[3,8] Ὁ μὲν ἐκτελέσας τὰ νομιζόμενα ὑπὸ τῶν οἰκείων
εἰς τὴν πόλιν ἀνήγετο· καταλειφθεῖσα δὲ ἐν τῷ
τάφῳ ἡ Ἀνθία ἑαυτῆς γενομένη καὶ συνεῖσα ὅτι μὴ τὸ
φάρμακον θανάσιμον ἦν, στενάξασα καὶ δακρύσασα »ὢ
ψευσάμενόν με {τὸ} φάρμακον« φησίν, »ὢ κωλῦσαν ὁδεῦσαι
πρὸς τὸν Ἁβροκόμην ὁδὸν εὐτυχῆ· ἐσφάλην ἄρα
παντάλαινα καὶ τῆς ἐπιθυμίας τοῦ θανάτου. Ἀλλὰ
ἔνεστί γε ἐν τῷ τάφῳ μείνασαν τὸ ἔργον ἐργάσασθαι τοῦ
φαρμάκου λιμῷ. Οὐ γὰρ ἂν ἐντεῦθέν μέ τις ἀνέλοιτο,
οὐδ´ ἂν ἐπίδοιμι τὸν ἥλιον οὐδ´ {ἂν} εἰς φῶς ἐλεύσομαι«.
Ταῦτα εἰποῦσα ἐκαρτέρει, τὸν θάνατον προσδεχομένη
γενναίως. Ἐν δὲ τούτῳ νυκτὸς ἐπιγενομένης λῃσταί τινες
μαθόντες ὅτι κόρη τέθαπται πλουσίως, καὶ πολὺς μὲν
αὐτῇ κόσμος συγκατάκειται γυναικεῖος, πολὺς δὲ ἄργυρος
καὶ χρυσός, ἦλθον ἐπὶ τὸν τάφον καὶ ἀναρρήξαντες τοῦ
τάφου τὰς θύρας, εἰσελθόντες τόν τε κόσμον ἀνῃροῦντο
καὶ τὴν Ἀνθίαν ζῶσαν ὁρῶσι· μέγα δὲ καὶ τοῦτο κέρδος
ἡγούμενοι ἀνίστων τε αὐτὴν καὶ ἄγειν ἐβούλοντο. Ἡ
δὲ τῶν ποδῶν αὐτῶν προκυλιομένη πολλὰ ἐδεῖτο »ἄνδρες,
οἵτινές ποτ´ ἐστὲ« λέγουσα, »τὸν μὲν κόσμον τοῦτον
ἅπαντα ὅστις ἐστὶ καὶ ἅπαντα τὰ συνταφέντα λαβόντες
κομίζετε, φείσασθε δὲ τοῦ σώματος. Δυοῖν ἀνάκειμαι
θεοῖς, Ἔρωτι καὶ Θανάτῳ· τούτοις ἐάσατε σχολάσαι με.
Ναὶ πρὸς τῶν θεῶν αὐτῶν τῶν πατρῴων ὑμῶν, μή με
ἡμέρᾳ δείξητε, τὴν ἄξια νυκτὸς καὶ σκότους δυστυχοῦσαν«.
Ταῦτα ἔλεγεν· οὐκ ἔπειθε δὲ τοὺς λῃστάς, ἀλλ´
ἐξαγαγόντες αὐτὴν τοῦ τάφου κατήγαγον ἐπὶ θάλατταν
καὶ ἐνθέμενοι σκάφει τὴν εἰς Ἀλεξάνδρειαν ἀνήγοντο· ἐν
δὲ τῷ πλοίῳ ἐθεράπευον αὐτὴν καὶ θαρρεῖν παρεκάλουν.
Ἡ δὲ ἐν οἵοις κακοῖς ἐγεγόνει πάλιν ἐννοήσασα,
θρηνοῦσα καὶ ὀδυρομένη »πάλιν« ἔφησε »λῃσταὶ καὶ
θάλασσα, πάλιν αἰχμάλωτος ἐγώ· ἀλλὰ νῦν δυστυχέστερον,
ὅτι μὴ μετὰ Ἁβροκόμου. Τίς με ἄρα ὑποδέξεται γῆ;
τίνας δὲ ἀνθρώπους ὄψομαι; μὴ Μοῖριν ἔτι, μὴ Μαντώ,
μὴ Περίλαον, μὴ Κιλικίαν· ἔλθοιμι δὲ ἔνθα δὴ κἂν τάφον
Ἁβροκόμου μόνον ὄψομαι«. Ταῦτα ἑκάστοτε ἐδάκρυε καὶ
αὐτὴ μὲν οὐ πότον, οὐ τροφὴν προσίετο, ἠνάγκαζον δὲ οἱ
λῃσταί.
| [3,8] Ensuite de quoi, les devoirs qu'on est obligé de se rendre entre époux après la mort, étant remplis, il s'en retourna, pénétré de douleur, à la ville de Tarse.
Le médecin Eudoxe avait trompé la malheureuse Anthia ; sans doute qu'il n'avait pu se résoudre à devenir le ministre d'un si fatal projet ; au lieu d'une drogue empoisonnée, il avait substitué quelque somnifère qui pût produire le même effet que le sommeil de la mort ; au bout de vingt-quatre heures Anthia revint de sa léthargie. Lorsque tous ses esprits furent sortis de leur assoupissement, elle comprit bien qu'Eudoxe s'était joué de sa crédulité, qu'il avait eu pour ses jours une cruelle compassion, qui ne faisait que prolonger ses maux. O poison trompeur, qui remplis si mal mon attente, dit-elle tout bas, c'est toi qui m'as empêché de suivre la voie fortunée qui s'ouvrait à mon ame pour aller rejoindre Abrocome ! je me trouve déçue d'un si doux espoir ; faut-il que tous mes desirs aient si peu de succès? Mais pourquoi ces regrets, ajoutait-elle ? ce sépulcre n'a-t-il pas de quoi satisfaire mon envie ? La faim prendra la place du poison, puisqu'il n'y a pas lieu de croire que personne vienne m'enlever d'ici. Non, je ne lèverai plus mes yeux sur l'astre du jour ; que sa divine lumière me sait interdite pour jamais !
Anthia attendait donc genéreusement la mort : mais le Destin en voulait ordonner autrement ; car cette même nuit des corsaires ayant appris qu'outre bien des ornemens précieux, son cercueil contenait beaucoup d'or et d'argent qu'on y avait laissé, ces corsaires brisèrent la porte du monument, et pillèrent tout le butin. Ils voient aussi cette jeune personne encore vivante, et sa beauté leur fait espérer de la vendre à haut prix. On la relève pour l'emmener. O vous, dit-elle alors en tombant aux pieds des pirates, qui que vous soyez, emportez ces ajustements et tout ce que vous trouverez d'enseveli avec moi ; mais du moins épargnez mon corps. Je suis consacrée à deux divinités, la mort et l'amour ; laissez-les-moi satisfaire; je vous en conjure par les dieux de votre patrie. Daignez ne pas montrer au jour une mortelle qui s'est condamnée elle-même aux ténèbres de la nuit Elle s'epuisa vainement en tristes lamentations ; les pirates demeurèrent inflexibles : Anthia fut traînée hors du sépulcre, et conduite sur le bord de la mer dans un esquif avec lequel ces corsaires tinrent la route d'Alexandrie. Pendant tout le voyage, ils l'exhortaient à se soumettre à la volonté du Destin : mais elle ne répondait point, et renfermait ses plaintes dans son cœur; elle pensait quelquefois en elle-même : Quoi, toujours des corsaires et la mer ! de nouveau faite esclave .' mais combien plus malheureusement, puisque je ne la suis point avec Abrocome ! En quelle terre vais-je aborder à présent ! à quelle sorte de maîtres suis-je réservée ! Ce ne sera plus Méris, ni Manto, ni Périlas, ni la Cilicie. Ah ! plût aux dieux que le sort me conduisît où le bel Abrocome a fini ses jours, quand je n'y devrais voir que sa sépulture !
Ces pensées étaient accompagnées de soupirs qu'Anthia poussait à tous moments, et les corsaires étaient obligés de recourir à la violence pour lui faire prendre quelque nourriture.
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