[5,12] Ὁ δὲ Λεύκων καὶ ἡ Ῥόδη τέως ὄντες περὶ τὴν
πομπὴν ἐφίστανται τῷ ἱερῷ καὶ βλέπουσι τὰ ἀναθήματα
καὶ γνωρίζουσι τῶν δεσποτῶν τὰ ὀνόματα καὶ πρῶτον
ἀσπάζονται τὴν κόμην καὶ πολλὰ κατωδύροντο οὕτως ὡς
Ἀνθίαν βλέποντες, τελευταῖον δὲ περιῄεσαν, εἴ που κἀκείνην
εὑρεῖν δυνήσονται (ἤδη δὲ καὶ τὸ πλῆθος τῶν Ῥοδίων
ἐγνώριζον τὰ ὀνόματα ἐκ τῆς προτέρας ἐπιδημίας).
Κἀκείνην μὲν τὴν ἡμέραν οὐδὲν εὑρίσκοντες ἀπηλλάγησαν
καὶ τῷ Ἁβροκόμῃ τὰ ἐν τῷ ἱερῷ ὄντα ἐμήνυσαν· ὁ δὲ ἔπαθε
μὲν τὴν ψυχὴν ἐπὶ τῷ παραδόξῳ τοῦ πράγματος, εὔελπις
δὲ ἦν ὡς Ἀνθίαν εὑρήσων.
Τῇ δὲ ἑξῆς ἧκεν ἡ Ἀνθία πάλιν εἰς τὸ ἱερὸν μετὰ
τοῦ Ἱπποθόου, οὐκ ὄντος αὐτοῖς πλοός, προσκαθίσασα δὲ
τοῖς ἀναθήμασιν ἐδάκρυέ τε καὶ ἀνέστενεν· ἐν τούτῳ δὲ
ἐπεισίασιν ὁ Λεύκων καὶ ἡ Ῥόδη τὸν Ἁβροκόμην καταλιπόντες
ἔνδον, ἀθύμως ἐπὶ τοῖς αὐτοῖς διακείμενον·
ἐλθόντες δὲ ὁρῶσι τὴν Ἀνθίαν καὶ ἦν μὲν ἔτι ἄγνωστος
αὐτοῖς, συμβάλλουσι δὲ πάντα, τὸν ἔρωτα, τὰ δάκρυα,
τὰ ἀναθήματα, τὰ ὀνόματα, τὸ εἶδος. Οὕτως κατὰ
βραχὺ ἐγνώριζον αὐτήν· προσπεσόντες δὲ τοῖς γόνασιν
ἔκειντο ἀχανεῖς· ἡ δὲ ἐτεθαυμάκει τίνες τε εἴησαν καὶ τί
βούλοιντο· οὐ γὰρ ἄν ποτε Λεύκωνα καὶ Ῥόδην ἰδεῖν
ἤλπισεν. Οἱ δὲ ἐν ἑαυτοῖς γενόμενοι »ὦ δέσποινα«
ἔφασαν »Ἀνθία, ἡμεῖς οἰκέται σοί, Λεύκων καὶ Ῥόδη, οἱ
τῆς ἀποδημίας κοινωνήσαντες καὶ τοῦ λῃστηρίου· ἀλλὰ τίς
ἐνταῦθα ἄγει σε τύχη; θάρσει, δέσποινα, Ἁβροκόμης
σῴζεται καὶ ἔστιν ἐνταῦθα ἀεί σε θρηνῶν.« Ἀκούσασα
ἡ Ἀνθία ἐξεπλάγη τοῦ λόγου, μόγις δὲ ἀνενεγκοῦσα καὶ
γνωρίσασα περιβάλλει τε αὐτοὺς καὶ ἀσπάζεται καὶ σαφέστατα
τὰ κατὰ Ἁβροκόμην μανθάνει.
| [5,12] Leucon et Rode, qui jusqu'alors étaient restes parmi la foule de la marche, vinrent au temple. A l'aspect de cette dernière offrande, sur laquelle ils aperçoivent les noms de leurs maîtres, ils s'inclinent et donnent mille marques de satisfaction et de regrets tout ensemble, comme si la belle Anthia eût été présente. Ils vont ensuite de tous côtés en demander des nouvelles au peuple de Rhodes, qui se souvenait parfaitement d'Abrocome et d'Anthia, depuis le premier voyage qu'ils avaient fait en ce port ; mais leurs recherches furent vaines pour ce jour-là; ils se retirèrent chez eux fort tristes, se contentant de mener Abrocome dans le temple, pour lui montrer les cheveux nouvellement consacrés. Son cœur en soupira de tendresse ; il éprouvait pour la première fois les douceurs d'une espérance qui ne paraissait point frivole. Cet événement était trop remarquable, pour n'en attendre pas quelque réalité.
Le jour suivant Anthia revint dès le matin dans le temple; Hyppothoùs l'accompagnait; un vent contraire les avait empêchés de partir. Anthia, selon l'usage, alla s'asseoir auprès de ses offrandes ; des larmes continuelles et de fréquents soupirs annonçaient sa tristesse. Leucon et Rode l'apperçoivent de loin; ils avaient laissé le bel Abrocome trop agité pour les suivre ; s'étant avancés de plus près, ils examinent la jeune Ephésienne, sans être encore assurés que ce fût elle. Cependant tout ce qu'ils voyaient semblait le leur prouver : ces noms, ces présents, les pleurs qu'elle versait, un reste brillant de beauté, une entière ressemblance avec les anciens traits de son visage, tout changé qu'il était, toutes ces conjectures ne laissaient plus douter de la vérité. Ils reconnaissent enfin Anthia ; ils s'abandonnent à ses genoux, où la joie qui les transporte leur coupe la respiration, et les empêche de parler.
Anthia ne les reconnaissait pas non plus; et, toute étonnée de les voir dans cette posture, elle ne savait ce qu'ils attendaient. Leucon et Rode revenus de leur saisissement, s'écrièrent : O notre chère maîtresse, ô belle Anthia! tu vois tes fidèles serviteurs à tes pieds ; c'est nous qui t'avons accompagnée dans ton premier voyage et dans l'habitation des corsaires Phéniciens. Mais quel astre benin te conduit en cette ville? Va, tu peux former les plus doux projets ; Abrocome est sauvé de tous les périls ; il est ici qui te regrette sans cesse, et n'aspire nuit et jour qu'au seul bien de te revoir.
La révolution que fit ce discours dans le cœur d'Anthia ne se peut exprimer. Enfin, remise de son trouble, elle leur témoigne mille bontés, et se fait instruire plus clairement de tout ce qui touche son cher Abrocome.
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