[13a,7] Ἐκ δὴ τῶν ὑπὸ τοῦ ποιητοῦ λεγομένων εἰκάζουσιν
οἱ φροντίσαντες περὶ τούτων πλέον τι, πᾶσαν τὴν παραλίαν
ταύτην ὑπὸ τοῖς Τρωσὶ γεγονέναι, διῃρημένην
μὲν εἰς δυναστείας ἐννέα, ὑπὸ δὲ τῷ Πριάμῳ τεταγμένην
κατὰ τὸν Ἰλιακὸν πόλεμον καὶ λεγομένην Τροίαν·
δῆλον δὲ ἐκ τῶν κατὰ μέρος. οἱ γὰρ περὶ τὸν Ἀχιλλέα
τειχήρεις ὁρῶντες τοὺς Ἰλιέας κατ´ ἀρχάς, ἔξω ποιεῖσθαι τὸν πόλεμον
ἐπεχείρησαν καὶ περιιόντες ἀφαιρεῖσθαι τὰ κύκλῳ
„δώδεκα δὴ σὺν νηυσὶ πόλεις ἀλάπαξ´ ἀνθρώπων,
πεζὸς δ´ ἕνδεκά φημι κατὰ Τροίην
ἐρίβωλον.“ Τροίαν γὰρ λέγει τὴν πεπορθημένην ἤπειρον· πεπόρθηται δὲ σὺν
ἄλλοις τόποις καὶ τὰ ἀντικείμενα τῇ Λέσβῳ τὰ περὶ Θήβην καὶ Λυρνησσὸν καὶ
Πήδασον τὴν τῶν Λελέγων καὶ ἔτι ἡ τοῦ Εὐρυπύλου τοῦ
Τηλέφου παιδός „ἀλλ´ οἷον τὸν Τηλεφίδην κατενήρατο
χαλκῷ“ ὁ Νεοπτόλεμος „ἥρω Εὐρύπυλον.“ ταῦτα δὴ πεπορθῆσθαι
λέγει καὶ αὐτὴν τὴν Λέσβον „ὅτε
„Λέσβον ἐυκτιμένην ἕλεν αὐτός.“ καὶ „πέρσε δὲ Λυρνησσὸν
καὶ Πήδασον.“ καὶ „Λυρνησσὸν διαπορθήσας καὶ τείχεα Θήβης.“
Ἐκ μὲν Λυρνησσοῦ ἡ Βρισηὶς ἑάλω „τὴν ἐκ Λυρνησσοῦ
ἐξείλετο.“ ἧς ἐν τῇ ἁλώσει τὸν Μύνητα πεσεῖν φησιν, ὡς ἡ Βρισηὶς θρηνοῦσα τὸν Πάτροκλον δηλοῖ „οὐδὲ μὲν οὐδέ μ´ ἔασκες, ὅτ´ ἄνδρ´ ἐμὸν ὠκὺς
„Ἀχιλλεὺς ἔκτεινεν, πέρσεν δὲ πόλιν θείοιο Μύνητος,
„κλαίειν.“ ἐμφαίνει γὰρ τὴν Λυρνησσὸν λέγων „πόλιν
θείοιο Μύνητος,“ ὡς ἂν δυναστευομένην ὑπ´ αὐτοῦ,
καὶ ἐνταῦθα πεσεῖν αὐτὸν μαχόμενον. ἐκ δὲ τῆς Θήβης ἡ Χρυσηὶς ἐλήφθη
„ᾠχόμεθ´ ἐς Θήβην ἱερὴν πόλιν
„Ἠετίωνος.“ ἐκ δὲ τῶν ἀχθέντων ἐκεῖθεν φησὶν εἶναι
τὴν Χρυσηίδα. „Ἀνδρομάχη θυγάτηρ μεγαλήτορος Ἠετίωνος,
Ἠετίων, ὃς ἔναιεν ὑπὸ Πλάκῳ ὑληέσσῃ, Θήβῃ
„ὑποπλακίῃ, Κιλίκεσς´ ἄνδρεσσιν ἀνάσσων.“ δευτέρα
οὖν αὕτη δυναστεία Τρωικὴ μετὰ τὴν ὑπὸ Μύνητι. οἰκείως δὲ τούτοις καὶ τὸ ὑπὸ
τῆς Ἀνδρομάχης λεχθὲν οὕτως „Ἕκτορ, ἐγὼ δύστηνος· ἰῇ ἄρα γεινόμεθ´ αἴσῃ
ἀμφότεροι, σὺ μὲν ἐν Τροίῃ Πριάμου ἐνὶ οἴκῳ, αὐτὰρ
„ἐγὼ Θήβῃσιν,“ οὐκ οἴονται δεῖν ἐξ εὐθείας ἀκούειν,
ἀλλὰ καθ´ ὑπερβατόν „ἀμφότεροι ἐν Τροίῃ, σὺ μὲν
„Πριάμου ἐνὶ οἴκῳ, αὐτὰρ ἐγὼ Θήβῃσι.“ τρίτη δ´ ἐστὶν
ἡ τῶν Λελέγων, καὶ αὕτη Τρωική, „Ἄλτεω, ὃς Λελέγεσσι φιλοπτολέμοισιν
ἀνάσσει.“ οὗ τῇ θυγατρὶ συνελθὼν Πρίαμος γεννᾷ τὸν Λυκάονα καὶ Πολύδωρον. καὶ μὴν οἵ γε ὑπὸ τῷ Ἕκτορι ἐν τῷ καταλόγῳ ταττόμενοι
λέγονται Τρῶες „Τρωσὶ μὲν ἡγεμόνευε μέγας κορυθαίολος Ἕκτωρ.“
εἶθ´ οἱ ὑπὸ τῷ Αἰνείᾳ „Δαρδανίων αὖτ´
„ἦρχεν ἐὺς πάις Ἀγχίσαο“ καὶ οὗτοι Τρῶες· φησὶ γοῦν
„Αἰνεία, Τρώων βουληφόρε.“ εἶθ´ οἱ ὑπὸ Πανδάρῳ
Λύκιοι, οὓς καὶ αὐτοὺς καλεῖ Τρῶας· „οἳ δὲ Ζέλειαν
„ἔναιον ὑπαὶ πόδα νείατον Ἴδης, Ἀφνειοί, πίνοντες
„ὕδωρ μέλαν Αἰσήποιο, Τρῶες· τῶν αὖτ´ ἦρχε Λυκάονος
ἀγλαὸς υἱός, Πάνδαρος.“ ἕκτη δ´ αὕτη δυναστεία.
καὶ μὴν οἵ γε μεταξὺ τοῦ Αἰσήπου καὶ Ἀβύδου Τρῶες·
ὑπὸ μὲν γὰρ τῷ Ἀσίῳ ἐστὶ τὰ περὶ Ἄβυδον „οἳ δ´ ἄρα
„Περκώτην καὶ Πράκτιον ἀμφενέμοντο, καὶ Σηστὸν
„καὶ Ἄβυδον ἔχον καὶ δῖαν Ἀρίσβην, τῶν αὖθ´ Ὑρτακίδης
ἦρχ´ Ἄσιος.“ ἀλλ´ ἐν Ἀβύδῳ μὲν υἱὸς τοῦ Πριάμου διέτριβεν,
ἵππους νέμων, πατρῴας δηλονότι „ἀλλ´
„υἱὸν Πριάμοιο νόθον βάλε Δημοκόωντα, ὅς οἱ Ἀβυδόθεν
ἦλθε παρ´ ἵππων ὠκειάων.“ ἐν δὲ Περκώτῃ υἱὸς
Ἱκετάονος ἐβουνόμει οὐκ ἀλλοτρίας οὐδ´ οὗτος βοῦς
„πρῶτον δ´ Ἱκεταονίδην ἐνένιπεν, ἴφθιμον Μελάνιππον·
ὁ δ´ ὄφρα μὲν εἰλίποδας βοῦς βόσκ´ ἐν Περκώτῃ.“
ὥστε καὶ αὕτη ἂν εἴη Τρῳὰς καὶ ἡ ἐφεξῆς
ἕως Ἀδραστείας· ἦρχον γὰρ αὐτῆς „υἷε δύω Μέροπος
„Περκωσίου.“ πάντες μὲν δὴ Τρῶες οἱ ἀπὸ Ἀβύδου
μέχρι Ἀδραστείας, δίχα μέντοι διῃρημένοι, οἱ μὲν ὑπὸ
τῷ Ἀσίῳ οἱ δ´ ὑπὸ τοῖς Μεροπίδαις· καθάπερ καὶ ἡ
τῶν Κιλίκων διττή, ἡ μὲν Θηβαϊκὴ ἡ δὲ Λυρνησσίς·
ἐν αὐτῇ δ´ ἂν λεχθείη ἡ ὑπὸ Εὐρυπύλῳ ἐφεξῆς οὖσα
τῇ Λυρνησσίδι. ὅτι δὲ τούτων ἁπάντων ἦρχεν ὁ Πρίαμος
οἱ τοῦ Ἀχιλλέως λόγοι πρὸς τὸν Πρίαμον σαφῶς
ἐμφανίζουσι „καί σε, γέρον, τὸ πρὶν μὲν ἀκούομεν ὄλβιον
εἶναι, ὅσσον Λέσβος ἄνω Μάκαρος πόλις ἐντὸς
ἐέργει, καὶ Φρυγίη καθύπερθε καὶ Ἑλλήσποντος ἀπείρων.“
| [13a,7] 7. Des paroles d'Homère les auteurs qui se sont plus particulièrement
occupés de ces questions infèrent que cette portion du littoral
appartenait tout entière aux Troyens : ils la montrent en effet, d'après
le poète, bien que divisée en neuf ou dix principautés distinctes,
soumise, au temps de la guerre de Troie, à l'autorité de Priam et portant
un nom unique, celui de Troia. Et c'est ce qui ressort avec évidence de
l'examen de certains passages détachés, de celui-ci, par exemple :
Achille, voyant que les habitants d'Ilion, au début de la guerre, se
tiennent renfermés au dedans de leurs murailles, a entrepris de ravager
les dehors de la place, d'en faire tout le tour et d'en enlever une à une
toutes les dépendances :
«Monté sur mes vaisseaux, dit-il, j'ai assailli et pillé douze cités
populeuses ; j'en ai forcé onze autres à la tête de mes braves fantassins
dans les plaines de la fertile Troie» (Il. IX, 328).
Mais, ici, sous ce nom de Troie, Achille apparemment désigne toute la
partie du continent dévastée par ses armes : or, entre autres lieux, il
avait dévasté tout ce qui fait face à Lesbos, et Thébé, et Lyrnesse, et
Pédase, l'une des villes des Léléges, voire même tout le pays d'Eurypyle,
fils de Télèphe :
«Ainsi déjà sous son fer (le fer de Néoptolème) était tombé le Téléphide,
le héros Eurypyle» (Od. XI, 519).
Tels sont les lieux qu'Homère dit formellement avoir été dévastés par
Achille, et auxquels on peut joindre Lesbos même, d'après ce passage :
«Quand il eut pris la riche et populeuse Lesbos» (Il. IX, 129).
On lit, en effet, dans l'Iliade (XX, 92) :
«Il détruisit et Lyrnesse et Pédase», et (ibid., II, 691) :
«Ayant saccagé Lyrnesse et forcé l'enceinte de Thébé».
Mais c'est dans Lyrnesse que Briséis était tombée au pouvoir d'Achille,
Homère le dit expressément (Iliade, II, 690) :
«Il l'avait enlevée dans Lyrnesse» ;
c'est là aussi, et au même moment, que Mynès trouve la mort, Homère le dit
encore, ou du moins l'indique par la bouche de Briséis, quand, parmi les
plaintes que lui inspire la mort de Patrocle, celle-ci s'écrie :
«Jamais, non, jamais, même au lendemain du jour où le fougueux Achille
avait tué mon époux et mis à sac la ville du divin Mynès, tu ne me laissas
me noyer dans mes larmes » (Il. XIX, 295) ;
car, en appelant Lyrnesse, comme il fait, «la ville du divin Mynés» (ce
qui revient à dire apparemment qu'elle avait Mynès pour roi), il donne
bien aussi à entendre que c'était dans Lyrnesse, et en voulant la
défendre, que Mynès avait succombé. C'est dans Thébé, maintenant, que fut
prise Chryséis : témoin cet autre passage de l'Iliade :
«Nous allons à Thébé, la ville sacrée d'Eétion» (Il. I, 366),
dans lequel Achille, parlant du butin ramené par lui de Thébé, mentionne
expressément Chryséis. Or de ce premier passage {et de celui-ci qui se
rapporte à Andromaque, «la fille du magnanime Eétion»},
«Eétion habitait au pied des forêts du Placos, dans Thébé Ypoplacie, et de
là régnait sur le peuple cilicien» (Il. VI, 396),
il résulte que nous avons là un second Etat troyen à ajouter au royaume de
Mynès ; et le fait serait encore confirmé par cette exclamation d'Andromaque :
«Hector, Hector, que je suis malheureuse ! Ah ! nous sommes nés tous deux
pour le même destin : toi dans Troie, en la demeure de Priam ; moi à
Thèbes, {au pied des forêts du Placos sous le toit d'Eétion}» (Il. XXII, 477),
s'il est vrai, comme certains grammairiens le prétendent, qu'il faille
entendre ici les paroles du poète, non pas suivant leur ordre direct ou
naturel, mais en les transposant, ce qui donne :
«Ah ! nous sommes nés tous deux DANS TROIE pour le même destin, toi en la
demeure de Priam, moi à Thèbes, etc».
Un troisième Etat, celui des Léléges, dépendait également de la Troade,
témoin le passage dans lequel, parlant d'Altée :
«D'Altée, qui commande aux valeureux Léléges» (Il. XXI, 86),
Homère rappelle que sa fille, unie à Priam par les liens de l'hyménée, en
avait eu deux fils, Lycaon et Polydore. Ajoutons que les peuples qui
figurent dans le Catalogue comme rangés sous les ordres immédiats d'Hector
sont qualifiés de Troyens par le poète :
«Les Troyens marchaient sous la conduite du grand Hector au casque
étincelant» (Il. II, 316).
On ne peut voir aussi que des Troyens dans ceux qui suivent, et que
commandait Enée,
«Suivaient les Dardaniens aux ordres du bouillant fils d'Anchise» (Il. II, 819) ;
d'autant plus qu'ailleurs encore Homère {fait dire à Apollon} :
«Enée, toi qui sièges dans le conseil des Troyens» (Il. XX, 83).
Puis viennent les Lyciens de Pandarus, à qui Homère donne cette même
dénomination de Troyens :
«Les Aphnii leur succèdent, les Troyens Aphnii, qui habitent Zélia à
l'extrémité la plus reculée de l'Ida et qui boivent l'eau noire de
l'Aesépus. Ils ont pour chef le fils illustre de Lycaon, Pandarus» (Il. II, 824).
Tel est donc le sixième Etat ou royaume de la Troade. Mais ce ne sont pas
là tous les peuples troyens : les populations comprises entre l'Aesépus et
la ville d'Abydos avaient droit au même nom ; car, si Asius régnait sur
Abydos, comme le prouve ce passage de l'Iliade :
«Et les habitants de Percoté, et les riverains de Practius, et ceux qui
occupaient Sestos et Abydos et la divine Arisbé, marchaient ensemble sous
les ordres d'Asius fils d'Hyrtace» (Il. II, 835),
nous savons d'autre part qu'Abydos servait de résidence habituelle à l'un
des fils de Priam, préposé là à la garde d'un parc ou d'un troupeau de
cavales, dépendant apparemment du domaine de son père :
«Le fer du héros atteint Démocoon, fils naturel de Priam, qui, pour venir,
avait dû quitter Abydos {et cesser de veiller} sur les rapides cavales
{confiées à sa garde}» (Il. IV, 499).
Le fils d'Hikétaon, préposé, dans Percoté, à la garde des étables, ne
gardait sans doute pas davantage le bien de l'étranger,
«Le premier qu'{Hector} appelle à son aide est le fils d'Hikétaon, le
vaillant Mélanippe, qui naguère encore faisait paître dans Percoté les
belles vaches aux pas lents et contournés» (Il. XV, 546).
Il s'ensuit donc que Percoté, elle aussi, dépendait de la Troade ; et non
seulement Percoté, mais tout le pays à la suite jusqu'à Adrastée, puisque
ce pays reconnaissait pour chefs
«Les deux fils de Mérops, de Mérops le Percosien» (Il. II, 831).
Le nom de Troyens, on le voit, s'étendait à tous les peuples compris entre
Abydos et Adrastée : seulement ces peuples formaient deux Etats distincts,
obéissant l'un à Asius, l'autre aux fils de Mérops, tout comme le
territoire cilicien se divisait en deux, comprenant d'une part la
Thébaïque et de l'autre la Lyrnesside. Enfin l'on peut considérer comme le
neuvième Etat troyen le royaume d'Eurypyle, lequel faisait suite
immédiatement à la Lyrnesside. Que tous ces Etats, maintenant, aient
reconnu l'autorité de Priam, la réponse d'Achille à Priam le donne assez à
entendre :
«Ton sort est le même, ô vieillard, et nous savons combien naguère tu fus
riche et prospère, quand tu possédais tout ce qu'enserrent et la cité de
Macar, la haute île de Lesbos, et, derrière Lesbos, la Phrygie et
l'immense Hellespont» (Il. XXIV, 543).
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