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[1100] (Χορός)
ἐλθὼν κόρην μὲν ἐκ κατώρυχος στέγης
ἄνες, κτίσον δὲ τῷ προκειμένῳ, τάφον.
(Κρέων)
καὶ ταῦτ᾽ ἐπαινεῖς καὶ δοκεῖς παρεικαθεῖν;
(Χορός)
ὅσον γ᾽, ἄναξ, τάχιστα· συντέμνουσι γὰρ
θεῶν ποδώκεις τοὺς κακόφρονας βλάβαι.
1105 (Κρέων)
οἴμοι· μόλις μέν, καρδίας δ᾽ ἐξίσταμαι
τὸ δρᾶν· ἀνάγκῃ δ᾽ οὐχὶ δυσμαχητέον.
(Χορός)
δρᾶ νυν τάδ᾽ ἐλθὼν μηδ᾽ ἐπ᾽ ἄλλοισιν τρέπε.
(Κρέων)
ὧδ᾽ ὡς ἔχω στείχοιμ᾽ ἄν· ἴτ᾽ ἴτ᾽ ὀπάονες,
οἵ τ᾽ ὄντες οἵ τ᾽ ἀπόντες, ἀξίνας χεροῖν
1110 ὁρμᾶσθ᾽ ἑλόντες εἰς ἐπόψιον τόπον.
ἐγὼ δ᾽, ἐπειδὴ δόξα τῇδ᾽ ἐπεστράφη,
αὐτός τ᾽ ἔδησα καὶ παρὼν ἐκλύσομαι.
δέδοικα γὰρ μὴ τοὺς καθεστῶτας νόμους
ἄριστον ᾖ σῴζοντα τὸν βίον τελεῖν.
1115 (Χορός)
πολυώνυμε, Καδμείας νύμφας ἄγαλμα
καὶ Διὸς βαρυβρεμέτα
γένος, κλυτὰν ὃς ἀμφέπεις
Ἰταλίαν, μέδεις δὲ
παγκοίνοις, Ἐλευσινίας
1120 Δῃοῦς ἐν κόλποις, Βακχεῦ Βακχᾶν
ὁ ματρόπολιν Θήβαν
ναιετῶν παρ᾽ ὑγρῶν
1125 Ἰσμηνοῦ ῥείθρων ἀγρίου τ᾽ ἐπὶ σπορᾷ δράκοντος
σὲ δ᾽ ὑπὲρ διλόφου πέτρας στέροψ ὄπωπε
λιγνύς, ἔνθα Κωρύκιαι
στείχουσι νύμφαι Βακχίδες,
1130 Κασταλίας τε νᾶμα.
καί σε Νυσαίων ὀρέων
κισσήρεις ὄχθαι χλωρά τ᾽ ἀκτὰ
πολυστάφυλος πέμπει,
ἀμβρότων ἐπέων
1135 εὐαζόντων Θηβαΐας ἐπισκοποῦντ᾽ ἀγυιάς·
τὰν ἐκ πᾶσαι τιμᾷς ὑπερτάταν πόλεων
ματρὶ σὺν κεραυνίᾳ·
1140 καὶ νῦν, ὡς βιαίας ἔχεται
πάνδαμος πόλις ἐπὶ νόσου,
μολεῖν καθαρσίῳ ποδὶ Παρνασίαν ὑπὲρ κλιτὺν
1145 ἢ στονόεντα πορθμόν.
ἰὼ πῦρ πνειόντων χοράγ᾽ ἄστρων, νυχίων
φθεγμάτων ἐπίσκοπε,
παῖ Διὸς γένεθλον, προφάνηθ᾽
| [1100] LE CORYPHÉE. Fais sortir la jeune fille de son caveau souterrain;
dresse au mort un tombeau.
CRÉON. Ainsi tu approuves ce parti ? Tu es d'avis que je cède?
LE CORYPHÉE. Oui, roi, et sans perdre un moment : le châtiment divin marche bon pas
et coupe la retraite au coupable.
CRÉON. Hélas ! je me dédis, non sans peine, mais il le faut. Contre la nécessité la lutte
est sans espoir.
LE CORYPHÉE. Va, et ne t'en remets pas à d'autres.
CRÉON. Je pars. Holà, serviteurs, rassemblez-vous, prenez des haches et courez
jusqu'à cet endroit qu'on aperçoit d'ici. Ainsi, je me suis déjugé. Cette jeune fille que j'ai
mise aux fers, je vais la délivrer moi-même. Le mieux, je le crains fort, est de respecter,
jusqu'à la fin de ses jours, les lois fondamentales.
CHANT DU CHŒUR
Dieu aux cent noms, orgueil de la nymphe ta mère,
qui est une fille de Cadmos,
ô rejeton de Zeus au sourd tonnerre,
tu festonnes les bords de l'illustre Italie,
et dans les vallons d'Éleusis,
au sanctuaire de Deô, visité de tous les Hellènes,
tu règnes, ô Bacchos, et dans Thèbes encore,
la cité mère des Bacchantes,
tu résides non loin du cours de l'Isménos,
là ou leva l'âpre semence du Dragon.
Elle t'a vu la flamme illuminant les crêtes
jumelles, dans les parages
où les nymphes Coryciennes vont dansant,
compagnes de tes jeux, et la fontaine Castalie.
Ayant quitté Nysa, ses rocs vêtus de lierre
et les vignobles de ses côtes,
aux cris de l'évohé mystique,
tu viens nous visiter, et tu parcours nos rues.
Car, entre toutes, notre ville
t'est chère, elle est chère à la Nymphe
qui tomba foudroyée en te donnant le jour.
Mais aujourd'hui tu vois de quel fléau
ce peuple encore est la proie.
Accours, ô Purificateur, d'un bond franchissant le Parnasse
ou l'Euripe aux remous grondants.
Iô! chef du choeur des astres à la lumineuse haleine,
toi que fêtent les cris qui montent dans la nuit,
enfant, race de Zeus,
| [1150] ὦναξ, σαῖς ἅμα περιπόλοις
Θυίαισιν, αἵ σε μαινόμεναι πάννυχοι χορεύουσι
τὸν ταμίαν Ἴακχον.
1155 (Ἄγγελος)
Κάδμου πάροικοι καὶ δόμων Ἀμφίονος,
οὐκ ἔσθ᾽ ὁποῖον στάντ᾽ ἂν ἀνθρώπου βίον
οὔτ᾽ αἰνέσαιμ᾽ ἂν οὔτε μεμψαίμην ποτέ.
τύχη γὰρ ὀρθοῖ καὶ τύχη καταρρέπει
τὸν εὐτυχοῦντα τόν τε δυστυχοῦντ᾽ ἀεί·
1160 καὶ μάντις οὐδεὶς τῶν καθεστώτων βροτοῖς.
(Κρέων) γὰρ ἦν ζηλωτός, ὡς ἐμοί, ποτέ,
σώσας μὲν ἐχθρῶν τήνδε Καδμείαν χθόνα
λαβών τε χώρας παντελῆ μοναρχίαν
ηὔθυνε, θάλλων εὐγενεῖ τέκνων σπορᾷ·
1165 καὶ νῦν ἀφεῖται πάντα. τὰς γὰρ ἡδονὰς
ὅταν προδῶσιν ἄνδρες, οὐ τίθημ᾽ ἐγὼ
ζῆν τοῦτον, ἀλλ᾽ ἔμψυχον ἡγοῦμαι νεκρόν.
πλούτει τε γὰρ κατ᾽ οἶκον, εἰ βούλει, μέγα
καὶ ζῆ τύραννον σχῆμ᾽ ἔχων· ἐὰν δ᾽ ἀπῇ
1170 τούτων τὸ χαίρειν, τἄλλ᾽ ἐγὼ καπνοῦ σκιᾶς
οὐκ ἂν πριαίμην ἀνδρὶ πρὸς τὴν ἡδονήν.
(Χορός)
τί δ᾽ αὖ τόδ᾽ ἄχθος βασιλέων ἥκεις φέρων;
(Ἄγγελος)
τεθνᾶσιν. οἱ δὲ ζῶντες αἴτιοι θανεῖν.
(Χορός)
καὶ τίς φονεύει; τίς δ᾽ ὁ κείμενος; λέγε.
1175 (Ἄγγελος)
Αἵμων ὄλωλεν· αὐτόχειρ δ᾽ αἱμάσσεται.
(Χορός)
πότερα πατρῴας ἢ πρὸς οἰκείας χερός;
(Ἄγγελος)
αὐτὸς πρὸς αὑτοῦ, πατρὶ μηνίσας φόνου.
(Χορός)
ὦ μάντι, τοὔπος ὡς ἄρ᾽ ὀρθὸν ἤνυσας.
(Ἄγγελος)
ὡς ὧδ᾽ ἐχόντων τἄλλα βουλεύειν πάρα.
1180 (Χορός)
καὶ μὴν ὁρῶ τάλαιναν (Εὐρυδίκη)ν ὁμοῦ
δάμαρτα τὴν Κρέοντος. ἐκ δὲ δωμάτων
ἤτοι κλύουσα παιδὸς ἢ τύχῃ πάρα.
(Εὐρυδίκη)
ὦ πάντες ἀστοί, τῶν λόγων ἐπῃσθόμην
πρὸς ἔξοδον στείχουσα, Παλλάδος θεᾶς
1185 ὅπως ἱκοίμην εὐγμάτων προσήγορος.
καὶ τυγχάνω τε κλῇθρ᾽ ἀνασπαστοῦ πύλης
χαλῶσα καί με φθόγγος οἰκείου κακοῦ
βάλλει δι᾽ ὤτων· ὑπτία δὲ κλίνομαι
δείσασα πρὸς δμωαῖσι κἀποπλήσσομαι
1190 ἀλλ᾽ ὅστις ἦν ὁ μῦθος αὖθις εἴπατε·
κακῶν γὰρ οὐκ ἄπειρος οὖσ᾽ ἀκούσομαι.
(Ἄγγελος)
ἐγώ, φίλη δέσποινα, καὶ παρὼν ἐρῶ
κοὐδὲν παρήσω τῆς ἀληθείας ἔπος.
τί γάρ σε μαλθάσσοιμ᾽ ἂν ὧν ἐς ὕστερον
1195 ψεῦσται φανούμεθ᾽; ὀρθὸν ἁλήθει᾽ ἀεί.
ἐγὼ δὲ σῷ ποδαγὸς ἑσπόμην πόσει
πεδίον ἐπ᾽ ἄκρον, ἔνθ᾽ ἔκειτο νηλεὲς
κυνοσπάρακτον σῶμα Πολυνείκους ἔτι·
καὶ τὸν μέν, αἰτήσαντες ἐνοδίαν θεὸν
| [1150] apparais, ô mon Roi, au milieu d'un cortège
de Thyiades qui, délirantes, jusqu'à l'aube,
dansent, dansent pour toi, leur seigneur, Iacchos!
DERNIER ÉPISODE
(Entre un messager.)
LE MESSAGER. Vous qui vivez près du palais, sous la garde des Fondateurs, d'aucun
homme vivant je n'affirmerais qu'il faut le féliciter ou le plaindre de son sort. On voit
tous les jours la Fortune précipiter les heureux, relever les misérables, et son
inconstance déjoue les plus sûres prévisions. Créon, naguère, me semblait digne d'envie.
Il avait libéré le sol thébain, il était monté sur le trône, il régnait, monarque absolu, il
fleurissait en beaux enfants : tout s'est évanoui! Quand un homme a perdu ce qui faisait
sa joie, je tiens qu'il ne vit plus, c'est un mort qui respire. Remplissez de trésors un
palais, menez un train royal : là où manque le plaisir de vivre, tout le reste en
comparaison ne vaut pas l'ombre d'une fumée.
LE CORYPHÉE. Quelle infortune de nos princes viens-tu encore nous annoncer ?
LE MESSAGER. La mort des uns, par la faute des autres.
LE CORYPHÉE. Qui a frappé ? Qui a péri ? Parle.
LE MESSAGER. Hémon a péri par une main de son sang.
LE CORYPHÉE. La main de son père, ou sa propre main ?
LE MESSAGER. Il s'est frappé lui-même, révolté contre un père assassin.
LE CORYPHÉE. Ah! devin, elles ne mentaient donc pas, tes prédictions !
LE MESSAGER. Tels sont les faits; il faut maintenant en prévoir les suites.
LE CORYPHÉE. Justement j'aperçois Eurydice, la malheureuse épouse de Créon. Est-ce
par hasard qu'elle est sortie ? Ou a-t-elle entendu qu'on parlait de son fils ?
EURYDICE (sur le seuil du palais). Citoyens, vos paroles sont venues jusqu'à moi,
comme je sortais pour adresser mes supplications à la déesse Pallas. Au moment où
s'ouvrait la porte, le bruit d'un malheur touchant les miens a frappé mes oreilles et je
suis tombée à la renverse dans les bras de mes femmes, paralysée par la terreur...
Allons, quelle que soit la nouvelle, répétez-la devant moi. Je saurai entendre mon
malheur : j'ai l'habitude.
LE MESSAGER. Ma chère maîtresse, j'ai assisté aux événements et je n'omettrai rien de
la vérité. A quoi bon l'adoucir, si l'on découvre ensuite que je l'ai faussée ? Le chemin de
la vérité est le droit chemin. Or donc, c'est moi qui ai guidé le roi à travers la plaine, vers
une butte où gisait encore, déchiqueté par les chiens, le corps lamentable de Polynice.
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