[4,2,40] (40) Ἐννοήσατε δ', ἔφη, ὡς εἰ μηδ' ἐκείνους αἰσχυντέον ἦν, οὐδ'
ὣς ἡμῖν νῦν προσῆκεν οὔτε πλησμονῆς πω οὔτε μέθης· οὐ γάρ πω
διαπέπρακται ἡμῖν ἃ βουλόμεθα, ἀλλ' αὐτὰ πάντα νῦν ἀκμάζει
ἐπιμελείας δεόμενα. Ἔχομεν γὰρ ἐν τῷ στρατοπέδῳ πολεμίους
πολλαπλασίους ἡμῶν αὐτῶν, καὶ τούτους λελυμένους· οὓς καὶ
φυλάττεσθαι ἔτι προσήκει καὶ φυλάττειν, ὅπως ὦσι καὶ οἱ
ποιήσοντες ἡμῖν τὰ ἐπιτήδεια· ἔτι δ' οἱ ἱππεῖς ἡμῖν ἄπεισι,
φροντίδα παρέχοντες ποῦ εἰσι· κἂν ἔλθωσιν, εἰ παραμενοῦσιν.
(41) Ὥστ', ὦ ἄνδρες, νῦν μοι δοκεῖ τοιοῦτον σῖτον ἡμᾶς προσφέρεσθαι
δεῖν καὶ τοιοῦτον ποτὸν ὁποῖον ἄν τις οἴεται μάλιστα σύμφορον
εἶναι πρὸς τὸ μήτε ὕπνου μήτε ἀφροσύνης ἐμπίμπλασθαι.
(42) Ἔτι δὲ καὶ χρήματα πολλά ἐστιν ἐν τῷ στρατοπέδῳ, ὧν οὐκ ἀγνοῶ ὅτι
δυνατὸν ἡμῖν κοινῶν ὄντων τοῖς συγκατειληφόσι νοσφίσασθαι
ὁπόσα ἂν βουλώμεθα· ἀλλ' οὔ μοι δοκεῖ τὸ λαβεῖν κερδαλεώτερον
εἶναι τοῦ δικαίους φαινομένους ἐκείνοις τούτῳ πρίασθαι ἔτι
μᾶλλον αὐτοὺς ἢ νῦν ἀσπάζεσθαι ἡμᾶς. (43) Δοκεῖ δέ μοι, ἔφη, καὶ
τὸ νεῖμαι τὰ χρήματα, ἐπειδὰν ἔλθωσι, Μήδοις καὶ ῾Υρκανίοις καὶ
Τιγράνῃ ἐπιτρέψαι· καὶ ἤν τι μεῖον ἡμῖν δάσωνται, κέρδος
ἡγεῖσθαι· διὰ γὰρ τὰ κέρδη ἥδιον ἡμῖν παραμενοῦσι.
(44) Τὸ μὲν γὰρ νῦν πλεονεκτῆσαι ὀλιγοχρόνιον ἂν τὸν πλοῦτον ἡμῖν
παράσχοι· τὸ δὲ ταῦτα προεμένους ἐκεῖνα κτήσασθαι ὅθεν ὁ
πλοῦτος φύεται, τοῦτο, ὡς ἐγὼ δοκῶ, ἀεναώτερον ἡμῖν δύναιτ' ἂν
τὸν ὄλβον καὶ πᾶσι τοῖς ἡμετέροις παρέχειν. (45) Οἶμαι δ', ἔφη, καὶ
οἴκοι ἡμᾶς τούτου ἕνεκα ἀσκεῖν καὶ γαστρὸς κρείττους εἶναι καὶ
κερδέων ἀκαίρων, ἵν', εἴ ποτε δέοι, δυναίμεθα αὐτοῖς συμφόρως
χρῆσθαι· ποῦ δ' ἂν ἐν μείζοσι τῶν νῦν παρόντων ἐπιδειξαίμεθ' ἂν
τὴν παιδείαν ἐγὼ μὲν οὐχ ὁρῶ. »
Ὁ μὲν οὕτως εἶπε.
(46) Συνεῖπε δ' αὐτῷ ῾Υστάσπας ἀνὴρ Πέρσης τῶν ὁμοτίμων ὧδε·
- « Δεινὸν γάρ τἂν εἴη, ὦ Κῦρε, εἰ ἐν θήρᾳ μὲν πολλάκις ἄσιτοι
καρτεροῦμεν, ὅπως θηρίον τι ὑποχείριον ποιησώμεθα καὶ μάλα
μικροῦ ἴσως ἄξιον· ὄλβον δὲ ὅλον πειρώμενοι θηρᾶν εἰ ἐμποδών τι
ποιησαίμεθα γενέσθαι ἡμῖν ἃ τῶν μὲν κακῶν ἀνθρώπων ἄρχει,
τοῖς δ' ἀγαθοῖς πείθεται, οὐκ ἂν πρέποντα ἡμῖν δοκοῦμεν ποιεῖν. »
(47) Ὁ μὲν οὖν ῾Υστάσπας οὕτως εἶπεν· οἱ δ' ἄλλοι πάντες ταῦτα
συνῄνουν. Ὁ δὲ Κῦρος εἶπεν·
- « Ἄγε δή, » ἔφη, « ἐπειδὴ ὁμονοοῦμεν ταῦτα, πέμψατε ἀπὸ λόχου
ἕκαστος πέντε ἄνδρας τῶν σπουδαιοτάτων· οὗτοι δὲ περιιόντες,
οὓς μὲν ἂν ὁρῶσι πορσύνοντας τὰ ἐπιτήδεια, ἐπαινούντων· οὓς δ'
ἂν ἀμελοῦντας, κολαζόντων ἀφειδέστερον ἢ ὡς δεσπόται. »
Οὗτοι μὲν δὴ ταῦτα ἐποίουν.
| [4,2,40] (40) Observez encore, ajouta-t-il, que même si nous ne
leur devions pas ces égards, ce ne serait pas le moment de se
remplir le ventre et de s’enivrer ; car nous n’avons pas encore
terminé ce que nous voulons faire ; au contraire, notre
situation est à son point critique et demande un surcroît
de surveillance. Nous avons, en effet, dans le camp des
ennemis bien plus nombreux que nous et qui ne sont pas
enchaînés ; aussi faut-il nous méfier d’eux et les garder,
pour avoir des gens qui fassent pour nous ce qui est
nécessaire. En outre, nos cavaliers ne sont pas ici ; nous
sommes inquiets de savoir où ils sont et s’ils resteront
avec nous, à leur retour. (41) Aussi, Perses, je suis d’avis
qu’il ne faut manger et boire que juste autant qu’on le juge
nécessaire, afin de ne pas céder au sommeil et de
conserver sa raison. (42) En outre il y a dans le camp de
grandes richesses, et je n’ignore pas qu’il ne tiendrait qu’à
nous d’en détourner ce qu’il nous plairait, bien qu’elles
nous soient communes avec ceux qui nous ont aidés à les
prendre ; mais je doute que nous gagnions plus à nous en
emparer qu’à nous montrer justes et à payer de ce prix
l’avantage de nous les attacher plus solidement. (43) Mon
avis, ajouta-t-il, est de nous en remettre pour le partage
de ces richesses aux Mèdes, aux Hyrcaniens et à Tigrane,
quand ils seront de retour ; et s’ils nous font petite part,
nous le tiendrons pour un profit, puisque l’intérêt les
portera à demeurer avec nous plus volontiers. (44) Si nous
nous adjugions aujourd’hui la plus grosse part, nous ne
serions pas riches pour longtemps, au lieu que si nous
abandonnons ces richesses pour acquérir le pays qui les
produit, nous avons là, ce me semble, le moyen d’assurer
une fortune inépuisable à nous et à tous les nôtres. (45) Je
crois, ajouta-t-il, que si nous nous entraînions dans notre
pays à maîtriser notre appétit et l’amour déplacé du gain,
c’est afin que nous puissions à l’occasion tirer parti do
cette éducation. Or, où trouver une occasion plus
importante que celle-ci pour pratiquer ces leçons, je ne le vois pas.»
Il dit. (46) Hystaspe, seigneur perse et homotime, parla
dans le même sens :
«Il serait vraiment étrange, Cyrus, qu’à la chasse nous
ayons souvent le courage de nous priver de manger pour
prendre quelque animal qui ne vaut peut-être pas grand-
chose, et que, quand nous poursuivons le bonheur
complet, si nous nous imaginons être traversés par un de
ces obstacles qui font reculer les lâches, mais cèdent aux
vaillants, on nous voie négliger nos devoirs.»
Ainsi parla Hystaspe, et tous les autres d’approuver. Cyrus
dit alors :
«Eh bien, puisque nous sommes du même avis, prenez
chacun dans vos compagnies cinq hommes des plus
sérieux, qu’ils fassent le tour du camp, qu’ils félicitent
ceux qu’ils verront occupés à préparer ce qu’il nous faut et
qu’ils punissent les négligents plus sévèrement que s’ils
étaient leurs maîtres.» Cet ordre fut exécuté.
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