HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Isocrate, Éloge d'Évagoras (texte complet)

Paragraphes 70-79

  Paragraphes 70-79

[70] Ὥστ' εἴ τινες τῶν προγεγενημένων δι' ἀρετὴν ἀθάνατοι γεγόνασιν, οἶμαι κἀκεῖνον ἠξιῶσθαι ταύτης τῆς δωρεᾶς, σημείοις χρώμενος ὅτι καὶ τὸν ἐνθάδε χρόνον εὐτυχέστερον καὶ θεοφιλέστερον ἐκείνων διαβεβίωκεν. Τῶν μὲν γὰρ ἡμιθέων τοὺς πλείστους καὶ τοὺς ὀνομαστοτάτους εὑρήσομεν ταῖς μεγίσταις συμφοραῖς περιπεσόντας, Εὐαγόρας δ' οὐ μόνον θαυμαστότατος ἀλλὰ καὶ μακαριστότατος ἐξ ἀρχῆς ὢν διετέλεσεν. (71) Τί γὰρ ἀπέλιπεν εὐδαιμονίας, ὃς τοιούτων μὲν προγόνων ἔτυχεν οἵων οὐδεὶς ἄλλος, πλὴν εἴ τις ἀπὸ τῶν αὐτῶν ἐκείνῳ γέγονεν, τοσοῦτον δὲ καὶ τῷ σώματι καὶ τῇ γνώμῃ τῶν ἄλλων διήνεγκεν ὥστε μὴ μόνον Σαλαμῖνος ἀλλὰ καὶ τῆς Ἀσίας ἁπάσης ἄξιος εἶναι τυραννεῖν, κάλλιστα δὲ κτησάμενος τὴν βασιλείαν ἐν ταύτῃ τὸν βίον διετέλεσε, θνητὸς δὲ γενόμενος ἀθάνατον τὴν περὶ αὑτοῦ μνήμην κατέλιπε, τοσοῦτον δ' ἐβίω χρόνον ὥστε μήτε τοῦ γήρως ἄμοιρος γενέσθαι μήτε τῶν νόσων μετασχεῖν τῶν διὰ ταύτην τὴν ἡλικίαν γιγνομένων. (72) Πρὸς δὲ τούτοις, δοκεῖ σπανιώτατον εἶναι καὶ χαλεπώτατον, εὐπαιδίας τυχεῖν ἅμα καὶ πολυπαιδίας, οὐδὲ τούτου διήμαρτεν, ἀλλὰ καὶ τοῦτ' αὐτῷ συνέπεσεν. Καὶ τὸ μέγιστον, ὅτι τῶν ἐξ αὑτοῦ γεγονότων οὐδένα κατέλιπεν ἰδιωτικοῖς ὀνόμασι προσαγορευόμενον, ἀλλὰ τὸν μὲν βασιλέα καλούμενον, τοὺς δ' ἄνακτας, τὰς δ' ἀνάσσας. Ὥστ' εἴ τινες τῶν ποιητῶν περί τινος τῶν προγεγενημένων ὑπερβολαῖς κέχρηνται, λέγοντες ὡς ἦν θεὸς ἐν ἀνθρώποις δαίμων θνητός, ἅπαντα τὰ τοιαῦτα περὶ τὴν ἐκείνου φύσιν ῥηθῆναι μάλιστ' ἂν ἁρμόσειεν. (73) Τῶν μὲν οὖν εἰς Εὐαγόραν πολλὰ μὲν οἶμαι παραλιπεῖν· ὑστερίζω γὰρ τῆς ἀκμῆς τῆς ἐμαυτοῦ, μεθ' ἧς ἀκριβέστερον καὶ φιλοπονώτερον ἐξειργασάμην ἂν τὸν ἔπαινον τοῦτον· οὐ μὴν ἀλλὰ καὶ νῦν, ὅσον κατὰ τὴν ἐμὴν δύναμιν, οὐκ ἀνεγκωμίαστός ἐστιν. Ἐγὼ δ', Νικόκλεις, ἡγοῦμαι καλὰ μὲν εἶναι μνημεῖα καὶ τὰς τῶν σωμάτων εἰκόνας, πολὺ μέντοι πλείονος ἀξίας τὰς τῶν πράξεων καὶ τῆς διανοίας, ἃς ἐν τοῖς λόγοις ἄν τις μόνον τοῖς τεχνικῶς ἔχουσι θεωρήσειεν. (74) Προκρίνω δὲ ταύτας πρῶτον μὲν εἰδὼς τοὺς καλοὺς κἀγαθοὺς τῶν ἀνδρῶν οὐχ οὕτως ἐπὶ τῷ κάλλει τοῦ σώματος σεμνυνομένους ὡς ἐπὶ τοῖς ἔργοις καὶ τῇ γνώμῃ φιλοτιμουμένους· ἔπειθ' ὅτι τοὺς μὲν τύπους ἀναγκαῖον παρὰ τούτοις εἶναι μόνοις, παρ' οἷς ἂν σταθῶσι, τοὺς δὲ λόγους ἐξενεχθῆναί θ' οἷόν τ' ἐστὶν εἰς τὴν Ἑλλάδα καί, διαδοθέντας ἐν ταῖς τῶν εὖ φρονούντων διατριβαῖς, ἀγαπᾶσθαι παρ' οἷς κρεῖττόν ἐστιν παρὰ τοῖς ἄλλοις ἅπασιν εὐδοκιμεῖν· (75) πρὸς δὲ τούτοις ὅτι τοῖς μὲν πεπλασμένοις καὶ τοῖς γεγραμμένοις οὐδεὶς ἂν τὴν τοῦ σώματος φύσιν ὁμοιώσειε, τοὺς δὲ τρόπους τοὺς ἀλλήλων καὶ τὰς διανοίας τὰς ἐν τοῖς λεγομένοις ἐνούσας ῥᾴδιόν ἐστι μιμεῖσθαι τοῖς μὴ ῥᾳθυμεῖν αἱρουμένοις, ἀλλὰ χρηστοῖς εἶναι βουλομένοις. (76) Ὧν ἕνεκα καὶ μᾶλλον ἐπεχείρησα γράφειν τὸν λόγον τοῦτον, ἡγούμενος καὶ σοὶ καὶ τοῖς σοῖς παισὶ καὶ τοῖς ἄλλοις τοῖς ἀπ' Εὐαγόρου γεγονόσι πολὺ καλλίστην ἂν γενέσθαι ταύτην παράκλησιν, εἴ τις ἀθροίσας τὰς ἀρετὰς τὰς ἐκείνου καὶ τῷ λόγῳ κοσμήσας παραδοίη θεωρεῖν ὑμῖν καὶ συνδιατρίβειν αὐταῖς. (77) Τοὺς μὲν γὰρ ἄλλους προτρέπομεν ἐπὶ τὴν φιλοσοφίαν ἑτέρους ἐπαινοῦντες, ἵνα ζηλοῦντες τοὺς εὐλογουμένους τῶν αὐτῶν ἐκείνοις ἐπιτηδευμάτων ἐπιθυμῶσιν, ἐγὼ δὲ σὲ καὶ τοὺς σοὺς οὐκ ἀλλοτρίοις παραδείγμασι χρώμενος ἀλλ' οἰκείοις παρακαλῶ, καὶ συμβουλεύω προσέχειν τὸν νοῦν, ὅπως καὶ λέγειν καὶ πράττειν μηδενὸς ἧττον δυνήσει τῶν Ἑλλήνων. (78) Καὶ μὴ νόμιζέ με καταγιγνώσκειν, ὡς νῦν ἀμελεῖς, ὅτι πολλάκις σοι διακελεύομαι περὶ τῶν αὐτῶν. Οὐ γὰρ οὔτ' ἐμὲ λέληθας οὔτε τοὺς ἄλλους ὅτι καὶ πρῶτος καὶ μόνος τῶν ἐν τυραννίδι καὶ πλούτῳ καὶ τρυφαῖς ὄντων φιλοσοφεῖν καὶ πονεῖν ἐπικεχείρηκας, οὐδ' ὅτι πολλοὺς τῶν βασιλέων ποιήσεις ζηλώσαντας τὴν σὴν παίδευσιν τούτων τῶν διατριβῶν ἐπιθυμεῖν, ἀφεμένους ἐφ' οἷς νῦν λίαν χαίρουσιν. (79) Ἀλλ' ὅμως ἐγὼ ταῦτ' εἰδὼς οὐδὲν ἧττον καὶ ποιῶ καὶ ποιήσω ταὐτὸν ὅπερ ἐν τοῖς γυμνικοῖς ἀγῶσιν οἱ θεαταί· καὶ γὰρ ἐκεῖνοι παρακελεύονται τῶν δρομέων οὐ τοῖς ἀπολελειμμένοις ἀλλὰ τοῖς περὶ τῆς νίκης ἁμιλλωμένοις. [70] 27. Par conséquent, si, dans les temps anciens, quelques hommes sont devenus immortels à cause de leur vertu, je crois qu'Évagoras a été jugé digne du même honneur, et j'en ai pour preuve que, tout le temps qu'il a passé sur la terre, il a été plus heureux et plus favorisé des dieux qu'il ne leur avait été donné de l'être. Nous trouverons en effet que la plupart des demi-dieux, et même les plus célèbres, ont éprouvé les plus cruelles infortunes, tandis qu'Évagoras a été, depuis le commencement et dans tout le cours de sa vie, le plus admiré des mortels et le plus heureux à la fois. (71) 28. Qu'a-t-il manqué à son bonheur? Ses ancêtres lui avaient transmis une si grande illustration que personne ne pouvait la partager, à moins d'être sorti de la même origine. Il était tellement supérieur aux autres hommes par les qualités du corps et de l'esprit, qu'il eût été digne de régner, non seulement sur Salamine, mais sur l'Asie tout entière ; il avait acquis la couronne de la manière la plus glorieuse, et il l'a conservée toute sa vie. Né mortel, il a laissé de son nom un souvenir immortel ; il a vécu assez, de temps pour connaître la vieillesse, mais il n'a pas connu les infirmités qui, chez les autres hommes, accompagnent un âge avancé. (72) Enfin le bonheur le plus rare, celui que l'on considère comme le plus difficile à obtenir, le bonheur d'avoir une postérité à la fois nombreuse et digne de son auteur, ne lui a pas été refusé, car il l'a possédé dans toute sa plénitude. Mais, ce qui est surtout remarquable, il n'a pas laissé un seul de ceux qui étaient nés de lui qui fût salué uniquement de son nom, comme un simple particulier : mais l'un avait le titre de roi, les autres celui de princes ; ses filles, celui de princesses. Si donc quelques poètes ont cru pouvoir se servir de l'hyperbole, en disant d'un personnage de l'antiquité qu'il était un dieu chez les hommes, une divinité mortelle, les mêmes titres d'honneur, employés pour Évagoras, seraient en parfaite harmonie avec sa noble nature. (73) 29. Parmi les actions d'Évagoras, il en est sans doute un grand nombre que je passe sous silence; mais je n'ai plus cette vigueur de la jeunesse, qui m'eût permis autrefois de consacrer à son éloge plus de soins et de travail. Quoiqu'il en soit, même aujourd'hui, autant que mes forces me l'ont permis, Évagoras n'est pas demeuré sans louanges. 30. Je crois, Nicoclès, que les statues qui rappellent les formes du corps sont des monuments honorables; mais j'attache beaucoup plus de prix aux images des actions et des pensées, que présentent seuls des discours composés avec art. (74) Je les préfère, d'abord, parce que les hommes distingués s'enorgueillissent bien moins de la beauté de leur corps qu'ils ne se glorifient de leurs actions et de la sagesse qui y préside; en second lieu, parce que les images matérielles restent nécessairement entre les mains de ceux chez lesquels elles ont été placées, tandis que les discours peuvent être transportés dans toute la Grèce, et charmer les réunions des hommes érudits dont le suffrage est préférable à celui de tous les autres, (75) et, de plus, parce que personne ne peut modeler son corps sur les statues et les images, tandis qu'il est facile pour ceux qui ne veulent pas s'abandonner à la mollesse, mais qui veulent devenir des citoyens utiles, d'imiter les mœurs honnêtes, comme aussi de s'approprier les pensées renfermées dans un discours. (76) 31. Pour moi, j'ai surtout entrepris de composer cet éloge, dans la conviction que le plus noble de tous les encouragements vous serait offert, à vous, à vos enfants et à tous ceux qui sont nés d'Évagoras, si ses vertus, réunies comme dans un tableau, et parées des charmes de l'éloquence, vous étaient offertes de manière qu'il vous fût possible de les contempler et de vivre, pour ainsi dire, au milieu d'elles. (77) Nous excitons ordinairement les hommes à la vertu par les éloges que nous donnons à ceux qui en observent les règles, afin que, rivalisant avec les hommes dont ils entendent célébrer les louanges, ils se sentent enflammés du désir de les imiter; mais, pour vous et pour les vôtres, ce n'est point en invoquant des exemples étrangers, c'est en m'appuyant sur des exemples tirés de votre propre famille, que je vous engage et vous exhorte à employer toutes les ressources de votre esprit afin de ne rester inférieur à aucun des Grecs, soit pour parler, soit pour agir. (78) 32. Et ne croyez pas que je vous accuse de vous abandonner à l'indolence, parce que je reviens plusieurs fois sur les mêmes exhortations. Il n'a échappé, ni à moi, ni à personne, que, le premier et le seul, entre tous ceux qui vivent au sein du pouvoir, de la richesse et des délices, vous avez, entrepris de vous livrer à la philosophie et à l'étude ; et que vous avez été la cause qu'un grand nombre de rois, jaloux de votre science, éprouvant le désir de se livrer aux mêmes travaux, renonçant ainsi aux habitudes qui ont aujourd'hui tant de charme pour eux. (79) Cependant, quoique instruit de ces circonstances, je fais et je continuerai de faire comme les spectateurs des jeux gymniques, qui, parmi ceux qui disputent le prix de la vitesse, encouragent de la voix, non ceux qui demeurent en arrière, mais ceux qui luttent déjà pour saisir la victoire.


Recherches | Texte | Lecture | Liste du vocabulaire | Index inverse | Menu | Site de Philippe Remacle |

 
UCL | FLTR | Hodoi Elektronikai | Itinera Electronica | Bibliotheca Classica Selecta (BCS) |
Ingénierie Technologies de l'Information : B. Maroutaeff - C. Ruell - J. Schumacher

Dernière mise à jour : 2/10/2008