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[71,33] ἐπειδὴ δὲ τὰ Σκυθικὰ αὖθις αὐτοῦ ἐδεήθη, γυναῖκα τῷ υἱεῖ
θᾶττον δι´ αὐτὰ ἢ ἐβούλετο Κρισπῖναν συνῴκισεν· οἱ γὰρ Κυιντίλιοι
οὐκ ἠδυνήθησαν, καίπερ δύο τε ὄντες καὶ φρόνημα καὶ ἀνδρίαν
ἐμπειρίαν τε πολλὴν ἔχοντες, τὸν πόλεμον παῦσαι, καὶ διὰ
τοῦτ´ ἀναγκαίως αὐτοὶ οἱ αὐτοκράτορες ἐξεστράτευσαν. ὁ δὲ Μᾶρκος
καὶ χρήματα ἐκ τοῦ δημοσίου ᾔτησε τὴν βουλήν, οὐχ ὅτι μὴ
ἔκειντο ἐπὶ τῇ τοῦ κρατοῦντος ἐξουσίᾳ, ἀλλ´ ὅτι ὁ Μᾶρκος πάντα
τῆς βουλῆς καὶ τοῦ δήμου καὶ αὐτὰ καὶ τἆλλα ἔλεγεν εἶναι· "ἡμεῖς
γάρ" ἔφη πρὸς τὴν βουλὴν λέγων "οὕτως οὐδὲν ἴδιον ἔχομεν ὥστε
καὶ ἐν τῇ ὑμετέρᾳ οἰκίᾳ οἰκοῦμεν". ταῦτά τε εἰπών, καὶ τὸ δόρυ
τὸ αἱματῶδες παρὰ τῷ Ἐνυείῳ ἐς τὸ πολέμιον δὴ χωρίον, ὥς γε
καὶ τῶν συγγενομένων αὐτῷ ἤκουσα, ἀκοντίσας ἐξωρμήθη, καὶ τῷ
Πατέρνῳ δοὺς χεῖρα μεγάλην ἔπεμψεν αὐτὸν ἐς τὸν τῆς μάχης
ἀγῶνα. καὶ οἱ βάρβαροι ἀντέτειναν μὲν διὰ τῆς ἡμέρας ἁπάσης,
κατεκόπησαν δὲ ὑπὸ τῶν Ῥωμαίων πάντες, καὶ ὁ Μᾶρκος τὸ δέκατον
αὐτοκράτωρ προσηγορεύθη.
καὶ εἴγε πλέον ἐβεβιώκει, πάντα τὰ ἐκεῖ ἂν ἐκεχείρωτο· νῦν
δὲ τῇ ἑπτακαιδεκάτῃ τοῦ Μαρτίου μετήλλαξεν, οὐχ ὑπὸ τῆς νόσου
ἣν καὶ τότε ἐνόσησεν, ἀλλ´ ὑπὸ τῶν ἰατρῶν, ὡς ἐγὼ σαφῶς ἤκουσα,
τῷ Κομμόδῳ χαριζομένων.
| [71,33] Les affaires de Scythie ayant de nouveau réclamé sa présence, il donna
Crispina en mariage à son fils plus tôt qu'il ne l'aurait voulu ; les
Quintilius, en effet, bien qu'ils fussent deux et qu'ils eussent beaucoup
de prudence, de courage et d'expérience, ne purent terminer la guerre, et
les empereurs furent, pour cette raison, obligés d'y aller en personne.
Marc-Antonin demanda alors au sénat l'autorisation de prendre de l'argent
dans le trésor public, non que cet argent ne fût pas à la discrétion de
l'empereur, mais parce que, disait-il, cet argent, ainsi que tout le
reste, appartenait au sénat et au peuple : «Nous n'avons rien qui soit à
nous, ajoutait-il dans son discours au sénat, à tel point que même la
demeure où nous habitons est à vous». Ayant à ces mots, lancé, près du
temple de Bellone, comme sur le territoire ennemi, le javelot ensanglanté,
ainsi que je l'ai appris de ceux qui étaient avec lui, il partit pour son
expédition ; il donna une puissante armée à Paternus, qu'il envoya pour
engager le combat. Les barbares résistèrent un jour entier, mais enfin ils
furent tous taillés en pièces par les Romains, et Marc-Antonin fut
proclamé imperator pour la dixième fois. S'il avait vécu plus longtemps,
il réduisait tout ce pays sous son obéissance ; mais il mourut le 17 mars,
non de la maladie dont il souffrait alors, mais, comme je le sais
certainement, du poison que les médecins lui avaient donné pour gagner les
bonnes grâces de Commode.
| [71,34] μέλλων οὖν ἀποθνήσκειν τοῦτόν τε
τοῖς στρατιώταις παρακατέθετο (οὐ γὰρ ἤθελε δοκεῖν ὑπ´ αὐτοῦ
θνήσκειν) καὶ τῷ χιλιάρχῳ τὸ σύνθημα αἰτοῦντι ἔφη "ἄπελθε
πρὸς τὸν ἀνατέλλοντα· ἐγὼ γὰρ ἤδη δύομαι". τελευτήσας δὲ ἄλλα
τε πολλὰ ἐς τιμὴν ἔλαβε καὶ χρυσοῦς ἐς αὐτὸ τὸ συνέδριον ἔστη.
ὁ μὲν οὖν Μᾶρκος οὕτω μετήλλαξεν.
ὅτι οὕτω θεοσεβὴς ἦν ὁ Μᾶρκος ὥστε καὶ ἐν ταῖς ἀποφράσιν
οἴκοι θύειν.
ὅτι εἶχε μὲν καὶ τὰς ἄλλας ἀρετὰς ἁπάσας, καὶ ἄριστα
διὰ πάντων τῶν ἐν κράτει τινὶ γενομένων ἦρξε, πλὴν καθ´ ὅσον οὐ
πολλὰ τῷ σώματι ἀνδρίζεσθαι ἐδύνατο· καὶ τοῦτο ἐξ ἀσθενεστάτου
καρτερικώτατον ἀπέδειξε. πλεῖστον δὲ ἐν εὐεργεσίᾳ διῆγεν·
ὅθεν που καὶ νεὼν αὐτῆς ἐν τῷ Καπιτωλίῳ ἱδρύσατο, ὀνόματί
τινι ἰδιωτάτῳ καὶ μήπω ἀκουσθέντι προσκαλέσας αὐτήν. αὐτὸς
μὲν γὰρ ἁπάντων τῶν ἁμαρτημάτων ἀπείχετο, καὶ οὔτε ἑκὼν οὔτ´
ἄκων ἐπλημμέλει. τὰ δὲ δὴ τῶν ἄλλων ἁμαρτήματα, καὶ μάλιστα
τὰ τῆς γυναικός, ἔφερε καὶ οὔτε ἐπολυπραγμόνει οὔτε ἐκόλαζεν,
ἀλλ´ εἰ μέν τις χρηστόν τι ἔπραττεν, ἐπῄνει καὶ ἐχρῆτο ἐς ἐκεῖνο
αὐτῷ, τῶν δὲ ἑτέρων οὐ προσεποιεῖτο, λέγων ὅτι ποιῆσαι μέν τινι
ἀνθρώπους ὁποίους βούλεται ἔχειν ἀδύνατόν ἐστι, τοῖς δὲ δὴ οὖσι
προσήκει, ἐς ὅ τι ἄν τις αὐτῶν τῷ κοινῷ χρήσιμος ᾖ, χρῆσθαι.
καὶ ὅτι οὐ προσποιητῶς ἀλλ´ ἐξ ἀρετῆς πάντα ἔπραττε, πρόδηλον·
ἔτη γὰρ ὀκτὼ καὶ πεντήκοντα καὶ μῆνας δέκα ἡμέρας τε εἴκοσι καὶ
δύο ζήσας, κἀν τούτοις τῷ τε πρὶν Ἀντωνίνῳ συχνὸν χρόνον ὑπάρξας
καὶ αὐτὸς ἐννέα καὶ δέκα ἔτη καὶ ἕνδεκα ἡμέρας αὐταρχήσας,
ὅμοιος διὰ πάντων ἐγένετο καὶ ἐν οὐδενὶ ἠλλοιώθη. οὕτως ὡς ἀληθῶς
ἀγαθὸς ἀνὴρ ἦν καὶ οὐδὲν προσποιητὸν εἶχε.
| [71,34] Sur le point de mourir, il recommanda Commode aux soldats (il ne
voulait pas paraître mourir par le crime de son fils), et dit au tribun
qui lui demandait le mot d'ordre : «Va trouver le soleil levant, car, pour
moi, j'approche de mon couchant». Quand il fut mort, on rendit de nombreux
honneurs à sa mémoire, et on lui érigea une statue d'or dans le sénat
même. Voilà de quelle façon se termina la vie de Marc-Antonin.
Marc-Antonin avait tant de piété envers les dieux que, même les jours
néfastes, il leur offait des sacrifices chez lui. Il avait toutes les
autres vertus et il se montra, dans son gouvernement, le meilleur de tous
les hommes qui aient jamais exercé une autorité quelconque ; toutefois les
forces de son corps ne lui permirent pas une foule d'oeuvres d'homme, bien
qu'il l'eût amené d'une très grande faiblesse à une très grande énergie.
Il passa la plus grande partie de sa vie dans la bienfaisance, vertu à
laquelle il bâtit un temple au Capitole, en l'appelant d'un nom tout
particulier et inconnu jusque-là. Il s'abstenait, en effet, de tous les
vices et ne commettait de fautes ni volontairement ni involontairement ;
quant à celles des autres et surtout de sa femme, il les supportait sans
les rechercher ni les punir ; loin de là, si quelqu'un faisait une chose
utile, il lui donnait des éloges et l'employait à cette chose, sans
s'inquiéter du reste ; disant que, puisqu'il est impossible de faire que
les hommes soient tels qu'on les voudrait avoir, il convient d'employer
ceux qui existent pour la chose où chacun d'eux rend service à l'Etat.
Tout chez lui avait pour source non la feinte, mais la vertu, la chose est
évidente, car, durant les cinquante-huit ans deux mois vingt-deux jours
qu'il a vécu, et sur lesquels, soit pendant le temps assez long qu'il
passa d'abord sous le gouvernement de son père Antonin, soit pendant les
dix-neuf ans onze jours qu'il fut lui-même maître absolu du pouvoir, il se
montra en tout semblable à lui-même et ne se démentit jamais. C'est qu'il
fut véritablement un homme vertueux, et qu'il n'y avait pas de feinte chez lui.
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