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[57,6] φοβηθεὶς δ´ οὖν καὶ ὣς ὁ Γερμανικὸς μὴ καὶ αὖθις στασιάσωσιν,
ἐς τὴν πολεμίαν ἐνέβαλε, καὶ ἐν αὐτῇ ἀσχολίαν τε ἅμα αὐτοῖς
καὶ τροφὴν ἄφθονον ἐκ τῶν ἀλλοτρίων παρέχων ἐνεχρόνισε.
καὶ ὁ μὲν δυνηθεὶς ἂν τὴν αὐτοκράτορα ἀρχὴν λαβεῖν (ἡ γὰρ
εὔνοια πάντων ἁπλῶς τῶν τε Ῥωμαίων καὶ τῶν ὑπηκόων σφῶν ἐς
αὐτὸν ἐποίει) οὐκ ἠθέλησε· Τιβέριος δὲ ἐπῄνεσε μὲν αὐτὸν ἐπὶ
τούτῳ, καὶ πολλὰ καὶ κεχαρισμένα καὶ ἐκείνῳ καὶ τῇ Ἀγριππίνῃ
ἐπέστειλεν, οὐ μέντοι καὶ ἥσθη οἷς ἔπραξεν, ἀλλὰ καὶ ἐπὶ πλεῖον
αὐτὸν ὡς καὶ τὰ στρατεύματα ἀνηρτημένον ἔδεισεν. οὐ γάρ που
καὶ φρονεῖν οὕτως ὡς ἐδόκει, ἐξ ὧν ἑαυτῷ συνῄδει ἄλλα μὲν λέγοντι
ἄλλα δὲ ποιοῦντι, ὑπελάμβανεν, ὥσθ´ ὑπετόπει μὲν καὶ ἐκεῖνον,
ὑπετόπει δὲ καὶ τὴν γυναῖκα αὐτοῦ· ἦν γὰρ ἀντίπαλον τὸ φρόνημα
τῷ τοῦ γένους ὄγκῳ ἔχουσα. οὐ μὴν καὶ προσεποιεῖτο ἄχθεσθαί
σφισιν, ἀλλὰ καὶ ἐπαίνους ἐν τῇ βουλῇ τοῦ Γερμανικοῦ πολλοὺς
ἐποιήσατο, καὶ θυσίας ἐπὶ τοῖς πραχθεῖσιν ὑπ´ αὐτοῦ, ὥσπερ καὶ
ἐπὶ τοῖς ὑπὸ τοῦ Δρούσου, γενέσθαι ἐσηγήσατο. τοῖς τε στρατιώταις
τοῖς ἐν τῇ Παννονίᾳ τὰ αὐτὰ τοῖς ὑπ´ ἐκείνου δοθεῖσιν ἐδωρήσατο.
ἐς μέντοι τὸ ἔπειτα οὐ πρότερον τοὺς ἔξω τῆς Ἰταλίας
στρατευομένους ἀπέλυε πρὶν τὰ εἴκοσιν ἔτη στρατεύσασθαι.
| [57,6] Germanicus, redoutant malgré cela une nouvelle
sédition, mena son armée sur la terre ennemie, où il
séjourna longtemps, afin de donner de l'occupation aux
soldats et de leur procurer des vivres en abondance,
aux dépens de l'étranger. Bien qu'il pût arriver à l'empire
(l'amour de tous les Romains, celui des peuples
soumis inclinait en sa faveur), il ne le voulut pas. Tibère,
à cette occasion, lui donna des éloges, et lui écrivit, à
lui et à Agrippine, une foule de choses agréables, sans
pour cela se réjouir de ses exploits; l'attachement des
légions lui était, au contraire, un motif de le craindre
davantage. La conscience qu'autres étaient chez lui les
paroles, autres les actions, lui laissait croire que Germanicus
n'avait pas les pensées qu'il faisait paraître ; en
sorte qu'il le soupçonnait, et qu'il soupçonnait aussi sa
femme, dont les sentiments répondaient à la grandeur de
sa race. Il feignit néanmoins de ne pas en être mécontent;
il combla Germanicus d'éloges dans le sénat, proposa
d'offrir des sacrifices, à l'occasion de ses exploits, comme
on l'avait fait à l'occasion de ceux de Drusus. Il accorda
aux soldats de Pannonie les mêmes récompenses que
celles qui avaient été accordées à ceux de Germanie.
Néanmoins, dans la suite, il ne donna de congé définitif
qu'après vingt ans de service à ceux qui avaient porté
les armes hors de l'Italie.
| [57,7] ὡς δ´ οὖν οὐδὲν ἔτι νεώτερον ἠγγέλλετο, ἀλλὰ ἀσφαλῶς πάντα
τὰ τῶν Ῥωμαίων ἐς τὴν ἡγεμονίαν αὐτοῦ συνεφρόνησε, τήν τε ἀρχὴν
οὐδὲν ἔτι εἰρωνευόμενος ὑπεδέξατο, καὶ ἐν τοιῷδε αὐτὴν τρόπῳ,
ἐφ´ ὅσον ὁ Γερμανικὸς ἔζη, διήγαγεν. αὐτὸς μὲν καθ´ ἑαυτὸν ἤ
τι ἢ οὐδὲν ἔπραττε, πάντα δὲ δὴ καὶ τὰ σμικρότατα ἔς τε τὴν
γερουσίαν ἐσέφερε καὶ ἐκείνῃ ἐκοίνου. ἐπεποίητο μὲν γὰρ βῆμα ἐν
τῇ ἀγορᾷ, ἐφ´ οὗ προκαθίζων ἐχρημάτιζε, καὶ συμβούλους ἀεὶ κατὰ
τὸν Αὔγουστον παρελάμβανεν, οὐ μέντοι καὶ διῴκει λόγου τι ἄξιον
ὃ μὴ καὶ τοῖς ἄλλοις ἐπεκοίνου. καὶ ἔς γε τὸ μέσον τὴν ἑαυτοῦ
γνώμην τιθεὶς οὐχ ὅπως ἀντειπεῖν αὐτῇ παντί τῳ παρρησίαν ἔνεμεν,
ἀλλὰ καὶ τἀναντία οἱ ἔστιν ὅτε ψηφιζομένων τινῶν ἔφερε. καὶ
γὰρ αὐτὸς ψῆφον πολλάκις ἐδίδου. ὁ μὲν γὰρ Δροῦσος ἐξ ἴσου
τοῖς ἄλλοις τοτὲ μὲν πρῶτος τοτὲ δὲ μεθ´ ἑτέρους τοῦτ´ ἐποίει·
ἐκεῖνος δὲ ἔστι μὲν ὅτε ἐσιώπα, ἔστι δ´ ὅτε καὶ πρῶτος ἢ καὶ μετ´
ἄλλους τινὰς ἢ καὶ τελευταῖος τὰ μὲν ἄντικρυς ἀπεφαίνετο, τὰ δὲ
δὴ πλείω, ἵνα δὴ μὴ δοκῇ τὴν παρρησίαν αὐτῶν ἀφαιρεῖσθαι,
ἔλεγεν ὅτι "εἰ γνώμην ἐποιούμην, τὰ καὶ τὰ ἂν ἀπεδειξάμην".
καὶ ἦν μὲν καὶ τοῦτο τὴν ἴσην τῷ ἑτέρῳ ἰσχὺν ἔχον, οὐ μέντοι
καὶ ἐκωλύοντο οἱ λοιποὶ ὑπ´ αὐτοῦ τὰ δοκοῦντά σφισι λέγειν,
ἀλλὰ καὶ πολλάκις ὁ μὲν τὸ ἐγίγνωσκεν, οἱ δὲ μετ´ αὐτὸν ἕτερόν
τι ἀνθῃροῦντο, καὶ ἔστιν ὅτε καὶ ἐπεκράτουν· καὶ οὐδενὶ μέντοι
παρὰ τοῦτο ὀργὴν εἶχεν. ἐδίκαζε μὲν οὖν ὥσπερ εἶπον, ἐπεφοίτα
δὲ καὶ ἐπὶ τὰ τῶν ἀρχόντων δικαστήρια, καὶ παρακαλούμενος ὑπ´
αὐτῶν καὶ ἀπαράκλητος, καὶ ἐκείνους μὲν ἐν τῇ ἑαυτῶν χώρᾳ καθῆσθαι
εἴα, αὐτὸς δὲ ἐπὶ τοῦ βάθρου τοῦ κατάντικρύς σφων κειμένου
καθίζων ἔλεγεν ὅσα ἐδόκει αὐτῷ ὡς πάρεδρος.
| [57,7] Comme on ne parlait plus de nouveaux soulèvements,
et que tout ce qui se passait chez les Romains
conspirait pour lui assurer la souveraineté, Tibère accepta
l'empire, sans désormais dissimuler, et, tant que
vécut Germanicus, il se conduisit de la sorte. Il ne décidait
rien ou presque rien par lui-même et portait au
sénat toutes les affaires, même les moins importantes,
et les lui communiquait. On avait élevé sur le Forum un
tribunal du haut duquel il présidait à l'administration
de la justice, et, à l'exemple d'Auguste, il prenait toujours
des conseillers; mais, néanmoins, il ne réglait aucune
affaire un peu importante sans l'avoir communiquée
aux autres sénateurs. `Lorsqu'il avait proposé son avis,
non seulement il accordait à tous la liberté de le contredire,
mais il souffrait parfois qu'on rendît des décrets
contraires à ses propositions. Lui-même, en effet, donnait
souvent sa voix. Drusus était sur le pied de l'égalité
avec tous, parlant tantôt le premier, tantôt après d'autres;
mais Tibère parfois gardait le silence, parfois aussi
exprimait son avis, tantôt le premier, tantôt après plusieurs
autres membres, tantôt même le dernier, proposant
hautement certaines choses, et, la plupart du temps,
afin de ne point paraître enlever la liberté de la parole,
il ajoutait : « Si j'avais à donner un avis, je prendrais
telle et telle résolution. » Bien que cette opinion eût la
même force que toutes les autres, le reste des sénateurs
n'étaient pas néanmoins empêchés de dire ce qu'ils pensaient ;
souvent même Tibère ouvrait un avis, et si les
sénateurs qui parlaient après lui en opposaient un autre,
parfois ce dernier l'emportait. Il ne se fâchait contre
personne à ce propos. Il rendait donc la justice de la
façon que j'ai dit, et allait fréquemment aux jugements
que rendaient les magistrats, soit qu'il y fut appelé par
eux, soit qu'il ne le fut pas. Il permettait qu'ils demeurassent
sur leurs siéges, et, assis sur un banc en face
d'eux, il leur adressait, comme s'il eût été leur assesseur,
les observations qu'il jugeait convenables.
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