[15] Δεῖ δὲ μηδὲ ταῖς φωναῖς τῶν ἐπαίνων ὡς
ἔτυχε χρῆσθαι. καὶ γὰρ Ἐπίκουρος ἐπὶ τοῖς τῶν
φίλων ἐπιστολίοις κροτοθορύβους γίγνεσθαι παρ´
αὐτῶν λέγων ἀηδής ἐστιν. οἱ δὲ τὰς ξένας φωνὰς
τοῖς ἀκροατηρίοις νῦν ἐπεισάγοντες οὗτοι, καὶ
"θείως" καὶ "θεοφορήτως" καὶ "ἀπροσίτως"
ἐπιλέγοντες, ὡς οὐκέτι τοῦ "καλῶς" καὶ τοῦ
"σοφῶς" καὶ τοῦ "ἀληθῶς" ἐξαρκοῦντος, οἷς οἱ
περὶ Πλάτωνα καὶ Σωκράτη καὶ Ὑπερείδην ἐχρῶντο
σημείοις τῶν ἐπαίνων, ὑπερασχημονοῦσι καὶ διαβάλλουσι
τοὺς λέγοντας ὡς ὑπερηφάνων τινῶν καὶ
περιττῶν δεομένους ἐπαίνων. σφόδρα δ´ ἀηδεῖς
εἰσι καὶ οἱ μεθ´ ὅρκου τοῖς λέγουσιν ὥσπερ ἐν δικαστηρίῳ
τὰς μαρτυρίας ἀποδιδόντες. οὐχ ἧττον δὲ
τούτων οἱ περὶ τὰς ποιότητας ἀστοχοῦντες, ὅταν
φιλοσόφῳ μὲν ἐπιφωνῶσι "δριμέως," γέροντι δ´
"εὐφυῶς" ἢ "ἀνθηρῶς," τὰς τῶν παιζόντων καὶ
πανηγυριζόντων ἐν ταῖς σχολαστικαῖς μελέταις
φωνὰς ἐπὶ τοὺς φιλοσόφους μετακομίζοντες καὶ
λόγῳ σωφρονοῦντι προσφέροντες ἔπαινον ἑταιρικόν,
ὥσπερ ἀθλητῇ κρίνων ἢ ῥόδων στέφανον, οὐ δάφνης
οὐδὲ κοτίνου περιτιθέντες. Εὐριπίδης μὲν οὖν ὁ
ποιητής, ὡς ὑπολέγοντος αὐτοῦ τοῖς χορευταῖς ᾠδήν
τινα πεποιημένην ἐφ´ ἁρμονίας εἷς ἐγέλασεν, "εἰ
μή τις ἦς ἀναίσθητος" εἶπε "καὶ ἀμαθής, οὐκ ἂν
ἐγέλασας ἐμοῦ μιξολυδιστὶ ᾄδοντος." ἀνὴρ δ´ ἂν
οἶμαι φιλόσοφος καὶ πολιτικὸς ἀκροατοῦ διακεχυμένου
τρυφὴν ἐκκόψειεν εἰπών "σύ μοι δοκεῖς
ἀνόητος εἶναι καὶ ἀνάγωγος· οὐ γὰρ ἂν ἐμοῦ διδάσκοντος
ἢ νουθετοῦντος ἢ διαλεγομένου περὶ θεῶν
ἢ πολιτείας ἢ ἀρχῆς ἐτερέτιζες καὶ προσωρχοῦ τοῖς
λόγοις." ὅρα γὰρ ἀληθῶς οἷόν ἐστι φιλοσόφου
λέγοντος ἀπορεῖν τοὺς ἔξωθεν ὑπὸ τῶν ἔνδον βοώντων
καὶ ἀλαλαζόντων πότερον αὐλοῦντος ἢ κιθαρίζοντος
ἢ ὀρχουμένου τινὸς ὁ ἔπαινός ἐστι.
| [15] II ne faut pas non plus se servir, en donnant des
éloges, des premiers termes venus. Quand Epicure vient, à
propos des billets tracés par ses amis, dire « qu'ils soulevaient
des tonnerres d'applaudissements », c'est là un propos
qui déplaît. Quelques-uns introduisent aujourd'hui dans
les réunions d'auditeurs des exclamations qui devraient y
être étrangères. « Divin ! » s'écrient-ils, « adorable ! incomparable ! »
Comme si ce n'était pas assez de dire : « Bien !
plein de goût ! très vrai ! » ainsi que l'on s'exprimait pour
louer les Platon, les Socrate, les Hypéride. C'est aller aux
dernières limites de l'inconvenance , c'est calomnier ceux
qui parlent, et laisser croire qu'il faille à leur orgueil des
louanges exagérées.
Des auditeurs bien désagréables encore sont ceux qui interpellent
les orateurs avec des formules de serment, et qui
procèdent, en exprimant leur témoignage, comme s'ils étaient
au tribunal. D'autres ne le sont pas moins, qui commettent
une confusion dénuée d'intelligence dans les diverses conditions
des orateurs. A celui qui procède par argumentation
philosophique ils crieront : « Voilà un mot piquant ! » à celui
qui est âgé :« Quelle grâce! » ou bien : « Quelle fraîcheur ! »
Des mots tels qu'on en laisse échapper dans des réunions
de plaisir sont par eux transportés au milieu d'exercices
scholastiques pour être appliqués à des philosophes. Ils
accueillent le langage de la sagesse avec des compliments
tels qu'on en ferait à des courtisanes : ce qui est la même
chose que si à un athlète ils offraient une couronne de lis,
de roses, au lieu d'une de laurier ou d'olivier sauvage. Le
poëte Euripide faisait répéter à des chœurs une pièce de
vers destinée à être chantée en musique, et quelqu'un se mit
à rire. « Si tu n'étais pas une stupide et ignorante créature,
lui dit Eschyle, tu ne rirais pas à propos d'un air composé
sur le mode mixolydien». Je crois qu'un philosophe, un
politique réprimerait l'insolence d'un auditeur évaporé en
lui disant : « Tu me parais dénué de sens et incapable de
suivre une direction : car autrement tu n'irais pas fredonner
et danser à mes paroles, quand je te tiens un langage moral
et instructif ou quand je parle des dieux ». Voyez, en vérité,
ce qui se passe lorsqu'un philosophe prononce un discours.
A entendre les cris, les exclamations que poussent les
auditeurs réunis dans l'enceinte, ceux du dehors sont fort
embarrassés pour reconnaître si c'est à un joueur de flûte,
à un joueur de lyre ou à un danseur que s'adressent les
applaudissements.
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