[3,4] Ἰδὼν δέ ποτε Νικομαχίδην ἐξ ἀρχαιρεσιῶν ἀπιόντα ἤρετο·
Τίνες, ὦ Νικομαχίδη, στρατηγοὶ ᾕρηνται; καὶ ὅς, Οὐ γάρ,
ἔφη, ὦ Σώκρατες, τοιοῦτοί εἰσιν Ἀθηναῖοι, ὥστε ἐμὲ μὲν
οὐχ εἵλοντο, ὃς ἐκ καταλόγου στρατευόμενος κατατέτριμμαι
καὶ λοχαγῶν καὶ ταξιαρχῶν καὶ τραύματα ὑπὸ τῶν πολεμίων
τοσαῦτα ἔχων—ἅμα δὲ καὶ τὰς οὐλὰς τῶν τραυμάτων ἀπογυμνούμενος
ἐπεδείκνυεν—Ἀντισθένη δὲ, ἔφη, εἵλοντο τὸν
οὔτε ὁπλίτην πώποτε στρατευσάμενον ἔν τε τοῖς ἱππεῦσιν
οὐδὲν περίβλεπτον ποιήσαντα ἐπιστάμενόν τε ἄλλο οὐδὲν ἢ
χρήματα συλλέγειν; Οὐκοῦν, ἔφη ὁ Σωκράτης, τοῦτο μὲν
ἀγαθόν, εἴ γε τοῖς στρατιώταις ἱκανὸς ἔσται τὰ ἐπιτήδεια
πορίζειν; Καὶ γὰρ οἱ ἔμποροι, ἔφη ὁ Νικομαχίδης, χρήματα
συλλέγειν ἱκανοί εἰσιν. ἀλλ´ οὐχ ἕνεκα τούτου καὶ στρατηγεῖν
δύναιντ´ ἄν. καὶ ὁ Σωκράτης ἔφη· Ἀλλὰ καὶ φιλόνικος
Ἀντισθένης ἐστίν, ὃ στρατηγῷ προσεῖναι ἐπιτήδειόν
ἐστιν· οὐχ ὁρᾷς ὅτι καὶ ὁσάκις κεχορήγηκε πᾶσι τοῖς χοροῖς
νενίκηκε; Μὰ Δί´, ἔφη ὁ Νικομαχίδης, ἀλλ´ οὐδὲν ὅμοιόν
ἐστι χοροῦ τε καὶ στρατεύματος προεστάναι. Καὶ μήν,
ἔφη ὁ Σωκράτης, οὐδὲ ᾠδῆς γε ὁ Ἀντισθένης οὐδὲ χορῶν
διδασκαλίας ἔμπειρος ὢν ὅμως ἐγένετο ἱκανὸς εὑρεῖν τοὺς
κρατίστους ταῦτα. Καὶ ἐν τῇ στρατηγίᾳ οὖν, ἔφη ὁ Νικομαχίδης,
ἄλλους μὲν εὑρήσει τοὺς τάξοντας ἀνθ´ ἑαυτοῦ,
ἄλλους δὲ τοὺς μαχουμένους. Οὐκοῦν, ἔφη ὁ Σωκράτης,
ἐάν γε καὶ ἐν τοῖς πολεμικοῖς τοὺς κρατίστους, ὥσπερ ἐν
τοῖς χορικοῖς, ἐξευρίσκῃ τε καὶ προαιρῆται, εἰκότως ἂν καὶ
τούτου νικηφόρος εἴη· καὶ δαπανᾶν δ´ αὐτὸν εἰκὸς μᾶλλον
ἂν ἐθέλειν εἰς τὴν σὺν ὅλῃ τῇ πόλει τῶν πολεμικῶν νίκην
ἢ εἰς τὴν σὺν τῇ φυλῇ τῶν χορικῶν. Λέγεις σύ, ἔφη, ὦ
Σώκρατες, ὡς τοῦ αὐτοῦ ἀνδρός ἐστι χορηγεῖν τε καλῶς καὶ
στρατηγεῖν; Λέγω ἔγωγ´, ἔφη, ὡς, ὅτου ἄν τις προστατεύῃ,
ἐὰν γιγνώσκῃ τε ὧν δεῖ καὶ ταῦτα πορίζεσθαι δύνηται,
ἀγαθὸς ἂν εἴη προστάτης, εἴτε χοροῦ εἴτε οἴκου εἴτε πόλεως
εἴτε στρατεύματος προστατεύοι. καὶ ὁ Νικομαχίδης, Μὰ
Δί´, ἔφη, ὦ Σώκρατες, οὐκ ἄν ποτε ᾤμην ἐγὼ σοῦ ἀκοῦσαι
ὡς οἱ ἀγαθοὶ οἰκονόμοι ἀγαθοὶ στρατηγοὶ ἂν εἶεν. Ἴθι δή,
ἔφη, ἐξετάσωμεν τὰ ἔργα ἑκατέρου αὐτῶν, ἵνα εἰδῶμεν
πότερον τὰ αὐτά ἐστιν ἢ διαφέρει τι. Πάνυ γε, ἔφη.
Οὐκοῦν, ἔφη, τὸ μὲν τοὺς ἀρχομένους κατηκόους τε καὶ
εὐπειθεῖς ἑαυτοῖς παρασκευάζειν ἀμφοτέρων ἐστὶν ἔργον;
Καὶ μάλα, ἔφη. Τί δέ; τὸ προστάττειν ἕκαστα τοῖς ἐπιτηδείοις
πράττειν; Καὶ τοῦτ´, ἔφη. Καὶ μὴν τὸ τοὺς κακοὺς
κολάζειν καὶ τοὺς ἀγαθοὺς τιμᾶν ἀμφοτέροις οἶμαι προσήκειν.
Πάνυ μὲν οὖν, ἔφη. Τὸ δὲ τοὺς ὑπηκόους εὐμενεῖς
ποιεῖσθαι πῶς οὐ καλὸν ἀμφοτέροις; Καὶ τοῦτ´, ἔφη. Συμμάχους
δὲ καὶ βοηθοὺς προσάγεσθαι δοκεῖ σοι συμφέρειν
ἀμφοτέροις ἢ οὔ; Πάνυ μὲν οὖν, ἔφη. Ἀλλὰ φυλακτικοὺς
τῶν ὄντων οὐκ ἀμφοτέρους εἶναι προσήκει; Σφόδρα γ´,
ἔφη. Οὐκοῦν καὶ ἐπιμελεῖς καὶ φιλοπόνους ἀμφοτέρους
εἶναι προσήκει περὶ τὰ αὑτῶν ἔργα; Ταῦτα μέν, ἔφη, πάντα
ὁμοίως ἀμφοτέρων ἐστίν· ἀλλὰ τὸ μάχεσθαι οὐκέτι ἀμφοτέρων.
Ἀλλ´ ἐχθροί γέ τοι ἀμφοτέροις γίγνονται; Καὶ μάλα,
ἔφη, τοῦτό γε. Οὐκοῦν τὸ περιγενέσθαι τούτων ἀμφοτέροις
συμφέρει; Πάνυ γ´, ἔφη· ἀλλ´ ἐκεῖνο παρίης, ἂν δέῃ μάχεσθαι,
τί ὠφελήσει ἡ οἰκονομική; Ἐνταῦθα δήπου καὶ πλεῖστον,
ἔφη· ὁ γὰρ ἀγαθὸς οἰκονόμος, εἰδὼς ὅτι οὐδὲν οὕτω
λυσιτελές τε καὶ κερδαλέον ἐστίν, ὡς τὸ μαχόμενον τοὺς
πολεμίους νικᾶν, οὐδὲ οὕτως ἀλυσιτελές τε καὶ ζημιῶδες,
ὡς τὸ ἡττᾶσθαι, προθύμως μὲν τὰ πρὸς τὸ νικᾶν συμφέροντα
ζητήσει καὶ παρασκευάσεται, ἐπιμελῶς δὲ τὰ πρὸς τὸ ἡττᾶσθαι
φέροντα σκέψεται καὶ φυλάξεται, ἐνεργῶς δ´, ἂν τὴν
παρασκευὴν ὁρᾷ νικητικὴν οὖσαν, μαχεῖται, οὐχ ἥκιστα δὲ
τούτων, ἐὰν ἀπαράσκευος ᾖ, φυλάξεται συνάπτειν μάχην.
μὴ καταφρόνει, ἔφη, ὦ Νικομαχίδη, τῶν οἰκονομικῶν ἀνδρῶν·
ἡ γὰρ τῶν ἰδίων ἐπιμέλεια πλήθει μόνον διαφέρει
τῆς τῶν κοινῶν, τὰ δὲ ἄλλα παραπλήσια ἔχει, τὸ δὲ μέγιστον,
ὅτι οὔτε ἄνευ ἀνθρώπων οὐδετέρα γίγνεται οὔτε
δι´ ἄλλων μὲν ἀνθρώπων τὰ ἴδια πράττεται, δι´ ἄλλων δὲ
τὰ κοινά. οὐ γὰρ ἄλλοις τισὶν ἀνθρώποις οἱ τῶν κοινῶν
ἐπιμελόμενοι χρῶνται ἢ οἷσπερ τὰ ἴδια οἰκονομοῦντες· οἷς
οἱ ἐπιστάμενοι χρῆσθαι καὶ τὰ ἴδια καὶ τὰ κοινὰ καλῶς
πράττουσιν, οἱ δὲ μὴ ἐπιστάμενοι ἀμφοτέρωθι πλημμελοῦσι.
| [3,4] CHAPITRE IV.
Voyant un jour Nicomachide revenant de l'assemblée du
peuple, il lui dit : « Quels sont, Nicomachide, les stratèges
élus? » Alors celui-ci : « N'est-ce pas, Socrate, que voilà bien
les Athéniens ? Au lieu de m'élire, moi qui, depuis mon enrôlement,
ai vieilli dans la milice, qui ai été lochage et taxiarque,
qui ai reçu tant de blessures de nos ennemis (et en même
temps il les mettait à nu et en montrait les cicatrices ), ils ont
été choisir un Antisthène, qui n'a jamais servi comme hoplite,
qui n'a jamais rien fait de saillant dans la cavalerie, et qui ne
sait rien qu'amasser de l'argent. — Mais, reprit Socrate,
n'est-ce pas une qualité excellente, si elle lui sert à procurer
le nécessaire aux soldats? — Les marchands aussi, dit Nicomachide,
sont bons à amasser de l'argent, mais ce n'est pas une
raison pour qu'ils puissent commander une armée. » Alors
Socrate : « Mais Antisthène est aussi passionné par la gloire,
qualité nécessaire à un général. Ne vois-tu pas que, toutes les
fois qu'il a été chorége, son choeur l'a emporté sur tous les
autres? — Par Jupiter, dit Nicomachide, autre chose est d'être
à la tête d'un choeur ou d'une armée. — Cependant, reprit Socrate,
Antisthène, qui ne sait pas chanter, qui est incapable
d'instruire des choeurs, a eu, malgré cela, le talent de choisir
les meilleurs artistes. — Il trouvera donc aussi à l'armée, dit
Nicomachide, des gens qui mettront pour lui les troupes en
bataille, et qui combattront à sa place. — Si donc, reprit Socrate,
il sait trouver et choisir les meilleurs soldats, comme
il a choisi les meilleurs choristes, il pourrait bien aussi remporter
la palme guerrière ; et il est vraisemblable qu'il aimera
mieux encore se mettre en dépense pour triompher à la
guerre avec toute la république, qu'avec sa tribu seule dans
les choeurs. — Tu dis donc, Socrate, que le même homme peut
être à la fois bon chorége et bon stratége? — Je dis, qu'un
homme qui, placé à la tête de quoi que ce soit, sait ce qu'il
faut et se le procure, sera un excellent directeur, qu'on le
place à la tête d'un choeur, d'une maison, d'une ville, d'une
armée.» Alors Nicomachide : «Par Jupiter, Socrate, je n'aurais
jamais cru t'entendre dire qu'un bon économe peut être bon
général. — Eh bien, examinons les devoirs de l'un et et de
l'autre, et voyons s'ils sont les mêmes ou s'ils sont différents.
—Voyons.—Et d'abord s'entourer de subordonnés obéissants et
dociles, n'est-ce pas le devoir de l'un et de l'autre? — Assurément.
— Maintenant ne doivent-ils pas imposer à chacun les
fonctions qu'il peut remplir? — C'est juste. — Je crois qu'ils
sont également tenus de châtier les lâches et de récompenser
les bons. — Certainement. — Tous deux ne feront-ils pas bien
de se concilier l'affection de leurs subordonnés? — Assurément.
— Ont-ils également intérêt ou non à se faire des alliés
et des auxiliaires? — C'est également leur intérêt. — Tous
deux ne doivent-ils pas s'efforcer de conserver les biens présents?
— Rien de mieux. —Enfin, dans leurs attributions différentes,
ne doivent-ils pas être également laborieux et attentifs?
— Tous ces devoirs leur sont communs sans exception; mais
pour ce qui est de combattre, ce n'est plus la même chose. —
Cependant tous deux ont des ennemis ? — Sans aucun doute,
ils en ont. — N'ont-ils donc pas le même intérêt à l'emporter
sur eux? — Certainement; mais ce que tu négliges de nous
dire, c'est de quoi leur servira, s'il faut se battre, la science économique.
— En ce cas même, elle leur sera de la plus grande
utilié; un bon économe, sachant qu'il n'y a rien de plus utile,
de plus avantageux que de vaincre les ennemis dans une bataille,
rien de plus nuisible, de plus ruineux que d'être vaincu,
sera plein de zèle pour chercher et pour se ménager tout ce
qui peut aider à la victoire ; d'attention à se défier et à se garantir
de tout ce qui peut amener une défaite, d'énergie à combattre,
en voyant qu'il a tout ce qu'il faut pour vaincre : autrement,
si ces resources lui font défaut, il se gardera bien d'engager
l'action. Ne méprise donc pas, Nicomachide, les bons
économes. Les affaires des particuliers ne diffèrent que par le
nombre des affaires publiques : tous les autres points se ressemblent;
et l'essentiel, c'est que les unes et les autres ne peuvent
se traiter que par des hommes, que ce ne sont pas tels
hommes qui font les affaires privées, et tels autres les affaires
publiques, que ceux qui dirigent les affaires publiques n'emploient
pas certains hommes, et certains autres ceux qui administrent
les affaires privées. Or, quand on sait bien employer
les hommes, on dirige également bien les affaires privées ou
publiques; quand on ne le sait pas, des deux côtés on ne commet
que des bévues."
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