[33] Φιλία δὲ ἡ μάλιστα καὶ κυρίως λεγομένη
οὐκ ἄλλη τίς ἐστι τῆς συνισταμένης κατ´ εὔνοιαν ἀντίστροφον·
αὕτη δὲ ὑφίσταται, ὅταν ἐπίσης ἑκάτερος βούληται τὸν πλησίον
καὶ ἑαυτὸν εὖ πράττειν. Ἡ δὲ ἰσότης αὕτη οὐκ ἄλλως σώζεται
ἢ κατὰ τὴν τοῦ ἤθους ὁμοιότητα· τὸ γὰρ ὅμοιον τῷ ὁμοίῳ
μετρίῳ ὄντι φίλον ὑπάρχει, τὰ δὲ ἄμετρα οὔτε ἀλλήλοις οὔτε
τοῖς συμμέτροις δύναται ἐφαρμόσαι.
Εἰσὶ δέ τινες καὶ ἄλλαι νομιζόμεναι φιλίαι, οὐ μὴν καὶ
οὖσαι, ὑπὸ τῆς ἀρετῆς ὥσπερ ἐπικεχρωσμέναι· ἥ τε φυσικὴ
τῶν γονέων πρὸς τὰ ἔκγονα καὶ ἡ τῶν συγγενῶν πρὸς ἀλλήλους
καὶ ἡ λεγομένη πολιτικὴ καὶ ἡ ἑταιρική, αὗται δὲ οὐκ ἀεὶ
ἔχουσι τὸ ἀντίστροφον τῆς εὐνοίας.
Εἶδος δέ πως φιλίας ἐστὶ καὶ τὸ ἐρωτικόν· ἔστι δὲ ἐρωτικὴ
ἡ μὲν ἀστεία, ἡ τῆς σπουδαίας ψυχῆς, ἡ δὲ φαύλη, ἡ τῆς
κακῆς, μέση δὲ ἡ τῆς μέσως διακειμένης. Ὥσπερ οὖν τρεῖς
εἰσὶν ἕξεις ψυχῆς λογικοῦ ζῴου, ἡ μὲν ἀγαθή, ἡ δὲ φαύλη,
τρίτη δὲ τούτων μέση, οὕτω καὶ τρεῖς ἐρωτικαὶ εἶεν ἂν κατ´
εἶδος ἀλλήλων διαφέρουσαι· τὸ δ´ εἶναι τρεῖς αὐτὰς δηλοῦσι
μάλιστα οἱ σκοποὶ διαφέροντες ἀλλήλων. Ἡ μὲν γὰρ φαύλη
μόνου τοῦ σώματός ἐστι, τοῦ ἡδέος ἡττωμένη καὶ ταύτῃ βοσκηματώδης
ὑπάρχουσα· ἡ δὲ ἀστεία ψιλῆς τῆς ψυχῆς ἕνεκεν, ᾗ
ἐνορᾶται ἐπιτηδειότης πρὸς ἀρετήν· ἡ δὲ μέση τοῦ συναμφοτέρου,
ὀρεγομένη μὲν τοῦ σώματος, ὀρεγομένη δὲ καὶ τοῦ κάλλους
τῆς ψυχῆς.
Ὁ δὲ ἀξιέραστος καὶ αὐτὸς μέσος τις ὑπάρχει οὔτε φαῦλος
ὢν οὔτε ἀστεῖος, ὅθεν καὶ τὸν σωματοποιούμενον Ἔρωτα δαίμονά
τινα μᾶλλον φατέον ἤπερ θεὸν μηδέποτε ἐν γηΐνῳ σώματι γεγενημένον, διαπορθμεύοντα τὰ παρὰ θεῶν ἀνθρώποις καὶ ἀνάπαλιν.
Κοινῶς δὲ τῆς ἐρωτικῆς εἰς τὰς τρεῖς ἰδέας διῃρημένης τὰς
προειρημένας, ἡ τοῦ ἀγαθοῦ τοίνυν ἐρωτικὴ ἀπηλλαγμένη πάθους
τεχνική τις ὑπάρχει, ὅθεν καὶ ἐν τῷ λογιστικῷ συνίσταται τῆς
ψυχῆς· θεωρήματα δ´ αὐτῆς τὸ γνῶναί τε τὸν ἀξιέραστον καὶ
κτήσασθαι καὶ χρήσασθαι· ἐπικρίνει δὲ αὐτὸν ἐκ τῶν προθέσεων
αὐτοῦ καὶ ὁρμῶν, εἰ εὐγενεῖς, εἰ ἐπὶ τὸ καλὸν γινόμεναι, εἰ
σφοδραί τε καὶ διάπυροι· κτήσεται δὲ αὐτὴν ὁ κτώμενος οὐ
θρύπτων οὐδ´ ἐπαινῶν τὰ παιδικά, ἀλλὰ μᾶλλον κωλύων καὶ
ἐνδεικνύμενος ὅτι οὐ βιωτὸν αὐτῷ οὕτως ἔχοντι ὡς νῦν ἔχει·
ὅταν δ´ ἕλῃ τὸν ἐρώμενον, χρήσεται αὐτῷ παρεγγυῶν ταῦτα,
δι´ ὧν ἀσκηθεὶς ἔσται τέλειος, τέλος δὲ αὐτοῖς τὸ ἀντὶ ἐραστοῦ
καὶ ἐρωμένου γενέσθαι φίλους.
| [33]
L'AMITIE, surtout celle qui est proprement ainsi nommée, consiste dans une
bienveillance réciproque : elle existe lorsque chacun veut également faire du bien à son prochain
et à lui-même ; et cette égalité ne peut subsister qu'avec une parfaite ressemblance de mœurs. Les
choses semblables entre elles, lorsqu'elles sont modérées, sympathisent réciproquement; mais les
choses immodérées ne peuvent convenir ni entre elles ni avec les choses qui ont une certaine
modération. Il y a d'autres amitiés auxquelles on donne ce nom, qu'elles ne méritent point, et qui
ne sont qu'une espèce de vernis de l'amitié proprement dite ; telle est l'amitié des parents pour
leurs enfants, celle des enfants entre eux, celle des citoyens les uns envers les autres, et celle d'un
amant pour sa maîtresse : ces affections n'ont pas toujours une réciprocité de bienveillance.
L'amour lui-même est une espèce d'amitié. Il en est de trois sortes ; l'un honnête, qui loge dans
une âme vertueuse; l'autre vicieux, qui est d'une âme corrompue; et un troisième, qui tient le
milieu. De même que l’âme d'un être raisonnable a trois modifications, la vertu, le vice, et
l'intermédiaire, il y a de même trois sortes d'amour spécialement différentes entre elles. La preuve
qu'il y a des amours de trois espèces se tire des divers objets de chacun d'eux. L'amour vicieux
n'est sensible qu'au plaisir du corps et n'est qu'une espèce de brutalité ; l'amour honnête n'a que
l’âme pour objet, et paraît entièrement tourné du côté de la vertu ; l'amour moyen est celui qui
tient de l'un et de l'autre, qui désire le plaisir du corps, mais qui s'attache aussi à la beauté de
l’âme. L'objet de cette dernière sorte d'amour tient lui-même le milieu, c'est-à-dire qu'il n'est ni
vicieux, ni vertueux: de manière que l'amour corporel doit être plutôt regardé comme un démon
que comme un dieu; car il n'a jamais été dans un corps d'homme, mais il communique à
l'homme les choses divines, et réciproquement. D'ailleurs l'amour considéré sous ce rapport ayant
été divisé dans les trois espèces dont nous venons de parler, l'amour d'un homme de bien étant
détaché des affections vicieuses est un amour (technique) proprement dit; il réside dans la partie
raisonnable de l’âme : son objet contemplatif est de discerner celui qui est digne d'affection, de le
posséder et de s'en servir : il le juge à ses inclinations et à ses penchants, s'ils sont honnêtes,
portés au bien, actifs, véhéments ; et s'il se détermine à s'y attacher, il ne vante ni la mollesse, ni
les plaisirs, il l'en éloigne, au contraire, et il lui fait sentir qu'il ne pourrait point vivre avec lui s'il
s'y livrait comme il fait actuellement. Lorsque son choix est fait, il en jouit en invitant celui qui en
est l'objet à se dévouer aux exercices propres à le rendre parfait : or la perfection de ce commerce
est de transformer l'amour en amitié.
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