[3,1,20] τὰ δ᾽ αὖ τῶν στρατιωτῶν ὁπότε ἐνθυμοίμην,
ὅτι τῶν μὲν ἀγαθῶν τούτων οὐδενὸς ἡμῖν μετείη, εἰ μὴ πριαίμεθα, ὅτου δ᾽
ὠνησόμεθα ᾔδειν ἔτι ὀλίγους ἔχοντας, ἄλλως δέ πως πορίζεσθαι τὰ ἐπιτήδεια ἢ
ὠνουμένους ὅρκους ἤδη κατέχοντας ἡμᾶς· ταῦτ᾽ οὖν λογιζόμενος ἐνίοτε τὰς
σπονδὰς μᾶλλον ἐφοβούμην ἢ νῦν τὸν πόλεμον. (3.1.21) ἐπεὶ μέντοι ἐκεῖνοι ἔλυσαν
τὰς σπονδάς, λελύσθαι μοι δοκεῖ καὶ ἡ ἐκείνων ὕβρις καὶ ἡ ἡμετέρα ὑποψία. ἐν μέσῳ
γὰρ ἤδη κεῖται ταῦτα τὰ ἀγαθὰ ἆθλα ὁπότεροι ἂν ἡμῶν ἄνδρες ἀμείνονες ὦσιν,
ἀγωνοθέται δ᾽ οἱ θεοί εἰσιν, οἳ σὺν ἡμῖν, ὡς τὸ εἰκός, ἔσονται. (3.1.22) οὗτοι μὲν γὰρ
αὐτοὺς ἐπιωρκήκασιν· ἡμεῖς δὲ πολλὰ ὁρῶντες ἀγαθὰ στερρῶς αὐτῶν ἀπειχόμεθα
διὰ τοὺς τῶν θεῶν ὅρκους· ὥστε ἐξεῖναί μοι δοκεῖ ἰέναι ἐπὶ τὸν ἀγῶνα πολὺ σὺν
φρονήματι μείζονι ἢ τούτοις. (3.1.23) ἔτι δ᾽ ἔχομεν σώματα ἱκανώτερα τούτων καὶ
ψύχη καὶ θάλπη καὶ πόνους φέρειν· ἔχομεν δὲ καὶ ψυχὰς σὺν τοῖς θεοῖς ἀμείνονας·
οἱ δὲ ἄνδρες καὶ τρωτοὶ καὶ θνητοὶ μᾶλλον ἡμῶν, ἢν οἱ θεοὶ ὥσπερ τὸ πρόσθεν νίκην
ἡμῖν διδῶσιν. (3.1.24) ἀλλ᾽ ἴσως γὰρ καὶ ἄλλοι ταὐτὰ ἐνθυμοῦνται, πρὸς τῶν θεῶν
μὴ ἀναμένωμεν ἄλλους ἐφ᾽ ἡμᾶς ἐλθεῖν παρακαλοῦντας ἐπὶ τὰ κάλλιστα ἔργα,
ἀλλ᾽ ἡμεῖς ἄρξωμεν τοῦ ἐξορμῆσαι καὶ τοὺς ἄλλους ἐπὶ τὴν ἀρετήν· φάνητε τῶν
λοχαγῶν ἄριστοι καὶ τῶν στρατηγῶν ἀξιοστρατηγότεροι. (3.1.25) κἀγὼ δέ, εἰ μὲν
ὑμεῖς ἐθέλετε ἐξορμᾶν ἐπὶ ταῦτα, ἕπεσθαι ὑμῖν βούλομαι, εἰ δ᾽ ὑμεῖς τάττετ᾽ ἐμὲ
ἡγεῖσθαι, οὐδὲν προφασίζομαι τὴν ἡλικίαν, ἀλλὰ καὶ ἀκμάζειν ἡγοῦμαι ἐρύκειν
ἀπ᾽ ἐμαυτοῦ τὰ κακά.
(3.1.26) ὁ μὲν ταῦτ᾽ ἔλεξεν, οἱ δὲ ἀρχηγοὶ ἀκούσαντες ἡγεῖσθαι ἐκέλευον πάντες,
πλὴν Ἀπολλωνίδης τις ἦν βοιωτιάζων τῇ φωνῇ· οὗτος δ᾽ εἶπεν ὅτι φλυαροίη ὅστις
λέγει ἄλλως πως σωτηρίας ἂν τυχεῖν ἢ βασιλέα πείσας, εἰ δύναιτο, καὶ ἅμα ἤρχετο
λέγειν τὰς ἀπορίας. ὁ μέντοι Ξενοφῶν μεταξὺ ὑπολαβὼν ἔλεξεν ὧδε. (3.1.27)
-- ὦ θαυμασιώτατε ἄνθρωπε, σύγε οὐδὲ ὁρῶν γιγνώσκεις οὐδὲ ἀκούων μέμνησαι. ἐν
ταὐτῷ γε μέντοι ἦσθα τούτοις ὅτε βασιλεύς, ἐπεὶ Κῦρος ἀπέθανε, μέγα φρονήσας
ἐπὶ τούτῳ πέμπων ἐκέλευε παραδιδόναι τὰ ὅπλα. (3.1.28) ἐπεὶ δὲ ἡμεῖς οὐ
παραδόντες, ἀλλ᾽ ἐξοπλισάμενοι ἐλθόντες παρεσκηνήσαμεν αὐτῷ, τί οὐκ ἐποίησε
πρέσβεις πέμπων καὶ σπονδὰς αἰτῶν καὶ παρέχων τὰ ἐπιτήδεια, ἔστε σπονδῶν
ἔτυχεν; (3.1.29) ἐπεὶ δ᾽ αὖ οἱ στρατηγοὶ καὶ λοχαγοί, ὥσπερ δὴ σὺ κελεύεις, εἰς
λόγους αὐτοῖς ἄνευ ὅπλων ἦλθον πιστεύσαντες ταῖς σπονδαῖς, οὐ νῦν ἐκεῖνοι
παιόμενοι, κεντούμενοι, ὑβριζόμενοι οὐδὲ ἀποθανεῖν οἱ τλήμονες δύνανται, καὶ
μάλ᾽ οἶμαι ἐρῶντες τούτου; ἃ σὺ πάντα εἰδὼς τοὺς μὲν ἀμύνασθαι κελεύοντας
φλυαρεῖν φῄς, πείθειν δὲ πάλιν κελεύεις ἰόντας;
| [3,1,20] Tournant ensuite mes regards sur notre armée, je voyais qu'aucun de ces biens n'était à
nous sans l'acheter. Je
savais qu'il ne restait plus de quoi payer qu'à peu de nos soldats, et que nos serments nous
empêchaient tous de nous fournir du
nécessaire, autrement que l'argent à la main. Souvent, d'après ces considérations, notre traité
m'effrayait plus que ne m'effraie
aujourd'hui la guerre. Puisque la convention est rompue par le fait des Perses, il me semble qu'ils ont
mis fin en même temps, et
aux outrages qu'il nous fallait essuyer d'eux, et aux soupçons continuels dans lesquels il nous fallait
vivre. Tous les biens dont ils
jouissaient ne sont pas plus à eux, désormais qu'ils ne sont à nous. Comme les prix des jeux de la
Grèce déposés entre les
prétendants, ils appartiendront aux plus courageux. Les dieux sont les arbitres de ce combat, et sans
doute, car ils sont justes, ils
se déclareront pour nous. Les Barbares les ont offensés par leurs parjures, et nous, lorsque nous
nous sommes vus entourés de
tant d'objets de tentation, nous nous sommes sévèrement abstenus de rien prendre par respect pour
nos serments et pour les
Immortels. Je crois donc que nous pouvons marcher au combat avec plus d'assurance que nos
ennemis. Nous avons d'ailleurs
plus qu'eux l'habitude et la force de supporter le froid, le chaud, la fatigue, et grâces au ciel, nos
âmes sont d'une meilleure
trempe. Les Barbares seront plus faciles que nous à blesser et à tuer si les dieux nous accordent
comme ci-devant la victoire.
Mais peut-être d'autres Grecs que nous ont-ils en ce moment la même pensée ? N'attendons pas, je
vous en conjure par les
Immortels, qu'ils viennent nous trouver, et que ce soient eux qui nous exhortent à une défense
honorable ; commençons les
premiers à marcher dans le chemin de l'honneur et entraînons-y les autres. Montrez -vous les plus
braves des chefs grecs ;
montrez-vous plus dignes d'être généraux que nos généraux eux-mêmes. Si vous voulez courir à
cette gloire, j'ai dessein de vous
suivre ; si vous m'ordonnez de vous y conduire, je ne prétexte point mon âge pour m'en dispenser. Je
crois au contraire que la
vigueur de la jeunesse ne me rend que plus capable de repousser les maux qui me menacent." Ainsi
parla Xénophon. Les chefs
ayant entendu son discours, lui dirent tous de se mettre à leur tête. Il n'y eut qu'un certain Apollonide,
qui affectait de parler le
dialecte béotien, qui soutint que c'était déraisonner que de prétendre, qu'il y eût d'autre espoir de
salut, que de fléchir le roi, s'il
était possible ; et il commençait à exposer les difficultés qu'il trouvait à se tirer autrement d'affaire.
Xénophon l'interrompit par ces
mots : "Ô le plus étonnant des hommes, qui ne concevez pas ce que vous voyez, qui ne vous
souvenez pas de ce qui a frappé
vos oreilles ! Vous étiez avec nous lorsqu'après la mort de Cyrus, le roi enorgueilli de sa bonne
fortune, nous fit ordonner de rendre
les armes ; mais dès qu'il vit qu'au lieu de les rendre nous nous en étions couverts, que nous avions
marché à lui et campé à peu
de distance de son armée, que ne fit-il pas pour obtenir la paix ? Il envoya des députés, mendia
notre alliance et fournit des vivres
d'avance. Nos généraux et nos autres chefs ensuite se fiant sur le traité et ayant été, sans armes,
comme vous voudriez que
nous y allassions encore, s'aboucher avec les Barbares, où en sont-ils maintenant ? Accablés de
coups, de blessures, d'outrages,
les malheureux ne peuvent obtenir la mort qu'ils implorent sans doute. Vous avez vu tout ce que je
dis là ; et traitez de vains
discoureurs ceux qui parlent de résistance. Vous nous exhorterez à aller encore faire d'inutiles efforts
pour fléchir nos ennemis.
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