| [5,1,10] Μετὰ δὲ ταῦτα Χαβρίας ἐξέπλει εἰς Κύπρον βοηθῶν
 Εὐαγόρᾳ, πελταστάς τ´ ἔχων ὀκτακοσίους καὶ δέκα τριήρεις,
 προσλαβὼν δὲ καὶ Ἀθήνηθεν ἄλλας τε ναῦς καὶ ὁπλίτας.
 αὐτὸς δὲ τῆς νυκτὸς ἀποβὰς εἰς τὴν Αἴγιναν πορρωτέρω τοῦ
 Ἡρακλείου ἐν κοίλῳ χωρίῳ ἐνήδρευσεν, ἔχων τοὺς πελταστάς.
 ἅμα δὲ τῇ ἡμέρᾳ, ὥσπερ συνέκειτο, ἧκον οἱ τῶν Ἀθηναίων
 ὁπλῖται, Δημαινέτου αὐτῶν ἡγουμένου, καὶ ἀνέβαινον τοῦ
 Ἡρακλείου ἐπέκεινα ὡς ἑκκαίδεκα σταδίους, ἔνθα ἡ Τριπυργία
 καλεῖται. ἀκούσας δὲ ταῦτα ὁ Γοργώπας, ἐβοήθει μετά τε
 τῶν Αἰγινητῶν καὶ σὺν τοῖς τῶν νεῶν ἐπιβάταις καὶ Σπαρτιατῶν 
 οἳ ἔτυχον αὐτόθι παρόντες ὀκτώ. καὶ ἀπὸ τῶν
 πληρωμάτων δὲ τῶν ἐκ τῶν νεῶν ἐκήρυξε βοηθεῖν ὅσοι
 ἐλεύθεροι εἶεν· ὥστ´ ἐβοήθουν καὶ τούτων πολλοί, ὅ τι
 ἐδύνατο ἕκαστος ὅπλον ἔχων. ἐπεὶ δὲ παρήλλαξαν οἱ πρῶτοι
 τὴν ἐνέδραν, ἐξανίστανται οἱ περὶ τὸν Χαβρίαν, καὶ εὐθὺς 
 ἠκόντιζον καὶ ἔβαλλον. ἐπῇσαν δὲ καὶ οἱ ἐκ τῶν νεῶν
 ἀποβεβηκότες ὁπλῖται. καὶ οἱ μὲν πρῶτοι, ἅτε οὐδενὸς
 ἁθρόου ὄντος, ταχὺ ἀπέθανον, ὧν ἦν Γοργώπας τε καὶ οἱ
 Λακεδαιμόνιοι· ἐπεὶ δὲ οὗτοι ἔπεσον, ἐτράπησαν δὴ καὶ
 οἱ ἄλλοι. καὶ ἀπέθανον Αἰγινητῶν μὲν ὡς πεντήκοντα καὶ
 ἑκατόν, ξένοι δὲ καὶ μέτοικοι καὶ ναῦται καταδεδραμηκότες
 οὐκ ἐλάττους διακοσίων. ἐκ δὲ τούτου οἱ μὲν Ἀθηναῖοι,
 ὥσπερ ἐν εἰρήνῃ, ἔπλεον τὴν θάλατταν· οὐδὲ γὰρ τῷ Ἐτεονίκῳ 
 ἤθελον οἱ ναῦται καίπερ ἀναγκάζοντι ἐμβάλλειν, ἐπεὶ
 μισθὸν οὐκ ἐδίδου.
 Ἐκ δὲ τούτου οἱ Λακεδαιμόνιοι Τελευτίαν αὖ †ἐπὶ ταύτῃ
 ἐκπέμπουσιν ἐπὶ ταύτας τὰς ναῦς ναύαρχον. ὡς δὲ εἶδον
 αὐτὸν ἥκοντα οἱ ναῦται, ὑπερήσθησαν. ὁ δ´ αὐτοὺς συγκαλέσας 
 εἶπε τοιάδε· Ὦ ἄνδρες στρατιῶται, ἐγὼ χρήματα μὲν
 οὐκ ἔχων ἥκω· ἐὰν μέντοι θεὸς ἐθέλῃ καὶ ὑμεῖς συμπροθυμῆσθε, 
 πειράσομαι τὰ ἐπιτήδεια ὑμῖν ὡς πλεῖστα πορίζειν.
 εὖ δ´ ἴστε, ἐγὼ ὅταν ὑμῶν ἄρχω, εὔχομαί τε οὐδὲν ἧττον ζῆν
 ὑμᾶς ἢ καὶ ἐμαυτόν, τά τ´ ἐπιτήδεια θαυμάσαιτε μὲν ἂν ἴσως,
 εἰ φαίην βούλεσθαι ὑμᾶς μᾶλλον ἢ ἐμὲ ἔχειν· ἐγὼ δὲ νὴ
 τοὺς θεοὺς καὶ δεξαίμην ἂν αὐτὸς μᾶλλον δύο ἡμέρας ἄσιτος
 ἢ ὑμᾶς μίαν γενέσθαι· ἥ γε μὴν θύρα ἡ ἐμὴ ἀνέῳκτο μὲν
 δήπου καὶ πρόσθεν εἰσιέναι τῷ δεομένῳ τι ἐμοῦ, ἀνεῴξεται
 δὲ καὶ νῦν. ὥστε ὅταν ὑμεῖς πλήρη ἔχητε τὰ ἐπιτήδεια,
 τότε καὶ ἐμὲ ὄψεσθε ἀφθονώτερον διαιτώμενον· ἂν δὲ ἀνεχόμενόν 
 με ὁρᾶτε καὶ ψύχη καὶ θάλπη καὶ ἀγρυπνίαν, οἴεσθε
 καὶ ὑμεῖς ταῦτα πάντα καρτερεῖν. οὐδὲν γὰρ ἐγὼ τούτων
 κελεύω ὑμᾶς ποιεῖν ἵνα ἀνιᾶσθε, ἀλλ´ ἵνα ἐκ τούτων ἀγαθόν
 τι λαμβάνητε. καὶ ἡ πόλις δέ τοι, ἔφη, ὦ ἄνδρες στρατιῶται, 
 ἡ ἡμετέρα, ἣ δοκεῖ εὐδαίμων εἶναι, εὖ ἴστε ὅτι τἀγαθὰ καὶ
 τὰ καλὰ ἐκτήσατο οὐ ῥᾳθυμοῦσα, ἀλλὰ ἐθέλουσα καὶ πονεῖν
 καὶ κινδυνεύειν, ὁπότε δέοι. καὶ ὑμεῖς οὖν ἦτε μὲν καὶ
 πρότερον, ὡς ἐγὼ οἶδα, ἄνδρες ἀγαθοί· νῦν δὲ πειρᾶσθαι
 χρὴ ἔτι ἀμείνους γίγνεσθαι, ἵν´ ἡδέως μὲν συμπονῶμεν,
 ἡδέως δὲ συνευδαιμονῶμεν. τί γὰρ ἥδιον ἢ μηδένα ἀνθρώπων
 κολακεύειν μήτε Ἕλληνα μήτε βάρβαρον ἕνεκα μισθοῦ, ἀλλ´
 ἑαυτοῖς ἱκανοὺς εἶναι τὰ ἐπιτήδεια πορίζεσθαι, καὶ ταῦτα
 ὅθενπερ κάλλιστον; ἡ γάρ τοι ἐν πολέμῳ ἀπὸ τῶν πολεμίων
 ἀφθονία εὖ ἴστε ὅτι ἅμα τροφήν τε καὶ εὔκλειαν ἐν πᾶσιν
 ἀνθρώποις παρέχεται.
 Ὁ μὲν ταῦτ´ εἶπεν, οἱ δὲ πάντες ἀνεβόησαν παραγγέλλειν
 ὅ τι ἂν δέῃ, ὡς σφῶν ὑπηρετησόντων. ὁ δὲ τεθυμένος ἐτύγχανεν· 
 εἶπε δέ· Ἄγετε, ὦ ἄνδρες, δειπνήσατε μὲν ἅπερ καὶ
 ὣς ἐμέλλετε· προπαράσχεσθε δέ μοι μιᾶς ἡμέρας σῖτον.
 ἔπειτα δὲ ἥκετε ἐπὶ τὰς ναῦς αὐτίκα μάλα, ὅπως πλεύσωμεν
 ἔνθα θεὸς ἐθέλει, ἐν καιρῷ ἀφιξόμενοι. ἐπειδὴ δὲ ἦλθον,
 ἐμβιβασάμενος αὐτοὺς εἰς τὰς ναῦς ἔπλει τῆς νυκτὸς εἰς τὸν
 λιμένα τῶν Ἀθηναίων, τοτὲ μὲν ἀναπαύων καὶ παραγγέλλων
 ἀποκοιμᾶσθαι, τοτὲ δὲ κώπαις προσκομιζόμενος. εἰ δέ τις
 ὑπολαμβάνει ὡς ἀφρόνως ἔπλει δώδεκα τριήρεις ἔχων ἐπὶ
 πολλὰς ναῦς κεκτημένους, ἐννοησάτω τὸν ἀναλογισμὸν αὐτοῦ.
 | [5,1,10]  Après ces événements, Chabrias mit à la voile pour Chypre 
afin de porter secours à Évagoras; il avait avec lui huit cents 
peltastes et dix trières. Il prit encore à Athènes d'autres 
vaisseaux et des hoplites. Il débarqua lui-même pendant la 
nuit à Égine et se mit en embuscade avec ses peltastes 
dans un endroit creux au-delà du temple d'Héraclès. Au 
point du jour, comme il était convenu, les hoplites 
athéniens arrivèrent sous la conduite de Dèmainétos et 
montèrent à seize stades environ de l'autre côté du temple 
d'Héraclès, à l'endroit appelé Tripyrgia. 11. Dès qu'il en fut 
informé, Gorgopas accourut avec les Éginètes, ses soldats 
de marine et les huit Spartiates qui se trouvaient auprès de 
lui. Il fit aussi proclamer que tous les hommes libres de ses 
équipages eussent à le suivre, et il en vint un grand 
nombre, chacun avec les armes qu'il avait pu se procurer. 
12. Quand les premiers rangs eurent dépassé l'embuscade, 
Chabrias et les siens se lèvent et les accablent aussitôt de 
traits et de flèches. En même temps, les hoplites débarqués 
des vaisseaux s'avancent. Les ennemis qui marchaient en 
tête, en rangs peu serrés, furent presque aussitôt tués, et, 
parmi eux, Gorgopas et les Lacédémoniens. Quand ils 
furent tombés, les autres prirent la fuite, et il y eut environ 
cent cinquante Éginètes tués et pas moins de deux cents 
mercenaires, métèques et matelots accourus à la 
rescousse. 13. A partir de ce moment, les Athéniens purent tenir la 
mer comme en pleine paix. Car les matelots d'Étéonicos, 
qui ne recevaient plus de solde, refusaient de ramer, bien 
qu'il voulût les y contraindre. À la suite de cet échec, les 
Lacédémoniens envoient de nouveau Téleutias prendre le 
commandement de ces vaisseaux. En le voyant arriver, les 
matelots furent au comble de la joie. Il les convoqua et leur 
tint ce discours : 14. « Soldats, je viens sans avoir 
d'argent; mais, si Dieu le veut et si vous m'aidez de votre 
zèle, j'essaierai de vous procurer le plus de vivres possible. 
Soyez assurés que, quand je vous commande, je ne prie 
pas moins pour votre vie que pour la mienne. Quant aux 
vivres, vous seriez surpris peut-être, si je vous disais que 
j'aime mieux vous en voir pourvus que d'en avoir moi-même. 
J'en atteste les dieux, j'accepterais plus volontiers 
de me voir deux jours sans manger que vous un seul. 
Auparavant, vous le savez, n'est-ce pas ? ma porte était 
toujours ouverte à qui voulait me demander quelque chose; 
elle le sera encore à présent. 15. Ainsi, ce n'est que lorsque 
vous aurez des vivres en abondance, que vous me verrez 
vivre plus largement; mais, si vous me voyez endurer le 
froid, le chaud, les veilles, dites-vous que, vous aussi, vous 
devez supporter tout cela; car, quelle que soit celle de ces 
privations que je vous impose, ce n'est jamais pour vous 
chagriner, mais pour que vous en retiriez quelque bien. 16. 
Sachez, soldats, poursuivit-il, que, si notre ville passe pour 
une ville prospère, ce n'est point en s'abandonnant à la 
mollesse qu'elle a acquis sa prospérité et sa gloire, mais en 
s'exposant volontairement aux travaux et aux dangers 
quand il le fallait. Vous aussi je le sais, vous avez déjà 
montré que vous êtes des braves; mais aujourd'hui il faut 
vous efforcer de vous surpasser encore, afin que nous 
partagions avec joie et les labeurs et les succès. 17. Qu'y 
a-t-il en effet de plus agréable que de n'avoir à flatter 
personne, ni grec, ni barbare, pour en obtenir une paye, et 
d'être capable de se procurer soi-même sa subsistance, et 
cela, par les moyens les plus honorables ? Car, sachez-le 
bien, l'abondance qu'on se procure à la guerre aux dépens 
de l'ennemi nous donne tout à la fois de la nourriture et de 
la gloire aux yeux de tous les hommes. » 18. Quand il eut 
prononcé ces paroles, tous les soldats lui crièrent qu'il 
n'avait qu'à donner des ordres et qu'il pouvait compter sur 
leur obéissance. Comme il venait justement de sacrifier, il 
leur dit : « Allez, soldats, prenez votre repas, comme vous 
alliez le faire, et prenez-moi des vivres pour un jour, puis 
venez tout de suite aux vaisseaux, afin que nous mettions à 
la voile où Dieu le veut et que nous arrivions au bon 
moment. » 19. Quand ils furent arrivés, il les fit monter sur 
les vaisseaux et cingla pendant la nuit sur le port 
d'Athènes, tantôt faisant reposer ses hommes et leur 
commandant de dormir, tantôt les remettant aux rames. Si 
l'on s'imagine que c'était une folie de marcher avec douze 
trières contre un ennemi qui disposait de tant de vaisseaux, 
que l'on songe au calcul qu'il avait fait. 
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