[10d,17] Λέγεσθαι δ' ὑπό τινων ὡς Λακωνικὰ εἴη τὰ πολλὰ τῶν νομιζομένων Κρητικῶν, τὸ
δ' ἀληθὲς εὑρῆσθαι μὲν ὑπ' ἐκείνων, ἠκριβωκέναι δὲ τοὺς Σπαρτιάτας, τοὺς δὲ Κρῆτας
ὀλιγωρῆσαι, κακωθεισῶν τῶν πόλεων καὶ μάλιστα τῆς Κνωσσίων, τῶν πολεμικῶν· μεῖναι
δέ τινα τῶν νομίμων παρὰ Λυττίοις καὶ Γορτυνίοις καὶ ἄλλοις τισὶ πολιχνίοις μᾶλλον ἢ παρ'
ἐκείνοις· καὶ δὴ καὶ τὰ Λυττίων νόμιμα ποιεῖσθαι μαρτύρια τοὺς τὰ Λακωνικὰ πρεσβύτερα
ἀποφαίνοντας· ἀποίκους γὰρ ὄντας φυλάττειν τὰ τῆς μητροπόλεως ἔθη, ἐπεὶ ἄλλως γε
εὔηθες εἶναι τὸ τοὺς βέλτιον συνεστῶτας καὶ πολιτευομένους τῶν χειρόνων ζηλωτὰς
ἀποφαίνειν· οὐκ εὖ δὲ ταῦτα λέγεσθαι· οὔτε γὰρ ἐκ τῶν νῦν καθεστηκότων τὰ παλαιὰ
τεκμηριοῦσθαι δεῖν, εἰς τἀναντία ἑκατέρων μεταπεπτωκότων· καὶ γὰρ ναυκρατεῖν πρότερον
τοὺς Κρῆτας, ὥστε καὶ παροιμιάζεσθαι πρὸς τοὺς προσποιουμένους μὴ εἰδέναι ἃ ἴσασιν “ὁ
Κρὴς ἀγνοεῖ τὴν θάλατταν,” νῦν δ' ἀποβεβληκέναι τὸ ναυτικόν· {οὔτε} ὅτι ἄποικοί τινες τῶν
πόλεων γεγόνασι τῶν ἐν Κρήτῃ Σπαρτιατῶν, ἐν τοῖς ἐκείνων νομίμοις διαμένειν
ἐπηναγκάσθαι· πολλὰς γοῦν τῶν ἀποικίδων μὴ φυλάττειν τὰ πάτρια, πολλὰς δὲ καὶ τῶν μὴ
ἀποικίδων ἐν Κρήτῃ τὰ αὐτὰ ἔχειν τοῖς ἀποίκοις ἔθη.
| [10d,17] «Quelques auteurs ont prétendu que la plupart des institutions de la Crète
étaient d'origine lacédémonienne, mais la vérité est qu'elles ont pris naissance en Crète
et a que les Spartiates n'ont fait que les perfectionner. Seulement, les Crétois ont fini
presque tous par les laisser tomber en désuétude, après que leurs cités les plus
belliqueuses, et Cnosse surtout, eurent été ruinées par la guerre. Que si une partie s'en
est gardée, c'est à Lyttos, à Gortyne et dans quelques autres petites villes plutôt qu'à
Cnosse. La fidélité des Lyttiens, notamment, aux anciennes coutumes a été invoquée
comme preuve à l'appui de leur opinion par ceux qui soutiennent l'antériorité des
institutions de Sparte. Ils ont prétendu que les colonies conservaient toujours les moeurs
de leur métropole, et qu'il ne pouvait en être autrement, car ce serait se montrer par trop
simple que de supposer qu'un peuple en possession de bonnes lois et de sages
institutions va s'empresser de les échanger contre des lois et des institutions
notoirement inférieures. - Mais, reprend Ephore, l'argument ne vaut rien. Ce n'est pas,
en effet, d'après les institutions actuelles de la Crète qu'on peut se faire une idée de ce
qui existait jadis, surtout quand chacun sait que, des deux côtés, du côté de la Crète
comme du côté de Lacédémone, il s'est opéré un changement en sens inverse. Chacun
sait, en effet, qu'anciennement l'empire de la mer était tout aux mains des Crétois, au
point même que, quand on voulait désigner les gens qui feignent d'ignorer ce qu'ils
savent, on disait, par manière de proverbe : «Oui, oui, des Crétois qui ne connaissent
pas la mer !» et qu'aujourd'hui, au contraire, les Crétois n'ont plus de marine. Qu'on ne
croie pas non plus que, parce que les Spartiates, venus anciennement en Crète, y ont
fondé dans plus d'une ville des colonies, ces villes aient été forcées de conserver à tout
jamais les lois et coutumes qui leur avaient été alors imposées. Aujourd'hui, en effet, il y
a beaucoup de ces anciennes colonies doriennes qui n'observent plus les coutumes de
la mère-patrie, et beaucoup d'autres villes, en revanche, qui, sans avoir été jamais
colonisées par les Spartiates, se trouvent avoir les mêmes moeurs et les mêmes
coutumes que leurs colonies».
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