῦντες αὐτοί τε τῶν ὤτων ἅπτονται κἀκεῖνα τοῦτο ποιεῖν κελεύουσιν, αἰνιττόμενοι μετὰ παιδιᾶς ὅτι δεῖ φιλεῖν μάλιστα τοὺς διὰ τῶν ὤτων ὠφελοῦντας. ἐπεὶ ὅτι γε πάσης ἀκροάσεως ἀπειργόμενος νέος καὶ λόγου μηδενὸς γευόμενος οὐ μόνον ἄκαρπος ὅλως καὶ ἀβλαστὴς διαμένει πρὸς ἀρετήν, ἀλλὰ καὶ διαστρέφοιτ´ ἂν πρὸς κακίαν, ὥσπερ ἐκ χώρας ἀκινήτου καὶ ἀργῆς ἄγρια πολλὰ τῆς ψυχῆς ἀναδιδούς, δῆλόν ἐστι. τὰς γὰρ ἐφ´ ἡδονὴν ὁρμὰς καὶ πρὸς πόνον ὑποψίας (οὐ θυραίους οὐδ´ ὑπὸ λόγων ἐπεισάκτους, ἀλλ´ ὥσπερ αὐτόχθονας οὔσας μυρίων παθῶν καὶ νοσημάτων πηγάς) ἂν ἐᾷ τις ἀφέτους πεφύκασι χωρεῖν καὶ μὴ λόγοις χρηστοῖς ἀφαιρῶν παρατρέπων καταρτύῃ τὴν φύσιν, οὐκ ἔστιν τῶν θηρίων οὐκ ἂν ἡμερώτερον ἀνθρώπου φανείη. [2] Mais de même que parmi ceux qui sont inscrits sur les registres civils, les uns, nés ailleurs et complétement étrangers, murmurent et se plaignent de presque tous les actes des magistrats, tandis que ceux qui sont nés dans le pays, qui y ont été élevés, qui y ont pris leurs habitudes, acceptent sans humeur les prescriptions de la loi pour ce qui les concerne et savent s'en accommoder; de même, lorsque longtemps on s'est trouvé nourri au sein de la philosophie, lorsque dès son jeune âge on a été habitué à ce que toute leçon d'enfance, tout enseignement que l'on recevait fussent mélangés d'une parole philosophique, on doit arriver à l'exercice de la philosophie elle-même avec un excellent vouloir et avec des dispositions parfaitement convenables. Or la philosophie seule, grâce à la raison, donne en réalité aux jeunes gens une parure virile et complète. Je pense donc que vous n'accueillerez pas sans intérêt ce qui concerne le sens de l'ouïe. C'est le plus efficace de tous, au dire de Théophraste, quand il s'agit d'émouvoir l'âme. Il n'y a en effet ni spectacle, ni saveur, ni contact qui produise des transports, des troubles, des ébranlements aussi considérables que ceux dont l'âme est saisie quand certains bruits, certains fracas, certains sons viennent frapper l'oreille. Or l'ouïe est appropriée à la raison plus encore qu'elle ne l'est à la passion. Bien des places, bien des parties de notre corps laissent à travers elles le vice pénétrer jusqu'à notre âme; mais la vertu ne peut s'emparer de celle-ci qu'au moyen des oreilles, et encore faut-il que dès le principe on les ait gardées pures, incorruptibles à la flatterie, inaccessibles aux mauvais discours. C'est pourquoi Xénocrate conseillait de mettre des « couvre-oreilles » aux enfants plutôt qu'aux athlètes, parce que ces derniers ne sont en danger d'avoir que les oreilles meurtries par les coups, tandis que c'est l'âme des jeunes gens qui est pervertie par les discours. Non pas qu'il voulût les empêcher de rien ouïr et les rendre sourds complétement, mais il recommandait ainsi de les mettre en garde contre les mauvaises doctrines jusqu'à l'époque où d'autres discours honnêtes, émanés de la philosophie, deviendraient des espèces de sentinelles et occuperaient, au profit de la saine morale, cette partie de nous-mêmes que le langage frappe et persuade d'une façon plus efficace. Bias l'ancien ayant reçu d'Amasis l'ordre de lui envoyer la pire et la meilleure partie de la chair d'une victime, en détacha la langue, et la lui adressa : il voulait lui faire entendre que la parole est ce qu'il y a de plus dangereux à la fois et de plus utile. D'ordinaire, lorsque nous embrassons les petits enfants, nous les prenons par les oreilles, et nous leur disons de nous saisir aussi par là, pour donner ainsi plaisamment à entendre qu'il faut aimer surtout ceux de qui on profite par les oreilles. En effet, le jeune homme que l'on a tenu écarté de toute audition, qui n'a goûté d'aucun discours, non seulement ne produira de lui-même ni fruit ni fleur de vertu, mais encore pourra tourner son âme au vice. Il en sera de cette âme comme d'un sol non remué, d'un sol laissé en friche, qui ne donne que des herbes sauvages. C'est là une conséquence évidente : car l'ardeur pour le plaisir et l'aversion du travail ne pénètrent pas en nous du dehors et ne nous sont pas inspirées par les discours, ce sont des sentiments innés, qui deviennent la source d'une infinité de passions et de maladies. Si donc à ces sentiments on laisse toute liberté de s'étendre là où ils ont germé, si de sages discours ne les font disparaître ou ne les détournent en corrigeant la nature, il n'est point de bête sauvage qui ne soit évidemment moins farouche que l'homme.


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Dernière mise à jour : 3/11/2005