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[1,101] 101. Ἐς ἅπαντα δ' ἦν οὕτω φοβερὸς καὶ ἄκρος ὀργήν, ὡς καὶ Κόιντον
Λουκρήτιον Ὀφέλλαν τὸν Πραινεστὸν αὐτῷ λαβόντα καὶ Μάριον τὸν
ὕπατον ἐκπεπολιορκηκότα καὶ τὸ τέλος αὐτῷ τῆς νίκης συναγαγόντα,
ὑπατεύειν ἔτι ἱππέα ὄντα, πρὶν ταμιεῦσαι καὶ στρατηγῆσαι, διὰ τὸ
μέγεθος τῶν εἰργασμένων κατὰ παλαιὸν ἔθος ἀξιοῦντα καὶ τῶν πολιτῶν
δεόμενον, ἐπεὶ κωλύων καὶ ἀνατιθέμενος οὐ μετέπειθεν, ἐν ἀγορᾷ μέσῃ
κτεῖναι. Καὶ συναγαγὼν τὸ πλῆθος ἐς ἐκκλησίαν εἶπεν· « Ἴστε μέν, ὦ
ἄνδρες, καὶ παρ' ἐμοῦ δὲ ἀκούσατε, ὅτι Λουκρήτιον ἐγὼ κατέκανον
ἀπειθοῦντά μοι. » Καὶ λόγον εἶπε· « Φθεῖρες γεωργὸν ἀροτριῶντα
ὑπέδακνον· ὁ δὲ δὶς μέν, ἔφη, τὸ ἄροτρον μεθεὶς τὸν χιτωνίσκον
ἐκάθηρεν· ὡς δ' αὖθις ἐδάκνετο, ἵνα μὴ πολλάκις ἀργοίη, τὸν
χιτωνίσκον ἔκαυσεν. Κἀγὼ τοῖς δὶς ἡττημένοις παραινῶ τρίτου πυρὸς
μὴ δεηθῆναι. » Σύλλας μὲν δὴ καὶ τοῖσδε καταπληξάμενος αὐτούς, καθὰ
ἐβούλετο, ἦρχε. Καὶ ἐθριάμβευσεν ἐπὶ τῷ Μιθριδατείῳ πολέμῳ. Καί
τινες αὐτοῦ τῆν ἀρχὴν ἀρνουμένην βασιλείαν ἐπισκώπτοντες ἐκάλουν,
ὅτι τὸ τοῦ βασιλέως ὄνομα μόνον ἐπικρύπτοι· οἱ δ' ἐπὶ τοὐναντίον ἀπὸ
τῶν ἔργων μετέφερον καὶ τυραννίδα ὁμολογοῦσαν ἔλεγον.
| [1,101] 101. Il était si terrible et si irascible à tous égards, qu'il fit assassiner,
en plein Forum, Quintus Lucrétius Ofella, celui qui, après avoir tenu le
consul Marius longtemps assiégé dans Préneste, s'était enfin emparé,
pour lui, de cette place, et avait mis, par cette victoire, le comble à ses
succès. Il le fit égorger en plein Forum, sous prétexte qu'il s'était mis
sur les rangs pour le consulat alors qu'il était toujours chevalier, et qu'il
faisait, à ces fins, appel au peuple, en considération de l'importance de
ses services, quoiqu'il n'eût encore passé ni par la questure, ni par la
préture, ce qui n'était pas nécessaire anciennement, et qu'il avait
résisté aux instances que le dictateur lui avait faites pour l'engager à
se départir de ses prétentions. Il convoqua le peuple à ce sujet, et lui
dit : « Sachez, citoyens, et apprenez par ma bouche que j'ai fait donner
la mort à Lucrétius parce qu'il m'a résisté. » Et, à ce propos, il cita cet
apologue : « Un laboureur, pendant qu'il poussait sa charrue, fut mordu
par des poux. Il interrompit deux fois son travail pour éplucher sa
chemise. Mais les poux ayant continué de le mordre, il jeta sa chemise
au feu, afin de n'être pas obligé de perdre encore son temps à leur
donner la chasse. Que les vaincus apprennent de moi, par cet
exemple, à ne pas s'exposer à se faire jeter au feu la troisième fois. »
Ce fut en faisant frémir ainsi les Romains de terreur que Sylla
gouverna comme il voulut. Les honneurs du triomphe lui furent
décernés, au sujet de la guerre contre Mithridate. On se permit des
quolibets au sujet de sa magistrature. Quelques plaisants lui donnèrent
le nom de royauté négative, parce que le titre de roi fut la seule chose
dont il s'abstint. D'autres, au contraire, faisant allusion à son
administration, l'appelèrent une tyrannie avouée.
| [1,102] 102. Ἐς τοσοῦτον αὐτοῖς τε Ῥωμαίοις καὶ Ἰταλοῖς ἅπασιν ὁ πόλεμος ὅδε
προύβη κακοῦ, προύβη δὲ καὶ τοῖς ὑπὲρ τὴν Ἰταλίαν ἔθνεσιν ἅπασιν,
ἄρτι μὲν ὑπὸ λῃστῶν καὶ Μιθριδάτου καὶ Σύλλα πεπολεμημένοις, ἄρτι δ'
ἀποροῦντος τοῦ ταμείου διὰ τὰς στάσεις ἐκτετρυχωμένοις εἰσφοραῖς
πολλαῖς. Ἔθνη τε γὰρ πάντα καὶ βασιλέες, ὅσοι σύμμαχοι, καὶ πόλεις,
οὐχ ὅσαι μόνον ὑποτελεῖς, ἀλλὰ καὶ ὅσαι ἑαυτὰς ἐγκεχειρίκεσαν ἐπὶ
συνθήκαις ἔνορκοι καὶ ὅσαι διὰ συμμαχίαν ἤ τινα ἀρετὴν ἄλλην
αὐτόνομοί τε καὶ φόρων ἦσαν ἀτελεῖς, τότε πᾶσαι συντελεῖν ἐκελεύοντο
καὶ ὑπακούειν, χώρας τε ἔνιαι καὶ λιμένων κατὰ συνθήκας σφίσι
δεδομένων ἀφῃροῦντο.
Σύλλας δὲ καὶ Ἀλέξανδρον τὸν Ἀλεξάνδρου τοῦ ἐν Αἰγύπτῳ
βασιλεύσαντος υἱόν, ἀνατραφέντα μὲν ἐν Κῷ καὶ ὑπὸ Κῴων ἐκδοθέντα
Μιθριδάτῃ, διαφυγόντα δὲ πρὸς Σύλλαν ἐκ Μιθριδάτου καὶ συνήθη
γενόμενον, ἐψηφίσατο βασιλεύειν Ἀλεξανδρέων, ἐρήμου τῆς
Ἀλεξανδρέων ἀρχῆς ἀνδρὸς οὔσης καὶ τῶν γυναικῶν, ὅσαι βασιλείου
γένους, ἀνδρὸς συγγενοῦς δεομένων, ἐλπίσας χρηματιεῖσθαι πολλὰ ἐκ
βασιλείας πολυχρύσου. Ἀλλὰ τόνδε μὲν οἱ Ἀλεξανδρεῖς
ἐννεακαιδεκάτην ἡμέραν ἔχοντα τῆς ἀρχῆς καὶ ἀτοπώτερον σφῶν, οἷα
Σύλλᾳ πεποιθότα, ἐξηγούμενον, ἐς τὸ γυμνάσιον ἐκ τοῦ βασιλείου
προαγαγόντες ἔκτειναν. Οὕτως ἔτι καὶ οἵδε διά τε μέγεθος ἀρχῆς ἰδίας
καὶ τῶν ἔξωθεν κακῶν ἔτι ὄντες ἀπαθεῖς ἀφόβως εἶχον ἑτέρων.
| [1,102] 102. Tel fut l'excès des maux de tout genre que cette guerre répandit
sur Rome même et sur l'Italie entière. Outre l'Italie, toutes les autres
nations s'en ressentirent également ; tantôt ravagées par des brigands,
par Mithridate, ou par Sylla, tantôt épuisées par de nombreuses
contributions, lorsque, au milieu de ces désordres, le trésor public était
vide. Tous les peuples, tous les rois alliés, toutes les villes, non
seulement celles qui étaient soumises à des tributs, mais encore celles
qui s'y étaient spontanément obligées par des traités, ou celles qui, par
leurs services auxiliaires, ou par tout autre honorable motif, avaient
conservé leur indépendance politique et toute immunité d'impôts,
eurent ordre, dans ces circonstances, de fournir des subventions
pécuniaires, et il leur fallut obéir. Quelques-uns furent dépouillés de
portions de territoire, de ports, dont des traités leur assuraient la
possession. Cependant Sylla fit rendre, par un décret, le royaume
d'Égypte à Alexandre, fils d'un roi de ce nom. Ce prince avait été
envoyé dans l'île de Cos pour son éducation ; et, livré à Mithridate par
les habitants de cette île, il s'était échappé des mains de ce prince, et il
s'était sauvé auprès de Sylla, dont il avait obtenu la bienveillance. Ce
royaume, en effet, faute de mâle, était tombé en quenouille, et les
femmes qui le gouvernaient avaient besoin qu'un prince de leur sang
vînt s'unir à l'une d'elles. Sylla espérait retirer beaucoup d'argent de
cette riche contrée. Mais les Égyptiens, mécontents du début
d'Alexandre et de sa dépendance à l'égard de Sylla, le déposèrent, le
dix-neuvième jour de son règne, et l'égorgèrent après l'avoir conduit de
son palais au gymnase. Encore pleins de confiance dans l'étendue de
leur domination, et encore étrangers aux calamités extérieures, ils ne
s'en laissaient pas imposer de si loin. L'année suivante, Sylla, quoique
dictateur, se laissa nommer consul une seconde fois, pour paraître
conserver quelque empire aux formes démocratiques. Il eut Métellus le
Pieux pour collègue. C'est peut-être d'après cet exemple que, encore
aujourd'hui, les empereurs romains, en donnant des consuls à la
République, prennent eux-mêmes parfois le titre de cette magistrature,
et que, au faîte du pouvoir, ils considèrent comme un bien que d'avoir
charge en même temps du consulat.
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