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[57,2] τοιοῦτος οὖν δή τις ὢν ἔς τε τὰ στρατόπεδα καὶ ἐς τὰ ἔθνη πάντα
ὡς αὐτοκράτωρ εὐθὺς ἀπὸ τῆς Νώλης ἐπέστειλε, μὴ λέγων αὐτοκράτωρ
εἶναι· ψηφισθὲν γὰρ αὐτῷ καὶ τοῦτο μετὰ τῶν ἄλλων ὀνομάτων
οὐκ ἐδέξατο, καὶ τὸν κλῆρον τοῦ Αὐγούστου λαβὼν τὴν ἐπίκλησιν
αὐτοῦ ταύτην οὐκ ἔθετο. τούς τε σωματοφύλακας ἀμφ´ αὑτὸν ἤδη
ἔχων ἐδεῖτο δὴ τῆς γερουσίας συνάρασθαί οἱ ὥστε μηδὲν βίαιον ἐν
τῇ τοῦ σώματος αὐτοῦ ταφῇ παθεῖν· ἐδεδίει γὰρ δῆθεν μή τινες
αὐτὸ ἁρπάσαντες ἐν τῇ ἀγορᾷ, ὥσπερ τὸ τοῦ Καίσαρος, καύσωσι.
καὶ ἐπειδή γε κομψευσάμενός τις ἐπὶ τούτῳ φρουρὰν αὐτῷ ὡς οὐκ
ἔχοντι δοθῆναι ἐσηγήσατο, τόν τε χλευασμὸν αὐτοῦ συνῆκε, καὶ
ἔφη καὶ ὅτι "οἱ στρατιῶται οὐκ ἐμοὶ ἀλλὰ δημόσιοί εἰσι". ταῦτά
τε οὖν οὕτως ἔπρασσε, καὶ τὰ τῆς ἀρχῆς ἔργῳ πάντα διοικῶν ἠρνεῖτο
μηδὲν αὐτῆς δεῖσθαι. καὶ τὸ μὲν πρῶτον καὶ πᾶσαν αὐτὴν
διά τε τὴν ἡλικίαν (ἓξ γὰρ καὶ πεντήκοντα ἔτη ἐγεγόνει) καὶ δι´
ἀμβλυωπίαν (πλεῖστον γὰρ τοῦ σκότους βλέπων ἐλάχιστα τῆς ἡμέρας
ἑώρα) ἐξίστασθαι ἔλεγεν· ἔπειτα δὲ κοινωνούς τέ τινας καὶ
συνάρχοντας, οὔτι γε καὶ πάντων καθάπαξ ὥσπερ ἐν ὀλιγαρχίᾳ,
ἀλλ´ ἐς τρία μέρη νέμων αὐτήν, ᾔτει, καὶ τὸ μὲν αὐτὸς ἔχειν ἠξίου,
τῶν δὲ ἑτέρων ἄλλοις παρεχώρει. ἦν δὲ ταῦτα ἓν μὲν ἥ τε Ῥώμη
καὶ ἡ ἄλλη Ἰταλία, ἕτερον δὲ τὰ στρατόπεδα, καὶ ἕτερον οἱ λοιποὶ
ὑπήκοοι. ὡς οὖν πολὺς ἐνέκειτο, οἱ μὲν ἄλλοι καὶ ὣς ἀντέλεγον
δῆθεν καὶ ἐδέοντο αὐτοῦ ἄρχειν πάντων, Ἀσίνιος δὲ δὴ Γάλλος
παρρησίᾳ ἀεί ποτε πατρῴᾳ καὶ ὑπὲρ τὸ συμφέρον αὐτῷ χρώμενος
"ἑλοῦ" ἔφη "ἣν ἂν ἐθελήσῃς μοῖραν." καὶ Τιβέριος "καὶ πῶς οἷόν
τέ ἐστιν" εἶπεν "τὸν αὐτὸν καὶ νέμειν τι καὶ αἱρεῖσθαι;" συνεὶς οὖν
ὁ Γάλλος ἐν ᾧ κακοῦ ἐγεγόνει, τῷ μὲν λόγῳ ἐθεράπευσεν αὐτόν,
ὑπολαβὼν ὅτι "οὐχ ὡς καὶ τὸ τρίτον ἕξοντός σου, ἀλλ´ ὡς ἀδύνατον
ὂν τὴν ἀρχὴν διαιρεθῆναι, τοῦτό σοι προέτεινα", οὐ μέντοι καὶ τῷ
ἔργῳ ἐτιθάσευσεν, ἀλλὰ πολλὰ καὶ δεινὰ προπαθὼν μετὰ ταῦτα
ἐπαπεσφάγη. καὶ γὰρ καὶ τὴν γυναῖκα αὐτοῦ τὴν προτέραν ἐγεγαμήκει,
τόν τε Δροῦσον ὡς υἱὸν προσεποιεῖτο, ὅθενπερ καὶ πρότερον
διὰ μίσους αὐτῷ ἦν.
| [57,2] Fidèle à ce caractère, il écrivit aussitôt de Nole
aux armées et à toutes les provinces comme empereur,
sans toutefois en prendre le titre ; bien qu'il lui eût été
comme les autres, décerné, il ne l'accepta pas, et, bien
qu'héritier d'Auguste, il ne voulut pas en porter le surnom;
de plus, quoiqu'il eût déjà des gardes autour de sa
personne, il pria le sénat de lui venir en aide pour le
garantir de la violence lors des funérailles; il craignait,
disait-il, qu'on n'enlevât le corps d'Auguste, comme
autrefois celui de César, pour le brûler sur le Forum.
Quelqu'un ayant, pour se moquer de cette demande,
proposé de lui donner une garde, comme s'il n'en avait
pas eu une, Tibère comprit la raillerie, et répondit :
« Ce n'est pas à moi, mais à l'État que les soldats
appartiennent. » Telle fut sa conduite en cette circonstance,
et, bien qu'il disposât en réalité de toutes les
affaires, il disait qu'il n'avait nul besoin de l'empire.
D'abord il s'excusa de ne pas l'accepter tout entier sur
son âge (il avait cinquante-six ans) et sur la faiblesse de
sa vue (quoiqu'il vît très bien dans l'obscurité, ses yeux,
le jour, étaient très faibles); puis il demanda des citoyens
pour partager avec lui le soin des affaires et
pour l'aider à gouverner, non tout l'empire à la fois,
ainsi que cela se pratique dans un gouvernement oligarchique,
mais une des trois divisions qu'il établissait,
et dont il prenait une pour lui et cédait deux aux
autres. Ces divisions comprenaient : la première, Rome
et le reste de l'Italie; la seconde, les armées; la troisième,
le reste des peuples soumis. Comme il insistait
avec force sur ce partage, et que les sénateurs; de leur
côté, faisaient semblant de le contredire et le priaient
de se charger de tout, Asinius Gallus, qui usait sans
cesse, même contre ses intérêts, d'une liberté de parler
qu'il tenait de son père, s'écria : « Eh bien donc, choisis
la part qu'il te plaira. » — « Comment, repartit Tibère,
est-il possible que le même fasse les parts et choisisse? »
Gallus, comprenant alors dans quel malheur il s'était
précipité, essaya d'adoucir Tibère par ses paroles, en
ajoutant : « Ce n'est pas pour que tu te contentes d'un
tiers de l'empire, c'est parce que son partage est impossible
que je t'ai fait cette offre; » mais, en réalité, il
ne l'apaisa pas et finit, après beaucoup de mauvais traitements,
par être mis à mort. Il est vrai aussi de dire
que Gallus avait épousé la première femme de Tibère, et
qu'il revendiquait Drusus pour son fils, ce qui lui avait
valu, déjà même avant cette époque, la haine du prince.
| [57,3] ὁ δ´ οὖν Τιβέριος ταῦτα τότε ἐποίει τὸ μὲν πλεῖστον ὅτι οὕτω
τε ἐπεφύκει καὶ οὕτω προῄρητο, ἤδη δὲ καὶ ὅτι τά τε στρατεύματα,
καὶ τὰ Παννονικὰ καὶ τὰ Γερμανικά, ὑπετόπει, καὶ τὸν Γερμανικὸν
τῆς τότε Γερμανίας ἄρχοντα καὶ φιλούμενον ὑπ´ αὐτῶν ἐδεδίει. τοὺς
μὲν γὰρ ἐν τῇ Ἰταλίᾳ ὄντας τοῖς ὅρκοις τοῖς ὑπὸ τοῦ Αὐγούστου
καταδειχθεῖσι προκατέλαβεν· ἐς δὲ ἐκείνους ὑποπτεύων ἐπ´ ἀμφότερα
ἀνεῖχεν, ὅπως, ἄν τι νεωτερίσαντες ἐπικρατήσωσιν, ὡς καὶ ἰδιωτεύων
σωθῇ. καὶ πολλάκις γε διὰ τοῦτο καὶ ἀρρωστεῖν προσεποιεῖτο
καὶ οἴκοι κατέμενεν, ἵνα μὴ ἀναγκασθῇ ἀποκεκριμένον τι εἰπεῖν ἢ
πρᾶξαι. ἤδη μὲν γὰρ ἤκουσα ὅτι, ἐπειδὴ ἡ Λιουία ἄκοντος τοῦ
Αὐγούστου τὴν ἀρχὴν αὐτῷ περιπεποιηκέναι ἐλέγετο, ἔπραττεν,
ὅπως μὴ παρ´ ἐκείνης (καὶ γὰρ πάνυ αὐτῇ ἤχθετο) ἀλλὰ παρὰ τῆς
βουλῆς ἀναγκαστός, ὡς καὶ κατὰ ἀρετήν σφων προήκων, δόξειεν
αὐτὴν εἰληφέναι· καὶ προσέτι καὶ ἐκεῖνο, ὅτι τοὺς ἀνθρώπους ὁρῶν
ἀλλοτρίως ἑαυτῷ ἔχοντας διέμελλε καὶ διῆγεν, ὅπως μὴ φθάσαντές
τι νεοχμώσωσιν ἐλπίδι τοῦ καὶ ἐθελούσιον αὐτὸν τὴν ἀρχὴν ἀφήσειν,
μέχρις οὗ ἐγκρατὴς αὐτῆς διὰ πάντων ἐγένετο. οὐ μέντοι
καὶ ταῦθ´ οὕτως αἴτια τῆς διαγωγῆς ταύτης γράφω, ὡς τήν τε
ἐπιτήδευσιν τῆς γνώμης αὐτοῦ καὶ τὴν ταραχὴν τῶν στρατιωτῶν.
τὸν μὲν γὰρ Ἀγρίππαν παραχρῆμα ἀπὸ τῆς Νώλης πέμψας τινὰ
ἀπέκτεινε· καὶ ἔλεγε μὲν μὴ ἐκ τῆς ἑαυτοῦ προστάξεως τοῦτο
γεγονέναι, ἐπηπείλει τε τῷ δράσαντι, οὐ μὴν καὶ τιμωρίαν τινὰ
αὐτοῦ ἐποιήσατο, ἀλλ´ εἴα τοὺς ἀνθρώπους λογοποιεῖν, τοὺς μὲν
ὅτι ὁ Αὔγουστος αὐτὸν ὑπὸ τὴν τελευτὴν ἀπεχρήσατο, τοὺς δ´ ὅτι
ὁ ἑκατόνταρχος ὁ τὴν φρουρὰν αὐτοῦ ἔχων καινοτομοῦντά τι
ἀπέσφαξεν αὐτογνωμονήσας, ἄλλους ὡς ἡ Λιουία, ἀλλ´ οὐκ ἐκεῖνος,
ἀποθανεῖν αὐτὸν ἐκέλευσεν.
| [57,3] Cette conduite de Tibère lui était dictée, avant
tout, par son naturel et par sa politique, et aussi par ses
soupçons à l'égard des légions de Pannonie et de Germanie,
et par la crainte de Germanicus, alors gouverneur
de Germanie et l'amour de ces légions. Quant à celles
qui étaient en Italie, il y avait pourvu en exigeant d'elles
le serment institué par Auguste ; mais, soupçonnant la
fidélité des autres, il hésitait à prendre l'un ou l'autre
parti, afin de pouvoir, dans le cas où une révolte leur
assurerait l'avantage, vivre en sûreté comme n'étant
qu'un simple particulier. Plusieurs fois, pour ce motif,
il feignit d'être malade et se renferma chez lui, afin de
ne pas être contraint de faire ou dire rien de positif. On
m'a raconté aussi que Livie prétendant l'avoir fait arriver
à l'empire malgré Auguste, il usait de ce stratagème,
afin de paraître le tenir non pas de sa mère (il était
vivement irrité contre elle), mais du sénat, qui lui aurait
fait violence, à cause de la supériorité de son mérite ; et
aussi que, voyant les esprits mal disposés en sa faveur,
il attendait et traînait le temps en longueur, afin que,
dans l'espérance de le voir renoncer volontairement à
l'empire, personne ne vînt, en se révoltant, devancer
le moment où il se sentit bien le maître. Néanmoins
je rapporte ces choses moins pour affirmer que telles
furent les causes de sa conduite, que pour montrer
quel était le tour de son esprit et quels soulèvements
eurent lieu parmi les troupes. Il envoya sur-le-champ de
Nole un agent tuer Agrippa; il prétendit ensuite que le
meurtre n'avait pas été ordonné par lui, et fit des menaces
à celui qui l'avait commis. Néanmoins il ne le
punit pas, et laissa dire aux uns qu'Auguste, sur la fin
de sa vie, avait fait périr Agrippa; aux autres, que le
centurion chargé de sa garde l'avait tué de son propre
mouvement, parce qu'il tentait de se révolter; à d'autres
encore, que c'était Livie, et non Tibère, qui avait ordonné
la mort de ce prince.
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