[4,4,23] Δεῖ δὴ θέσθαι, ὡς τὸ αἰσθάνεσθαι τῶν αἰσθητῶν ἐστι τῇ ψυχῇ ἢ τῷ ζῴῳ ἀντίληψις τὴν προσοῦσαν τοῖς σώμασι ποιότητα συνιείσης καὶ τὰ εἴδη αὐτῶν ἀποματτομένης. Ἢ τοίνυν μόνη ἐφ´ ἑαυτῆς ἀντιλήψεται, ἢ μετ´ ἄλλου. Μόνη μὲν οὖν καὶ ἐφ´ ἑαυτῆς πῶς; Ἐφ´ ἑαυτῆς γὰρ τῶν ἐν αὐτῇ, καὶ μόνον νόησις· εἰ δὲ καὶ ἄλλων, δεῖ πρότερον καὶ ταῦτα ἐσχηκέναι ἤτοι ὁμοιωθεῖσαν ἢ τῷ ὁμοιωθέντι συνοῦσαν. Ὁμοιωθῆναι μὲν οὖν ἐφ´ ἑαυτῆς μένουσαν οὐχ οἷόν τε. Πῶς γὰρ ἂν ὁμοιωθείη σημεῖον γραμμῇ; Ἐπεὶ οὐδ´ ἡ νοητὴ τῇ αἰσθητῇ ἂν γραμμῇ ἐφαρμόσειεν, οὐδὲ τὸ νοητὸν πῦρ ἢ ἄνθρωπος τῷ αἰσθητῷ πυρὶ ἢ ἀνθρώπῳ. Ἐπεὶ οὐδ´ ἡ φύσις ἡ ποιοῦσα τὸν ἄνθρωπον τῷ γενομένῳ ἀνθρώπῳ εἰς ταὐτόν. Ἀλλὰ μόνη, κἂν εἰ οἷόν τε τῷ αἰσθητῷ ἐπιβάλλειν, τελευτήσει εἰς νοητοῦ σύνεσιν, ἐκφυγόντος τοῦ αἰσθητοῦ αὐτήν, οὐκ ἐχούσης ὅτῳ αὐτοῦ λάβοιτο. Ἐπεὶ καὶ τὸ ὁρατὸν ὅταν ψυχὴ πόρρωθεν ὁρᾷ, κἂν ὅτι μάλιστα εἶδος εἰς αὐτὴν ἥκῃ, ἀρχόμενον τὸ πρὸς αὐτὴν οἷον ἀμερὲς ὂν λήγει εἰς τὸ ὑποκείμενον χρῶμα καὶ σχῆμα, ὅσον ἐστὶν ἐκεῖ ὁρώσης. Οὐ τοίνυν δεῖ μόνα ταῦτα εἶναι, τὸ ἔξω καὶ τὴν ψυχήν· ἐπεὶ οὐδ´ ἂν πάθοι· ἀλλὰ δεῖ τὸ πεισόμενον τρίτον εἶναι, τοῦτο δέ ἐστι τὸ τὴν μορφὴν δεξόμενον. Συμπαθὲς ἄρα καὶ ὁμοιοπαθὲς δεῖ εἶναι καὶ ὕλης μιᾶς καὶ τὸ μὲν παθεῖν, τὸ δὲ γνῶναι, καὶ τοιοῦτον γενέσθαι τὸ πάθος, οἷον σῴζειν μέν τι τοῦ πεποιηκότος, μὴ μέντοι ταὐτὸν εἶναι, ἀλλὰ ἅτε μεταξὺ τοῦ πεποιηκότος καὶ ψυχῆς ὄν, τὸ πάθος ἔχειν μεταξὺ αἰσθητοῦ καὶ νοητοῦ κείμενον μέσον ἀνάλογον, συνάπτον πως τὰ ἄκρα ἀλλήλοις, δεκτικὸν ἅμα καὶ ἀπαγγελτικὸν ὑπάρχον, ἐπιτήδειον ὁμοιωθῆναι ἑκατέρῳ. Ὄργανον γὰρ ὂν γνώσεώς τινος οὔτε ταὐτὸν δεῖ τῷ γινώσκοντι εἶναι οὔτε τῷ γνωσθησομένῳ, ἐπιτήδειον δὲ ἑκατέρῳ ὁμοιωθῆναι, τῷ μὲν ἔξω διὰ τοῦ παθεῖν, τῷ δὲ εἴσω διὰ τοῦ τὸ πάθος αὐτοῦ εἶδος γενέσθαι. Εἰ δή τι νῦν ὑγιὲς λέγομεν, δι´ ὀργάνων δεῖ σωματικῶν τὰς αἰσθήσεις γίνεσθαι. Καὶ γὰρ τοῦτο ἀκόλουθον τῷ τὴν ψυχὴν πάντη σώματος ἔξω γενομένην μηδενὸς ἀντιλαμβάνεσθαι αἰσθητοῦ. Τὸ δὲ ὄργανον δεῖ ἢ πᾶν τὸ σῶμα, ἢ μέρος τι πρὸς ἔργον τι ἀφωρισμένον εἶναι, οἷον ἐπὶ ἁφῆς καὶ ὄψεως. Καὶ τὰ τεχνητὰ δὲ τῶν ὀργάνων ἴδοι τις ἂν μεταξὺ τῶν κρινόντων καὶ τῶν κρινομένων γινόμενα καὶ ἀπαγγέλλοντα τῷ κρίνοντι τὴν τῶν ὑποκειμένων ἰδιότητα· ὁ γὰρ κανὼν τῷ εὐθεῖ τῷ ἐν τῇ ψυχῇ καὶ τῷ ἐν τῷ ξύλῳ συναψάμενος ἐν τῷ μεταξὺ τεθεὶς τὸ κρίνειν τῷ τεχνίτῃ τὸ τεχνητὸν ἔδωκεν. Εἰ δὲ συνάπτειν δεῖ τὸ κριθησόμενον τῷ ὀργάνῳ, ἢ καὶ διά τινος μεταξὺ διεστηκότος πόρρω τοῦ αἰσθητοῦ, οἷον εἰ πόρρω τὸ πῦρ τῆς σαρκὸς τοῦ μεταξὺ μηδὲν παθόντος, ἢ οἷον εἰ κενόν τι εἴη μεταξὺ ὄψεως καὶ χρώματος, δυνατὸν ὁρᾶν τοῦ ὀργάνου τῇ δυνάμει παρόντος, ἑτέρου λόγου. Ἀλλ´ ὅτι ψυχῆς ἐν σώματι καὶ διὰ σώματος ἡ αἴσθησις, δῆλον.
| [4,4,23] Sentir les choses sensibles, c'est pour l'âme ou pour l'animal percevoir en saisissant les qualités inhérentes aux corps et en se représentant leurs formes. L'âme doit donc percevoir les choses sensibles ou seule ou avec le corps. Si l'âme est seule, comment y parviendra-t-elle ? Pure et isolée, elle ne peut que concevoir ce qu'elle a en elle-même, elle ne peut que penser. Pour qu'elle conçoive alors aussi des objets autres qu'elle-même, il faut qu'elle les ait saisis antérieurement, soit en leur devenant semblable, soit en se trouvant unie à quelque chose qui leur soit devenu semblable.
Il est impossible qu'en restant pure l'âme devienne semblable aux objets sensibles {par conséquent qu'elle les saisisse}. Comment en effet le point pourrait-il devenir semblable à la ligne? La ligne intelligible elle-même ne saurait devenir conforme à la ligne sensible, non plus que le feu intelligible au feu sensible, l'homme intelligible à l'homme sensible. La nature même qui engendre l'homme ne saurait être identique à l'homme engendré. L'âme isolée, pût-elle saisir les objets sensibles, finira par s'appliquer à l'intuition des objets intelligibles, parce que, n'ayant rien pour saisir les premiers, elle les laissera échapper. En effet, quand l'âme aperçoit de loin un objet visible, quoique ce soit la forme seule qui parvienne jusqu'à elle, cependant ce qui a commencé par être pour elle comme indivisible finit par constituer un sujet, soit couleur, soit figure, dont l'âme détermine la quantité.
Il ne suffit donc pas qu'il y ait l'âme et l'objet extérieur {pour que la sensation soit possible} : car il n'y aurait là rien qui pâtit; il doit y avoir un troisième terme qui pâtisse, c'est-à-dire qui reçoive la forme sensible; il faut que ce troisième terme partage la passion de l'objet extérieur, qu'il éprouve la même passion, qu'il soit de la même matière, et, d'un autre côté, que sa passion soit connue par un autre principe; il faut enfin que la passion garde quelque chose de l'objet qui la produit, sans lui être cependant identique. L'organe qui pâtit doit donc être d'une nature intermédiaire entre l'objet qui produit la passion et l'âme, entre le sensible et l'intelligible, et jouer ainsi le rôle de moyen terme entre deux extrêmes, recevant d'un côté, annonçant de l'autre, et devenant semblable également à tous les deux. Pour être l'instrument de la connaissance, l'organe doit n'être identique ni au sujet qui connaît, ni à l'objet qui est connu ; il doit devenir semblable à chacun d'eux, à l'objet extérieur parce qu'il pâtit, à l'âme qui connaît parce que la passion qu'il éprouve devient une forme. Pour parler exactement, les sensations ont lieu par les organes : c'est la conséquence du principe que nous avons avancé, savoir, que l'âme isolée du corps ne peut saisir rien de sensible. Quant à l'organe, il est ou le corps entier, ou une partie du corps destinée à remplir une fonction particulière; c'est ce qui a lieu pour le tact, par exemple, ou la vue. Il est également facile de voir que les instruments des artisans jouent le rôle d'intermédiaires entre l'esprit qui juge et l'objet qui est jugé, et qu'ils servent à reconnaître les propriétés des substances. La règle, étant également conforme à l'idée d'être droit qui est dans l'esprit et à la propriété d'être droit qui se trouve dans le bois, sert d'intermédiaire à l'esprit de l'artisan pour juger si le bois qu'il travaille est droit.
C'est une autre question que d'examiner s'il faut que l'objet perçu soit en contact avec l'organe, ou si la sensation peut avoir lieu loin de l'objet sensible au moyen d'un intermédiaire: c'est le cas où du feu, par exemple, se trouve placé loin de notre corps, sans que le milieu pâtisse en aucune façon ; c'est encore le cas où, un vide se trouvant servir de milieu entre l'œil et la couleur, on peut se demander s'il suffit, pour voir, de posséder la puissance propre à l'organe.
Nous venons d'ailleurs d'établir que la sensation n'appartient qu'à l'âme qui se trouve dans le corps et qu'elle suppose des organes.
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