HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Sophocle, Antigone

Vers 700-799

  Vers 700-799

[700] τοιάδἐρεμνὴ σῖγἐπέρχεται φάτις.
ἐμοὶ δὲ σοῦ πράσσοντος εὐτυχῶς, πάτερ,
οὐκ ἔστιν οὐδὲν κτῆμα τιμιώτερον,
τί γὰρ πατρὸς θάλλοντος εὐκλείας τέκνοις
ἄγαλμα μεῖζον, τί πρὸς παίδων πατρί;
705 μή νυν ἓν ἦθος μοῦνον ἐν σαυτῷ φόρει,
ὡς φὴς σύ, κοὐδὲν ἄλλο, τοῦτὀρθῶς ἔχειν
ὅστις γὰρ αὐτὸς φρονεῖν μόνος δοκεῖ,
γλῶσσαν, ἣν οὐκ ἄλλος, ψυχὴν ἔχειν,
οὗτοι διαπτυχθέντες ὤφθησαν κενοί.
710 ἀλλἄνδρα, κεἴ τις σοφός, τὸ μανθάνειν
πόλλ᾽, αἰσχρὸν οὐδὲν καὶ τὸ μὴ τείνειν ἄγαν.
ὁρᾷς παρὰ ῥείθροισι χειμάρροις ὅσα
δένδρων ὑπείκει, κλῶνας ὡς ἐκσῴζεται,
τὰ δἀντιτείνονταὐτόπρεμνἀπόλλυται.
715 αὕτως δὲ ναὸς ὅστις ἐγκρατῆ πόδα
τείνας ὑπείκει μηδέν, ὑπτίοις κάτω
στρέψας τὸ λοιπὸν σέλμασιν ναυτίλλεται.
ἀλλεἶκε καὶ θυμῷ μετάστασιν δίδου.
γνώμη γὰρ εἴ τις κἀπἐμοῦ νεωτέρου
720 πρόσεστι, φήμἔγωγε πρεσβεύειν πολὺ
φῦναι τὸν ἄνδρα πάντἐπιστήμης πλέων·
εἰ δοὖν, φιλεῖ γὰρ τοῦτο μὴ ταύτῃ ῥέπειν,
καὶ τῶν λεγόντων εὖ καλὸν τὸ μανθάνειν.
(Χορός)
ἄναξ, σέ τεἰκός, εἴ τι καίριον λέγει,
725 μαθεῖν, σέ ταὖ τοῦδ᾽· εὖ γὰρ εἴρηται διπλῇ.
(Κρέων)
οἱ τηλικοίδε καὶ διδαξόμεσθα δὴ
φρονεῖν ὑπἀνδρὸς τηλικοῦδε τὴν φύσιν;
(Αἵμων)
μηδὲν τὸ μὴ δίκαιον· εἰ δἐγὼ νέος,
οὐ τὸν χρόνον χρὴ μᾶλλον τἄργα σκοπεῖν.
730 (Κρέων)
ἔργον γάρ ἐστι τοὺς ἀκοσμοῦντας σέβειν;
(Αἵμων)
οὐδἂν κελεύσαιμ᾽, εὐσεβεῖν εἰς τοὺς κακούς.
(Κρέων)
οὐχ ἥδε γὰρ τοιᾷδἐπείληπται νόσῳ;
(Αἵμων)
οὔ φησι Θήβης τῆσδὁμόπτολις λεώς.
(Κρέων)
πόλις γὰρ ἡμῖν ἁμὲ χρὴ τάσσειν ἐρεῖ;
(Αἵμων)
735 ὁρᾷς τόδὡς εἴρηκας ὡς ἄγαν νέος;
(Κρέων)
ἄλλῳ γὰρ μοὶ χρή με τῆσδἄρχειν χθονός;
(Αἵμων)
πόλις γὰρ οὐκ ἔσθἥτις ἀνδρός ἐσθἑνός.
(Κρέων)
οὐ τοῦ κρατοῦντος πόλις νομίζεται;
(Αἵμων)
καλῶς γἐρήμης ἂν σὺ γῆς ἄρχοις μόνος.
740 (Κρέων)
ὅδ᾽, ὡς ἔοικε, τῇ γυναικὶ συμμαχεῖ.
(Αἵμων)
εἴπερ γυνὴ σύ. σοῦ γὰρ οὖν προκήδομαι.
(Κρέων)
παγκάκιστε, διὰ δίκης ἰὼν πατρί;
(Αἵμων)
οὐ γὰρ δίκαιά σἐξαμαρτάνονθὁρῶ.
(Κρέων)
ἁμαρτάνω γὰρ τὰς ἐμὰς ἀρχὰς σέβων;
745 (Αἵμων)
οὐ γὰρ σέβεις τιμάς γε τὰς θεῶν πατῶν.
(Κρέων)
μιαρὸν ἦθος καὶ γυναικὸς ὕστερον.
(Αἵμων)
οὔ τἂν ἕλοις ἥσσω γε τῶν αἰσχρῶν ἐμέ.
(Κρέων)
γοῦν λόγος σοι πᾶς ὑπὲρ κείνης ὅδε.
(Αἵμων)
καὶ σοῦ γε κἀμοῦ, καὶ θεῶν τῶν νερτέρων.
[700] Voilà les propos qui vont leur train sous le manteau.
Père, ton bonheur m'est plus cher que tout : un père florissant fait l'orgueil de ses
enfants comme de beaux enfants sont l'orgueil de leur père. Mais montre-toi moins
absolu dans tes jugements; ne te crois pas l'unique détenteur de la vérité. Ceux qui
pensent avoir seuls reçu la sagesse en partage ou posséder une éloquence, un génie
hors de pair, on découvre à l'épreuve l'inanité de leurs prétentions. Même pour un grand
clerc, il n'y a pas de honte à s'instruire sans cesse et à réformer ses jugements. En
temps de crue, le long des torrents, tu vois les arbres qui savent plier sauver leurs
jeunes pousses, mais ceux qui tiennent tête sont déracinés; et le marin quine laisse pas
de jeu à la voile naviguera bientôt la quille en l'air. Allons, cède en ton coeur, reviens sur
ton arrêt. Si ma jeunesse n'est pas dénuée de tout bon sens, je dirai que rien n'est
supérieur à un homme expérimenté, mais que de tels sages ne courent pas les rues, et
qu'à tout prendre il n'est jamais déshonorant d'écouter un avis judicieux.
LE CORYPHÉE. Roi, s'il y a du bon sens dans ses paroles, il convient que tu en fasses
ton profit, comme lui des tiennes. De part et d'autre, vous avez parlé pertinemment.
CRÉON. A notre âge, souffrir qu'un jouvenceau nous donne des leçons de sagesse!
HÉMON. Ne retiens que ce qui est juste. Je suis jeune, c'est vrai, mais juge-moi sur
mes actes, non sur mon âge.
CRÉON. La belle action, en vérité, que d'honorer des rebelles!
HÉMON. Je n'intercéderais pas pour des coeurs dépravés.
CRÉON. Eh! n'est-ce pas justement le cas de cette fille?
HÉMON. Le peuple de Thèbes est unanime à le nier.
CRÉON. Appartient-il à l'opinion publique de nous dicter notre conduite ?
HÉMON. Ne vois-tu pas que tu parles là comme un jeune homme ?
CRÉON. Ce n'est pas pour moi, peut-être, que je dois gouverner?
HÉMON. De cité faite pour un seul, il n'en existe pas.
CRÉON. N'est-ce pas un principe reconnu que la cité appartient au souverain?
HÉMON. Il ferait beau te voir régner sur un désert.
CRÉON. Ce garçon, à ce qu'il me semble, fait cause commune avec la femme.
HÉMON. Est-ce donc toi la femme? C'est ton intérêt que je défends.
CRÉON. Misérable! en faisant le procès de ton père?
HÉMON. C'est que je te vois prêt à commettre une injustice.
CRÉON. Je commets une injustice quand je fais respecter mon pouvoir ?
HÉMON. Tu le fais mal respecter si c'est aux dépens des dieux.
CRÉON. Ah! vile nature, qu'une femme asservit!
HÉMON. Tu ne me trouveras point asservi à des sentiments bas.
CRÉON. Tous les mots que tu dis ne sont que pour elle.
HÉMON. - Et pour toi aussi, et pour moi, et pour les dieux infernaux.
[750] (Κρέων)
ταύτην ποτοὐκ ἔσθὡς ἔτι ζῶσαν γαμεῖς.
(Αἵμων)
δοὖν θανεῖται καὶ θανοῦσὀλεῖ τινα.
(Κρέων)
κἀπαπειλῶν ὧδἐπεξέρχει θρασύς;
(Αἵμων)
τίς δἔστἀπειλὴ πρὸς κενὰς γνώμας λέγειν;
(Κρέων)
κλαίων φρενώσεις, ὢν φρενῶν αὐτὸς κενός.
755 (Αἵμων)
εἰ μὴ πατὴρ ἦσθ᾽, εἶπον ἄν σοὐκ εὖ φρονεῖν.
(Κρέων)
γυναικὸς ὢν δούλευμα μὴ κώτιλλέ με.
(Αἵμων)
βούλει λέγειν τι καὶ λέγων μηδὲν κλύειν;
(Κρέων)
ἄληθες; ἀλλοὐ τόνδὌλυμπον, ἴσθὅτι,
χαίρων ἐπὶ ψόγοισι δεννάσεις ἐμέ.
760 ἄγαγε τὸ μῖσος ὡς κατὄμματαὐτίκα
παρόντι θνῄσκῃ πλησία τῷ νυμφίῳ.
(Αἵμων)
οὐ δῆτἔμοιγε, τοῦτο μὴ δόξῃς ποτέ,
οὔθἥδὀλεῖται πλησία, σύ τοὐδαμὰ
τοὐμὸν προσόψει κρᾶτἐν ὀφθαλμοῖς ὁρῶν,
765 ὡς τοῖς θέλουσι τῶν φίλων μαίνῃ συνών.
(Χορός)
ἁνήρ, ἄναξ, βέβηκεν ἐξ ὀργῆς ταχύς·
νοῦς δἐστὶ τηλικοῦτος ἀλγήσας βαρύς.
(Κρέων)
δράτω· φρονείτω μεῖζον κατἄνδρἰών·
τὼ δοὖν κόρα τώδοὐκ ἀπαλλάξει μόρου.
770 (Χορός)
ἄμφω γὰρ αὐτὼ καὶ κατακτεῖναι νοεῖς;
(Κρέων)
οὐ τήν γε μὴ θιγοῦσαν· εὖ γὰρ οὖν λέγεις.
(Χορός)
μόρῳ δὲ ποίῳ καί σφε βουλεύει κτανεῖν;
(Κρέων)
ἄγων ἔρημος ἔνθἂν βροτῶν στίβος
κρύψω πετρώδει ζῶσαν ἐν κατώρυχι,
775 φορβῆς τοσοῦτον ὡς ἄγος μόνον προθείς,
ὅπως μίασμα πᾶσὑπεκφύγῃ πόλις.
κἀκεῖ τὸν Ἅιδην, ὃν μόνον σέβει θεῶν,
αἰτουμένη που τεύξεται τὸ μὴ θανεῖν,
γνώσεται γοῦν ἀλλὰ τηνικαῦθὅτι
780 πόνος περισσός ἐστι τἀν Ἅιδου σέβειν.
(Χορός)
Ἔρως ἀνίκατε μάχαν, Ἔρως, ὃς ἐν κτήμασι πίπτεις,
ὃς ἐν μαλακαῖς παρειαῖς νεάνιδος ἐννυχεύεις,
785 φοιτᾷς δὑπερπόντιος ἔν τἀγρονόμοις αὐλαῖς·
καί σοὔτἀθανάτων φύξιμος οὐδεὶς
790 οὔθἁμερίων σέ γἀνθρώπων. δἔχων μέμηνεν.
σὺ καὶ δικαίων ἀδίκους φρένας παρασπᾷς ἐπὶ λώβᾳ,
σὺ καὶ τόδε νεῖκος ἀνδρῶν ξύναιμον ἔχεις ταράξας·
795 νικᾷ δἐναργὴς βλεφάρων ἵμερος εὐλέκτρου
νύμφας, τῶν μεγάλων πάρεδρος ἐν ἀρχαῖς
[750] CRÉON. Cette femme, non, jamais tu ne l'épouseras vivante.
HÉMON. Elle mourra donc, mais sa mort tuera un autre.
CRÉON. Tu as le front de me menacer, maintenant ? Tout beau!
HÉMON. Où vois-tu que je te menace ? Je ne fais que répondre à tes pauvres raisons.
CRÉON. Pauvre cervelle toi-même, il va t'en cuire de tes remontrances!
HÉMON. Si tu n'étais mon père, je dirais que c'est toi qui as le cerveau troublé.
CRÉON. Vil jouet d'une femme, ne me romps plus la tête.
HÉMON. Tu t'étourdis de paroles pour t'empêcher de m'entendre !
CRÉON. Vraiment? Par l'Olympe, tu vas payer cher tes reproches insolents.
(A un serviteur.)
Amène cette odieuse fille; je veux la faire périr, séance tenante, sous les yeux de son fiancé.
HÉMON. Cela, vois-tu, n'y compte pas : elle ne mourra pas sous mes yeux. Et toi, tu
n'auras plus jamais à souffrir ma présence. Donne ta folie en spectacle à tes
courtisans. (Il sort.)
LE CORYPHÉE. Roi, ce garçon est parti brusquement, dans un transport de fureur. A
son âge, la douleur est mauvaise conseillère.
CRÉON. Qu'il s'agite, qu'il passe les bornes, ce petit orgueilleux! Les deux jeunes filles
n'échapperont pas à leur sort.
LE CORYPHÉE. Quoi! tu veux les mettre à mort toutes les deux?
CRÉON. Tu as raison : pas celle dont la main est innocente.
LE CORYPHÉE. Et quel supplice réserves-tu à l'autre ?
CRÉON. Je la reléguerai en un lieu désert et je la murerai vivante dans un caveau, en
lui laissant de nourriture ce qu'en prescrivent les rites, afin que la ville échappe à la
souillure. Là-dessous, en priant Hadès, son dieu favori, elle obtiendra peut-être de ne
pas mourir. Sinon, elle mesurera du moins la vanité des honneurs qu'on rend aux morts.
(Il rentre dans le palais.)
CHANT DU CHŒUR.
Erôs, jouteur irrésistible, Erôs,
qui ne respectes rien, ni l'opulence,
ni la candeur des jeunes filles, dont les joues
s'empourprent de ton feu dans leur sommeil,
toi qui hantes les flots, les champs et les tanières,
aucun immortel ne t'évite,
aucun des hommes périssables,
et qui t'abrite en son coeur,
c'en est fait de sa raison !
L'esprit du juste même,
pour le perdre, tu le séduis à l'injustice.
Ne viens-tu pas, entre ces hommes,
d'exciter une haine au même sang nourrie ?
Vainqueur est l'attrait qui rayonne
des yeux de la jeune épousée;
le Désir a sa place entre les grandes Lois
qui règnent sur le monde,


Recherches | Texte | Lecture | Liste du vocabulaire | Index inverse | Menu | Site de Philippe Remacle |

 
UCL | FLTR | Hodoi Elektronikai | Itinera Electronica | Bibliotheca Classica Selecta (BCS) |
Ingénierie Technologies de l'Information : B. Maroutaeff - C. Ruell - J. Schumacher

Dernière mise à jour : 1/06/2005