[2,3,35] (35) Ὁ μὲν ταῦτ᾽ εἰπὼν ἐκαθέζετο· Θηραμένης δὲ ἀναστὰς ἔλεξεν· « Ἀλλὰ
πρῶτον μὲν μνησθήσομαι, ὦ ἄνδρες, ὃ τελευταῖον κατ᾽ ἐμοῦ εἶπε. φησὶ γάρ με
τοὺς στρατηγοὺς ἀποκτεῖναι κατηγοροῦντα. Ἐγὼ δὲ οὐκ ἦρχον δήπου τοῦ κατ᾽
ἐκείνων λόγου, ἀλλ᾽ ἐκεῖνοι ἔφασαν προσταχθέν μοι ὑφ᾽ ἑαυτῶν οὐκ ἀνελέσθαι
τοὺς δυστυχοῦντας ἐν τῇ περὶ Λέσβον ναυμαχίᾳ. Ἐγὼ δὲ ἀπολογούμενος ὡς διὰ
τὸν χειμῶνα οὐδὲ πλεῖν, μὴ ὅτι ἀναιρεῖσθαι τοὺς ἄνδρας δυνατὸν ἦν, ἔδοξα τῇ
πόλει εἰκότα λέγειν, ἐκεῖνοι δ᾽ ἑαυτῶν κατηγορεῖν ἐφαίνοντο. Φάσκοντες γὰρ
οἷόν τε εἶναι σῶσαι τοὺς ἄνδρας, προέμενοι ἀπολέσθαι αὐτοὺς ἀποπλέοντες
ᾤχοντο.
(36) Οὐ μέντοι θαυμάζω γε τὸ Κριτίαν παρανενομηκέναι· ὅτε γὰρ ταῦτα ἦν, οὐ
παρὼν ἐτύγχανεν, ἀλλ᾽ ἐν Θετταλίᾳ μετὰ Προμηθέως δημοκρατίαν κατεσκεύαζε
καὶ τοὺς πενέστας ὥπλιζεν ἐπὶ τοὺς δεσπότας.
(37) Ὧν μὲν οὖν οὗτος ἐκεῖ ἔπραττε μηδὲν ἐνθάδε γένοιτο· τάδε γε μέντοι
ὁμολογῶ ἐγὼ τούτῳ, εἴ τις ὑμᾶς μὲν τῆς ἀρχῆς βούλεται παῦσαι, τοὺς δ᾽
ἐπιβουλεύοντας ὑμῖν ἰσχυροὺς ποιεῖ, δίκαιον εἶναι τῆς μεγίστης αὐτὸν τιμωρίας
τυγχάνειν· ὅστις μέντοι ὁ ταῦτα πράττων ἐστὶν οἶμαι ἂν ὑμᾶς κάλλιστα κρίνειν, τά
τε πεπραγμένα καὶ ἃ νῦν πράττει ἕκαστος ἡμῶν εἰ κατανοήσετε.
(38) Οὐκοῦν μέχρι μὲν τοῦ ὑμᾶς τε καταστῆναι εἰς τὴν βουλείαν καὶ ἀρχὰς
ἀποδειχθῆναι καὶ τοὺς ὁμολογουμένως συκοφάντας ὑπάγεσθαι πάντες ταὐτὰ
ἐγιγνώσκομεν· ἐπεὶ δέ γε οὗτοι ἤρξαντο ἄνδρας καλούς τε κἀγαθοὺς
συλλαμβάνειν, ἐκ τούτου κἀγὼ ἠρξάμην τἀναντία τούτοις γιγνώσκειν.
(39) ᾜδειν γὰρ ὅτι ἀποθνῄσκοντος μὲν Λέοντος τοῦ Σαλαμινίον, ἀνδρὸς καὶ
ὄντος καὶ δοκοῦντος ἱκανοῦ εἶναι, ἀδικοῦντος δ᾽ οὐδὲ ἕν, οἱ ὅμοιοι τούτῳ
φοβήσοιντο, φοβούμενοι δὲ ἐναντίοι τῇδε τῇ πολιτείᾳ ἔσοιντο· ἐγίγνωσκον δὲ ὅτι
συλλαμβανομένου Νικηράτου τοῦ Νικίου, καὶ πλουσίου καὶ οὐδὲν πώποτε
δημοτικὸν οὔτε αὐτοῦ οὔτε τοῦ πατρὸς πράξαντος, οἱ τούτῳ ὅμοιοι δυσμενεῖς
ἡμῖν γενήσοιντο.
| [2,3,35] 35. Après avoir ainsi parlé, il s'assit. Alors Théramène se leva et dit : « Je veux, Athéniens,
relever d'abord ce que Critias a dit en dernier lieu contre moi. Il prétend que c'est moi qui ai
causé la mort des généraux par mon accusation. Non, ce n'est pas moi qui ai pris l'initiative
contre eux; ce sont eux qui ont soutenu que, malgré l'ordre qu'ils m'en avaient donné, je n'avais
pas recueilli les malheureux naufragés du combat naval de Lesbos. Je me suis défendu en
disant que, par suite de la tempête, il n'était pas possible même de tenir la mer, encore moins
de relever les corps, et l'assemblée approuva ma justification. Les généraux au contraire
paraissaient s'accuser eux-mêmes. Ils affirmaient qu'il était possible de sauver les hommes, et
cependant ils les avaient laissés périr et étaient partis avec la flotte.
36. Je ne m'étonne pas d'ailleurs que Critias se soit mépris en cette affaire : lorsque ces faits
avaient lieu, il n'était pas présent; il était en Thessalie où il organisait la démocratie avec
Prométhée et armait les pénestes contre leurs maîtres.
37. Dieu nous préserve ici de ce que cet homme faisait là-bas ? Cependant je suis d'accord
avec lui sur un point, c'est que, si quelqu'un veut vous ôter le pouvoir ou fortifier ceux qui vous
dressent des pièges, il est juste qu'il soit très sévèrement puni. Mais quel est celui qui se
conduit ainsi ? Vous n'en pouvez mieux juger qu'en repassant ce que nous avons fait et ce que
chacun de nous fait encore à présent.
38. Or jusqu'au moment où vous avez été nommés sénateurs, où les magistrats ont été
institués, où les sycophantes notoires ont été traduits en justice, nous avons tous été du même
sentiment. Mais quand ces gens-là se sont mis à arrêter les honnêtes gens, dès ce moment j'ai
été d'un avis contraire au leur.
39. Je savais en effet que, si l'on mettait à mort un Léon de Salamine, qui était un homme de
mérite et réputé pour tel, et qui n'avait fait aucun mal, cela effrayerait ses pareils et que la
crainte en ferait des adversaires de notre gouvernement. Je savais de même que, si l'on
arrêtait Nicèratos, fils de Nicias, citoyen riche et qui, pas plus que son père, n'a jamais rien fait
pour obtenir les faveurs du peuple, ses pareils deviendraient nos ennemis.
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