[2,4,2] Φησὶ δ' οὖν ὁ Πολύβιος ἄπιστον καὶ αὐτὸ τοῦτο, πῶς ἰδιώτῃ
ἀνθρώπῳ καὶ πένητι τὰ τοσαῦτα διαστήματα πλωτὰ καὶ πορευτὰ
γένοιτο· τὸν δ' Ἐρατοσθένη διαπορήσαντα, εἰ χρὴ πιστεύειν τούτοις,
ὅμως περί τε τῆς Βρεττανικῆς πεπιστευκέναι καὶ τῶν κατὰ Γάδειρα
καὶ τὴν Ἰβηρίαν· πολὺ δέ φησι βέλτιον τῷ Μεσσηνίῳ πιστεύειν ἢ
τούτῳ. Ὁ μέντοι γε εἰς μίαν χώραν τὴν Παγχαίίαν λέγει πλεῦσαι· ὁ δὲ
καὶ μέχρι τῶν τοῦ κόσμου περάτων κατωπτευκέναι τὴν προσάρκτιον
τῆς Εὐρώπης πᾶσαν, ἣν οὐδ' ἂν τῷ Ἑρμῇ πιστεύσαι τις λέγοντι.
Ἐρατοσθένη δὲ τὸν μὲν Εὐήμερον Βεργαῖον καλεῖν, Πυθέᾳ δὲ
πιστεύειν, καὶ ταῦτα μηδὲ Δικαιάρχου πιστεύσαντος. Τὸ μὲν οὖν μηδὲ
Δικαιάρχου πιστεύσαντος, γελοῖον, ὥσπερ ἐκείνῳ κανόνι χρήσασθαι
προσῆκον, καθ' οὗ τοσούτους ἐλέγχους αὐτὸς προφέρεται·
Ἐρατοσθένους δὲ εἴρηται ἡ περὶ τὰ ἑσπέρια καὶ τὰ ἀρκτικὰ τῆς
Εὐρώπης ἄγνοια. Ἀλλ' ἐκείνῳ μὲν καὶ Δικαιάρχῳ συγγνώμη, τοῖς μὴ
κατιδοῦσι τοὺς τόπους ἐκείνους· Πολυβίῳ δὲ καὶ Ποσειδωνίῳ τίς ἂν
συγ γνοίη; Ἀλλὰ μὴν Πολύβιός γέ ἐστιν ὁ λαοδογματικὰς καλῶν
ἀποφάσεις, ἃς ποιοῦνται περὶ τῶν ἐν τούτοις τοῖς τόποις διαστημάτων
καὶ ἐν ἄλλοις πολλοῖς, ἀλλ' οὐδ' ἐν οἷς ἐκείνους ἐλέγχει καθαρεύων.
Τοῦ γοῦν Δικαιάρχου μυρίους μὲν εἰπόντος τοὺς ἐπὶ Στήλας ἀπὸ τῆς
Πελοποννήσου σταδίους, πλείους δὲ τούτων τοὺς ἐπὶ τὸν Ἀδρίαν μέχρι
τοῦ μυχοῦ, τοῦ δ' ἐπὶ Στήλας τὸ μέχρι τοῦ πορθμοῦ τρισχιλίους
ἀποδόντος, ὡς γίνεσθαι τὸ λοιπὸν ἑπτακισχιλίους τὸ ἀπὸ πορθμοῦ
μέχρι Στηλῶν· τοὺς μὲν τρισχιλίους ἐᾶν φησιν, εἴτ' εὖ λαμβάνονται
εἴτε μή, τοὺς δ' ἑπτακισχιλίους οὐδετέρως, οὔτε τὴν παραλίαν
ἐκμετροῦντι, οὔτε τὴν διὰ μέσου τοῦ πελάγους. Τὴν μὲν γὰρ παραλίαν
ἐοικέναι μάλιστ' ἀμβλείᾳ γωνίᾳ, βεβηκυίᾳ ἐπί τε τοῦ πορθμοῦ καὶ τῶν
Στηλῶν, κορυφὴν δ' ἐχούσῃ Νάρβωνα· ὥστε συνίστασθαι τρίγωνον
βάσιν ἔχον τὴν διὰ τοῦ πελάγους εὐθεῖαν, πλευρὰς δὲ τὰς τὴν γωνίαν
ποιούσας τὴν λεχθεῖσαν, ὧν ἡ μὲν ἀπὸ τοῦ πορθμοῦ μέχρι Νάρβωνος
μυρίων ἐστὶ καὶ πλειόνων ἢ διακοσίων ἐπὶ τοῖς χιλίοις, ἡ δὲ λοιπὴ
μικρῷ ἐλαττόνων ἢ ὀκτακισχιλίων· καὶ μὴν πλεῖστον μὲν διάστημα
ἀπὸ τῆς Εὐρώπης ἐπὶ τὴν Λιβύην ὁμολογεῖσθαι κατὰ τὸ Τυρρηνικὸν
πέλαγος σταδίων οὐ πλειόνων ἢ τρισχιλίων, κατὰ τὸ Σαρδόνιον δὲ
λαμβάνειν συναγωγήν. Ἀλλ' ἔστω, φησί, καὶ ἐκεῖνο τρισχιλίων,
προειλήφθω δ' ἐπὶ τούτοις δισχιλίων σταδίων τὸ τοῦ κόλπου βάθος
τοῦ κατὰ Νάρβωνα, ὡς ἂν κάθετος ἀπὸ τῆς κορυφῆς ἐπὶ τὴν βάσιν τοῦ
ἀμβλυγωνίου· δῆλον οὖν, φησίν, ἐκ τῆς παιδικῆς μετρήσεως, ὅτι ἡ
σύμπασα παραλία ἡ ἀπὸ τοῦ πορθμοῦ ἐπὶ Στήλας ἔγγιστα ὑπερέχει
τῆς διὰ τοῦ πελάγους εὐθείας πεντακοσίοις σταδίοις. Προστεθέντων
δὲ τῶν ἀπὸ τῆς Πελοποννήσου ἐπὶ τὸν Πορθμὸν τρισχιλίων, οἱ
σύμπαντες ἔσονται στάδιοι, αὐτοὶ οἱ ἐπ' εὐθείας, πλείους ἢ διπλάσιοι
ὧν Δικαίαρχος εἶπε· πλείους δὲ τούτων τοὺς ἐπὶ τὸν μυχὸν τὸν
Ἀδριατικὸν δεήσει, φησί, τιθέναι κατ' ἐκεῖνον.
| [2,4,2] Or, au jugement de Polybe, il est déjà incroyable qu'un simple
particulier, notoirement pauvre, ait trouvé les moyens de parcourir, soit
par mer, soit par. terre, de si énormes distances ; mais ce qui ne l'est pas
moins, c'est qu'Ératosthène, après avoir émis absolument les mêmes
doutes, ait accepté pourtant le témoignage de Pythéas en ce qui
concerne la Bretagne, Gadira et l'Ibérie. « N'eût-il pas mieux valu cent
fois, dit Polybe, croire au récit du Messénien? Celui-ci du moins ne s'est
vanté que d'une seule découverte, de sa navigation à l'île de Panchaia,
tandis que l'autre prétend avoir atteint aux limites mêmes du monde et
avoir exploré toute la région septentrionale de l'Europe, allégation qu'on
ne croirait même pas sortant de la bouche d'Hermès. Que fait
cependant Ératosthène? Il traite Évhémère de Bergéen, et croit Pythéas,
oui, Pythéas, que Dicéarque lui-même n'a pas cru ! » - « Que Dicéarque
lui-même n'a pas cru, » plaisante remarque en vérité! Comme si
Ératosthène était tenu de se régler sur un auteur contre qui Polybe tout le
premier ne cesse de diriger ses critiques ! Il est bien vrai, maintenant,
qu'Ératosthène ignorait la géographie des parties occidentale et
septentrionale de l'Europe, nous-même l'avons démontré plus haut. Mais
cette ignorance chez lui et chez Dicéarque est excusable, puisque ni l'un
ni l'autre n'avaient visité ces contrées; ne serait-elle pas inexcusable au
contraire si nous la rencontrions chez Polybe et chez Posidonius? Eh
bien! Polybe, qui traite d'erreurs et de préjugés populaires tout ce que ces
auteurs nous ont rapporté au sujet des distances non seulement dans ces
pays lointains, mais dans bien d'autres pays encore, n'a pas su se
préserver lui-même de toute erreur dans les critiques qu'il leur adresse.
Ainsi Dicéarque compte à partir du Péloponnèse 10.000 stades jusqu'aux
Colonnes d'Hercule et plus de 10.000 stades jusqu'au fond de
l'Adriatique, et comme, suivant lui, entre le Péloponnèse et les Colonnes
d'Hercule, la première partie du trajet jusqu'au détroit de Sicile est de
3.000 stades, c'est, on le voit, 7.000 stades qui restent pour la distance du
détroit de Sicile aux Colonnes d'Hercule. Que dit Polybe à ce propos? Il
passe condamnation sur ce nombre de 3.000 stades, exact ou non,
attribué à la première partie du trajet, mais il nie absolument que le reste
puisse être de 7.000 stades, qu'on le mesure en longeant la côte ou en
coupant la mer par le milieu. Suivant lui, en effet, la côte forme
exactement un angle obtus, dont l'un des côtés se termine au détroit de
Sicile, tandis que l'autre se prolonge jusqu'aux Colonnes d'Hercule, le
sommet de l'angle se trouvant placé à Narbonne, de sorte que l'on peut
concevoir un triangle ayant pour base la droite tirée à travers la mer et
pour côtés les côtés mêmes de l'angle en question, le côté compris entre
le détroit de Sicile et Narbonne mesurant plus de 11.200 stades et l'autre
un peu moins de 8.000. A vrai dire, ajoute Polybe, il paraît constant que la
plus grande distance entre l'Europe et la Libye, laquelle se mesure à
travers la mer Tyrrhénienne, n'excède pas 3000 stades et qu'elle pourrait
même être réduite encore, si on la mesurait à travers la mer de
Sardaigne. Mais soit, de ce côté-là même portons à 3.000 stades la
distance en question, il nous faut maintenant prélever sur cette longueur
2.000 stades pour la profondeur du golfe de Narbonne, autrement dit pour
la perpendiculaire abaissée du sommet sur la base du triangle
obtusangle; or, d'après ces données, il est évident qu'un enfant saurait
calculer que la longueur totale de la côte comprise entre le détroit de
Sicile et les Colonnes d'Hercule doit dépasser à peu près de 500 stades
la droite qui coupe transversalement la mer. E, si à cette longueur on
ajoute les 3.000 stades représentant la distance du Péloponnèse au détroit de
Sicile, la somme ainsi obtenue, qui sera précisément la longueur totale de
la droite en question, dépassera, on le voit, de plus du double le nombre
de stades que Dicéarque lui assigne. Et il faudrait pourtant, d'après son
calcul, faire la distance du Péloponnèse au fond de l'Adriatique encore
plus grande ! »
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