[5,7,20] ἐπεὶ δὲ τοῦτο ἐγένετο, ἔρχονται πρὸς ἡμᾶς οἱ Κερασούντιοι
καὶ λέγουσι τὸ πρᾶγμα· καὶ ἡμεῖς οἱ στρατηγοὶ ἀκούσαντες
ἠχθόμεθά τε τοῖς γεγενημένοις καὶ ἐβουλευόμεθα ξὺν τοῖς Κερασουντίοις ὅπως
ἂν ταφείησαν οἱ τῶν Ἑλλήνων νεκροί. (5.7.21) συγκαθήμενοι δ᾽ ἔξωθεν τῶν
ὅπλων ἐξαίφνης ἀκούομεν θορύβου πολλοῦ
- παῖε παῖε, βάλλε βάλλε, καὶ τάχα δὴ ὁρῶμεν πολλοὺς προσθέοντας λίθους
ἔχοντας ἐν ταῖς χερσί, τοὺς δὲ καὶ ἀναιρουμένους. (5.7.22) καὶ οἱ μὲν
Κερασούντιοι, ὡς (ἂν) καὶ ἑορακότες τὸ παρ᾽ ἑαυτοῖς πρᾶγμα, δείσαντες
ἀποχωροῦσι πρὸς τὰ πλοῖα. ἦσαν δὲ νὴ Δία καὶ ἡμῶν οἳ ἔδεισαν. (5.7.23) ἐγώ γε
μὴν ἦλθον πρὸς αὐτοὺς καὶ ἠρώτων ὅ τι ἐστὶ τὸ πρᾶγμα. τῶν δὲ ἦσαν μὲν οἳ
οὐδὲν ᾔδεσαν, ὅμως δὲ λίθους εἶχον ἐν ταῖς χερσίν. ἐπεὶ δὲ εἰδότι τινὶ ἐπέτυχον,
λέγει μοι ὅτι οἱ ἀγορανόμοι δεινότατα ποιοῦσι τὸ στράτευμα. (5.7.24) ἐν τούτῳ τις
ὁρᾷ τὸν ἀγορανόμον Ζήλαρχον πρὸς τὴν θάλατταν ἀποχωροῦντα, καὶ
ἀνέκραγεν· οἱ δὲ ὡς ἤκουσαν, ὥσπερ ἢ συὸς ἀγρίου ἢ ἐλάφου φανέντος ἵενται
ἐπ᾽ αὐτόν. (5.7.25) οἱ δ᾽ αὖ Κερασούντιοι ὡς εἶδον ὁρμῶντας καθ᾽ αὑτούς, σαφῶς
νομίζοντες ἐπὶ σφᾶς ἵεσθαι, φεύγουσι δρόμῳ καὶ ἐμπίπτουσιν εἰς τὴν θάλατταν.
ξυνεισέπεσον δὲ καὶ ἡμῶν αὐτῶν τινες, καὶ ἐπνίγετο ὅστις νεῖν μὴ ἐτύγχανεν
ἐπιστάμενος. (5.7.26) καὶ τούτους τί δοκεῖτε; ἠδίκουν μὲν οὐδέν, ἔδεισαν δὲ μὴ
λύττα τις ὥσπερ κυσὶν ἡμῖν ἐμπεπτώκοι. εἰ οὖν ταῦτα τοιαῦτα ἔσται, θεάσασθε
οἵα ἡ κατάστασις ἡμῖν ἔσται τῆς στρατιᾶς. (5.7.27) ὑμεῖς μὲν οἱ πάντες οὐκ
ἔσεσθε κύριοι οὔτε ἀνελέσθαι πόλεμον ᾧ ἂν βούλησθε οὔτε καταλῦσαι, ἰδίᾳ δὲ ὁ
βουλόμενος ἄξει στράτευμα ἐφ᾽ ὅ τι ἂν θέλῃ. κἄν τινες πρὸς ὑμᾶς ἴωσι πρέσβεις
εἰρήνης δεόμενοι ἢ ἄλλου τινός, κατακτείναντες τούτους οἱ βουλόμενοι
ποιήσουσιν ὑμᾶς τῶν λόγων μὴ ἀκοῦσαι τῶν πρὸς ὑμᾶς ἰόντων. (5.7.28) ἔπειτα δὲ
οὓς μὲν ἂν ὑμεῖς πάντες ἕλησθε ἄρχοντας, ἐν οὐδεμιᾷ χώρᾳ ἔσονται, ὅστις δὲ ἂν
ἑαυτὸν ἕληται στρατηγὸν καὶ ἐθέλῃ λέγειν
- βάλλε βάλλε, οὗτος ἔσται ἱκανὸς καὶ ἄρχοντα κατακανεῖν καὶ ἰδιώτην ὃν ἂν
ὑμῶν ἐθέλῃ ἄκριτον, ἢν ὦσιν οἱ πεισόμενοι αὐτῷ, ὥσπερ καὶ νῦν ἐγένετο. (5.7.29)
οἷα δὲ ὑμῖν καὶ διαπεπράχασιν οἱ αὐθαίρετοι οὗτοι στρατηγοὶ σκέψασθε.
Ζήλαρχος μὲν ὁ ἀγορανόμος εἰ μὲν ἀδικεῖ ὑμᾶς, οἴχεται ἀποπλέων οὐ δοὺς ὑμῖν
δίκην· εἰ δὲ μὴ ἀδικεῖ, φεύγει ἐκ τοῦ στρατεύματος δείσας μὴ ἀδίκως ἄκριτος ἀποθάνῃ.
| [5,7,20] Après cet assassinat, quelques Cérasuntiens vinrent nous trouver
et nous firent un récit exact de l'événement. Leur rapport
m'affligea ainsi que les autres généraux. Nous délibérions avec ces étrangers
sur les moyens de donner la sépulture aux cadavres de nos compatriotes, et nous
étions ensemble assis à la tête du camp, en avant des armes, quand tout à coup
nous entendons de grands cris : "frappe, frappe, jette, jette". Nous voyons bientôt
beaucoup de Grecs accourir ; les uns tenaient des pierres dans leurs mains,
d'autres en amassaient par terre. Les Cérasuntiens, témoins de ce qui s'était
passé dans leur ville, s'effraient et se retirent vers les vaisseaux. Que dis-je
! par Jupiter ! quelques-uns de nous-mêmes n'étaient pas sans crainte. Je
m'avançai, vers les séditieux et leur demandai de quoi il s'agissait ; il y en
avait beaucoup qui nieraient et qui cependant tenaient des pierres. Je
m'adressai enfin à un soldat qui était au fait ; il me répondit que les
commissaires des vivres vexaient horriblement l'armée. Pendant que cet homme me
parle, un autre aperçoit le commissaire Zélarque qui se retirait vers le rivage
et il jette un grand cri. Dès que la multitude l'a entendu, elle court sur
Zélarque comme sur un sanglier ou sur un cerf qui paraîtrait tout à coup dans la
plaine. Les Cérasuntiens voyant nos soldats se précipiter de leur côté, croient
qu'on leur en veut, fuient tant qu'ils ont de forces, et se jettent dans la mer
: quelques-uns des nôtres y tombent aussi, et tous ceux qui ne savaient pas
nager se sont noyés. Que croyez-vous que pensassent alors les Cérasuntiens ? Ils
n'avaient aucun tort à se reprocher, mais ils craignaient qu'une rage subite
n'eût pris à notre armée comme elle prend à des chiens, et considérez où vous en
serez réduits si une telle indiscipline subsiste à l'avenir. Vous aurez beau
vous assembler, vous n'aurez l'autorité, ni de déclarer la guerre à qui vous
voudrez, ni de la finir quand il vous conviendra ; un particulier entraînera
l'armée aux entreprises qu'il aura seul adoptées. Si quelques députés viennent
désormais vous demander la paix ou vous faire d'autres propositions, qui voudra
les assassinera, et vous laissera ignorer jamais les motifs qui les amenaient
vers vous. Les généraux que vous vous êtes donnés vous-mêmes n'auront plus
d'autorité. Quiconque s'élira lui-même chef de séditieux et criera "tue, tue",
s'il trouve des compagnons qui lui prêtent la main, comme il vient d'arriver,
aura le pouvoir de faire périr, sans forme de justice, tout général ou tout
particulier qu'il aura proscrit. Considérez un peu les obligations que vous avez
à ces chefs qui n'ont d'autre autorité que celle qu'ils se sont arrogée,
Zélarque, commissaire des vivres, s'il est coupable envers nous, a mis à la
voile et a disparu sans recevoir la peine due à son crime ; s'il est innocent, il fuit
loin de l'armée, craignant d'être mis à mort injustement et de n'être point entendu.
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