[2,5,1] Ἐπεὶ δὲ τοῖς πρὸς ἐκείνους λόγοις συνεχής ἐστιν ἡ ἐγχείρησις τῆς
ἡμετέρας ὑποσχέσεως, λαβόντες ἀρχὴν ἑτέραν λέγωμεν, ὅτι δεῖ τὸν
χωρογραφεῖν ἐπιχειροῦντα πολλὰ τῶν φυσικῶς τε καὶ μαθηματικῶς
λεγομένων ὑποθέσθαι, καὶ πρὸς τὴν ἐκείνων ὑπόνοιάν τε καὶ πίστιν
τὰ ἑξῆς πραγματεύεσθαι. Εἴρηται γάρ, ὅτι οὐδ' οἰκοδόμος, οὐδ'
ἀρχιτέκτων οἰκίαν ἢ πόλιν ἱδρῦσαι καλῶς οἷός τε γένοιτ' ἂν,
ἀπρονοήτως ἔχων κλιμάτων {τε} τῶν κατὰ τὸν οὐρανὸν καὶ σχημάτων
τε καὶ μεγεθῶν καὶ θάλπους καὶ ψύχους καὶ ἄλλων τοιούτων, μή τί γε
τὴν ὅλην οἰκουμένην τοποθετῶν. Αὐτὸ γὰρ τὸ εἰς ἐπίπεδον γράφειν
ἐπιφάνειαν μίαν καὶ τὴν αὐτὴν τά τε Ἰβηρικὰ καὶ τὰ Ἰνδικὰ καὶ τὰ
μέσα τούτων, καὶ μηδὲν ἧττον δύσεις καὶ ἀνατολὰς ἀφορίζειν καὶ
μεσουρανήσεις ὡς ἂν κοινὰς πᾶσι, τῷ μὲν προεπινοήσαντι τὴν τοῦ
οὐρανοῦ διάθεσίν τε καὶ κίνησιν καὶ λαβόντι, ὅτι σφαιρικὴ μέν ἐστιν ἡ
κατ' ἀλήθειαν τῆς γῆς ἐπιφάνεια, πλάττεται δὲ νῦν ἐπίπεδος πρὸς τὴν
ὄψιν, γεωγραφικὴν ἔχει τὴν παράδοσιν, τῷ δ' ἄλλως, οὐ γεωγραφικήν.
Οὐ γὰρ ὥσπερ διὰ πεδίων ἰοῦσι μεγάλων, οἷον τῶν Βαβυλωνίων, ἢ διὰ
πελάγους παρίσταται τὰ πρόσω πάντα καὶ τὰ κατόπιν καὶ ἐκ πλαγίων
ἐπίπεδα, καὶ οὐδεμίαν ἀντέμφασιν παρέχει πρὸς τὰ οὐράνια καὶ τὰς
τοῦ ἡλίου κινήσεις καὶ σχέσεις πρὸς ἡμᾶς καὶ τῶν ἄλλων ἄστρων,
οὕτω καὶ γεωγραφοῦσιν παρίστασθαι ἀεὶ δεῖ τὰ ὅμοια. Ὁ μὲν γὰρ
πελαγίζων ἢ ὁδεύων διὰ χώρας πεδιάδος κοιναῖς τισι φαντασίαις
ἄγεται, καθ' ἃς καὶ ὁ ἀπαίδευτος καὶ ὁ πολιτικὸς ἐνεργεῖ ταὐτά,
ἄπειρος ὢν τῶν οὐρανίων καὶ τὰς πρὸς ταῦτα ἀντεμφάσεις ἀγνοῶν.
Ἀνατέλλοντα μὲν γὰρ ὁρᾷ ἥλιον καὶ δύνοντα καὶ μεσουρανοῦντα,
τίνα δὲ τρόπον, οὐκ ἐπισκοπεῖ· οὐδὲ γὰρ χρήσιμον αὐτῷ πρὸς τὸ
προκείμενον, ὥσπερ οὐδὲ τὸ παράλληλον ἑστάναι τῷ παρεστῶτι ἢ μή·
τάχα δ' ἐπισκοποῖ μὲν ἄν τι, δόξει δ' ἐν τοῖς μαθηματικῶς λεγομένοις,
καθάπερ οἱ ἐπιχώριοι· ἔχει γὰρ ὁ τόπος τοιαῦτα διαπτώματα. Ὁ δὲ
γεωγραφικὸς οὐκ ἐπιχωρίῳ γεωγραφεῖ, οὐδὲ πολιτικῷ τοιούτῳ, ὅστις
μηδὲν ἐφρόντισε τῶν λεγομένων ἰδίως μαθημάτων· οὐδὲ γὰρ θεριστῇ
καὶ σκαπανεῖ, ἀλλὰ τῷ πεισθῆναι δυναμένῳ τὴν γῆν ἔχειν οὕτω τὴν
ὅλην, ὡς οἱ μαθηματικοί φασι, καὶ τὰ ἄλλα τὰ πρὸς τὴν ὑπόθεσιν τὴν
τοιαύτην. Κελεύει τε τοῖς προσιοῦσιν ἐκεῖνα προενθυμηθεῖσι τὰ ἑξῆς
ἐφορᾶν· ἐκείνοις γὰρ τὰ ἀκόλουθα ἐρεῖν, ὥστε μᾶλλον ποιήσασθαι
τῶν παραδιδομένων ἀσφαλῆ τὴν χρῆσιν τοὺς ἐντυγχάνοντας, ἂν
ἀκούωσι μαθηματικῶς, τοῖς δ' ἄλλως ἔχουσιν οὔ φησι γεωγραφεῖν.
| [2,5,1] De l'examen critique que nous venons de faire de ces anciens
géographes, passons maintenant, pour tenir notre promesse, à l'exposé
de nos propres opinions. Ici encore nous commencerons par déclarer que
quiconque entreprend de décrire en détail les différentes contrées de la
terre doit emprunter à la physique et à la science mathématique un
certain nombre d'axiomes, pour s'en inspirer et s'en autoriser dans toute
la suite de son ouvrage. S'il est vrai, disions-nous aussi plus haut, que
jamais maçon ni architecte n'auraient pu bâtir convenablement soit une
maison, soit une ville, s'ils ne se fussent rendu compte au préalable du
climat et de l'exposition, de la configuration, de l'étendue du terrain, de la
température et des autres conditions de ce genre, à plus forte raison est-
ce vrai de celui qui entreprend de décrire toute la terre habitée. Le dessin,
en effet, où l'on représente sur une seule et même surface plane l'Ibérie,
l'Inde et toutes les contrées intermédiaires, et où le couchant néanmoins,
le levant et le midi, sont censés déterminés pour tous les lieux de la terre
à la fois, un tel dessin peut bien faciliter l'étude de la géographie, mais
c'est à la condition qu'on se sera fait au préalable une idée nette de la
disposition et du mouvement du ciel et qu'on aura compris une fois pour
toutes qu'en réalité la surface de la terre est sphérique et qu'on ne la
suppose plane que pour les yeux ; autrement il ne peut donner que de
fausses notions géographiques. Le voyageur qui traverse une plaine
immense, celle de la Babylonie par exemple, ou qui navigue loin des
côtes, n'ayant devant lui, derrière lui, à sa droite, à sa gauche, qu'une
même surface plane, peut ne rien soupçonner des changements qui
affectent l'aspect du ciel, ainsi que le mouvement et la position du soleil et
des autres astres par rapport à nous ; mais le géographe, lui, ne peut s'en
tenir à cette apparente uniformité. Le navigateur en pleine mer, le
voyageur au milieu du désert se guide donc d'après ces phénomènes
vulgaires, sur lesquels se règlent aussi dans la vie habituelle l'homme du
peuple et l'homme d'État, sans rien enténdre ni l'un ni l'autre à
l'astronomie et sans se douter de l'extrême diversité des phénomènes
célestes. L'homme d'État, notamment, voit tous les jours le soleil qui se
lève, passe au méridien et se couche , sans chercher à deviner les
causes du phénomène, car, pour ce qui l'occupe, il n'a que faire de les
connaître, non plus que de savoir si, dans le moment où il parle, le plan
sur lequel il se trouve est ou non parallèle à celui de son interlocuteur, ou,
si par hasard il y arrête sa pensée, vous le voyez, dans une question
purement mathématique, adopter l'explication des gens du pays, chaque
pays, sur ces matières-là même, ayant ses préjugés à lui. Mais le
géographe n'écrit pas pour l'habitant de telle ou telle localité, il n'écrit pas
davantage pour le politique, qui, comme celui dont nous venons de parler,
fait profession de mépriser tout ce qui est proprement du domaine des
mathématiques, car autant vaudrait s'adresser au moissonneur ou au
simple fossoyeur, il écrit pour celui-là seulement qui a pu arriver à se
convaincre que la terre prise dans son ensemble est bien réellement telle
que les mathématiciens nous la représentent et qui a compris tout ce qui
découle de cette première hypothèse ; il veut que ses disciples se soient
bien pénétrés de ces principes mathématiques avant de porter leur vue
plus loin, et il a raison, car il ne leur dira rien qui n'en soit une
conséquence directe, et le moyen le plus sûr pour eux de profiter de son
enseignement, c'est de l'entendre avec un esprit mathématique; le
géographe, encore une fois, ne s'adresse pas à ceux qui sont clans une
autre disposition d'esprit.
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