[3,1,10] ἐστρατεύετο μὲν δὴ οὕτως ἐξαπατηθείς
-- οὐχ ὑπὸ Προξένου· οὐ γὰρ ᾔδει τὴν ἐπὶ βασιλέα ὁρμὴν οὐδὲ
ἄλλος οὐδεὶς τῶν Ἑλλήνων πλὴν Κλεάρχου· ἐπεὶ μέντοι εἰς Κιλικίαν ἦλθον, σαφὲς
πᾶσιν ἤδη ἐδόκει εἶναι ὅτι ὁ στόλος εἴη ἐπὶ βασιλέα. φοβούμενοι δὲ τὴν ὁδὸν καὶ
ἄκοντες ὅμως οἱ πολλοὶ δι᾽ αἰσχύνην καὶ ἀλλήλων καὶ Κύρου συνηκολούθησαν· ὧν
εἷς καὶ Ξενοφῶν ἦν. (3.1.11) ἐπεὶ δὲ ἀπορία ἦν, ἐλυπεῖτο μὲν σὺν τοῖς ἄλλοις καὶ οὐκ
ἐδύνατο καθεύδειν· μικρὸν δ᾽ ὕπνου λαχὼν εἶδεν ὄναρ. ἔδοξεν αὐτῷ βροντῆς
γενομένης σκηπτὸς πεσεῖν εἰς τὴν πατρᾐαν οἰκίαν, καὶ ἐκ τούτου λάμπεσθαι πᾶσα.
(3.1.12) περίφοβος δ᾽ εὐθὺς ἀνηγέρθη, καὶ τὸ ὄναρ τῇ μὲν ἔκρινεν ἀγαθόν, ὅτι ἐν
πόνοις ὢν καὶ κινδύνοις φῶς μέγα ἐκ Διὸς ἰδεῖν ἔδοξε· τῇ δὲ καὶ ἐφοβεῖτο, ὅτι ἀπὸ
Διὸς μὲν βασιλέως τὸ ὄναρ ἐδόκει αὐτῷ εἶναι, κύκλῳ δὲ ἐδόκει λάμπεσθαι τὸ πῦρ, μὴ
οὐ δύναιτο ἐκ τῆς χώρας ἐξελθεῖν τῆς βασιλέως, ἀλλ᾽ εἴργοιτο πάντοθεν ὑπό τινων
ἀποριῶν. (3.1.13) ὁποῖόν τι μὲν δὴ ἐστὶ τὸ τοιοῦτον ὄναρ ἰδεῖν ἔξεστι σκοπεῖν ἐκ τῶν
συμβάντων μετὰ τὸ ὄναρ. γίγνεται γὰρ τάδε. εὐθὺς ἐπειδὴ ἀνηγέρθη πρῶτον μὲν
ἔννοια αὐτῷ ἐμπίπτει· τί κατάκειμαι; ἡ δὲ νὺξ προβαίνει· ἅμα δὲ τῇ ἡμέρᾳ εἰκὸς τοὺς
πολεμίους ἥξειν. εἰ δὲ γενησόμεθα ἐπὶ βασιλεῖ, τί ἐμποδὼν μὴ οὐχὶ πάντα μὲν τὰ
χαλεπώτατα ἐπιδόντας, πάντα δὲ τὰ δεινότατα παθόντας ὑβριζομένους ἀποθανεῖν;
(3.1.14) ὅπως δ᾽ ἀμυνούμεθα οὐδεὶς παρασκευάζεται οὐδὲ ἐπιμελεῖται, ἀλλὰ
κατακείμεθα ὥσπερ ἐξὸν ἡσυχίαν ἄγειν. ἐγὼ οὖν τὸν ἐκ ποίας πόλεως στρατηγὸν
προσδοκῶ ταῦτα πράξειν; ποίαν δ᾽ ἡλικίαν ἐμαυτῷ ἐλθεῖν ἀναμείνω; οὐ γὰρ ἔγωγ᾽
ἔτι πρεσβύτερος ἔσομαι, ἐὰν τήμερον προδῶ ἐμαυτὸν τοῖς πολεμίοις. (3.1.15) ἐκ
τούτου ἀνίσταται καὶ συγκαλεῖ τοὺς Προξένου πρῶτον λοχαγούς.
ἐπεὶ δὲ συνῆλθον, ἔλεξεν·
-- ἐγώ, ὦ ἄνδρες λοχαγοί, οὔτε καθεύδειν δύναμαι, ὥσπερ οἶμαι οὐδ᾽ ὑμεῖς, οὔτε
κατακεῖσθαι ἔτι, ὁρῶν ἐν οἵοις ἐσμέν. (3.1.16) οἱ μὲν γὰρ πολέμιοι δῆλον ὅτι οὐ
πρότερον πρὸς ἡμᾶς τὸν πόλεμον ἐξέφηναν πρὶν ἐνόμισαν καλῶς τὰ ἑαυτῶν
παρασκευάσασθαι, ἡμῶν δ᾽ οὐδεὶς οὐδὲν ἀντεπιμελεῖται ὅπως ὡς κάλλιστα
ἀγωνιούμεθα. (3.1.17) καὶ μὴν εἰ ὑφησόμεθα καὶ ἐπὶ βασιλεῖ γενησόμεθα, τί οἰόμεθα
πείσεσθαι; ὃς καὶ τοῦ ὁμομητρίου ἀδελφοῦ καὶ τεθνηκότος ἤδη ἀποτεμὼν τὴν
κεφαλὴν καὶ τὴν χεῖρα ἀνεσταύρωσεν· ἡμᾶς δέ, οἷς κηδεμὼν μὲν οὐδεὶς πάρεστιν,
ἐστρατεύσαμεν δὲ ἐπ᾽ αὐτὸν ὡς δοῦλον ἀντὶ βασιλέως ποιήσοντες καὶ
ἀποκτενοῦντες εἰ δυναίμεθα, τί ἂν οἰόμεθα παθεῖν; (3.1.18) ἆρ᾽ οὐκ ἂν ἐπὶ πᾶν
ἔλθοι ὡς ἡμᾶς τὰ ἔσχατα αἰκισάμενος πᾶσιν ἀνθρώποις φόβον παράσχοι τοῦ
στρατεῦσαί ποτε ἐπ᾽ αὐτόν; ἀλλ᾽ ὅπως τοι μὴ ἐπ᾽ ἐκείνῳ γενησόμεθα πάντα
ποιητέον. (3.1.19) ἐγὼ μὲν οὖν ἔστε μὲν αἱ σπονδαὶ ἦσαν οὔποτε ἐπαυόμην ἡμᾶς μὲν
οἰκτίρων, βασιλέα δὲ καὶ τοὺς σὺν αὐτῷ μακαρίζων, διαθεώμενος αὐτῶν ὅσην μὲν
χώραν καὶ οἵαν ἔχοιεν, ὡς δὲ ἄφθονα τὰ ἐπιτήδεια, ὅσους δὲ θεράποντας, ὅσα δὲ
κτήνη, χρυσὸν δέ, ἐσθῆτα δέ·
| [3,1,10] Xénophon commença la campagne, ayant été ainsi trompé sur l'objet de l'entreprise, mais
n'étant pas joué par Proxène ; car ni ce
général, ni aucun autre des Grecs, si ce n'est Cléarque ne se doutaient qu'on marchât contre le roi.
Lorsqu'on fut arrivé en Cilicie,
il parut évident que c'était contre Artaxerxès que se faisait cette expédition. La plupart des Grecs,
effrayés de la longueur de la
route, ne suivirent que contre leur gré Cyrus. La honte de reculer aux yeux de leurs camarades et du
prince les retint à son armée.
Xénophon fut de ce nombre. Dans l'extrémité où l'on était réduit pour lors, il s'affligeait comme les
autres, et ne pouvait dormir. Le
sommeil cependant ayant un instant fermé sa paupière, il eut un songe. Il lui sembla entendre gronder
le tonnerre, et voir tomber
sur la maison de son père la foudre, qui la mit toute en feu. Il s'éveilla aussitôt saisi de terreur. D'une
part, il jugea que ce songe
ne lui présageait rien que d'heureux ; car au milieu des fatigues et des dangers, il lui avait apparu une
grande lumière venant du
ciel ; d'autre part, il craignit qu'il ne pût sortir de l'empire du roi, et que de tous côtés il n'y fût retenu
par des obstacles, jugeant que ce songe venait de Jupiter roi, et s'étant vu de toutes parts environné
de flammes.
Par les événements qui suivirent ce songe, on pourra reconnaître de quelle nature il était ; car voici ce
qui arrive aussitôt :
Xénophon s'éveille, et telles sont les premières idées qui le frappent : "Pourquoi suis-je couché ? La
nuit s'avance. Avec le jour
nous aurons probablement l'ennemi sur les bras ; si nous tombons au pouvoir du roi, qui l'empêchera,
après que nous aurons été
témoins du plus affreux spectacle, après qu'il nous aura fait souffrir toutes les horreurs des supplices,
de nous condamner à la
mort la plus ignominieuse ? Personne ne se prépare, personne ne songe même à prendre les moyens
de repousser l'ennemi. Nous
restons tous couchés comme si nous avions le loisir de nous livrer au repos. Que fais-je moi-même ?
D'où attends-je un général
qui prenne le parti qu'exigent les circonstances, et jusqu'à quel âge dois-je différer de veiller moi-
même à mon salut ? Car je n'ai
pas l'air de vieillir beaucoup si je me rends aujourd'hui à l'ennemi." D'après ces réflexions, il se lève et
appelle d'abord les chefs de
loches de la section de Proxène Quand ils furent assemblés, il leur dit : "Braves chefs, je ne puis ni
dormir (et sans doute, vous
ne dormiez pas plus que moi), ni rester plus longtemps couché, ayant devant les yeux la triste
situation où nous sommes réduits ;
car il est évident que nos ennemis n'ont voulu être en guerre ouverte avec nous qu'après avoir cru s'y
être bien préparés, et
personne de nous ne s'occupe des moyens de les repousser vigoureusement. Quel sort pensons-nous
qui nous attende, si nous
perdons courage et tombons dans les mains du roi, de ce prince inhumain qui, ne trouvant pas sa
cruauté assouvie par la mort de
son propre a frère, en a mutilé le cadavre, a fait couper la tête et la main de Cyrus, et les a exposées
en spectacle au haut d'une pique ?
Quels supplices réserve-t-il, croyez-vous, pour nous, dont personne n'épouse ici les intérêts,
et qui avons pris les armes
pour le faire tomber du trône dans l'esclavage ou même pour lui ôter, si nous pouvions, la vie ? Ne
nous fera-t-il pas subir les plus
honteuses tortures ? Ne cherchera-t-il pas tous les moyens d'inspirer au reste des mortels une terreur
qui les détourne de porter la
guerre au sein de ses états ? Il faut donc tout tenter pour ne pas tomber en son pouvoir. Tant qu'a
duré le traité, je n'ai cessé de
plaindre les Grecs et d'envier le bonheur d'Artaxerxès et des Perses. Je considérais l'immensité et la
fertilité du pays que
possédaient nos ennemis, l'abondance dans laquelle ils nageaient. Que d'esclaves ! Que de bétail !
Que d'or et d'habits magnifiques !
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