[1450] (ΙΩΝ) ἐμοὶ γενέσθαι πάντα μᾶλλον ἄν ποτε,
1451 μῆτερ, παρέστη τῶνδ´, ὅπως σός εἰμ´ ἐγώ.
1452 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἔτι φόβωι τρέμω.
1452 (ΙΩΝ) μῶν οὐκ ἔχειν μ´ ἔχουσα; (ΚΡΕΟΥΣΑ) τὰς γὰρ ἐλπίδας
1453 ἀπέβαλον πρόσω.
1454 ἰὼ ἰὼ γύναι, πόθεν ἔλαβες ἐμὸν
1454 βρέφος ἐς ἀγκάλας;
1455 τίν´ ἀνὰ χέρα δόμους ἔβα Λοξίου;
1456 (ΙΩΝ) θεῖον τόδ´· ἀλλὰ τἀπίλοιπα τῆς τύχης
1457 εὐδαιμονοῖμεν, ὡς τὰ πρόσθ´ ἐδυστύχει.
1458 (ΚΡΕΟΥΣΑ) τέκνον, οὐκ ἀδάκρυτος ἐκλοχεύηι,
1459 γόοις δὲ ματρὸς ἐκ χερῶν ὁρίζηι.
1460 νῦν δὲ γενειάσιν πάρα σέθεν πνέω
1461 μακαριωτάτας τυχοῦς´ ἡδονᾶς.
1462 (ΙΩΝ) τοὐμὸν λέγουσα καὶ τὸ σὸν κοινῶς λέγεις.
1463 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἄπαιδες οὐκέτ´ ἐσμὲν οὐδ´ ἄτεκνοι·
1464 δῶμ´ ἑστιοῦται, γᾶ δ´ ἔχει τυράννους,
1465 ἀνηβᾶι δ´ Ἐρεχθεύς·
1466 ὅ τε γηγενέτας δόμος οὐκέτι νύκτα δέρκεται,
1467 ἀελίου δ´ ἀναβλέπει λαμπάσιν.
1468 (ΙΩΝ) μῆτερ, παρών μοι καὶ πατὴρ μετασχέτω
1469 τῆς ἡδονῆς τῆσδ´ ἧς ἔδωχ´ ὑμῖν ἐγώ.
1470 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ὦ τέκνον,
1471 τί φήις; οἷον οἷον ἀνελέγχομαι.
1472 (ΙΩΝ) πῶς εἶπας; (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἄλλοθεν γέγονας, ἄλλοθεν.
1473 (ΙΩΝ) ὤμοι· νόθον με παρθένευμ´ ἔτικτε σόν;
1474 (ΚΡΕΟΥΣΑ) οὐχ ὑπὸ λαμπάδων οὐδὲ χορευμάτων
1475 ὑμέναιος ἐμός,
1476 τέκνον, ἔτικτε σὸν κάρα.
1477 (ΙΩΝ) αἰαῖ· πέφυκα δυσγενής, μῆτερ; πόθεν;
1478 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἴστω Γοργοφόνα (ΙΩΝ) τί τοῦτ´ ἔλεξας;
1479 (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἃ σκοπέλοις ἐπ´ ἐμοῖς
1480 τὸν ἐλαιοφυῆ πάγον
1481 θάσσει (ΙΩΝ) λέγεις μοι σκολιὰ κοὐ σαφῆ τάδε.
1482 (ΚΡΕΟΥΣΑ) παρ´ ἀηδόνιον πέτραν
1483 Φοίβωι (ΙΩΝ) τί Φοῖβον αὐδᾶις;
1484 (ΚΡΕΟΥΣΑ) κρυπτόμενον λέχος ηὐνάσθην
1485 (ΙΩΝ) λέγ´· ὡς ἐρεῖς τι κεδνὸν εὐτυχές τέ μοι.
1486 (ΚΡΕΟΥΣΑ) δεκάτωι δέ σε μηνὸς ἐν
1487 κύκλωι κρύφιον ὠδῖν´ ἔτεκον Φοίβωι.
1488 (ΙΩΝ) ὦ φίλτατ´ εἰποῦς´, εἰ λέγεις ἐτήτυμα.
1489 (ΚΡΕΟΥΣΑ) παρθένια δ´ ἐμᾶς ματέρος
1490 σπάργαν´ ἀμφίβολά σοι τάδ´ ἀνῆψα κερκίδος
1491 ἐμᾶς πλάνους.
1492 γάλακτι δ´ οὐκ ἐπέσχον οὐδὲ μαστῶι
1493 τροφεῖα ματρὸς οὐδὲ λουτρὰ χειροῖν,
1494 ἀνὰ δ´ ἄντρον ἔρημον οἰωνῶν
1495 γαμφηλαῖς φόνευμα θοίναμά τ´ εἰς
1496 Ἅιδαν ἐκβάλληι.
1497 (ΙΩΝ) ὦ δεινὰ τλᾶσα, μῆτερ. (ΚΡΕΟΥΣΑ) ἐν φόβωι, τέκνον,
1498 καταδεθεῖσα σὰν ἀπέβαλον ψυχάν.
1499 ἔκτεινά ς´ ἄκους´. (ΙΩΝ) ἐξ ἐμοῦ τ´ οὐχ ὅσι´
| [1450] ION.
J'aurais tout imaginé, ô ma mère, avant de me croire ton fils.
CRÉUSE.
Je suis encore toute tremblante.
ION.
Crains-tu d'avoir perdu ce fils que tu serres entre tes bras?
CRÉUSE.
J'avais depuis longtemps renoncé à cette espérance. Mais, ô prophétesse ! de qui as-tu reçu mon fils dans tes bras ? quelle main l'a apporté dans le temple d'Apollon ?
ION.
C'est l'ouvrage du dieu. Désormais jouissons de notre bonheur, après avoir été si longtemps malheureux.
CRÉUSE.
Mon fils, tu m'as coûté bien des pleurs en venant au monde, et ce n'est pas sans de douloureux gémissements que je t'ai éloigné de ces mains maternelles. Mais aujourd'hui je respire le même air que toi, que pourrait- il manquer à ma félicité ?
ION.
En exhalant les sentiments de ton cœur, tu exprimes aussi tout ce que j'éprouve.
CRÉUSE.
1463 Non, je ne serai plus stérile et sans héritier ; ma maison trouve un appui, et ma patrie un roi ; en toi revit Érechthée : la race des fils de la Terre n'est plus ensevelie dans la nuit, elle revoit la lumière du soleil.
ION.
Ô ma mère, que mon père vienne aussi partager la joie que je t'ai donnée.
CRÉUSE.
Ô mon fils, que dis-tu ! à quel pénible aveu suis-je condamnée !
ION.
Que signifient ces paroles ?
CRÉUSE.
Un autre, un autre fut ton père.
ION.
Eh quoi ! ma naissance est illégitime ?
CRÉUSE.
Les flambeaux de l'hymen n'ont point éclairé l'union à laquelle tu dois la vie.
ION.
Hélas ! hélas ! la honte a marqué ma naissance ! Mais du moins quel en est l'auteur ?
CRÉUSE.
J'atteste ici Pallas,
ION.
A quoi bon ces paroles ?
CRÉUSE.
La déesse qui règne sur la colline où croît l'olivier, et dont je suis souveraine;
ION.
Ce que tu dis est obscur et manque de clarté.
CRÉUSE.
Dans une grotte visitée par les rossignols, Apollon
ION.
Pourquoi nommes-tu Apollon ?
1484 CRÉUSE.
Fut celui qui me rendit mère.
ION.
Parle; tu dis là des faits glorieux et heureux pour moi.
CRÉUSE.
Dans la dixième révolution de l'astre qui marque les mois, je t'enfantai avec mystère, toi, fils d'Apollon.
ION.
Ton récit est bien doux pour moi, s'il est sincère.
CRÉUSE.
1489 Je t'enveloppai de ces langes, ouvrage de ma navette et de mes jeunes mains. Je ne t'ai pas approché de mon sein, le lait maternel ne t'a point nourri, mes mains n'ont pas lavé ton corps. Tu fus abandonné dans un antre désert, en proie aux oiseaux dévorants, pour y mourir.
ION.
O ma mère, qu'as-tu osé ?
CRÉUSE.
La crainte me fit sacrifier ta vie, ô mon fils ; malgré moi, je te livrai à la mort.
ION.
Et moi aussi, dans ma colère impie,
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