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[71,23] ταῦτ´ οὖν αὐτῷ διανοουμένῳ ἀγγελία ἦλθε τὸν Μᾶρκον τεθνηκέναι,
οἷά που φιλεῖ τοιαῦτα ἐπὶ τὸ χεῖρον ἀεὶ θρυλεῖσθαι· καὶ εὐθύς,
οὐκ ἀναμείνας αὐτὴν ἀκριβῶσαι, ἔφεσιν τῆς ἀρχῆς ἐποιήσατο ὡς
καὶ πρὸς τῶν στρατιωτῶν τῶν ἐν τῇ Παννονίᾳ τότε ὄντων προκεχειρισμένος.
καὶ ὁ μέν, εἰ καὶ τὰ μάλιστα μὴ ἐς μακρὰν τἀληθὲς
ἔμαθεν, ὅμως ἐπειδήπερ ἅπαξ ὑπεκεκινήκει οὐ μετεβάλετο, ἀλλὰ
τά τε ἐντὸς τοῦ Ταύρου πάντα διὰ βραχέος προσεποιήσατο καὶ
παρεσκευάζετο ὡς καὶ πολέμῳ τὸ κράτος ἕξων· ὁ δὲ δὴ Μᾶρκος
παρὰ τοῦ Οὐήρου τοῦ τῆς Καππαδοκίας ἄρχοντος τὴν ἐπανάστασιν
αὐτοῦ μαθὼν τέως μὲν συνέκρυπτεν αὐτά, ἐπεὶ δὲ οἱ στρατιῶται
τῇ τε φήμῃ ἰσχυρῶς ἐταράσσοντο καὶ ἐλογοποίουν πολλά, συνεκάλεσεν
αὐτοὺς καὶ ἀνέγνω τοιάδε·
| [71,23] Pendant que Cassius roulait ce dessein dans son esprit, une nouvelle,
attendu que, dans ces sortes de circonstances, ce sont toujours les bruits
fâcheux qui d'ordinaire se répandent, lui arriva que Marc-Antonin était
mort ; et aussitôt, sans attendre que la chose fût avérée, il aspira à
l'empire, comme s'il eût été auparavant élu par les soldats alors en
Pannonie. Bien qu'il n'eût pas tardé à connaître la vérité, néanmoins,
comme il s'était révolté, il ne changea pas de résolution ; il rangea en
peu de temps sous son obéissance tous les peuples en-deçà du Taurus, et il
se prépara à s'emparer du pouvoir par les armes. Quant à Marc-Antonin,
informé de la révolte par Vérus, gouverneur de la Cappadoce, il cacha un
instant ce qui se passait ; mais, les soldats étant fortement troublés par
les bruits qui se répandaient et en faisant le sujet de nombreux
entretiens, il les convoqua et leur lut ce qui suit :
| [71,24] "οὐκ ἀγανακτήσων, ὦ συστρατιῶται, ἢ ὀδυρούμενος παρελήλυθα.
χαλεπαίνειν μὲν γὰρ τί δεῖ πρὸς τὸ δαιμόνιον, ᾧ πάντα ἔξεστιν;
ὀλοφύρεσθαι δὲ ἴσως ἀνάγκη τοὺς ἀδίκως δυστυχοῦντας· ὃ καὶ
ἐμοὶ νῦν συμβέβηκε. πῶς γὰρ οὐ δεινὸν πολέμοις ἡμᾶς ἐκ πολέμων
συμφέρεσθαι; πῶς δ´ οὐκ ἄτοπον καὶ ἐμφυλίῳ συμπλακῆναι;
πῶς οὐκ ἀμφότερα καὶ δεινότητι καὶ ἀτοπίᾳ νικᾷ τὸ μηδὲν πιστὸν
ἐν ἀνθρώποις εἶναι, ἀλλ´ ἐπιβεβουλεῦσθαί τέ με ὑπὸ τοῦ φιλτάτου
καὶ ἐς ἀγῶνα ἀκούσιον καθίστασθαι μήτε τι ἠδικηκότα μήτε τι πεπλημμεληκότα;
τίς μὲν γὰρ ἀρετὴ ἀσφαλής, τίς δὲ φιλία ἔτι νομισθήσεται
ἐμοῦ ταῦτα πεπονθότος; πῶς δ´ οὐκ ἀπόλωλε μὲν πίστις,
ἀπόλωλε δὲ ἐλπὶς ἀγαθή; ἀλλ´ εἰ μὲν μόνος ἐγὼ ἐκινδύνευον, παρ´
οὐδὲν ἂν τὸ πρᾶγμα ἐποιησάμην (οὐ γάρ που καὶ ἀθάνατος ἐγεννήθην)·
ἐπεὶ δὲ δημοσία τε ἀπόστασις, μᾶλλον δὲ ἐπανάστασις γέγονε.
καὶ ὁ πόλεμος πάντων ὁμοίως ἡμῶν ἅπτεται, ἐβουλόμην, εἰ οἷόν τε
ἦν, προσκαλέσασθαι τὸν Κάσσιον καὶ δικαιολογήσασθαι πρὸς αὐτὸν
παρ´ ὑμῖν ἢ παρὰ τῇ γερουσίᾳ· καὶ ἡδέως ἂν ἀμαχεὶ παρεχώρησα
αὐτῷ τῆς ἡγεμονίας, εἰ τοῦτο τῷ κοινῷ συμφέρειν ἐδεδόχει. ὑπὲρ
τοῦ κοινοῦ γὰρ καὶ πονῶν καὶ κινδυνεύων διατελῶ, τοσοῦτόν τε ἐνταυθοῖ
χρόνον ἔξω τῆς Ἰταλίας πεποίηκα, ἄνθρωπος καὶ γέρων ἤδη
καὶ ἀσθενὴς καὶ οὔτε τροφὴν ἄλυπον οὔθ´ ὕπνον ἄφροντιν λαβεῖν δυνάμενος.
| [71,24] «Compagnons d'armes, c'est pour faire éclater moins mon indignation
que ma douleur que je suis venu ici. Que sert, en effet, de s'irriter
contre les dieux, puisqu'ils disposent de tout avec un pouvoir absolu ?
Cependant il peut y avoir nécessité de se plaindre, quand on est
malheureux sans l'avoir mérité, comme cela m'arrive en ce moment. N'est-ce
pas une chose horrible, en effet, que des guerres s'élèvent sans cesse à
la suite d'autres guerres ? N'est-ce pas une chose étrange que nous soyons
engagés dans une guerre civile ? N'est-ce pas même une chose qui surpasse
en horreur et en étrangeté ces deux malheurs, que de ne rencontrer aucune
fidélité parmi les hommes, d'être trahi par mon ami le plus cher, et
d'être, malgré moi, en lutte avec un homme à qui je n'ai fait ni tort ni
offense ? Quelle vertu, quelle amitié désormais croira-t-on assurée,
lorsque, moi, j'éprouve un tel sort ? La fidélité n'est-elle pas morte,
ainsi que la bonne espérance ? Si encore ce danger ne menaçait que moi
seul, je ne m'en serais nullement inquiété (je ne suis pas immortel) ;
mais, puisqu'il s'agit d'une défection publique ou plutôt d'une rébellion,
d'une guerre qui nous atteint tous pareillement, je voudrais, si la chose
était possible, appeler Cassius à discuter avec moi de ses prétentions
devant vous ou devant le sénat ; j'aurais plaisir à lui céder le pouvoir
sans combat, si la chose semblait utile à l'intérêt général. C'est, en
effet, pour l'intérêt général que je persiste à braver la fatigue et le
danger, que je demeure ici, éloigné si longtemps de l'Italie, à cet âge et
avec une telle santé, ne pouvant prendre de nourriture sans en éprouver de
la souffrance, ni goûter le sommeil sans être tourmenté par les soucis.
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