[13,101] ᾿Αθηναῖοι δὲ πυθόμενοι τὴν ἐν ταῖς ᾿Αργινούσαις εὐημερίαν ἐπὶ μὲν τῇ νίκῃ τοὺς
στρατηγοὺς ἐπῄνουν, ἐπὶ δὲ τῷ περιιδεῖν ἀτάφους τοὺς ὑπὲρ τῆς ἡγεμονίας
τετελευτηκότας χαλεπῶς διετέθησαν. (2) Θηραμένους δὲ καὶ Θρασυβούλου
προαπεληλυθότων εἰς ᾿Αθήνας, ὑπολαβόντες οἱ στρατηγοὶ τούτους εἶναι τοὺς
διαβαλόντας πρὸς τὰ πλήθη περὶ τῶν τελευτησάντων, ἀπέστειλαν κατ' αὐτῶν
ἐπιστολὰς πρὸς τὸν δῆμον, διασαφοῦντες ὅτι τούτοις ἐπέταξαν ἀνελέσθαι τοὺς
τελευτήσαντας· ὅπερ μάλιστ' αὐτοῖς αἴτιον ἐγενήθη τῶν κακῶν. (3) Δυνάμενοι γὰρ
ἔχειν συναγωνιστὰς εἰς τὴν κρίσιν τοὺς περὶ Θηραμένην, ἄνδρας καὶ λόγῳ δυνατοὺς
καὶ φίλους πολλοὺς ἔχοντας, καὶ τὸ μέγιστον, συμπαραγεγονότας τοῖς εἰς τὴν
ναυμαχίαν πράγμασιν, ἐκ τῶν ἐναντίων ἔσχον ἀντιδίκους καὶ πικροὺς κατηγόρους.
(4) Ἀναγνωσθεισῶν γὰρ ἐν τῷ δήμῳ τῶν ἐπιστολῶν εὐθὺς μὲν τοῖς περὶ Θηραμένην
ὠργίζετο τὰ πλήθη, τούτων δὲ ἀπολογησαμένων συνέβη τὴν ὀργὴν πάλιν μεταπεσεῖν
εἰς τοὺς στρατηγούς. (5) Διόπερ ὁ δῆμος προέθηκεν αὐτοῖς κρίσιν, καὶ Κόνωνα μὲν
ἀπολύσας τῆς αἰτίας προσέταξε τούτῳ τὰς δυνάμεις παραδίδοσθαι, τοὺς δ' ἄλλους
ἐψηφίσατο τὴν ταχίστην ἥκειν. Ὧν ᾿Αριστογένης μὲν καὶ Πρωτόμαχος φοβηθέντες
τὴν ὀργὴν τοῦ πλήθους ἔφυγον, Θράσυλλος δὲ καὶ Καλλιάδης, ἔτι δὲ Λυσίας καὶ
Περικλῆς καὶ ᾿Αριστοκράτης μετὰ τῶν πλείστων νεῶν κατέπλευσαν εἰς τὰς ᾿Αθήνας,
ἐλπίζοντες τοὺς ἐν ταῖς ναυσὶ πολλοὺς ὄντας βοηθοὺς ἕξειν ἐν τῇ κρίσει. (6) Ὡς δ' εἰς
τὴν ἐκκλησίαν τὰ πλήθη συνῆλθον, τῆς μὲν κατηγορίας καὶ τῶν πρὸς χάριν
δημηγορούντων ἤκουον,τοὺς δ' ἀπολογουμένους συνθορυβοῦντες οὐκ ἠνείχοντο τῶν
λόγων. Οὐκ ἐλάχιστα δ' αὐτοὺς ἔβλαψαν οἱ συγγενεῖς τῶν τετελευτηκότων,
παρελθόντες μὲν εἰς τὴν ἐκκλησίαν ἐν πενθίμοις, δεόμενοι δὲ τοῦ δήμου
τιμωρήσασθαι τοὺς περιεωρακότας ἀτάφους τοὺς ὑπὲρ τῆς πατρίδος προθύμως
τετελευτηκότας. (7) Τέλος δ' οἵ τε τούτων φίλοι καὶ οἱ τοῖς περὶ Θηραμένην
συναγωνιζόμενοι πολλοὶ καθεστῶτες ἐνίσχυσαν, καὶ συνέβη καταδικασθῆναι τοὺς
στρατηγοὺς θανάτῳ καὶ δημεύσει τῶν οὐσιῶν.
| [13,101] Les Athéniens apprenant le grand succès qu'ils avaient eu aux Arginuses
donnèrent à leurs généraux de grande éloges sur cette victoire, mais ils ne
jugèrent pas de même de la négligence qu'ils avaient marquée pour la
sépulture des morts et ils se rendirent très sévères sur cet article. (2) Comme
Thrasybule et Théramène étaient arrivés les premiers à Athènes, les autres
chefs crurent que c'étaient ces deux-là qui les avaient accusés devant le
peuple d'être la cause de cette négligence. Dans cette pensée, ils écrivirent
des lettres au peuple, par lesquelles ils lui représentaient que ces deux
premiers avaient été chargés nommément de faire ensevelir les morts. (3)
Cette précaution téméraire fut la source de leur perte : car au lieu qu'ils
auraient pu avoir pour défenseurs Thrasybule et Théramène, qui avaient
beaucoup d'amis, dont plusieurs étaient accrédités par leur éloquence et qui
de plus avaient été présents à tout ce qui s'était passé dans le combat naval,
ils se firent d'eux, au contraire, des ennemis irréconciliables. (4) En effet, à la
première lecture de ces lettres, on inclinait d'abord à rejeter cette faute sur les
deux principaux chefs, mais ils furent justifiés de telle sorte que toute la colère
du peuple passa sur les autres officiers qu'on appela en jugement. (5) On
commença par absoudre Conon, auquel même on donna toutes les troupes,
après quoi on cita les chefs absents avec injonction de se rendre
incessamment dans la ville. Aristogène et Protomachus jugèrent à propos de
prendre la suite. Mais Thrasyllus, Calliade, Lysias, Periclès et Aristocrate,
vinrent à Athènes avec un grand nombre de vaisseaux, espérant que tous les
soldats qu'ils amenaient prendraient leur parti dans cette affaire. (6) Dès que
l'on fut assemblé pour le jugement, on admit les accusations et l'on goûta
même beaucoup l'éloquence de ceux qui aggravèrent le reproche. Mais on ne
reçut les défenses qu'avec beaucoup de bruit et de tumulte, et elles ne purent
se faire entendre. Les parents des morts ne contribuèrent pas peu à cette
disgrâce. Ils se présentèrent en deuil au milieu de l'assemblée, en conjurant le
peuple de punir des hommes coupables d'avoir omis les derniers devoirs à
l'égard de ceux qui avaient été tués pour le service de la patrie. (7) Enfin, le
parti de Théramène et des morts l'emporta : et les commandants furent
condamnés aux supplice et à la publication de leurs biens.
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