[5,7,10] ἀλλ᾽ οὗτοί εἰσιν οἱ λόγοι ἀνδρῶν καὶ ἠλιθίων κἀμοὶ φθονούντων, ὅτι ἐγὼ
ὑφ᾽ ὑμῶν τιμῶμαι. καίτοι οὐ δικαίως γ᾽ ἄν μοι φθονοῖεν·
τίνα γὰρ αὐτῶν ἐγὼ κωλύω ἢ λέγειν εἴ τίς τι ἀγαθὸν δύναται ἐν ὑμῖν,
ἢ μάχεσθαι εἴ τις ἐθέλει ὑπὲρ ὑμῶν τε καὶ ἑαυτοῦ,
ἢ ἐγρηγορέναι περὶ τῆς ὑμετέρας ἀσφαλείας ἐπιμελούμενον; τί γάρ, ἄρχοντας
αἱρουμένων ὑμῶν ἐγώ τινι ἐμποδών εἰμι; παρίημι, ἀρχέτω· μόνον ἀγαθόν τι
ποιῶν ὑμᾶς φαινέσθω. (5.7.11) ἀλλὰ γὰρ ἐμοὶ μὲν ἀρκεῖ περὶ τούτων τὰ εἰρημένα·
εἰ δέ τις ὑμῶν ἢ αὐτὸς ἐξαπατηθῆναι ἂν οἴεται ταῦτα ἢ ἄλλον ἐξαπατῆσαι
ταῦτα, λέγων διδασκέτω. (5.7.12) ὅταν δὲ τούτων ἅλις ἔχητε, μὴ ἀπέλθητε πρὶν
ἂν ἀκούσητε οἷον ὁρῶ ἐν τῇ στρατιᾷ ἀρχόμενον πρᾶγμα· ὃ εἰ ἔπεισι καὶ ἔσται
οἷον ὑποδείκνυσιν, ὥρα ἡμῖν βουλεύεσθαι ὑπὲρ ἡμῶν αὐτῶν μὴ κάκιστοί τε καὶ
αἴσχιστοι ἄνδρες ἀποφαινώμεθα καὶ πρὸς θεῶν καὶ πρὸς ἀνθρώπων καὶ φίλων
καὶ πολεμίων. (5.7.13) ἀκούσαντες δὲ ταῦτα οἱ στρατιῶται ἐθαύμασάν τε ὅ τι εἴη
καὶ λέγειν ἐκέλευον. ἐκ τούτου ἄρχεται πάλιν·
- ἐπίστασθέ που ὅτι χωρία ἦν ἐν τοῖς ὄρεσι βαρβαρικά, φίλια τοῖς Κερασουντίοις,
ὅθεν κατιόντες τινὲς καὶ ἱερεῖα ἐπώλουν ἡμῖν καὶ ἄλλα ὧν εἶχον, δοκοῦσι δέ μοι
καὶ ὑμῶν τινες εἰς τὸ ἐγγυτάτω χωρίον τούτων ἐλθόντες ἀγοράσαντές τι πάλιν
ἀπελθεῖν. (5.7.14) τοῦτο καταμαθὼν Κλεάρετος ὁ λοχαγὸς ὅτι καὶ μικρὸν εἴη καὶ
ἀφύλακτον διὰ τὸ φίλιον νομίζειν εἶναι, ἔρχεται ἐπ᾽ αὐτοὺς τῆς νυκτὸς ὡς
πορθήσων, οὐδενὶ ἡμῶν εἰπών. (5.7.15) διενενόητο δέ, εἰ λάβοι τόδε τὸ χωρίον, εἰς
μὲν τὸ στράτευμα μηκέτι ἐλθεῖν, εἰσβὰς δὲ εἰς πλοῖον ἐν ᾧ ἐτύγχανον οἱ
ξύσκηνοι αὐτοῦ παραπλέοντες, καὶ ἐνθέμενος εἴ τι λάβοι, ἀποπλέων οἴχεσθαι
ἔξω τοῦ Πόντου. καὶ ταῦτα ξυνωμολόγησαν αὐτῷ οἱ ἐκ τοῦ πλοίου σύσκηνοι, ὡς
ἐγὼ νῦν αἰσθάνομαι. (5.7.16) παρακαλέσας οὖν ὁπόσους ἔπειθεν ἦγεν ἐπὶ τὸ
χωρίον. πορευόμενον δ᾽ αὐτὸν φθάνει ἡμέρα γενομένη, καὶ ξυστάντες οἱ
ἄνθρωποι ἀπὸ ἰσχυρῶν τόπων βάλλοντες καὶ παίοντες τόν τε Κλεάρετον
ἀποκτείνουσι καὶ τῶν ἄλλων συχνούς, οἱ δέ τινες καὶ εἰς Κερασοῦντα αὐτῶν
ἀποχωροῦσι. (5.7.17) ταῦτα δ᾽ ἦν ἐν τῇ ἡμέρᾳ ᾗ ἡμεῖς δεῦρο ἐξωρμῶμεν πεζῇ· τῶν
δὲ πλεόντων ἔτι τινὲς ἦσαν ἐν Κερασοῦντι, οὔπω ἀνηγμένοι. μετὰ τοῦτο, ὡς οἱ
Κερασούντιοι λέγουσιν, ἀφικνοῦνται τῶν ἐκ τοῦ χωρίου τρεῖς ἄνδρες τῶν
γεραιτέρων πρὸς τὸ κοινὸν τὸ ἡμέτερον χρῄζοντες ἐλθεῖν. (5.7.18) ἐπεὶ δ᾽ ἡμᾶς οὐ
κατέλαβον, πρὸς τοὺς Κερασουντίους ἔλεγον ὅτι θαυμάζοιεν τί ἡμῖν δόξειεν
ἐλθεῖν ἐπ᾽ αὐτούς. ἐπεὶ μέντοι σφεῖς λέγειν, ἔφασαν, ὅτι οὐκ ἀπὸ κοινοῦ γένοιτο
τὸ πρᾶγμα, ἥδεσθαί τε αὐτοὺς καὶ μέλλειν ἐνθάδε πλεῖν, ὡς ἡμῖν λέξαι τὰ
γενόμενα καὶ τοὺς νεκροὺς κελεύειν αὐτοὺς θάπτειν λαβόντας. (5.7.19) τῶν δ᾽
ἀποφυγόντων τινὰς Ἑλλήνων τυχεῖν ἔτι ὄντας ἐν Κερασοῦντι· αἰσθόμενοι δὲ
τοὺς βαρβάρους ὅποι ἴοιεν αὐτοί τε ἐτόλμησαν βάλλειν τοῖς λίθοις καὶ τοῖς
ἄλλοις παρεκελεύοντο. καὶ οἱ ἄνδρες ἀποθνῄσκουσι τρεῖς ὄντες οἱ πρέσβεις
καταλευσθέντες.
| [5,7,10] Vous ajoutez foi à de vains propos tenus par des gens insensés, jaloux de votre
général et des honneurs que vous lui rendez. Je n'ai pas mérité cependant d'être
en butte aux envieux. Qui empêchai-je d'exposer un avis utile à l'armée, de
combattre pour votre salut et pour le sien, de veiller à la sûreté commune et
d'en prendre un soin particulier ? Eh quoi ! si vous voulez élire d'autres
généraux, quelqu'un croit-il que je l'exclurai de ce grade ? Je me retire. Qu'un
autre vous commande ! Seulement qu'il fasse le bien de l'armée ! Mais ce que
j'ai dit à ce sujet me suffit. S'il est un Grec qui croie encore avoir été
trompé ou qui présume qu'on puisse en tromper d'autres, qu'il prenne la parole,
qu'il vous instruise de l'objet de ses craintes. Quand vous aurez assez discuté
cette matière, ne vous séparez pas que je ne vous aie parlé de ce que je
remarque dans l'armée : ce sont les germes d'un mal plus réel. S'il doit
s'étendre et devenir aussi violent qu'on a droit de le conjecturer, il est bien
temps certainement de délibérer sur nos affaires : tâchons de ne pas passer pour
les plus scélérats des mortels, de ne nous pas couvrir de honte devant les
dieux, devant les hommes amis et ennemis, et de ne nous pas faire
universellement mépriser." Les soldats ne comprirent point ce que signifiaient
ces mots ; ils en parurent étonnés et dirent à Xénophon de s'expliquer. Il
recommença à parler en ces termes : "Vous savez bien qu'il y avait dans les
montagnes des Barbares des bourgades alliées de Cérasunte, d'où quelques
habitants descendaient et venaient vous vendre du bétail, et les autres denrées
qu'ils avaient ; il me semble même que plusieurs de vous ont été dans la plus
voisine de ces bourgades, et sont revenus au camp après avoir acheté ce dont ils
avaient besoin, Cléarate, chef de lochos, ayant été informé qu'elle était petite
et se gardait mal, parce qu'elle se reposait sur la foi des traités, y marcha de
nuit sans en prévenir aucun des généraux, avec intention de la piller ; il avait
dessein, s'il s'en rendait maître, de ne plus revenir à l'armée, mais de monter
à bord d'un bâtiment sur lequel ses camarades de chambrée longeaient la côte,
d'y charger son butin, de mettre à la voile et de sortir de l'Euxin. Ses
camarades dont je vous parle, qui étaient sur le navire savaient le projet du
chef, et en étaient complices : je viens d'en être informé. Cléarate s'associa
tous les Grecs qu'il put engager à le suivre, et les mena droit à la place ;
mais le jour ayant paru avant qu'on fût arrivé aux portes, les Barbares se
rassemblent, occupent des lieux fortifiés par la nature, d'où frappant les Grecs
et leur lançant des traits, ils tuent Cléarate et beaucoup des siens
quelques-uns fuient et arrivent à Cérasunte cela se passait le jour même que
nous nous mîmes en marche pour venir ici. Plusieurs des Grecs qui nous devaient
suivre par mer étaient encore dans Cérasunte, et leurs navires n'avaient point
levé l'ancre. Il y arriva ensuite, à ce que disent les habitants de Cérasunte,
trois vieillards députés de la bourgade qu'on avait voulu insulter. Ils nous
cherchaient ; ne nous ayant plus trouvés, ils témoignèrent aux Cérasuntiens
qu'ils étaient étonnés et qu'ils ne concevaient pas quel motif nous avait fait
marcher contre eux. Les Cérasuntiens disent leur avoir répondu que l'attaque ne
s'était point faite d'après une résolution publique, mais que des particuliers
s'étaient portés à cet attentat. Ils assurent que les Barbares en témoignèrent
une vive joie, qu'ils allaient s'embarquer pour venir ici nous raconter ce qui
s'était passé, et qu'ils invitèrent ceux des Grecs qui le souhaiteraient à aller
ensevelir les morts. Quelques-uns des fuyards se trouvaient encore à Cérasunte ;
ils surent le projet des Barbares ; ils osèrent leur jeter des pierres et
exhorter d'autres Grecs à les imiter. Les trois malheureux députés sont restés
sur la place et ont été lapidés.
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