[2,3,50] (50) Ὡς δ᾽ εἰπὼν ταῦτα ἐπαύσατο, καὶ ἡ βουλὴ δήλη ἐγένετο εὐμενῶς
ἐπιθορυβήσασα, γνοὺς ὁ Κριτίας ὅτι εἰ ἐπιτρέψοι τῇ βουλῇ διαψηφίζεσθαι περὶ
αὐτοῦ, ἀναφεύξοιτο, καὶ τοῦτο οὐ βιωτὸν ἡγησάμενος, προσελθὼν καὶ
διαλεχθείς τι τοῖς τριάκοντα ἐξῆλθε, καὶ ἐπιστῆναι ἐκέλευσε τοὺς τὰ ἐγχειρίδια
ἔχοντας φανερῶς τῇ βουλῇ ἐπὶ τοῖς δρυφάκτοις.
(51) Πάλιν δὲ εἰσελθὼν εἶπεν· « Ἐγώ, ὦ βουλή, νομίζω προστάτου ἔργον εἶναι
οἵου δεῖ, ὃς ἂν ὁρῶν τοὺς φίλους ἐξαπατωμένους μὴ ἐπιτρέπῃ. Καὶ ἐγὼ οὖν
τοῦτο ποιήσω. καὶ γὰρ οἵδε οἱ ἐφεστηκότες οὔ φασιν ἡμῖν ἐπιτρέψειν, εἰ
ἀνήσομεν ἄνδρα τὸν φανερῶς τὴν ὀλιγαρχίαν λυμαινόμενον. Ἔστι δὲ ἐν τοῖς
καινοῖς νόμοις τῶν μὲν ἐν τοῖς τρισχιλίοις ὄντων μηδένα ἀποθνῄσκειν ἄνευ τῆς
ὑμετέρας ψήφου, τῶν δ᾽ ἔξω τοῦ καταλόγου κυρίους εἶναι τοὺς τριάκοντα
θανατοῦν. Ἐγὼ οὖν, ἔφη, Θηραμένην τουτονὶ ἐξαλείφω ἐκ τοῦ καταλόγου,
συνδοκοῦν ἅπασιν ἡμῖν. Καὶ τοῦτον, ἔφη, ἡμεῖς θανατοῦμεν. »
(52) Ἀκούσας ταῦτα ὁ Θηραμένης ἀνεπήδησεν ἐπὶ τὴν ἑστίαν καὶ εἶπεν· « Ἐγὼ
δ᾽, ἔφη, ὦ ἄνδρες, ἱκετεύω τὰ πάντων ἐννομώτατα, μὴ ἐπὶ Κριτίᾳ εἶναι ἐξαλείφειν
μήτε ἐμὲ μήτε ὑμῶν ὃν ἂν βούληται, ἀλλ᾽ ὅνπερ νόμον οὗτοι ἔγραψαν περὶ τῶν
ἐν τῷ καταλόγῳ, κατὰ τοῦτον καὶ ὑμῖν καὶ ἐμοὶ τὴν κρίσιν εἶναι.
(53) Καὶ τοῦτο μέν, ἔφη, μὰ τοὺς θεοὺς οὐκ ἀγνοῶ, ὅτι οὐδέν μοι ἀρκέσει ὅδε ὁ
βωμός, ἀλλὰ βούλομαι καὶ τοῦτο ἐπιδεῖξαι, ὅτι οὗτοι οὐ μόνον εἰσὶ περὶ
ἀνθρώπους ἀδικώτατοι, ἀλλὰ καὶ περὶ θεοὺς ἀσεβέστατοι. Ὑμῶν μέντοι, ἔφη, ὦ
ἄνδρες καλοὶ κἀγαθοί, θαυμάζω, εἰ μὴ βοηθήσετε ὑμῖν αὐτοῖς, καὶ ταῦτα
γιγνώσκοντες ὅτι οὐδὲν τὸ ἐμὸν ὄνομα εὐεξαλειπτότερον ἢ τὸ ὑμῶν ἑκάστου. »
(54) Ἐκ δὲ τούτου ἐκέλευσε μὲν ὁ τῶν τριάκοντα κῆρυξ τοὺς ἕνδεκα ἐπὶ τὸν
Θηραμένην· ἐκεῖνοι δὲ εἰσελθόντες σὺν τοῖς ὑπηρέταις, ἡγουμένου αὐτῶν
Σατύρου τοῦ θρασυτάτου τε καὶ ἀναιδεστάτου, εἶπε μὲν ὁ Κριτίας· «
Παραδίδομεν ὑμῖν, ἔφη, Θηραμένην τουτονὶ κατακεκριμένον κατὰ τὸν νόμον·
ὑμεῖς δὲ λαβόντες καὶ ἀπαγαγόντες οἱ ἕνδεκα οὗ δεῖ τὰ ἐκ τούτων πράττετε. »
| [2,3,50] 50. Quand Théramène cessa de parler, le sénat laissa voir par ses applaudissements qu'il
sympathisait avec lui. Critias, comprenant que, s'il s'en remettait au sénat de trancher le
différend, son adversaire lui échapperait et que dès lors la vie lui serait intolérable, s'approcha
des Trente, se consulta brièvement avec eux et sortit, puis il donna l'ordre aux gens armés de
poignards de venir se placer ostensiblement devant les barres, face aux sénateurs;
51. après quoi il rentra et prit la parole : « C'est mon opinion, sénateurs, qu'un prostate qui est
ce qu'il doit être, s'il voit qu'on trompe ses amis, ne doit pas le tolérer. Aussi moi, je ne le
tolérerai pas. D'ailleurs ces hommes que vous voyez devant vous déclarent qu'ils ne souffriront
pas que nous relâchions un homme qui bat ouvertement en brèche l'oligarchie. Il est écrit dans
les nouvelles lois qu'aucun des citoyens qui font partie des trois mille ne sera mis à mort sans
que vous l'ayez voté, mais que les Trente sont maîtres de condamner à mort ceux qui ne sont
pas sur la liste. En conséquence, ajouta-t-il, j'efface de la liste Théramène ici présent, en quoi
je suis d'accord avec tous mes collègues. Et cet homme, dit-il, nous le condamnons à mort. »
52. En entendant ces mots, Théramène s'élança vers l'autel : « Et moi, citoyens, s'écria-t-il, je
vous supplie de faire droit à la plus juste des demandes : ne laissez pas Critias maître d'effacer
de la liste ni moi, ni aucun de vous, au gré de ses caprices; mais qu'on nous juge, vous et moi,
d'après la loi que ces gens ont faite pour ceux qui sont sur la liste.
53. Par les dieux, je sais fort bien, ajouta-t-il, que cet autel ne me protégera pas; mais je tiens à
faire voir que ces gens-là ne sont pas seulement les plus injustes envers les hommes, mais
encore les plus impies envers les dieux. Quant à vous, qui êtes d'honnêtes gens, je m'étonne,
poursuivit-il, que vous ne vous secouriez pas vous-mêmes, sachant bien que mon nom n'est
pas plus facile à effacer que celui de chacun de vous. » 54. À ce moment le héraut des Trente
ordonna aux Onze de saisir Théramène. Les Onze entrèrent avec leurs valets, ayant à leur tête
Satyros, le plus hardi et le plus cynique d'entre eux. Critias leur dit : « Nous vous livrons
Théramène que voici, condamné selon la loi. Vous, les Onze, saisissez-le, et, après l'avoir
conduit où il faut, faites ce qui s'ensuit. »
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