[1,14] Ἀκούσας ὁ Κόρυμβος εὐθὺς μὲν ἐκέλευσε φείσασθαι
φονεύοντας, μεταθέμενος δὲ τὰ τιμιώτερα τῶν
φορτίων καὶ τὸν Ἁβροκόμην καὶ τὴν Ἀνθίαν ἄλλους τε
τινὰς τῶν οἰκετῶν ὀλίγους ἐνέπρησε τὴν ναῦν, καὶ οἱ
λοιποὶ πάντες κατεφλέχθησαν· τὸ γὰρ πάντας ἄγειν οὔτε
ἐδύνατο οὔτε ἀσφαλὲς ἑώρα. Ἦν δὲ τὸ θέαμα ἐλεεινόν,
τῶν μὲν ἐν τῇ τριήρει ἀναγομένων, τῶν δὲ ἐν τῇ νηὶ
φλεγομένων τὰς χεῖρας ἐκτεινόντων καὶ ὀλοφυρομένων.
Καὶ οἱ μὲν ἔλεγον «ποῖ ποτε ἀχθήσεσθε, δεσπόται;
τίς ὑμᾶς ὑποδέξεται γῆ, καὶ τίνα πόλιν οἰκήσετε;» οἱ
δὲ «ὦ μακάριοι, μέλλοντες ἀποθνῄσκειν εὐτυχῶς πρὸ τοῦ
πειραθῆναι δεσμῶν, πρὸ τοῦ δουλείαν λῃστρικὴν ἰδεῖν».
Ταῦτα λέγοντες οἱ μὲν ἀνήγοντο, οἱ δὲ κατεφλέγοντο.
Ἐν τούτῳ δὲ ὁ τροφεὺς τοῦ Ἁβροκόμου πρεσβύτης ἤδη,
σεμνὸς ἰδεῖν καὶ διὰ τὸ γῆρας ἐλεεινός, οὐκ ἐνεγκὼν
ἀναγόμενον τὸν Ἁβροκόμην, ῥίψας ἑαυτὸν εἰς τὴν θάλασσαν
ἐνήχετο ὡς καταληψόμενος τὴν τριήρη «ποῖ με καταλείψεις,
τέκνον» λέγων, «τὸν γέροντα, τὸν παιδαγωγόν;
ποῖ δὲ ἀπερχόμενος, Ἁβροκόμη; αὐτὸς ἀπόκτεινόν με
τὸν δυστυχῆ καὶ θάψον· τί γάρ ἐστί μοι ζῆν ἄνευ σοῦ;»
Ταῦτα ἔλεγε καὶ τέλος ἀπελπίσας ἔτι Ἁβροκόμην ὄψεσθαι,
παραδοὺς ἑαυτὸν τοῖς κύμασιν ἀπέθανε. Τοῦτο δὲ καὶ
Ἁβροκόμῃ πάντων ἦν ἐλεεινότατον· καὶ γὰρ τὰς χεῖρας
ἐξέτεινε τῷ πρεσβύτῃ καὶ τοὺς πειρατὰς ἀναλαμβάνειν
παρεκάλει· οἱ δὲ οὐδένα λόγον ποιησάμενοι, διανύσαντες
ἡμέραις τρισὶ τὸν πλοῦν κατήχθησαν εἰς πόλιν τῆς Φοινίκης
Τύρον, ἔνθα ἦν τοῖς πειραταῖς τὰ οἰκεῖα. Ἦγον
δὲ αὐτοὺς εἰς αὐτὴν μὲν τὴν πόλιν οὐχί, εἰς πλησίον δέ
τι χωρίον ἀνδρὸς ἄρχοντος λῃστηρίου, Ἀψύρτου τοὔνομα,
οὗ καὶ ὁ Κόρυμβος ἦν ὑπηρέτης ἐπὶ μισθῷ καὶ μέρει τῶν
λαμβανομένων.
| [1,14] Corimbe aussitôt arrêta le carnage; et, s'étant emparé de ce qu'il y avait de plus précieux, d'Abrocome et d'Anthia, et de quelques beaux esclaves qu'il fit passer dans sa galère, il condamna le navire au feu. Les Ephésiens qui étaient dedans, et dont il n'avait pas voulu se charger, tant à cause du nombre, que pour plus grande assurance, furent dévorés par les flammes.
Quel spectacle plus touchant, que de voir quelques-uns de ces malheureux Ephésiens traînés dans la galère, et tout le reste abandonné sur le vaisseau ! Ces derniers tendaient les mains à travers les flammes, et poussaient des hurlements affreux ; les autres demandaient en pleurant, quel allait être leur sort, en quelle terre on les conduisait, quelle ville ils devaient habiter. Qu'ils sont heureux, disaient-ils, ceux que la mort a délivrés des chaînes, ou qui ont prévenu la barbarie des corsaires ! Parmi toutes ces horreurs, Abrocome aperçut un malheureux vieillard, à qui son éducation avait été confiée, lequel suivait la galère à la nage: ce triste vieillard, aussi respectable par ses ans que par sa vertu, n'avait pu supporter qu'on lui enlevât son cher Abrocome, sans lui permettre de le suivre. Il s'était jeté à la mer, et faisait tous ses efforts pour rejoindre la galère, d'où l'on entendait ces mots :
O mon cher fils ! où vas-tu me laisser ? moi qui pris soin de ton enfance ! hélas ! tu sais bien que je ne puis vivre sans Abrocome ! donne-moi donc la mort, et prends soin de ma sépulture. En prononçant ces dernières paroles, il s'abandonna de faiblesse au gré des flots, et fut enseveli dans l'onde. Abrocome lui tendait les mains, suppliant en méme-tems les corsaires de recevoir ce vieillard ; mais ni ses prières ni ses larmes ne purent rien obtenir : sourds à sa voix, ces inhumains voguèrent avec encore plus d'activité, et le troisième jour de leur navigation ils arrivèrent à Tyr.
L'asyle de leurs pirateries n'était point dans la ville même, mais dans un lieu voisin ; c'est-là qu'ils débarquèrent. Un fameux capitaine de Corse à qui cet endroit appartenait, les reçut avec joie. Apsirte (il s'appelait ainsi) était le maître de la galère ; Corimbe n'était qu'à sa solde, de même que les autres, et, moyennant une certaine part qu'il leur cédait sur les prises, outre leurs salaires, ils lui rendaient un compte exact de tout ce qu'ils avaient enlevé. Abrocome et Anthia devaient donc lui appartenir.
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