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[4] Ταῦτ´ ἐγὼ μὲν ἐπὶ πολὺ εἱστήκειν ὁρῶν καὶ
θαυμάζων καὶ ἀπορῶν καὶ ἀγανακτῶν· Κελτὸς
δέ τις παρεστὼς οὐκ ἀπαίδευτος τὰ ἡμέτερα, ὡς
ἔδειξεν ἀκριβῶς Ἑλλάδα φωνὴν ἀφιείς, φιλόσοφος,
οἶμαι, τὰ ἐπιχώρια, Ἐγώ σοι, ἔφη, ὦ ξένε, λύσω
τῆς γραφῆς τὸ αἴνιγμα· πάνυ γὰρ ταραττομένῳ
ἔοικας πρὸς αὐτήν. τὸν λόγον ἡμεῖς οἱ Κελτοὶ
οὐχ ὥσπερ ὑμεῖς οἱ Ἕλληνες Ἑρμῆν οἰόμεθα εἶναι,
ἀλλ´ Ἡρακλεῖ αὐτὸν εἰκάζομεν, ὅτι παρὰ πολὺ
τοῦ Ἑρμοῦ ἰσχυρότερος οὗτος. εἰ δὲ γέρων
πεποίηται, μὴ θαυμάσῃς· μόνος γὰρ ὁ λόγος ἐν
γήρᾳ φιλεῖ ἐντελῆ ἐπιδείκνυσθαι τὴν ἀκμήν, εἴ
γε ἀληθῆ ὑμῶν οἱ ποιηταὶ λέγουσιν, ὅτι αἱ μὲν
τῶν ὁπλοτέρων φρένες ἠερέθονται, τὸ δὲ γῆρας
ἔχει τι λέξαι τῶν νέων σοφώτερον. οὕτω γέ τοι
καὶ τοῦ Νέστορος ὑμῖν ἀπορρεῖ ἐκ τῆς γλώττης
τὸ μέλι, καὶ οἱ ἀγορηταὶ τῶν Τρώων τὴν ὄπα
ἀφιᾶσιν εὐανθῆ τινα· λείρια γὰρ καλεῖται, εἴ γε
μέμνημαι, τὰ ἄνθη.
| [4] Je demeurai longtemps devant cette image, la regardant
avec une admiration mêlée d'embarras et de colère. Un
Gaulois qui se trouvait alors près de moi, homme instruit
dans notre littérature, à en juger par la pureté avec laquelle
il parlait grec, et de plus versé, je crois, dans une
connaissance profonde des arts de son pays : "Etranger,
me dit-il, je vais vous expliquer l'énigme de cette image qui
semble si fort vous troubler. Nous autres Gaulois, nous ne
pensons pas comme vous Grecs, que Mercure soit le dieu
de l’éloquence. Nous l'attribuons à Hercule, qui l'emporte
sur Mercure par la supériorité de ses forces. Si nous le
représentons sous la forme d'un vieillard, n'en soyez pas
surpris. Ce n'est que dans un âge avancé que le talent de la
parole se montre avec le plus d'éclat et de maturité, si
toutefois vos poètes disent vrai :
"La jeunesse, en sa fougue, est toujours incertaine".
"Le vieillard est plus froid, plus sage en ses discours".
La même raison vous fait dire de Nestor que le miel coulait
de ses lèvres et que les orateurs de Troie faisaient entendre
une voix de lis, pour dire fleur, car si je ne me trompe, chez
vous lis signifie une espèce de fleur.
| [5] ὥστε εἰ τῶν ὤτων ἐκδεδεμένους
τοὺς ἀνθρώπους πρὸς τὴν γλῶτταν ὁ γέρων
οὗτος Ἡρακλῆς ἕλκει, μηδὲ τοῦτο θαυμάσῃς εἰδὼς
τὴν ὤτων καὶ γλώττης συγγένειαν· οὐδ´ ὕβρις εἰς
αὐτόν, εἰ ταύτῃ τετρύπηται· μέμνημαι γοῦν, ἔφη,
καὶ κωμικῶν τινων ἰαμβείων παρ´ ὑμῶν μαθών,
τοῖς γὰρ λάλοις ἐξ ἄκρου ἡ γλῶττα πᾶσίν ἐστι
τετρυπημένη.
| [5] Ne soyez pas surpris non plus de ce qu'Hercule,
emblème de l'éloquence, conduit avec sa langue des
hommes enchaînés par les oreilles. Vous savez la parenté
qui existe entre les oreilles et la langue. Ce n'est pas pour
insulter au dieu qu'on les lui a percées. Je me rappelle, en
effet, qu'un de vos poètes comiques a dit dans ses ïambes :
"Le bavard a toujours la langue au bout percée".
| [6] τὸ δ´ ὅλον καὶ αὐτὸν ἡμεῖς
τὸν Ἡρακλέα λόγῳ τὰ πάντα ἡγούμεθα ἐξεργάσασθαι
σοφὸν γενόμενον, καὶ πειθοῖ τὰ πλεῖστα βιάσασθαι.
καὶ τά γε βέλη αὐτοῦ οἱ λόγοι εἰσίν, οἶμαι, ὀξεῖς
καὶ εὔστοχοι καὶ ταχεῖς καὶ τὰς ψυχὰς τιτρώσκοντες·
πτερόεντα γοῦν τὰ ἔπη καὶ ὑμεῖς φατε εἶναι.
| [6] Enfin nous croyons que c'est par la force de son
éloquence qu'Hercule a accompli ses exploits. C'était un
sage qui faisait violence par la puissance de sa parole. Les
traits que vous lui voyez sont ses discours, qui pénètrent,
volent droit au but, et blessent les âmes. Ne dites-vous pas
vous-mêmes des "paroles ailées ?"
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