[8,1160] (1160a) (1) οὐ γὰρ ταὐτὰ γονεῦσι πρὸς τέκνα
καὶ ἀδελφοῖς πρὸς ἀλλήλους, οὐδ' ἑταίροις καὶ πολίταις, ὁμοίως δὲ
καὶ ἐπὶ τῶν ἄλλων φιλιῶν. Ἕτερα δὴ καὶ τὰ ἄδικα πρὸς ἑκάστους τούτων, καὶ
αὔξησιν λαμβάνει τῷ μᾶλλον πρὸς φίλους εἶναι, οἷον χρήματα (5) ἀποστερῆσαι
ἑταῖρον δεινότερον ἢ πολίτην, καὶ μὴ βοηθῆσαι ἀδελφῷ ἢ ὀθνείῳ, καὶ πατάξαι
πατέρα ἢ ὁντινοῦν ἄλλον. Αὔξεσθαι δὲ πέφυκεν ἅμα τῇ φιλίᾳ καὶ τὸ δίκαιον,
ὡς ἐν τοῖς αὐτοῖς ὄντα καὶ ἐπ' ἴσον διήκοντα. Αἱ δὲ κοινωνίαι πᾶσαι
μορίοις ἐοίκασι τῆς πολιτικῆς· συμπορεύονται (10) γὰρ ἐπί τινι συμφέροντι,
καὶ ποριζόμενοί τι τῶν εἰς τὸν βίον· καὶ ἡ πολιτικὴ δὲ κοινωνία τοῦ
συμφέροντος χάριν δοκεῖ καὶ ἐξ ἀρχῆς συνελθεῖν καὶ διαμένειν· τούτου γὰρ
καὶ οἱ νομοθέται στοχάζονται, καὶ δίκαιόν φασιν εἶναι τὸ κοινῇ συμφέρον.
Αἱ μὲν οὖν ἄλλαι κοινωνίαι κατὰ μέρη (15) τοῦ συμφέροντος ἐφίενται, οἷον
πλωτῆρες μὲν τοῦ κατὰ τὸν πλοῦν πρὸς ἐργασίαν χρημάτων ἤ τι τοιοῦτον,
συστρατιῶται δὲ τοῦ κατὰ τὸν πόλεμον, εἴτε χρημάτων εἴτε νίκης ἢ πόλεως
ὀρεγόμενοι, ὁμοίως δὲ καὶ φυλέται καὶ δημόται. (Ἔνιαι δὲ τῶν κοινωνιῶν δι'
ἡδονὴν δοκοῦσι γίνεσθαι, θιασωτῶν (20) καὶ ἐρανιστῶν· αὗται γὰρ θυσίας
ἕνεκα καὶ συνουσίας.) Πᾶσαι δ' αὗται ὑπὸ τὴν πολιτικὴν ἐοίκασιν εἶναι· οὐ
γὰρ τοῦ παρόντος συμφέροντος ἡ πολιτικὴ ἐφίεται, ἀλλ' εἰς ἅπαντα τὸν
βίον, Θυσίας τε ποιοῦντες καὶ περὶ ταύτας συνόδους, τιμάς ἀπονέμοντες
τοῖς θεοῖς, καὶ αὑτοῖς ἀναπαύσεις (25) πορίζοντες μεθ' ἡδονῆς. Αἱ γὰρ
ἀρχαῖαι θυσίαι καὶ σύνοδοι φαίνονται γίνεσθαι μετὰ τὰς τῶν καρπῶν
συγκομιδὰς οἷον ἀπαρχαί· μάλιστα γὰρ ἐν τούτοις ἐσχόλαζον τοῖς καιροῖς.
Πᾶσαι δὴ φαίνονται αἱ κοινωνίαι μόρια τῆς πολιτικῆς εἶναι· ἀκολουθήσουσι
δὲ αἱ τοιαῦται φιλίαι ταῖς (30) τοιαύταις κοινωνίαις.
X. Πολιτείας δ' ἐστὶν εἴδη τρία, ἴσαι δὲ καὶ παρεκβάσεις, οἷον φθοραὶ
τούτων. Εἰσὶ δ' αἱ μὲν πολιτεῖαι βασιλεία τε καὶ ἀριστοκρατία, τρίτη δὲ
ἀπὸ τιμημάτων, ἣν τιμοκρατικὴν λέγειν οἰκεῖον φαίνεται, πολιτείαν δ' αὐτὴν
(35) εἰώθασιν οἱ πλεῖστοι καλεῖν. Τούτων δὲ βελτίστη μὲν ἡ βασιλεία,
χειρίστη δ' ἡ τιμοκρατία. Παρέκβασις δὲ βασιλείας μὲν τυραννίς· (1160b)
(1) ἄμφω γὰρ μοναρχίαι, διαφέρουσι δὲ πλεῖστον· ὁ μὲν γὰρ τύραννος τὸ αὑτῷ
συμφέρον σκοπεῖ, ὁ δὲ βασιλεὺς τὸ τῶν ἀρχομένων. Οὐ γάρ ἐστι βασιλεὺς ὁ μὴ
αὐτάρκης καὶ πᾶσι τοῖς ἀγαθοῖς ὑπερέχων· ὁ δὲ (5) τοιοῦτος οὐδενὸς
προσδεῖται· τὰ ὠφέλιμα οὖν αὑτῷ μὲν οὐκ ἂν σκοποίη, τοῖς δ' ἀρχομένοις· ὁ
γὰρ μὴ τοιοῦτος κληρωτὸς ἄν τις εἴη βασιλεύς. Ἡ δὲ τυραννὶς ἐξ ἐναντίας
ταύτῃ· τὸ γὰρ ἑαυτῷ ἀγαθὸν διώκει. Καὶ φανερώτερον ἐπὶ ταύτης ὅτι
χειρίστη· κάκιστον δὲ τὸ ἐναντίον τῷ βελτίστῳ. (10) Μεταβαίνει δ' ἐκ
βασιλείας εἰς τυραννίδα· φαυλότης γάρ ἐστι μοναρχίας ἡ τυραννίς, ὁ δὲ
μοχθηρὸς βασιλεὺς τύραννος γίνεται. Ἐξ ἀριστοκρατίας δὲ εἰς ὀλιγαρχίαν
κακίᾳ τῶν ἀρχόντων, οἳ νέμουσι τὰ τῆς πόλεως παρὰ τὴν ἀξίαν, καὶ πάντα ἢ
τὰ πλεῖστα τῶν ἀγαθῶν ἑαυτοῖς, καὶ τὰς ἀρχὰς (15) ἀεὶ τοῖς αὐτοῖς, περὶ
πλείστου ποιούμενοι τὸ πλουτεῖν· ὀλίγοι δὴ ἄρχουσι καὶ μοχθηροὶ ἀντὶ τῶν
ἐπιεικεστάτων. Ἐκ δὲ τιμοκρατίας εἰς δημοκρατίαν· σύνοροι γάρ εἰσιν αὗται·
πλήθους γὰρ βούλεται καὶ ἡ τιμοκρατία εἶναι, καὶ ἴσοι πάντες οἱ ἐν τῷ
τιμήματι. Ἥκιστα δὲ μοχθηρόν ἐστιν ἡ (20) δημοκρατία· ἐπὶ μικρὸν γὰρ
παρεκβαίνει τὸ τῆς πολιτείας εἶδος. Μεταβάλλουσι μὲν οὖν μάλισθ' οὕτως αἱ
πολιτεῖαι· ἐλάχιστον γὰρ οὕτω καὶ ῥᾷστα μεταβαίνουσιν. Ὁμοιώματα δ' αὐτῶν
καὶ οἷον παραδείγματα λάβοι τις ἂν καὶ ἐν ταῖς οἰκίαις. Ἡ μὲν γὰρ πατρὸς
πρὸς υἱεῖς κοινωνία βασιλείας (25) ἔχει σχῆμα· τῶν τέκνων γὰρ τῷ πατρὶ
μέλει· ἐντεῦθεν δὲ καὶ Ὅμηρος τὸν Δία πατέρα προσαγορεύει· πατρικὴ γὰρ
ἀρχὴ βούλεται ἡ βασιλεία εἶναι. Ἐν Πέρσαις δ' ἡ τοῦ πατρὸς τυραννική·
χρῶνται γὰρ ὡς δούλοις τοῖς υἱέσιν. Τυραννικὴ δὲ καὶ ἡ δεσπότου πρὸς
δούλους· τὸ γὰρ (30) τοῦ δεσπότου συμφέρον ἐν αὐτῇ πράττεται. Αὕτη μὲν οὖν
ὀρθὴ φαίνεται, ἡ Περσικὴ δ' ἡμαρτημένη· τῶν διαφερόντων γὰρ αἱ ἀρχαὶ
διάφοροι. Ἀνδρὸς δὲ καὶ γυναικὸς ἀριστοκρατικὴ φαίνεται· κατ' ἀξίαν γὰρ ὁ
ἀνὴρ ἄρχει, καὶ περὶ ταῦτα ἃ δεῖ τὸν ἄνδρα· ὅσα δὲ γυναικὶ ἁρμόζει, (35)
ἐκείνῃ ἀποδίδωσιν. Ἁπάντων δὲ κυριεύων ὁ ἀνὴρ εἰς ὀλιγαρχίαν μεθίστησιν·
παρὰ τὴν ἀξίαν γὰρ αὐτὸ ποιεῖ, καὶ οὐχ ᾗ ἀμείνων.
| [8,1160] (1160a) car il n'est pas le même entre les parents et
leurs enfants, et entre les frères, les uns à l'égard des autres, ni entre
les citoyens, en général, et entre les membres d'une association
particulière Il en est ainsi des autres espèces d'amitiés.
L'injustice ne sera pas non plus la même dans chacune de ces
circonstances; elle sera plus grande à l'égard de ceux qui sont plus amis.
Par exemple, on sera plus coupable de faire éprouver une perte d'argent à
un ami de plaisir, qu'à un autre citoyen; de ne pas secourir un frère,
plutôt qu'un étranger; la violence envers un père sera plus criminelle
qu'envers un autre individu. Et la justice a naturellement des droits plus
étendus, à mesure que l'amitié est plus intime, parce qu'on vit au milieu
des mêmes objets, et qu'il y a égalité sous tous les rapports. D'ailleurs,
toutes les associations ressemblent à la société politique; elles tendent
à la satisfaction de quelque intérêt, et à procurer quelque avantage pour
la vie. Aussi, la société civile semble-t-elle n'avoir été établie dans le
principe, et ne se maintenir, qu'en vue de l'intérêt commun; il est le but
que se proposent les législateurs, et ils déclarent juste ce qui y est
conforme.
Or, les autres associations tendent également à quelque partie de cet
intérêt commun : ainsi, ceux qui s'embarquent ont pour but l'intérêt
résultant de la navigation, qui est de se procurer des richesses, ou
quelque autre chose avantageuse; les soldats ont en vue l'intérêt qui
résulte de la guerre, soit l'acquisition des richesses, soit la gloire de
la victoire, ou le désir des conquêtes. Il en est ainsi des membres d'une
même tribu, ou des citoyens d'un même bourg.
Quelques-unes de ces associations semblent même n'avoir pour but que le
plaisir, comme les repas où l'on célèbre quelque solennité, et ceux
où chacun contribue pour sa part; car on ne veut alors que faire des
sacrifices en commun, ou même on ne cherche que l'agrément d'être ensemble. Mais toutes ces espèces de sociétés sont, pour ainsi dire,
subordonnées à la société politique ; car ce n'est pas seulement l'intérêt
du moment que celle-ci s'applique à protéger, mais celui de toute la vie;
et c'est pour cela qu'on fait des sacrifices, qu'on ordonne des réunions
solennelles, en l'honneur des dieux, et qui offrent aux citoyens des
occasions de délassements agréables. Car anciennement ces sacrifices et
ces solennités se célébraient à l'époque qui suivait la récolte des fruits ;
c'étaient comme des prémices qu'on offrait à la divinité, parce
qu'alors on jouissait de plus de loisir.
Ainsi donc toutes les associations semblent n'être que des parties de la
société politique, et, par conséquent, le caractère de chacune d'elles se
reproduira dans autant d'espèces d'amitiés différentes.
X. Or, il y a trois espèces de gouvernements et autant de manières de
dévier de la forme propre à chacune d'elles, et qui en sont comme des
corruptions ou des dégénérations. Ces formes principales sont, la Royauté,
l'Aristocratie, et le Pouvoir accordé à ceux qui ont une certaine quotité
de revenu, forme que l'on pourrait désigner par le nom de Timocratie,
mais à laquelle on donne la plupart du temps celui de République. Cette
dernière est la pire de toutes; la meilleure est la royauté. La déviation
ou dégénération de la royauté est la tyrannie (1160b): car l'une et
l'autre sont monarchies; mais elles diffèrent prodigieusement, le tyran
n'ayant en vue que son intérêt personnel, au lieu que le roi n'a pour but
que l'intérêt de ceux qui sont soumis à son autorité. En effet, il
n'y a de véritable roi que celui qui sait se suffire à lui-même, et qui
surpasse les autres hommes en tout genre de biens et d'avantages : or, un
tel être n'a besoin de rien de plus, et, par conséquent, il ne saurait
être fort occupé de ce qui lui est utile; mais il ne s'intéressera qu'au
bien de ceux sur qui il a autorité. Celui qui ne sera pas tel, ne peut
devoir son autorité qu'à la faveur du sort, à l'effet du hasard.
Le tyran, au contraire, n'envisage jamais que son propre avantage. Et dès
lors, il est évident que la tyrannie est le pire de tous les
gouvernements, puisque c'est le contraire du plus parfait. Mais les états
passent ordinairement de l'une de ces formes à l'autre; car la tyrannie
est la corruption ou la dégénération de la monarchie, et un mauvais roi
devient tyran.
Les états sont aussi sujets à passer de l'aristocratie à l'oligarchie, par
l'effet des vices ou de la perversité de ceux qui ont le pouvoir, et qui,
disposant de la fortune publique, sans aucun égard au mérite, s'emparent
de tous les biens, ou au moins de la plus considérable partie, et ne
donnent les magistratures qu'aux mêmes personnes; ne faisant cas que des
richesses. Par conséquent, l'autorité, au lieu d'être exercée par les
citoyens les plus vertueux, tombe dans les mains d'un petit nombre
d'hommes dépravés.
Enfin, le passage de la timocratie à la démocratie (est encore fort
naturel); car ces deux formes de gouvernement sont, s'il le faut ainsi
dire, limitrophes; la timocratie étant le mode de gouvernement que la
multitude adopte le plus volontiers, et tous ceux qui ont un même revenu
étant naturellement portés à se regarder comme égaux. Au reste, entre les
corruptions ou dégénérations de ces formes diverses, la moins mauvaise est
la démocratie, parce que la république ne s'écarte pas beaucoup (de cette
forme principale dont elle est une corruption). Tels sont les changements
que subissent le plus communément les principales espèces de gouvernement,
parce qu'ils en sont la transition la plus facile et la forme la plus voisine.
On pourrait trouver des images et comme des exemples de ces formes dans le
mode d'existence des familles : car les relations d'un père avec ses
enfants offrent, en quelque sorte, une image de la royauté ; c'est pour
cela qu'Homère donne à Jupiter le nom de père : et l'autorité paternelle
ressemble, en effet, à la puissance royale. Mais, chez les Perses,
cette autorité du père est tyrannique; car ils disposent de leurs
enfants comme d'esclaves. Le pouvoir d'un maître sur ses esclaves est
également tyrannique; car l'intérêt du maître est tout ce que l'on
considère. Dans ce cas, néanmoins, l'autorité est ce qu'elle doit être ;
mais l'autorité paternelle, en Perse, est vicieuse et dépravée ; car
le pouvoir doit différer comme les personnes qui l'exercent.
Mais les rapports du mari avec la femme constituent une sorte de
gouvernement aristocratique: car le mari y exerce une autorité
proportionnée au mérite ou à la dignité, dans les choses où il convient
que l'homme commande; mais il abandonne à la femme tous les soins qui
conviennent à son sexe. Au contraire, s'il veut décider de tout en maître,
l'aristocratie alors dégénère en oligarchie; car ce n'est plus en vertu de
sa supériorité réelle et naturelle qu'il agit, mais il usurpe un pouvoir
supérieur à son mérite.
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