HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Xénophon d'Éphèse, Les amours d'Abrocome et d'Anthia, livre V

Chapitre 10

 Chapitre 10

[5,10] δὲ Ἁβροκόμης τὰ μὲν πρῶτα ἐπιπόνως ἐν τῷ Νουκερίῳ εἰργάζετο, τελευταῖον δὲ οὐκέτι φέρων τοὺς πόνους διέγνω νεὼς ἐπιβὰς εἰς Ἔφεσον ἀνάγεσθαι. Καὶ μὲν νύκτωρ κατελθὼν ἐπὶ θάλασσαν ἐπιφθάνει πλοίῳ ἀναγομένῳ καὶ ἐπιβὰς ἔπλει τὴν ἐπὶ Σικελίας πάλιν, ὡς ἐκεῖθεν ἐπὶ Κρήτην τε καὶ Κύπρον καὶ Ῥόδον ἀφιξόμενος κἀκεῖθεν εἰς Ἔφεσον γενησόμενος· ἤλπιζε δὲ ἐν τῷ μακρῷ πλῷ καὶ περὶ Ἀνθίας τι πυθέσθαι. Καὶ μὲν ὀλίγα ἔχων τὰ ἐπιτήδεια ἀναγόμενος καὶ διανύσας τὸν πλοῦν τὰ μὲν πρῶτα ἐπὶ τῆς Σικελίας ἔρχεται καὶ εὑρίσκει τὸν πρότερον ξένον τὸν Αἰγιαλέα τεθνηκότα· ἐπενέγκας δὲ αὐτῷ χοὰς καὶ πολλὰ καταδακρύσας, ἀναχθεὶς πάλιν καὶ Κρήτην παρελθών, ἐν Κύπρῳ γενόμενος, ἡμέρας διατρίψας ὀλίγας καὶ εὐξάμενος τῇ πατρίῳ Κυπρίων θεῷ ἀνήγετο καὶ ἧκεν εἰς Ῥόδον· ἐνταῦθα πλησίον τοῦ λιμένος εἰσῳκίσατο. Καὶ ἤδη τε ἐγγὺς ἐγίνετο Ἐφέσου καὶ πάντων αὐτὸν ἔννοια τῶν δεινῶν εἰσήρχετο, τῆς πατρίδος, τῶν πατέρων, τῆς Ἀνθίας, τῶν οἰκετῶν· καὶ ἀναστενάξας »φεῦ« ἔφη »τῶν κακῶν· εἰς Ἔφεσον ἵξομαι μόνος καὶ πατράσιν ὀφθήσομαι τοῖς ἐμαυτοῦ χωρὶς Ἀνθίας καὶ πλεύσομαι πλοῦν δυστυχὴς κενὸν καὶ διηγήσομαι διηγήματα ἴσως ἄπιστα, κοινωνὸν ὧν πέπονθα οὐκ ἔχων· ἀλλὰ καρτέρησον, Ἁβροκόμη, καὶ γενόμενος ἐν Ἐφέσῳ τοσοῦτον ἐπιβίωσον χρόνον· τάφον ἔγειρον τῇ Ἀνθίᾳ καὶ θρήνησον αὐτὴν καὶ χοὰς ἐπένεγκαι καὶ σαυτὸν ἤδη παρ´ αὐτὴν ἄγεΤαῦτα ἔλεγε καὶ περιῄει τὴν πόλιν ἀλύων, ἀπορίᾳ μὲν τῶν κατὰ τὴν Ἀνθίαν, ἀπορίᾳ δὲ τῶν ἐπιτηδείων. δὲ Λεύκων ἐν τούτῳ καὶ Ῥόδη διατρίβοντες ἐν Ῥόδῳ ἀναθήματα ἀνατεθείκεσαν ἐν τῷ τοῦ Ἡλίου ἱερῷ παρὰ τὴν χρυσῆν πανοπλίαν, ἣν Ἀνθία καὶ Ἁβροκόμης ἀνατεθείκεσαν· ἀνέθεσαν στήλην γράμμασι χρυσοῖς γεγραμμένην ὑπὲρ Ἁβροκόμου καὶ Ἀνθίας, ἀνεγέγραπτο δὲ καὶ τῶν ἀναθέντων τὰ ὀνόματα, τε Λεύκων καὶ Ῥόδη. Ταύτῃ τῇ στήλῃ Ἁβροκόμης ἐπιτυγχάνει, ἐληλύθει δὲ προσεύξασθαι τῷ θεῷ. Ἀναγνοὺς οὖν καὶ γνωρίσας τοὺς ἀναθέντας καὶ τὴν τῶν οἰκετῶν εὔνοιαν, πλησίον δὲ καὶ τὴν πανοπλίαν ἰδών, μέγα ἀνωδύρετο παρακαθεσθεὶς τῇ στήλῃ. » πάντα« ἔλεγεν »ἐγὼ δυστυχής· ἐπὶ τὸ τέρμα ἥκω τοῦ βίου καὶ εἰς ἀνάμνησιν τῶν ἐμαυτοῦ συμφορῶν· ἰδοὺ ταύτην μὲν τὴν πανοπλίαν ἐγὼ μετὰ Ἀνθίας ἀνέθηκα καὶ μετ´ ἐκείνης ἀποπλεύσας Ῥόδου ἥκω νῦν ἐκείνην οὐκ ἄγων· εἰ δὲ αὕτη στήλη τῶν συντρόφων τῶν ἡμετέρων ὑπὲρ ἀμφοτέρων τὸ ἀνάθημα, τίς οὖν γένωμαι μόνος; ποῦ δὲ τοὺς φιλτάτους ἀνεύρω;« Ταῦτα ἐθρήνει λέγων· καὶ ἐν τούτῳ ἐφίστανται Λεύκων καὶ Ῥόδη συνήθως εὐχόμενοι τῷ θεῷ καὶ θεωροῦσι τὸν Ἁβροκόμην τῇ στήλῃ παρακαθεζόμενον καὶ εἰς τὴν πανοπλίαν ἀποβλέποντα καὶ γνωρίζουσι μὲν οὐχί, θαυμάζουσι δὲ ὅστις ὢν ἀλλοτρίοις ἀναθήμασι παραμένοι. Καὶ δὴ Λεύκων ἔφη » μειράκιον, τί βουλόμενος ἀναθήμασιν οὐδέν σοι προσήκουσι παρακαθεζόμενος ὀδύρῃ καὶ θρηνεῖς; τί δὲ σοὶ τούτων μέλει; τί δὲ τῶν ἐνταῦθα ἀναγεγραμμένων κοινωνεῖ σοί;« Ἀποκρίνεται πρὸς αὐτὸν Ἁβροκόμης »ἐμὰ« φησὶν »ἐμὰ τὰ ἀναθήματα Λεύκωνος καὶ Ῥόδης, οὓς ἰδεῖν εὔχομαι μετὰ Ἀνθίαν Ἁβροκόμης δυστυχήςἈκούσαντες οἱ περὶ τὸν Λεύκωνα εὐθὺς μὲν ἀχανεῖς ἐγένοντο, ἀνενεγκόντες δὲ κατὰ μικρὸν ἐγνώριζον ἐκ τοῦ σχήματος. ἐκ τῆς φωνῆς, ἐξ ὧν ἔλεγεν, ἐξ ὧν Ἀνθίας ἐμέμνητο, καὶ πίπτουσι πρὸ τῶν ποδῶν αὐτοῦ καὶ τὰ καθ´ αὑτοὺς διηγοῦνται, τὴν ὁδὸν τὴν εἰς Συρίαν ἀπὸ Τύρου, τὴν Μαντοῦς ὀργήν, τὴν ἔκδοσιν, τὴν πρᾶσιν τὴν εἰς Λυκίαν, τὴν τοῦ δεσπότου τελευτήν, τὴν περιουσίαν, τὴν εἰς Ῥόδον ἄφιξιν· καὶ δὴ παραλαβόντες ἄγουσιν εἰς τὴν οἰκίαν, ἔνθα αὐτοὶ κατήγοντο, καὶ τὰ κτήματα αὑτῶν παραδιδόασι καὶ ἐπεμελοῦντο καὶ ἐθεράπευον καὶ θαρρεῖν παρεκάλουν· τῷ δὲ ἦν οὐδὲν Ἀνθίας τιμιώτερον, ἀλλ´ ἐκείνην ἐθρήνει παρ´ ἕκαστα. Καὶ μὲν ἐν Ῥόδῳ διῆγε μετὰ τῶν συντρόφων, τι πράξει βουλευόμενος· [5,10] Abrocome succombait d'épuisement dans la profession qu'il avait embrassée à Nocére pour vivre. Dès que son travail l'eut mis en état d'amasser quelque légère épargne, il tourna ses vues vers sa patrie. L'arrivée d'un vaisseau qui devait partir le lendemain, fut pour ce projet une occasion favorable ; il s'y embarqua pendant la nuit. Ce vaisseau devait aborder en Sicile, et de là voguer en Crète, à Cithère, à Rhodes, et se rendre à Ephèse. Une longue navigation le flattait toujours. Plus Abrocome avait de pays à parcourir, et plus il espérait d'entendre parler d'Anthia. Conduit par un vent favorable à Syracuse, il trouva son hôte Égialée mort. Après avoir appaisé ses mânes par beaucoup de larmes et de libations, il repartit, sans s'arrêter en Crète ; il continua sa route jusqu'à Cithare. Ici le besoin de vivres les retint quelques jours. Abrocome les passa en partie dans le temple à offrir ses vœux à la puissante Déesse qu'on révére en cette isle, et s'étant remis en voyage, le port de Rhodes lui prêta bientôt son asile. Il descendit à terre, et se logea près de la mer. Le voisinage d'Éphèse le rendait morne et pensif ; un tendre souvenir de sa patrie, de ses parents, d'Anthia, de l'oracle et de l'accomplissement de ses prédictions lui arrachait mille soupirs : Infortuné, disait-il, je retourne donc tout seul à Éphèse ! nos parents vont me voir revenir sans la compagnie d'Anthia ! est-ce là le fruit de mon voyage? voudra-t-on ajouter foi sur mes simples discours à des événements surnaturels ? qui sera là pour les attester? je n'ai point de compagnons, hélas, à qui le ciel ait fait partager toutes mes misères ! Mais attends, Abrocome, suspends le projet qui t'a si souvent occupé de sortir de la vie ; attends que les rivages d'Éphèse t'aient vu de retour, que tu sois quitte envers Anthia des devoirs funèbres, et que le mausolée élevé par tes soins à sa mémoire ait été suffisamment arrosé de tes pleurs ; tu pourras alors chercher à rejoindre les mânes fidéles de cette tendre épouse. C'était en parcourant la ville, comme il l'avait accoutumé dès qu'il arrivait quelque part, qu'il s'entretenait de ces tristes pensées ; mais bien éloigné de croire qu'il retrouverait Anthia. Leucon et Rode, qui s'étaient fixés dans la même ville pour quelque temps, avaient offert un don dans le temple du Soleil, tout à côté de l'armure d'or qu'anciennement Abrocome et Anthia leurs maîtres avaient offerte à la même divinité; ils avaient fait poser une colonne, où l'on voyait écrit en lettres d'or : "Pour Abrocome et Anthia"; et au-dessous Leucon et Rode. Abrocome avait été conduit par un mouvement de piété dans le même temple. Avant de commencer sa prière, il fut arrêté par cette inscription, qui lui fit connaître le zèle et l'attachement que lui conservaient ses deux fidèles serviteurs; mais l'armure d'à côté, auprès de laquelle il s'assit, lui arracha ces plaintes : Hélas ! dit-il, le malheur m'accompagne jusques dans les choses qui paraissent indifférentes pour les autres mortels! Je touche enfin aux derniers moments de ma vie. Puisque je suis obligé de me rappeler mes disgrâces de si loin ; voilà l'armure que nous consacrâmes au Soleil ; Anthia l'offrit de moitié avec moi. C'est avec elle que je sortis de ce port, et j'y suis de retour sans la ramener». Elle ne verra point cette colonne de nos frères de lait qui nous est dédiée à tous les deux. Que vais-je faire tout seul? Où trouver les personnes qui me sont chères? En ce moment Leucon et Rode entrèrent dans le temple pour y faire leurs prières accoutumées : ils voient assis proche la colonne, Abrocome qui regarde l'armure avec douleur ; mais ils ne se remettent point ses traits : au contraire, ils sont fort étonnés, et se demandent l'un à l'autre, qui peut demeurer collé de la sorte près des offrandes qui ne le concernent point. Leucon impatient lui dit : ô jeune homme, quelle est ta pensée de t'asseoir ainsi tout à côté de deux colonnes offertes par d'autres mains que les tiennes, et de t'affliger et te plaindre? Qu'as-tu de commun avec ceux dont les noms sont écrits là-dessus? Que t'importe leur destinée? Abrocome répondit : Cette offrande de Leucon et de Rode est pour moi; ils sont après Anthia, ceux que je brûle le plus de revoir ; je suis le malheureux Abrocome. Quels furent les transports de Leucon ! il demeura presqu'immobile au seul nom de son cher maître ; puis rappellant ses idées, il se remit les traits et le son de voix d'Abrocome à ses discours; et, sur le nom d'Anthia qu'il avait prononcé, Rode et lui tombent à ses pieds, et lui racontent leurs aventures, depuis le départ de Tyr jusqu'à leur retour à Rhodes. Abrocome les accompagne ensuite dans la maison qu'ils habitaient, où ces deux fidèles serviteurs le mettent en possession de tous leurs effets. Ils s'empressent de le servir et de le consoler par les expressions les plus propres à rallumer une esperance éteinte : mais qu'y avait-il au monde qui le pût dédommager d'Anthia ? Chacun de ses moments était compté par de nouveaux regrets ; il passait toute la journée à consulter avec Leucon et Rode sur le parti qui lui restait à prendre.


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Dernière mise à jour : 15/04/2010