HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Sophocle, Antigone

Vers 400-499

  Vers 400-499

[400] δίκαιός εἰμι τῶνδἀπηλλάχθαι κακῶν.
(Κρέων)
ἄγεις δὲ τήνδε τῷ τρόπῳ πόθεν λαβών;
(Φύλαξ)
αὕτη τὸν ἄνδρἔθαπτε· πάντἐπίστασαι.
(Κρέων)
καὶ ξυνίης καὶ λέγεις ὀρθῶς φῄς;
(Φύλαξ)
ταύτην γἰδὼν θάπτουσαν ὃν σὺ τὸν νεκρὸν
405 ἀπεῖπας. ἆρἔνδηλα καὶ σαφῆ λέγω;
(Κρέων)
καὶ πῶς ὁρᾶται κἀπίληπτος ᾑρέθη;
(Φύλαξ)
τοιοῦτον ἦν τὸ πρᾶγμ᾽. ὅπως γὰρ ἥκομεν,
πρὸς σοῦ τὰ δείνἐκεῖνἐπηπειλημένοι,
πᾶσαν κόνιν σήραντες, κατεῖχε τὸν
410 νέκυν, μυδῶν τε σῶμα γυμνώσαντες εὖ,
καθήμεθἄκρων ἐκ πάγων ὑπήνεμοι,
ὀσμὴν ἀπαὐτοῦ μὴ βάλοι πεφευγότες,
ἐγερτὶ κινῶν ἄνδρἀνὴρ ἐπιρρόθοις
κακοῖσιν, εἴ τις τοῦδἀκηδήσοι πόνου.
415 χρόνον τάδἦν τοσοῦτον, ἔστἐν αἰθέρι
μέσῳ κατέστη λαμπρὸς ἡλίου κύκλος
καὶ καῦμἔθαλπε· καὶ τότἐξαίφνης χθονὸς
τυφὼς ἀείρας σκηπτόν οὐράνιον ἄχος,
πίμπλησι πεδίον, πᾶσαν αἰκίζων φόβην
420 ὕλης πεδιάδος, ἐν δἐμεστώθη μέγας
αἰθήρ· μύσαντες δεἴχομεν θείαν νόσον.
καὶ τοῦδἀπαλλαγέντος ἐν χρόνῳ μακρῷ,
παῖς ὁρᾶται, κἀνακωκύει πικρᾶς
ὄρνιθος ὀξὺν φθόγγον, ἐς ὅταν κενῆς
425 εὐνῆς νεοσσῶν ὀρφανὸν βλέψῃ λέχος.
οὕτω δὲ χαὔτη, ψιλὸν ὡς ὁρᾷ νέκυν,
γόοισιν ἐξῴμωξεν, ἐκ δἀρὰς κακὰς
ἠρᾶτο τοῖσι τοὔργον ἐξειργασμένοις.
καὶ χερσὶν εὐθὺς διψίαν φέρει κόνιν,
430 ἔκ τεὐκροτήτου χαλκέας ἄρδην πρόχου
χοαῖσι τρισπόνδοισι τὸν νέκυν στέφει.
χἠμεῖς ἰδόντες ἱέμεσθα, σὺν δέ νιν
θηρώμεθεὐθὺς οὐδὲν ἐκπεπληγμένην,
καὶ τάς τε πρόσθεν τάς τε νῦν ἠλέγχομεν
435 πράξεις· ἄπαρνος δοὐδενὸς καθίστατο,
ἅμἡδέως ἔμοιγε κἀλγεινῶς ἅμα.
τὸ μὲν γὰρ αὐτὸν ἐκ κακῶν πεφευγέναι
ἥδιστον, ἐς κακὸν δὲ τοὺς φίλους ἄγειν
ἀλγεινόν· ἀλλὰ πάντα ταῦθἥσσω λαβεῖν
440 ἐμοὶ πέφυκε τῆς ἐμῆς σωτηρίας.
(Κρέων)
σὲ δή, σὲ τὴν νεύουσαν εἰς πέδον κάρα,
φὴς καταρνεῖ μὴ δεδρακέναι τάδε·
(Ἀντιγόνη)
καὶ φημὶ δρᾶσαι κοὐκ ἀπαρνοῦμαι τὸ μή.
(Κρέων)
σὺ μὲν κομίζοις ἂν σεαυτὸν θέλεις
445 ἔξω βαρείας αἰτίας ἐλεύθερον·
σὺ δεἰπέ μοι μὴ μῆκος, ἀλλὰ συντόμως,
ᾔδησθα κηρυχθέντα μὴ πράσσειν τάδε;
(Ἀντιγόνη)
ᾔδη· τί δοὐκ ἔμελλον; ἐμφανῆ γὰρ ἦν.
(Κρέων)
καὶ δῆτἐτόλμας τούσδὑπερβαίνειν νόμους;
[400] Me voici tiré d'affaire, et j'ai bien gagné ma liberté.
CRÉON. Cette fille que tu amènes, où l'as-tu prise, et comment?
LE GARDE. Elle ensevelissait le mort. Que veux-tu savoir de plus?
CRÉON. Comprends-tu la portée de tes paroles ? Et dis-tu bien la vérité?
LE GARDE. Je l'ai vue ensevelissant le cadavre que tu as interdit d'ensevelir. Cela
n'est-il point clair et précis ?
CRÉON. Comment a-t-elle été découverte et prise sur le fait?
LE GARDE. Voici l'affaire. J'arrive, encore étourdi de tes menaces. Aussitôt, nous
balayons la poussière qui recouvrait le cadavre et nous le mettons à nu. Comme il
commençait à se décomposer, nous allons nous asseoir sur une butte voisine, en plein
vent, à cause de l'odeur. Pour mieux nous tenir éveillés, nous nous gourmandions entre
nous, sans nous passer la moindre distraction. Nous sommes restés ainsi jusqu'au
moment où le soleil a gagné le milieu du ciel, et ses rayons étaient cuisants. Mais voilà
qu'un coup de vent soulève un tourbillon de poussière, véritable plaie céleste qui envahit
toute la plaine, cinglant le feuillage, emplissant l'air jusqu'aux nues. Les yeux fermés,
nous nous courbions sous le fléau. Au bout d'un long moment, quand la bourrasque s'est
éloignée, nous apercevons la fillette qui pousse des lamentations aiguës, comme fait un
oiseau affolé, quand il arrive au nid et n'y trouve plus ses petits. Elle aussi, en voyant le
corps exhumé, elle se prend à gémir, à crier, à maudire les auteurs du sacrilège. De ses
mains, elle amasse à nouveau de la poussière; puis, levant un beau vase de bronze, elle
couronne le cadavre d'une triple libation. Nous accourons, nous l'appréhendons; elle ne
paraissait nullement effrayée. Nous l'interrogeons sur ce qu'elle avait fait la première
fois, sur ce qu'elle venait de faire; elle a tout avoué. J'en étais heureux et pourtant cela
me faisait de la peine, car s'il est doux d'échapper au malheur, on n'aime point à y jeter
des gens qu'on aime bien. Mais enfin, pour moi, n'est-ce pas, mon salut avant tout.
CRÉON. Eh bien, toi, oui, toi qui baisses le front vers la terre, reconnais-tu les faits ?
ANTIGONE. Je les reconnais formellement.
CRÉON (au garde). File où tu voudras, la con-science légère; tu es libre.
(A Antigone).
Réponds en peu de mots. Connaissais-tu mon édit ?
ANTIGONE. Comment ne l'aurais-je pas connu ? Il était public.
CRÉON. Et tu as osé passer outre à mon ordonnance ?
[450] (Ἀντιγόνη)
οὐ γάρ τί μοι Ζεὺς ἦν κηρύξας τάδε,
οὐδ ξύνοικος τῶν κάτω θεῶν Δίκη
τοιούσδἐν ἀνθρώποισιν ὥρισεν νόμους.
οὐδὲ σθένειν τοσοῦτον ᾠόμην τὰ σὰ
κηρύγμαθ᾽, ὥστἄγραπτα κἀσφαλῆ θεῶν
455 νόμιμα δύνασθαι θνητὸν ὄνθὑπερδραμεῖν.
οὐ γάρ τι νῦν γε κἀχθές, ἀλλἀεί ποτε
ζῇ ταῦτα, κοὐδεὶς οἶδεν ἐξ ὅτουφάνη.
τούτων ἐγὼ οὐκ ἔμελλον, ἀνδρὸς οὐδενὸς
φρόνημα δείσασ᾽, ἐν θεοῖσι τὴν δίκην
460 δώσειν· θανουμένη γὰρ ἐξῄδη, τί δοὔ;
κεἰ μὴ σὺ προὐκήρυξας. εἰ δὲ τοῦ χρόνου
πρόσθεν θανοῦμαι, κέρδος αὔτἐγὼ λέγω.
ὅστις γὰρ ἐν πολλοῖσιν ἐς ἐγὼ κακοῖς
ζῇ, πῶς ὅδΟὐχὶ κατθανὼν κέρδος φέρει;
465 οὕτως ἔμοιγε τοῦδε τοῦ μόρου τυχεῖν
παροὐδὲν ἄλγος· ἀλλἄν, εἰ τὸν ἐξ ἐμῆς
μητρὸς θανόντἄθαπτον ἠνσχόμην νέκυν,
κείνοις ἂν ἤλγουν· τοῖσδε δοὐκ ἀλγύνομαι.
σοὶ δεἰ δοκῶ νῦν μῶρα δρῶσα τυγχάνειν,
470 σχεδόν τι μώρῳ μωρίαν ὀφλισκάνω.
(Χορός)
δηλοῖ τὸ γέννημὠμὸν ἐξ ὠμοῦ πατρὸς
τῆς παιδός. εἴκειν δοὐκ ἐπίσταται κακοῖς.
(Κρέων)
ἀλλἴσθι τοι τὰ σκλήρἄγαν φρονήματα
πίπτειν μάλιστα, καὶ τὸν ἐγκρατέστατον
475 σίδηρον ὀπτὸν ἐκ πυρὸς περισκελῆ
θραυσθέντα καὶ ῥαγέντα πλεῖστἂν εἰσίδοις·
σμικρῷ χαλινῷ δοἶδα τοὺς θυμουμένους
ἵππους καταρτυθέντας· οὐ γὰρ ἐκπέλει
φρονεῖν μέγὅστις δοῦλός ἐστι τῶν πέλας.
480 αὕτη δὑβρίζειν μὲν τότἐξηπίστατο,
νόμους ὑπερβαίνουσα τοὺς προκειμένους·
ὕβρις δ᾽, ἐπεὶ δέδρακεν, ἥδε δευτέρα,
τούτοις ἐπαυχεῖν καὶ δεδρακυῖαν γελᾶν.
νῦν ἐγὼ μὲν οὐκ ἀνήρ, αὕτη δἀνήρ,
485 εἰ ταῦτἀνατὶ τῇδε κείσεται κράτη.
ἀλλεἴτἀδελφῆς εἴθὁμαιμονεστέρα
τοῦ παντὸς ἡμῖν Ζηνὸς ἑρκείου κυρεῖ,
αὐτή τε χἠ ξύναιμος οὐκ ἀλύξετον
μόρου κακίστου· καὶ γὰρ οὖν κείνην ἴσον
490 ἐπαιτιῶμαι τοῦδε βουλεῦσαι τάφου.
καί νιν καλεῖτ᾽· ἔσω γὰρ εἶδον ἀρτίως
λυσσῶσαν αὐτὴν οὐδἐπήβολον φρενῶν.
φιλεῖ δ θυμὸς πρόσθεν, ᾑρῆσθαι κλοπεὺς
τῶν μηδὲν ὀρθῶς ἐν σκότῳ τεχνωμένων·
495 μισῶ γε μέντοι χὤταν ἐν κακοῖσί τις
ἁλοὺς ἔπειτα τοῦτο καλλύνειν θέλῃ.
(Ἀντιγόνη)
θέλεις τι μεῖζον κατακτεῖναί μἑλών;
(Κρέων)
ἐγὼ μὲν οὐδέν· τοῦτἔχων ἅπαντἔχω.
(Ἀντιγόνη)
τί δῆτα μέλλεις; ὡς ἐμοὶ τῶν σῶν λόγων
[450] ANTIGONE. Oui, car ce n'est pas Zeus qui l'a promulguée, et la Justice qui siège
auprès des dieux de sous terre n'en a point tracé de telles parmi les hommes. Je ne
croyais pas, certes, que tes édits eussent tant de pouvoir qu'ils permissent à un mortel
de violer les lois divines : lois non écrites, celles-là, mais intangibles. Ce n'est pas
d'aujourd'hui ni d'hier, c'est depuis l'origine qu'elles sont en vigueur, et personne ne les
a vues naître. Leur désobéir, n'était-ce point, par un lâche respect pour l'autorité d'un
homme, encourir la rigueur des dieux? Je savais bien que je mourrais; c'était inévitable
et même sans ton édit! Si je péris avant le temps, je regarde la mort comme un bienfait.
Quand on vit au milieu des maux, comment n'aurait-on pas avantage à mourir? Non, le
sort qui m'attend n'a rien qui me tourmente. Si j'avais dû laisser sans sépulture un corps
que ma mère a mis au monde, je ne m=en serais jamais consolée; maintenant, je ne me
tourmente plus de rien. Si tu estimes que je me conduis comme une folle, peut-être
n'as-tu rien à m'envier sur l'article de la folie!
LE CORYPHÉE. Comme on retrouve dans la fille le caractère intraitable du père ! Elle ne
sait pas fléchir devant l'adversité.
CRÉON. Apprends que c'est le manque de souplesse, le plus souvent, qui nous fait
trébucher. Le fer massif, si tu le durcis au feu, tu le vois presque toujours éclater et se
rompre. Mais je sais aussi qu'un léger frein a bientôt raison des chevaux rétifs. Oui,
l'orgueil sied mal à qui dépend du bon plaisir d'autrui. Celle-ci savait parfaitement ce
qu'elle faisait quand elle s'est mise au-dessus de la loi. Son forfait accompli, elle pèche
une seconde fois par outrecuidance lorsqu'elle s'en fait gloire et sourit à son oeuvre. En
vérité, de nous deux, c'est elle qui serait l'homme, si je la laissais triompher
impunément. Elle est ma nièce, mais me touchât-elle par le sang de plus près que tous
les miens, ni elle ni sa soeur n'échapperont au châtiment capital. Car j'accuse également
Ismène d'avoir comploté avec elle cette inhumation. Qu'on l'appelle : je l'ai rencontrée
tout à l'heure dans le palais, l'air égaré, hors d'elle. Or ceux qui trament dans l'ombre
quelque mauvais dessein se trahissent toujours par leur agitation... Mais ce que je
déteste, c'est qu'un coupable, quand il se voit pris sur le fait, cherche à peindre son
crime en beau.
ANTIGONE. Je suis ta prisonnière; tu vas me mettre à mort : que te faut-il de plus ?
CRÉON. Rien. Ce châtiment me satisfait.
ANTIGONE. Alors, pourquoi tardes-tu ?


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Dernière mise à jour : 1/06/2005