HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Lucien, Le tyrannicide

Chapitres 13-15

  Chapitres 13-15

[13] οὐδὲ γὰρ ἐκεῖνο ἂν ἔχοις λέγειν, ὡς ἐγὼ μὲν ἁπλῶς αὐτὸ ἔπραξα, ἠκολούθησε δέ τι τέλος ἄλλως χρηστόν, ἐμοῦ μὴ θελήσαντος. τί γὰρ ἔτι ἐδεδίειν τοῦ ἰσχυροτέρου πεφονευμένου; τί δὲ κατέλιπον τὸ ξίφος ἐν τῇ σφαγῇ, εἰ μὴ πάντως τὸ ἐσόμενον αὐτὸ προεμαντευόμην; ἐκτὸς εἰ μὴ τοῦτο φής, ὡς οὐ τύραννος τεθνεὼς ἦν οὐδὲ ταύτην εἶχε τὴν προσηγορίαν, οὐδὲ δωρεὰς ἐπ´ αὐτῷ πολλάς, εἰ ἀποθάνοι, ἡδέως ἂν ὑμεῖς ἐδώκατε. ἀλλ´ οὐκ ἂν εἴποις. Εἶτα τοῦ τυράννου πεφονευμένου τῷ τὴν αἰτίαν παρασχόντι τῆς σφαγῆς οὐκ ἀποδώσεις τὴν δωρεάν; τῆς πολυπραγμοσύνης. μέλει δέ σοι, πῶς ἀπέθανεν, ἀπολαύοντι τῆς ἐλευθερίας, τὸν τὴν δημοκρατίαν ἀποδεδωκότα περιττότερόν τι προσαπαιτεῖς; "Καίτοι γε νόμος," ὡς φής, "τὸ κεφάλαιον ἐξετάζει τῶν πεπραγμένων, τὰ διὰ μέσου δὲ πάντα ἐᾷ καὶ οὐκέτι πολυπραγμονεῖ." τί γάρ; οὐχὶ καὶ ἐξελάσας τις τύραννον ἤδη τιμὴν ἔλαβεν τυραννοκτόνου; καὶ μάλα δικαίως· ἐλευθερίαν γὰρ κἀκεῖνος ἀντὶ δουλείας παρέσχηται. τὸ δ´ ὑπ´ ἐμοῦ γεγενημένον οὐ φυγὴ οὐδὲ δευτέρας ἐπαναστάσεως ἐλπίς, ἀλλὰ παντελὴς καθαίρεσις καὶ πανωλεθρία παντὸς τοῦ γένους καὶ ῥιζόθεν τὸ δεινὸν ἅπαν ἐκκεκομμένον. [13] Vous ne pouvez pas m’objecter davantage que ce que j’ai fait a été fait simplement, mais que ma volonté n’y était pour rien. Qu’avais-je à craindre, quand le plus terrible de nos deux tyrans n’existait plus ? Pourquoi ai-je laissé mon épée dans le corps de ma victime, si je ne prévoyais pas clairement ce qui devait arriver ? A moins que vous ne prétendiez que celui que j’ai tué n’était pas un tyran, qu’il n’avait jamais porté ce nom, et que vous n’entendiez nullement payer sa mort d’une ample récompense. Vous n’oseriez le soutenir. Eh bien, le tyran est mort, et vous refuseriez de récompenser celui qui a causé ce suicide ? Quelle intelligence des faits ! Que vous importe la façon dont il a péri, maintenant que vous jouissez de la liberté ? Qu’exigez-vous de celui qui rend au peuple le gouvernement démocratique ? La loi, vous en convenez vous-mêmes, n’examine que le fait principal : elle ne s’occupe point des circonstances indifférentes et ne prend pas tant de soins ! Quoi donc ! un citoyen qui aurait seulement chassé le tyran ne recevrait-il pas la récompense promise au tyrannicide ? On la lui accorderait, et ce serait justice, puisqu’il aurait remplacé la servitude par la liberté. Et moi, ce n’est pas à l’exil que j’ai contraint le tyran ; je n’ai pas laissé peser sur nous la crainte d’une restauration ; je l’ai détruit, j’ai anéanti sa race, j’ai coupé le mal dans sa racine.
[14] Καί μοι πρὸς θεῶν ἤδη ἀπ´ ἀρχῆς ἐς τέλος, εἰ δοκεῖ, πάντα ἐξετάσατε, εἴ τι τῶν πρὸς τὸν νόμον παραλέλειπται καὶ εἰ ἐνδεῖ τι τῶν προσεῖναι ὀφειλόντων τυραννοκτόνῳ. πρῶτα μὲν δὴ γνώμην προϋπάρχειν χρὴ γενναίαν καὶ φιλόπολιν καὶ πρὸ τῶν κοινῶν κινδυνεύειν ἐθέλουσαν καὶ τῷ οἰκείῳ θανάτῳ τὴν τῶν πολλῶν σωτηρίαν ὠνησομένην. ἆρ´ οὖν πρὸς τοῦτο ἐνεδέησα, ἐμαλακίσθην, προελόμενός τινα τῶν διὰ μέσου κινδύνων ἀπώκνησα; οὐκ ἂν εἴποις. μένε τοίνυν ἐπὶ τούτου ἔτι μόνου καὶ νόμιζε τοῦ θελῆσαι μόνον καὶ τοῦ βουλεύσασθαι ταῦτα, εἰ καὶ μὴ χρηστὸν ἀποβεβήκει, ἔκ γε τῆς γνώμης αὐτῆς καταστάντα με γέρας ἀξιοῦν ὡς εὐεργέτην λαμβάνειν. ἐμοῦ μὲν οὐ δυνηθέντος, ἄλλου δὲ μετ´ ἐμὲ τετυραννοκτονηκότος, ἄλογον, εἰπέ μοι, ἀγνῶμον ἦν παρασχεῖν; καὶ μάλιστα εἰ ἔλεγον, "Ἄνδρες, ἐβουλόμην, ἠθέλησα, ἐπεχείρησα, ἐπειράθην· τῆς γνώμης μόνης ἄξιός εἰμι τιμᾶσθαι," τί ἂν ἀπεκρίνω τότε; [14] Au nom des dieux, examinez, je vous prie, quelle a été ma conduite depuis le commencement jusqu’à la fin, et voyez si j’ai rien omis de ce qu’exige la loi, s’il me manque une seule des conditions exigées chez le meurtrier d’un tyran. Et d’abord, il fallait une âme courageuse, patriote, décidée à tout braver pour l’intérêt commun, prête à acheter, au prix même de la mort, le salut de tous. Ai-je manqué de coeur ? Ai-je molli ? La prévision des dangers que je pouvais courir m’a-t-elle fait hésiter au milieu de l’entreprise ? Vous n’oseriez le dire. Eh bien ! N’allez pas plus loin ; attachez-vous à ce point isolé ; et supposez que je n’ai fait que vouloir, que méditer ce dessein, sans qu’il en soit rien sorti d'utile. Cette volonté seule m'autoriserait encore à réclamer la récompense comme bienfaiteur de mon pays. Mais je n'ai pu exécuter ce dessein, c'est un autre, après moi, qui a immolé le tyran. Serait-il, cependant, déraisonnable, absurde, répondez-moi, de m'accorder la récompense, surtout si je venais vous dire : "Juges, j'ai conçu ce projet, j'ai voulu l'exécuter, j'ai essayé, j'ai donné des preuves de ma résolution, je suis seul digne de la récompense." Que répondriez-vous ?
[15] Νῦν δὲ οὐ τοῦτό φημι, ἀλλὰ καὶ ἀνῆλθον καὶ ἐκινδύνευσα καὶ μυρία πρὸ τῆς τοῦ νεανίσκου σφαγῆς ἐπόνησα· μὴ γὰρ οὕτω ῥᾷστον μηδὲ εὐχερὲς ὑπολάβητε εἶναι τὸ πρᾶγμα, φρουρὰν ὑπερβῆναι καὶ δορυφόρων κρατῆσαι καὶ τρέψασθαι τοσούτους μόνον, ἀλλὰ σχεδὸν τὸ μέγιστον ἐν τῇ τυραννοκτονίᾳ καὶ τὸ κεφάλαιον τῶν ἔργων τοῦτό ἐστιν. οὐ γὰρ δὴ αὐτός γε τύραννος μέγα καὶ δυσάλωτον καὶ δυσκατέργαστόν ἐστιν, ἀλλὰ τὰ φρουροῦντα καὶ συνέχοντα τὴν τυραννίδα, τις ἂν νικήσῃ, πάντα οὗτος κατώρθωσεν, καὶ τὸ λοιπὸν ὀλίγον. τὸ δὴ ἄχρι τῶν τυράννων προελθεῖν οὐκ ἂν ὑπῆρξέ μοι, μὴ οὐχὶ τῶν περὶ αὐτοὺς φυλάκων καὶ δορυφόρων ἁπάντων κεκρατηκότι κἀκείνους ἅπαντας προνενικηκότι. οὐδὲν ἔτι προστίθημι, ἀλλ´ ἐπὶ τούτων αὖθις μένω· φυλακῆς ἐκράτησα, δορυφόρους ἐνίκησα, τὸν τύραννον ἀφύλακτον, ἄνοπλον, γυμνὸν ἀπέδωκα. τιμῆς ἄξιος ἐπὶ τούτοις εἶναί σοι δοκῶ, ἔτι ἀπαιτεῖς παρ´ ἐμοῦ τὸν φόνον; [15] Maintenant, je tiens un autre langage : je suis monté à la citadelle, j'ai bravé tous les dangers, j'ai couronné mille exploits par la mort du jeune tyran. N'imaginez pas que ce soit une chose aisée, une entreprise facile, que de passer sur le corps des gardiens, de renverser les satellites, de mettre en fuite, tout seul, une foule de soldats. C'est justement là ce qu'il y a de plus difficile, de plus important dans un pareil meurtre. En effet, ce n'est pas le tyran lui-même qu'on a peine à saisir afin d'achever l’oeuvre, mais ceux qui gardent et défendent la tyrannie. Les vaincre, c'est tout ; et le reste n'est plus rien. Il m'eût donc été impossible de pénétrer jusqu'au tyran, si je n'eusse triomphé de sa garde et de ses nombreux doryphores, si je ne les eusse tous exterminés. Je n'ajoute rien ; je m'en tiens à ce point unique, et je répète : j'ai renversé la garde, vaincu les doryphores, j'ai privé le tyran de ses satellites, je l’'ai réduit à être nu, sans armes. Croyez-vous que, pour tout cela, je sois digne de récompense, on bien est-il nécessaire qu'en outre, j'aie versé du sang ?


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Dernière mise à jour : 27/05/2009