[2,10] Καὶ ἡ μὲν παρὰ τῷ αἰπόλῳ ἦν ἐν τῷ χωρίῳ πάντα
χρόνον Ἁβροκόμην θρηνοῦσα· ὁ δὲ Ἄψυρτος ἐρευνώμενος
τὸ οἰκημάτιον ἔνθα ὁ Ἁβροκόμης πρὸ τῆς κολάσεως διῆγεν,
ἐπιτυγχάνει τῷ γραμματιδίῳ τῷ Μαντοῦς πρὸς Ἁβροκόμην
καὶ γνωρίζει τὰ γράμματα, καὶ ὅτι ἀδίκως Ἁβροκόμην
τιμωρεῖται ἔμαθεν· εὐθὺς οὖν λῦσαί τε αὐτὸν προσέταξε
καὶ ἀγαγεῖν εἰς ὄψεις. Πόνηρα δὲ καὶ ἐλεεινὰ πεπονθὼς
προσπίπτει τοῖς γόνασι τοῖς Ἀψύρτου, ὁ δὲ αὐτὸν
ἀνίστησι καὶ «θάρσει» ἔφη, «ὦ μειράκιον· ἀδίκως σου
κατέγνων πεισθεὶς θυγατρὸς λόγοις· ἀλλὰ νῦν μέν σε ἐλεύθερον
ἀντὶ δούλου ποιήσω, δίδωμι δέ σοι τῆς οἰκίας ἄρχειν
τῆς ἐμῆς καὶ γυναῖκα ἄξομαι τῶν πολιτῶν τινος θυγατέρα·
σὺ δὲ μὴ μνησικακήσῃς τῶν γεγενημένων, οὐ γὰρ ἑκών σε
ἠδίκησα.» Ταῦτα ἔλεγεν ὁ Ἄψυρτος· ὁ δὲ Ἁβροκόμης
«ἀλλὰ χάρις» ἔφη «σοι, δέσποτα, ὅτι καὶ τὸ
ἀληθὲς ἔμαθες καὶ τῆς σωφροσύνης ἀμείβῃ με.» Ἔχαιρον
δὴ πάντες οἱ κατὰ τὴν οἰκίαν ὑπὲρ Ἁβροκόμου καὶ χάριν
ᾔδεσαν ὑπὲρ αὐτοῦ τῷ δεσπότῃ· αὐτὸς δὲ ἐν μεγάλῃ συμφορᾷ
κατὰ Ἀνθίαν ἦν· ἐνενόει δὲ πρὸς ἑαυτὸν πολλάκις
«τί δὲ ἐλευθερίας ἐμοί; τί δὲ πλούτων καὶ ἐπιμελείας τῶν
Ἀψύρτου χρημάτων; οὐ τοιοῦτον εἶναί με δεῖ· ἐκείνην ἢ
ζῶσαν ἢ τεθνεῶσαν εὕροιμι.»
Ὁ μὲν οὖν ἐν τούτοις ἦν, διοικῶν μὲν τὰ Ἀψύρτου,
ἐννοῶν δὲ ὁπότε καὶ ποῦ τὴν Ἀνθίαν εὑρήσει· ὁ δὲ
Λεύκων καὶ ἡ Ῥόδη ἤχθησαν εἰς Λυκίαν εἰς πόλιν Ξάνθον
(ἀνώτερον δὲ θαλάσσης ἡ πόλις) κἀνταῦθα ἐπράθησαν
πρεσβύτῃ τινί, ὃς αὐτοὺς εἶχε μετὰ πάσης ἐπιμελείας,
παῖδας αὑτοῦ νομίζων· καὶ γὰρ ἄτεκνος ἦν· διῆγον δὲ ἐν
ἀφθόνοις μὲν πᾶσιν, ἐλύπουν δὲ αὐτοὺς Ἀνθία καὶ Ἁβροκόμης
οὐχ ὁρώμενοι.
| [2,10] Apsirte que le hasard conduisit dans l'endroit où couchait Abrocome, avant l'accusation de Manto, aperçut le billet que sa fille avait écrit à ce jeune Ephésien ; il en reconnut le caractère, et, très-convaincu que le malheureux Abrocome était innocent, il ordonna qu'on brisât ses liens, et se le fit amener. Abrocome, voyant son maître radouci, se jete à ses pieds; Apsirte le relève et lui dit, avec bonté : c'est à tort que je te condamnai, ajoutant foi trop légèrement aux discours de ma fille ; pour réparer mon injustice, d'esclave que tu étais, je te rends libre, et te confie la surintendance de toute ma maison ; je te choisirai même, si tu le souhaites, une femme parmi les plus belles filles de nos citoyens ; oublie le passé, je t'en prie, ce n'est pas volontairement que je t'ai traité si mal.
Que mille graces te soient rendus, ô mon cher maître, lui répond Abrocome, de ce que tu as bien voulu reconnaître la vérité, et récompenser mon innocence.
Tous les affranchis et les esclaves d'Apsirte surent bon gré à leur maître de cet acte de justice. Chacun s'empressa d'en venir marquer sa joie à Abrocome, mais Abrocome paraissait peu sensible à ces légères faveurs du destin ; Anthia seule pouvait lui tenir lieu de tout, et sans elle rien n'était capable de le toucher ; il se disait souvent à lui-même, à quoi me sert la liberté ? que m'importe les richesses et l'administration de tous les biens d'Apsirte ? ce n'est pas là mon état ; ah, que ne puis-je la retrouver ou vivante ou morte.
Ces pensées ne sortaient point de l'esprit d'Abrocome ; Anthia l'occupait même au milieu des plus grands embarras que lui causaient les affaires d'Apsirte ; il ne songeait qu'à l'endroit et au moment où la fortune lui rendrait ce précieux trésor.
Rode et Leucon avaient été emmenés et vendus à Xante, ville de Lycie, située à quelques lieues de la mer, auprès du fleuve du même nom. Le maître qui les acheta les traitait avec douceur; sa vieillesse le mettant hors d'état d'avoir des enfants, ces deux esclaves lui en tenaient lieu ; il les regardait d'un œil de père et les faisait vivre dans la plus grande abondance ; malgré cela le regret de ne plus voir Abrocome et Anthia les jetait dans une langueur continuelle.
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