[15b,14] Ἡ δὲ Καρμανία τελευταία μέν ἐστι τῆς ἀπὸ τοῦ
Ἰνδοῦ παραλίας, ἀρκτικωτέρα δ´ ἐστὶ πολὺ τῆς τοῦ Ἰνδοῦ
ἐκβολῆς· τὸ μέντοι πρῶτον αὐτῆς ἄκρον ἔκκειται
πρὸς νότον εἰς τὴν μεγάλην θάλατταν, ποιήσασα δὲ τὸ
στόμα τοῦ Περσικοῦ κόλπου πρὸς τὴν ἀπὸ τῆς εὐδαίμονος
Ἀραβίας ἄκραν ἐν ἀπόψει οὖσαν, κάμπτεται
πρὸς τὸν Περσικὸν κόλπον ἕως ἂν συνάψῃ τῇ Περσίδι·
πολλὴ δὲ κἀν τῇ μεσογαίᾳ ἐστὶν ἐκτεινομένη
μεταξὺ τῆς Γεδρωσίας καὶ τῆς Περσίδος, παραλλάττουσα
πλέον τῆς Γεδρωσίας πρὸς τὴν ἄρκτον. δηλοῖ
δ´ ἡ εὐκαρπία· καὶ γὰρ πάμφορος καὶ μεγαλόδενδρος
πλὴν ἐλαίας καὶ ποταμοῖς κατάρρυτος. ἡ δὲ Γεδρωσία
διαφέρει μικρὸν τῆς τῶν Ἰχθυοφάγων, ὥστ´ ἀκαρπία
κατέχει πολλάκις· διὸ φυλάττουσι τὸν ἐνιαύσιον καρπὸν
εἰς ἔτη πλείω ταμιευόμενοι. Ὀνησίκριτος δὲ λέγει
ποταμὸν ἐν τῇ Καρμανίᾳ καταφέροντα ψήγματα χρυσοῦ·
καὶ ὀρυκτοῦ δὲ εἶναι μέταλλον καὶ ἀργύρου καὶ
χαλκοῦ καὶ μίλτου· ὄρη τε εἶναι δύο τὸ μὲν ἀρσενικοῦ
τὸ δὲ ἁλός. ἔχει δέ τινα καὶ ἔρημον συνάπτουσαν ἤδη
τῇ Παρθυαίᾳ καὶ τῇ Παραιτακηνῇ. γεώργια δ´ ἔχει
παραπλήσια τοῖς Περσικοῖς τά τε ἄλλα καὶ ἄμπελον·
ταύτης δ´ ἡ Καρμανία λεγομένη παρ´ ἡμῖν καὶ δίπηχυν
ἔχει πολλάκις τὸν βότρυν πυκνορρῶγά τε ὄντα καὶ μεγαλορρῶγα,
ἣν εἰκὸς ἐκεῖ εὐερνεστέραν εἶναι. χρῶνται
δ´ ὄνοις οἱ πολλοὶ καὶ πρὸς πόλεμον σπάνει τῶν ἵππων·
ὄνον τε θύουσι τῷ Ἄρει, ὅνπερ σέβονται θεῶν μόνον,
καὶ εἰσὶ πολεμισταί· γαμεῖ δ´ οὐδεὶς πρὶν ἂν πολεμίου
κεφαλὴν ἀποτεμὼν ἀνενέγκῃ ἐπὶ τὸν βασιλέα· ὁ δὲ τὸ
κρανίον μὲν ἐπὶ τῶν βασιλείων ἀνατίθησι, τὴν δὲ
γλῶτταν λεπτοτομήσας {καὶ} καταμίξας ἀλεύρῳ γευσάμενος
αὐτὸς δίδωσι τῷ ἀνενέγκαντι καὶ τοῖς οἰκείοις
κατασιτήσασθαι· ἐνδοξότατος δ´ ἐστὶν ᾧ πλεῖσται κεφαλαὶ
ἀνηνέχθησαν. Νέαρχος δὲ τὰ πλεῖστα ἔθη καὶ
τὴν διάλεκτον τῶν Καρμανιτῶν Περσικά τε καὶ Μηδικὰ
εἴρηκε. τὸ δὲ στόμα τοῦ Περσικοῦ κόλπου {οὐ}
μεῖζον διάρματος ἡμερησίου.
| [15b,14] Avec la Carmanie finit la longue côte que nous avons vue commencer à
l'Indus. Mais la Carmanie est située beaucoup plus au nord que
l'embouchure de ce fleuve, bien que le premier cap qu'elle projette
s'avance dans la Grande Mer passablement loin au midi ; seulement, après
avoir formé l'entrée du golfe Persique avec un promontoire que l'Arabie
Heureuse envoie en quelque sorte à sa rencontre, la côte de Carmanie fait
un coude et remonte dans la direction de ce même golfe jusqu'aux confins
de la Perse. Ajoutons que la Carmanie s'enfonce aussi fort avant dans
l'intérieur entre la Gédrosie et la Perse, et qu'elle dépasse même de
beaucoup la Gédrosie vers le nord, comme l'atteste du reste son extrême
fertilité. Il n'y a rien en effet que son sol ne produise, et, à
l'exception de l'olivier, elle possède toutes les grandes espèces d'arbres
; de plus, on peut dire que des cours d'eau la sillonnent en tous sens. La
Gédrosie au contraire diffère à peine de la côte des Ichthyophages, et,
comme elle est exposée elle aussi à de fréquentes disettes, ses habitants
sont tenus à réserver toujours une partie de la récolte de l'année en vue
des années suivantes. Onésicrite parle en outre d'un fleuve de la Carmanie
qui roule des paillettes d'or ; il signale même la présence dans le pays
de mines d'argent, de cuivre et de minium, voire d'une montagne d'orpiment
et d'une montagne de sel. En revanche, dans la partie où elle touche à la
Parthyène et à la Parétacène, la Carmanie n'est plus qu'un désert.
Ailleurs, ses productions agricoles sont absolument les mêmes que celles
de la Perse ; on y cultive beaucoup la vigne notamment. Le plant connu
dans nos pays sous le nom de plant de Carmanie donne parfois des grappes
de deux coudées, à grains déjà très gros et très serrés, mais il y a
apparence que, dans le pays même dont il est originaire, il a encore plus
de force. Les indigènes de la Carmanie se servent communément, voire pour
la guerre, d'ânes au lieu de chevaux, les chevaux chez eux étant très
rares. Aussi est-ce toujours un âne qu'ils offrent à Mars comme victime, à
Mars, la seule divinité qui soit chez eux l'objet d'une grande vénération.
Ils sont en effet naturellement belliqueux ; et pas un homme chez eux ne
se marie avant d'avoir coupé la tête à un ennemi et avant de l'avoir
rapportée au roi. Le roi garde la tête pour exposer le crâne plus tard sur
son palais, mais il arrache la langue, la coupe en menus morceaux qu'il
saupoudre de farine de froment, goûte lui-même à ce mets friand et donne
le reste à celui qui lui a apporté le trophée, pour qu'il s'en régale avec
ses parents et amis. La gloire du roi se mesure au nombre de têtes qui lui
ont été apportées. D'autre part, Néarque assure que les Carmanites ont
emprunté aux Perses et aux Mèdes la plus grande partie de leurs usages et
des mots de leur langue. - L'entrée du golfe Persique n'a pas en largeur
plus d'une journée de navigation.
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