[3,2] ὁ δὲ Σεβῆρος ὡς ἔνι μάλιστα σὺν τῇ στρατιᾷ ἠπείγετο, μηδὲν ῥᾳθυμίᾳ
μηδ´ ἀναπαύλῃ νέμων. μαθὼν δὲ τὸ Βυζάντιον προκατειλημμένον,
καὶ εἰδὼς ὀχυρώτατα τετειχισμένον, ἐπὶ
Κύζικον τὸν στρατὸν ἐκέλευσε διαβαίνειν. ὁ δὲ τῆς
Ἀσίας ἡγούμενος Αἰμιλιανός, ᾧ τὴν πρόνοιαν καὶ στρατηγίαν ὁ Νίγρος
ἐγκεχειρίκει, μαθὼν ἐπιόντα τὸν τοῦ
Σεβήρου στρατὸν τὴν ἐπὶ Κύζικον καὶ αὐτὸς ἐτράπετο,
ἄγων τὴν στρατιὰν πᾶσαν, ἣν αὐτὸς συνείλεκτο καὶ ἣν
ὁ Νίγρος ἐπεπόμφει. ὡς δὲ συνέβαλεν ἑκατέρωθεν τὰ
στρατεύματα, μάχαι καρτεραὶ γίνονται κατ´ ἐκεῖνα τὰ
χωρία, καὶ κρατεῖ τὸ Σεβήρου στράτευμα, φυγή τε καὶ
τροπὴ καὶ φόνος πολὺς τῶν τοῦ Νίγρου στρατιωτῶν
γίνεται, ὡς τῶν μὲν ἀνατολικῶν εὐθέως θραῦσαι τὴν
ἐλπίδα, τῶν δὲ Ἰλλυριῶν ἐπιρρῶσαι.
φασὶ δέ τινες προδοθέντα τὰ τοῦ Νίγρου πράγματα
ὑπὸ Αἰμιλιανοῦ εὐθέως ἐν ἀρχῇ διαφθαρῆναι. διττὴν
δὲ λέγουσι τῆς τοιαύτης προαιρέσεως τοῦ Αἰμιλιανοῦ
τὴν αἰτίαν· οἳ μὲν γὰρ φθονοῦντα τῷ Νίγρῳ ἐπιβουλεῦσαι,
ἀγανακτοῦντα ὅτι δὴ διάδοχος αὐτοῦ γενόμενος
τῆς ἐν Συρίᾳ ἀρχῆς ἔμελλεν ἔσεσθαι κρείττων ἅτε βασιλεὺς καὶ δεσπότης,
οἳ δέ φασιν αὐτὸν ἀναπεισθῆναι ὑπὸ
τῶν παίδων ἐπιστειλάντων καὶ δεηθέντων ὑπὲρ τῆς ἑαυτῶν σωτηρίας, οὓς ἐν τῇ
Ῥώμῃ εὑρὼν ὁ Σεβῆρος συλλαβὼν εἶχεν ἐν φρουρᾷ. ἐχρήσατο γὰρ καὶ τούτῳ
σοφίσματι προμηθεστάτῳ. ἔθος ἦν τῷ Κομμόδῳ κατέχειν
τοὺς παῖδας τῶν ἐς τὰ ἔθνη πεμπομένων ἡγεμόνων, ὡς
ἔχοι ὅμηρα τῆς τε εὐνοίας αὐτῶν καὶ τῆς πίστεως. εἰδὼς
τοίνυν τοῦτο ὁ Σεβῆρος, ἅμα τῷ βασιλεὺς ἀναδειχθῆναι,
καὶ τοῦ Ἰουλιανοῦ ἔτι περιόντος, πέμψας λάθρᾳ διὰ
φροντίδος ἔσχε τοὺς παῖδας αὑτῷ τῆς Ῥώμης ἐκκλαπέντας
μὴ εἶναι ἐν ἑτέρου ἐξουσίᾳ. αὐτὸς δ´ ἅμα τῷ τῆς
Ῥώμης ἐπιβῆναι συλλαβὼν πάντας τοὺς τῶν ἡγεμόνων
ἢ τῶν ὁτιδὴ πραττόντων κατὰ τὴν ἀνατολὴν καὶ πᾶσαν
τὴν Ἀσίαν, φρουρᾷ δοὺς εἶχε σὺν αὑτῷ, ὅπως ἢ πόθῳ
τῆς τῶν παίδων σωτηρίας οἱ ἡγεμόνες τὰ Νίγρου προδιδοῖεν, ἢ μένοντες ἐπὶ τῆς
πρὸς ἐκεῖνον εὐνοίας φθάσωσί τι κακὸν παθεῖν διὰ τῆς τῶν παίδων ἀναιρέσεως
ἢ δράσωσιν αὐτοί. γενομένης δὲ τῆς ἥττης κατὰ τὴν Κύζικον ἔφευγον οἱ
τοῦ Νίγρου, ὡς ἕκαστος ἐδύνατο σπεύδοντες, οἳ μὲν
παρὰ τὰς ὑπωρείας τῆς Ἀρμενίας, οἳ δὲ τὴν ἐπὶ Γαλατίας
τε καὶ Ἀσίας, φθάσαι θέλοντες τὸν Ταῦρον ὑπερβῆναι,
ὡς ἐντὸς τοῦ ἐρύματος γένοιντο. ὁ δὲ τοῦ Σεβήρου
στρατὸς περαιωθεὶς διὰ τῆς Κυζικηνῆς χώρας διαβάς τε
ἐπὶ τὴν Βιθυνίαν ὅμορον οὖσαν ἠπείγετο.
ὡς δὲ διέδραμεν ἡ φήμη τῆς Σεβήρου νίκης, εὐθὺς
ἐν πᾶσι τοῖς ἔθνεσιν ἐκείνοις στάσις καὶ διάφορος γνώμη ἐνέπεσε ταῖς πόλεσιν,
οὐχ οὕτως τῇ πρὸς τοὺς πολεμοῦντας βασιλέας ἀπεχθεία τινὶ ἢ εὐνοίᾳ ὡς ζήλῳ
καὶ ἔριδι τῇ πρὸς ἀλλήλας φθόνῳ τε καὶ καθαιρέσει τῶν
ὁμοφύλων. ἀρχαῖον τοῦτο πάθος Ἑλλήνων, οἳ πρὸς ἀλλήλους στασιάζοντες ἀεὶ
καὶ τοὺς ὑπερέχειν δοκοῦντας
καθαιρεῖν θέλοντες ἐτρύχωσαν τὴν Ἑλλάδα. ἀλλὰ τὰ
μὲν ἐκείνων γηράσαντα καὶ περὶ ἀλλήλοις συντριβέντα
Μακεδόσιν εὐάλωτα καὶ Ῥωμαίοις δοῦλα γεγένηται· τὸ
δὲ πάθος τοῦτο τοῦ ζήλου καὶ φθόνου μετῆλθεν ἐς τὰς
καθ´ ἡμᾶς ἀκμαζούσας πόλεις. κατὰ μὲν οὖν τὴν Βιθυνίαν εὐθὺς μετὰ τὰ ἐν
Κυζίκῳ Νικομηδεῖς μὲν Σεβήρῳ
προσέθεντο καὶ πρέσβεις ἔπεμπον, τήν τε στρατιὰν ὑποδεχόμενοι καὶ πάντα
παρέξειν ὑπισχνούμενοι, Νικαεῖς
δὲ τῷ πρὸς Νικομηδέας μίσει τἀναντία ἐφρόνουν καὶ
τὸν στρατὸν τοῦ Νίγρου ὑπεδέχοντο, εἴ τέ τινες ἐκ τῶν
φυγόντων κατέφευγον πρὸς αὐτούς, καὶ τοὺς πεμφθέντας ὑπὸ τοῦ Νίγρου
φρουρεῖν Βιθυνίαν. ἑκατέρωθεν
οὖν ἐκ τῶν πόλεων ὡς ἀπὸ στρατοπέδων ὁρμώμενοι συνέβαλον ἀλλήλοις, καὶ
μάχης καρτερᾶς γενομένης πολὺ
περιεγένοντο οἱ τοῦ Σεβήρου. φυγόντες δὲ οἱ τοῦ Νίγρου κἀκεῖθεν, ὅσοι
περιελείφθησαν, ἐπὶ τὰ στενὰ τοῦ
Ταύρου ἠπείγοντο, ἀποκλείσαντές τε τὸ ἔρυμα ἐφύλαττον.
ὁ δὲ Νίγρος φρουρὰν καταλιπὼν τοῦ ἐρύματος, ὡς
ᾤετο, αὐτάρκη, ἐς τὴν Ἀντιόχειαν ἠπείγετο, στρατὸν ἀθροίζων καὶ χρήματα.
| [3,2] III. Sévère cependant faisait avec son armée la plus grande diligence,
marchant sans relâche et ne prenant aucun repos. Ayant appris qu'une
garnison occupait Byzance, et connaissant la force de cette ville, il
dirigea son armée vers Cyzique. A la nouvelle de son approche, Émilien,
qui commandait en Asie et à qui Niger avait confié le soin et la conduite
de toute la guerre, marcha lui-même vers Cyzique avec toutes les forces
qu'il avait pu réunir, et celles que lui avait envoyées Niger. On en vint
aux mains; des combats sanglants se livrèrent de ce côté, et enfin la
victoire resta aux troupes de Sévère; celles de Niger furent mises en
fuite et dans une déroute complète. Cet événement fit perdre l'espoir à
l'armée d'Orient et redoubla celui des Illyriens.
IV. On crut même qu'Émilien avait résolu d'avance de trahir la cause de
Niger ; on donnait deux motifs à cette résolution : les uns pensaient que
la jalousie seule l'y avait déterminé, et qu'il ne voulait point souffrir
qu'un homme qui venait de lui succéder dans le gouvernement de la Syrie,
s'élevant tout à coup au-dessus de lui, devint son empereur et son maître;
d'autres prétendaient qu'il avait cédé aux instances de ses enfants, qui,
trouvés à Rome et emprisonnés par Sévère, avaient écrit à leur père pour
le supplier de songer à leur salut. Sévère avait agi en cette occasion
avec beaucoup d'adresse et de prudence. Il savait que Commode avait
l'habitude de garder auprès de lui les enfants de ceux qu'il faisait
partir pour le gouvernement des provinces : il les conservait comme des
otages qui l'assuraient de la fidélité et des bonnes intentions de leurs
pères. Aussi Sévère s'était-il empressé, lorsqu'il fut proclamé par les
soldats empereur, du vivant de Julien, d'envoyer secrètement à Rome des
émissaires chargés d'en faire sortir ses enfants, pour qu'ils ne
tombassent pas au pouvoir de son compétiteur. Lorsqu'il arriva lui-même
dans la capitale, ses premiers soins furent d'arrêter les enfants de tous
les généraux et de tous ceux qui remplissaient quelque poste important
dans les diverses contrées de l'Asie. Il les retint auprès de lui, afin
que le désir de les sauver engageât les généraux de Niger à trahir sa
cause, ou que, s'ils restaient fidèles à ce prince, il fût maître de se
venger d'eux, par la mort de leurs enfants.
V. Cependant, défaits près de Cyzique, les soldats de Niger tâchaient
d'échapper au vainqueur par la plus prompte fuite. Les uns longeaient les
montagnes de l'Arménie ; les autres traversaient en toute hâte la Cilicie
et la Galatie pour franchir le mont Taurus et se retirer derrière ses
retranchements. Quant à Sévère, il se dirigea avec son armée par le
territoire de Cyzique vers la Bithynie, pays voisin.
VI. Dès que la nouvelle de sa victoire se fut répandue, on vit éclater
parmi les peuples et les différentes villes de ces contrées des troubles
soudains et de violentes discordes, qui prirent naissance, moins dans les
dispositions diverses des chefs, que dans l'envie et la jalousie que ces
villes se portaient l'une à l'autre, rivalité funeste et qui cause la
ruine des nations. Ce fut là l'ancienne maladie des Grecs, qui, toujours
livrés à de mutuelles dissensions, désirant toujours renverser tout ce qui
semblait dominer au milieu d'eux, ont peu à peu détruit leur patrie :
accablée à la fois par la vieillesse et par des déchirements intérieurs, la
Grèce devint une proie facile à l'invasion des Macédoniens, et plus tard
au despotisme de Rome. Nous avons vu de notre temps ce fléau de la
rivalité et de l'envie attaquer encore de florissantes cités.
VII. En Bithynie, par exemple, aussitôt après la bataille de Cyzique, les
habitants de Nicomédie se joignirent à Sévère, lui envoyèrent des députés,
accueillirent ses troupes, et lui promirent tous les secours qu'il
pourrait désirer. Les habitants de Nicée, par haine pour ceux de
Nicomédie, se jetèrent dans le parti contraire : ils ouvrirent leurs murs
aux débris de l'armée de Niger, qui, après la défaite, cherchaient auprès
d'eux un asile, et aux troupes que ce général envoyait à la défense de la
Bithynie. Bientôt de ces deux villes, comme de deux camps, sortirent deux
armées qui en vinrent aux mains : un grand combat se livra, et les troupes
de Sévère remportèrent l'avantage le plus signalé. Ceux des soldats de
Niger qui purent échapper aux vainqueurs, s'enfuirent vers les gorges du
mont Taurus, et se préparèrent à en défendre les retranchements. Niger,
après avoir laissé à la garde de ces défilés le nombre d'hommes qu'il crut
suffisant, se dirigea vers Antioche , pour y rassembler des troupes et de l'argent.
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