[960] (960a) ἡ γὰρ συνήθεια δεινὴ τοῖς κατὰ μικρὸν ἐνοικειουμένοις πάθεσι
πόρρω προαγαγεῖν τὸν ἄνθρωπον.
Ἀλλ' οὐκ οἶδ' ὅπως ἐν λόγοις γεγονότες λελήθαμεν οὔτε τῶν χθὲς ἡμῖν
γεγονότων οὔτε τῶν τάχα δὴ γενησομένων σήμερον ἀπηρτημένοις.
Ἀποφηνάμενοι γὰρ ἐχθές, ὡς οἶσθα, μετέχειν ἁμωσγέπως πάντα τὰ ζῷα
διανοίας καὶ λογισμοῦ παρέσχομεν οὐκ ἄμουσον οὐδ' ἄχαριν τοῖς θηρατικοῖς
νεανίσκοις περὶ συνέσεως θηρίων ἐνάλων τε καὶ πεζῶν ἅμιλλαν, ἣν σήμερον,
ὡς ἔοικε, βραβεύσομεν, ἄν γε δὴ ταῖς προκλήσεσιν οἱ περὶ Ἀριστότιμον καὶ
Φαίδιμον ἐμμείνωσιν· (960b) ἐκείνων γὰρ ὁ μὲν τῆς γῆς ὡς διαφέροντα τῷ
φρονεῖν ζῷα γεννώσης ἐπεδίδου τοῖς ἑταίροις συνήγορον ἑαυτόν, ὁ δὲ τῆς
θαλάττης.
(ΣΟΚΛΑΡΟΣ) Ἐμμένουσιν, ὦ Αὐτόβουλε, καὶ ὅσον οὔπω πάρεισι· συντασσομένους γὰρ
αὐτοὺς ἕωθεν ἑώρων. Ἀλλ' εἰ βούλει, πρὸ τοῦ ἀγῶνος ὅσα τοῖς ἐχθὲς λόγοις
προσήκοντα λεχθῆναι καιρὸν οὐκ ἔσχεν ἢ σὺν οἴνῳ καὶ παρὰ πότον οὐ μετὰ
σπουδῆς ἐλέχθη πρὸς αὑτοὺς ἀναλάβωμεν. Ἐδόκει γάρ τι πραγματικῶς οἷον
ἀντηχεῖν ἐκ τῆς Στοᾶς, ὡς τῷ θνητῷ τὸ ἀθάνατον ἀντίκειται καὶ τῷ φθαρτῷ τὸ
ἄφθαρτον καὶ σώματί γε τὸ ἀσώματον, οὕτως ὑπάρχοντι (960c) τῷ λογικῷ
χρῆναι τὸ ἄλογον ἀντικεῖσθαι καὶ ἀνθυπάρχειν καὶ μὴ μόνην ἐν τοσαῖσδε
συζυγίαις ἀτελῆ τήνδε λείπεσθαι καὶ πεπηρωμένην.
(ΑΥΤΟΒΥΛΕ) Τίς δ', ὦ φίλε Σώκλαρε, τοῦτ' ἠξίωσεν, ὄντος ἐν τοῖς πράγμασι τοῦ
λογικοῦ, μὴ εἶναι τὸ ἄλογον; πολὺ γάρ ἐστι καὶ ἄφθονον ἐν πᾶσι τοῖς ψυχῆς
ἀμοιροῦσι καὶ οὐδὲν ἑτέρας δεόμεθα πρὸς τὸ λογικὸν ἀντιθέσεως, ἀλλὰ πᾶν
εὐθὺς τὸ ἄψυχον ὡς ἄλογον καὶ ἀνόητον ἀντίκειται τῷ μετὰ ψυχῆς λόγον
ἔχοντι καὶ διάνοιαν. Εἰ δέ τις ἀξιοῖ μὴ κολοβὸν εἶναι τὴν φύσιν ἀλλὰ τὴν
ἔμψυχον φύσιν ἔχειν τὸ μὲν λογικὸν τὸ δ' ἄλογον, ἕτερος ἀξιώσει τὴν (960d)
ἔμψυχον φύσιν ἔχειν τὸ μὲν φανταστικὸν τὸ δ' ἀφαντασίωτον, καὶ τὸ μὲν
αἰσθητικὸν τὸ δ' ἀναίσθητον· ἵνα δὴ τὰς ἀντιζύγους ταύτας καὶ ἀντιθέτους
ἕξεις καὶ στερήσεις περὶ ταὐτὸν ἡ φύσις ἔχῃ γένος οἷον ἰσορροπούσας. Εἰ δ'
ἄτοπος ὁ ζητῶν τοῦ ἐμψύχου τὸ μὲν αἰσθητικὸν τὸ δ' ἀναίσθητον εἶναι, καὶ
τὸ μὲν φαντασιούμενον τὸ δ' ἀφαντασίωτον, ὅτι πᾶν τὸ ἔμψυχον αἰσθητικὸν
εὐθὺς εἶναι καὶ φανταστικὸν πέφυκεν, οὐδ' οὗτος ἐπιεικῶς ἀπαιτήσει τὸ μὲν
λογικὸν εἶναι τοῦ ἐμψύχου τὸ δ' ἄλογον, πρὸς ἀνθρώπους διαλεγόμενος μηδὲ
ἓν οἰομένους αἰσθήσεως μετέχειν ὃ μὴ καὶ συνέσεως, μηδ' εἶναι ζῷον ᾧ μὴ
δόξα τις καὶ λογισμὸς ὥσπερ αἴσθησις καὶ (960e) ὁρμὴ κατὰ φύσιν πάρεστιν.
Ἡ γὰρ φύσις, ἣν ἕνεκά του καὶ πρός τι πάντα ποιεῖν ὀρθῶς λέγουσιν, οὐκ ἐπὶ
ψιλῷ τῷ πάσχον τι αἰσθάνεσθαι τὸ ζῷον αἰσθητικὸν ἐποίησεν· ἀλλ' ὄντων μὲν
οἰκείων πρὸς αὐτὸ πολλῶν ὄντων δ' ἀλλοτρίων, οὐδ' ἀκαρὲς ἦν περιεῖναι μὴ
μαθόντι τὰ μὲν φυλάττεσθαι τοῖς δὲ συμφέρεσθαι. Τὴν μὲν οὖν γνῶσιν ἀμφοῖν
ὁμοίως ἡ αἴσθησις ἑκάστῳ παρέχει· τὰς δ' ἑπομένας τῇ αἰσθήσει τῶν μὲν
ὠφελίμων λήψεις καὶ διώξεις, διακρούσεις δὲ καὶ φυγὰς τῶν ὀλεθρίων καὶ
λυπηρῶν οὐδεμία μηχανὴ παρεῖναι τοῖς μὴ λογίζεσθαί τι καὶ (960f) κρίνειν
καὶ μνημονεύειν καὶ προσέχειν πεφυκόσιν· ἀλλ' ὧν ἂν ἀφέλῃς παντάπασι
προσδοκίαν μνήμην πρόθεσιν παρασκευὴν τὸ ἐλπίζειν τὸ δεδοικέναι τὸ
ἐπιθυμεῖν τὸ ἀσχάλλειν, οὔτ' ὀμμάτων ὄφελος οὐδὲν αὐτοῖς παρόντων οὔτ'
ὤτων· αἰσθήσεώς τε πάσης καὶ φαντασίας τὸ χρώμενον οὐκ ἐχούσης
ἀπηλλάχθαι βέλτιον ἢ πονεῖν καὶ λυπεῖσθαι καὶ ἀλγεῖν,
| [960] (9§0a) car l'habitude, formée peu à peu sur des affections légères,
nous mène insensiblement très loin.
Mais je ne sais comment nous nous sommes jetés dans une conversation qui
nous a fait oublier l'entretien d'hier, que nous devons continuer
aujourd'hui. Nous y convînmes, vous le savez, que tous les animaux ont une
certaine portion de raison ; et par là nous fournîmes à ceux de nos jeunes
gens qui aiment la chasse la matière d'une dispute aussi savante
qu'agréable, qui avait pour objet d'examiner si les animaux de terre sont
plus industrieux que ceux de mer. C'est la question qu'on doit décider
aujourd'hui, si toutefois Aristotime et Phédime veulent tenir l'engagement
qu'ils ont pris. (960b) Le premier a promis à ses compagnons de prouver
que les animaux terrestres étaient les plus intelligents, et l'autre s'est
engagé à plaider la cause des animaux aquatiques.
(SOCLARUS) Ils sont toujours dans les mêmes dispositions, Autobule, et ils
ne tarderont pas à se rendre ici pour cet effet ; je les ai vus s'y
préparer dès le matin. Mais en attendant que la dispute commence,
reprenons, si vous le voulez, un des articles qui devait être traité dans
la conférence d'hier, et qui ne le fut pas, soit parce que le temps nous
manqua, ou parce qu'on crut qu'il ne serait pas discuté assez sérieusement à table.
Un des convives avait jeté à la traverse une question assez intéressante, empruntée
de l'école du Portique. Ces philosophes disent que l'immortel étant opposé au mortel,
l'incorruptible au corruptible, l'incorporel au corporel, il faut aussi qu'il y ait un
irraisonnable (960c) opposé au raisonnable, afin que, dans un si grand
nombre de substances opposées deux à deux, ce couple de contraires ne soit
pas le seul défectueux et imparfait.
(AUTOBULE) Et qui voudrait nier, mon cher Soclarus, que la substance
raisonnable étant dans la nature, l'irraisonnable n'y soit aussi? Elle
existe, et en grand nombre, dans tous les êtres inanimés, et il ne faut
pas chercher d'autre contraire à la substance raisonnable ; car tout ce
qui est sans âme, n'ayant point de raison, est, par cela seul, le
contraire de tout ce qui, ayant une âme, a aussi la raison et
l'intelligence en partage. Si quelqu'un prétend qu'afin que la nature ne
soit pas défectueuse, il faut que toute substance douée d'une âme soit
raisonnable ou irraisonnable, un autre (980d) lui objectera avec fondement
que, entre les substances animées, les unes devront avoir de l'imagination
et du sentiment, et les autres en être privées, afin que dans chaque genre
la nature ait des habitudes et des privations opposées, et qu'elle soit
ainsi dans un équilibre parfait. Il serait absurde de vouloir que parmi
les êtres animés les uns soient sensibles, les autres insensibles, que les
uns aient de l'imagination, et que les autres n'en aient pas, puisque tout
être qui est animé a, par cela seul, et du sentiment et de l'imagination.
Il ne le serait pas moins de prétendre qu'entre ces êtres, les uns sont
raisonnables et que les autres ne le sont pas, surtout en parlant avec des
hommes qui croient que tout être qui a du sentiment a aussi de
l'intelligence, et qu'il n'est pas d'animal qui n'ait des opinions et des
raisonnements, comme il a (960e) de sa nature de la sensibilité et des
appétits. Car la nature, qui, comme les stoïciens eux-mêmes l'avouent, ne fait rien
que par une cause et pour une fin certaines, n'a pas créé l'animal sensible afin
qu'il fut simplement affecté de sensations. Mais comme il y a plusieurs
choses qui lui sont bonnes, et d'autres qui lui sont contraires, il ne
subsisterait pas un seul instant s'il n'était pas capable de rechercher
les unes et d'éviter les autres. Or, le sentiment donne également aux
animaux la connaissance des unes et des autres; mais le discernement, qui
est une suite de ce sentiment, leur fait désirer et poursuivre ce qui leur
est utile, repousser et fuir ce qui leur est nuisible et pernicieux. Ce
discernement ne peut se trouver dans des êtres qui n'ont pas la faculté de
raisonner, (960f) de juger, de se ressouvenir et de méditer. En leur ôtant
l'attente, la mémoire, la prévoyance, la disposition, l'espérance, la
crainte, le désir et la peine, vous leur rendez inutiles les yeux, les
oreilles, tous les autres sens naturels et toute imagination, puisqu'ils
n'ont pas le pouvoir d'en faire usage. Il vaudrait mieux qu'ils en fussent
privés que de souffrir le travail, la tristesse et la douleur,
|